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09/03/2023 | FRANCE | N°19/16212

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 09 mars 2023, 19/16212


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3



ARRÊT AU FOND

DU 09 MARS 2023



N° 2023/77













Rôle N° RG 19/16212 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFBLM







[N] [L]

[U] [B] épouse [L]





C/



SNC VILLA SAINTE MARGUERITE

SA BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE









Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Me Joseph MAGNAN



Me Romain CHERFILS



M

e Renaud ESSNER





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 27 Septembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n°16/01772.





APPELANTS



Monsieur [N] [L]

né le 01 Août 1960 à [Localité 7] (RUSSIE)

de nationalité Rus...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 09 MARS 2023

N° 2023/77

Rôle N° RG 19/16212 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFBLM

[N] [L]

[U] [B] épouse [L]

C/

SNC VILLA SAINTE MARGUERITE

SA BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Joseph MAGNAN

Me Romain CHERFILS

Me Renaud ESSNER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 27 Septembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n°16/01772.

APPELANTS

Monsieur [N] [L]

né le 01 Août 1960 à [Localité 7] (RUSSIE)

de nationalité Russe, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Robert CHEMLA, avocat au barreau de NICE

Madame [U] [B] épouse [L] [F]

née le 21 Avril 1967 à [Localité 6] (RUSSIE)

de nationalité Russe, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Robert CHEMLA, avocat au barreau de NICE

INTIMÉES

SNC VILLA SAINTE MARGUERITE et encore NEW-IM GROUPE, [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège sis [Adresse 3]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Damien MONTIBELLER de la SELEURL MONTIBELLER DAMIEN, avocat au barreau de LYON

Société BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE venant aux droits de la Banque Populaire Côte d'Azur (BPCA),

sis [Adresse 2]

représentée par Me Renaud ESSNER de la SELARL CABINET ESSNER, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté par Me Gilbert MANCEAU, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Béatrice MARS, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marjolaine MAUBERT.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Mars 2023,

Signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente et Madame Angeline PLACERES, greffier lors du prononcé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Suivant acte authentique en date du 6 septembre 2012, la SNC Villa Sainte Marguerite a vendu à M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L], en l'état futur d'achèvement, une villa à usage d'habitation portant le n°C7 au plan, formant le lot n°7 du groupe d'habitation dénommé [Adresse 5], à [Localité 4], moyennant le prix de 839 000 euros.

Le délai d'achèvement stipulé était fixé dans le courant du troisième trimestre 2013.

Se plaignant du retard de livraison et de divers désordres et non conformités, les époux [L] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse à l'effet d'obtenir le prononcé d'une expertise judiciaire ainsi qu'une provision.

Par ordonnance du 2 juin 2014, ayant fait l'objet d'une rectification d'erreur matérielle le 16 juin 2014, le juge des référés a nommé M. [I] et a condamné les époux [L] à payer à la SNC Villa Sainte Marguerite la somme de 125 850 euros correspondant à l'appel de fonds du 12 septembre 2013.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 15 février 2016.

Par acte du 14 mars 2016, M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] ont assigné la SNC Villa Sainte Marguerite et la Banque Populaire Côte d'Azur aux droits de laquelle vient la Banque Populaire Méditerranée qui avait délivré une garantie financière d'achèvement aux fins d'obtenir la condamnation de la SNC Villa Sainte Marguerite au paiement de la somme de 400 808,11 euros à titre de dommages et intérêts pour le retard subi, outre les sommes de 80 000 euros pour les préjudices relatifs à la piscine et au défaut de planimétrie et tous les préjudices à parfaire au jour de la livraison, la validation de l'inscription d'hypothèque conservatoire déposée le 4 mai 2017 de ce chef et à cette hauteur et de la saisie conservatoire opérée par le juge de l'exécution de Grasse le 27 mars 2018, la condamnation de la SNC Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la Banque Populaire de la Côte d'Azur à achever la villa C7 sous astreinte de 1000 euros par jour et à lever les réserves évoquées.

Par ordonnance du juge de la mise en état en date du 14 octobre 2016 la SNC Villa Sainte Marguerite a été condamnée à payer à M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] la somme provisionnelle de 12 000 euros, à valoir sur la réparation de leur préjudice de jouissance, et a été déboutée de sa demande de provision.

Par jugement en date du 27 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a':

-déclare recevable l'intervention volontaire de la société anonyme coopérative de banque populaire Banque Populaire Méditerranée, venant aux droits de la société anonyme coopérative de banque populaire Banque Populaire de la Côte d'Azur, absorbée par cette dernière et radiée ;

-déclare la société anonyme coopérative de banque populaire Banque Populaire Méditerranée irrecevable à soulever une exception de nullité de l'assignation devant le juge du fond';

-condamné la société en nom collectif Villa Sainte Marguerite à payer à M. [N] [L] et Mme [U] [L] née [B] la somme de 65 218 euros, à titre de dommages

et intérêts, en indemnisation du préjudice résultant pour eux du retard de livraison, provision ordonnée par le juge de la mise en état non déduite';

-débouté M. [N] [L] et Mme [U] [L] née [B] du surplus de leurs demandes ;

-condamné M. [N] [L] et Mme [U] [L] née [B] à payer à la société en nom collectif Villa Sainte Marguerite :

*la somme de quatre-vingt-trois mille neuf cents euros (83 900 euros) correspondant à la fraction du prix due au titre de la phase « achèvement », avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2017,

*la somme de quarante et un mille neuf cent cinquante euros (41 950 euros) à la date de la livraison effective du bien vendu, constatée par procès-verbal contradictoire ou de la carence des acquéreurs convoqués par lettre recommandée avec avis de réception en vue de cette livraison ;

-débouté la société en nom collectif Villa Sainte Marguerite du surplus de ses demandes ;

-dit n'y avoir lieu a condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-dit que les dépens de la procédure, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire seront supportés par moitié, d'une part par M. [N] [L] et Mme [U] [L] née [B]. d'autre part par la société en nom collectif Villa Sainte Marguerite, avec distraction au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

-ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

-rejeté tous autres chefs de demandes.

M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] ont relevé appel de cette décision le 18 octobre 2019.

Vu les dernières conclusions de M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L], notifiées par voie électronique le 20 mai 2020, au terme desquelles il est demandé à la cour de':

Vu le contrat de vente en VEFA';

Vu le dépassement des délais sans délai nouveau annoncé';

Vu la garantie d'achèvement de la BPCA';

Vu les articles ci dessus visés du CCH';

Vu les pièces versées aux débats, et notamment le rapport d'information dressé le 19/02/2014 par Mr [D]';

Vu le rapport d'expertise de Mr [I]';

Vu les décisions rendues depuis lors y compris les décisions du JEX de Grasse et de votre cour en appel de ladite décision';

-débouter la SNC Villa Sainte Marguerite de son appel et de toutes ses demandes fins et conclusions,

-recevoir les concluants en leur appel partiel et le dire fondé,

-réformer en partie le jugement attaqué et ce faisant :

*donner acte aux appelants qu'ils acceptent le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention de la Banque Populaire Méditerranée aux droits de la société coopérative de banque populaire BPCA,

*rejeté l'exception de nullité soulevée par ladite banque devant le juge du fond,

*condamné la SNC Villa Sainte Marguerite à verser aux époux [L] une somme de 65 218 euros de dommages et intérêts,

Mais le réformer :

-en ce qu'il a débouté les époux [L] du surplus de leurs demandes et notamment en ce que le jugement a débouté les époux [L] de leurs demandes tendant à :

*dire et juger que le retard de livraison était d'un minimum de 48 mois imputable à la seule SNC Villa Sainte Marguerite,

*constater en réalité le préjudice imputable à la SNC venderesse à 50 mois réels,

-condamner la SNC Villa Sainte Marguerite en réparation à verser aux époux [L] la somme ramenée à hauteur de 400 000 euros de dommages et intérêts directement dus aux retards outre 80 000 euros pour les préjudices relatifs à la non constructibilité de la piscine, et au défaut de planimétrie et tous autres préjudices à parfaire au jour de la livraison,

-valider la saisie conservatoire opérée sur décision du JEX de Grasse du 27 Mars 2018,

-condamner SNC Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la Banque Populaire Méditerranée (venant aux droits de la BPCA) à achever la Villa C 7, sous astreinte de 1000 euros par jour, et à lever les réserves évoquées aux divers documents dénoncés au maître de l'ouvrage,

-condamner la SNC Villa Sainte Marguerite au paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris tous constats d'huissier et les frais et dépens d'expertise,

-réformer également le jugement attaqué en ce qu'i1 a condamné les époux [L] à verser à la SNC Villa Sainte Marguerite les sommes de 83 900 euros avec intérêts au taux légal à compter du ler Juillet 2017, et celle de 41 950 euros à la date de livraison effective du bien vendu constaté par PV contradictoire ou de la carence des acquéreurs convoqués par lettre recommandée avec avis de réception en vue de cette livraison,

En outre et si besoin subsidiairement :

-dire et juger qu'un retard minimum (force majeure et intempéries déduites) de 50 mois de livraison est imputable à la seule SNC Villa Sainte Marguerite,

-la condamner en réparation à verser aux concluants la somme ramenée à 400 000 euros de dommages et intérêts, outre les sommes de 80 000 euros pour les préjudices relatifs à la non constructibilité de la piscine et au défaut de planimétrie, soit 480 000 euros tous préjudices confondus,

-condamner SNC Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la BPCA à achever la Villa C7, sous astreinte de 1 000 euros par jour, et à lever les réserves évoquées ci dessus,

-condamner la SNC Villa Sainte Marguerite au paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris tous constats d'huissier et les frais et dépens d'expertise ;

Vu les dernières conclusions de la SNC Villa Sainte Marguerite, notifiées par voie électronique le 15 décembre 2022, au terme desquelles il est demandé à la cour de':

Vu les articles 1147 (anciens) et suivants du code civil ;

Vu les R 261-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Vu les pièces versées aux débats ;

Vu le rapport d'expertise judiciaire du 15 février 2016 ;

-confirmer la décision rendue le 27 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Grasse

en ce qu'elle a :

*rejeté la demande des époux [L] visant à obtenir la validation de l'inscription d'hypothèque conservatoire déposée le 4 mai 2017 de ce chef et à cette hauteur et de la saisie conservatoire opérée par le juge de l'exécution de Grasse le 27 mars 2018 ;

*rejeté la demande des époux [L] visant à obtenir la condamnation de la société en

nom collectif Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la société anonyme coopérative de banque populaire Banque Populaire de la Côte d'Azur à achever la villa C7 sous astreinte de 1000 euros par jour et à lever les réserves évoquées dans le cadre des conclusions d'appelant n°1';

*débouté les époux [L] de leur demande en paiement d'une indemnité d'un montant

de 30 000 euros en raison de la prétendue impossibilité de construire une piscine côté Sud de leur villa';

*débouté les époux [L] de leur demande en paiement d'une indemnité d'un montant

de 50 000 euros en raison d'un prétendu défaut de raccordement entre le studio réalisé au sous-

sol de leur maison et les égouts';

*débouté les époux [L] de leur demande en paiement de la somme de 50 000 euros au

titre de prétendues pertes financières et au titre d'un prétendu préjudice moral';

-réformer la décision pour le surplus et statuant à nouveau :

-juger que seuls 16 mois de retard (du 1er mars 2016 au 22 juin 2017) peuvent être imputés à la SNC Villa Sainte Marguerite s'agissant de la livraison de la villa des époux [L] et que le préjudice résultant de ce retard doit être limité à la somme de 28 800 euros';

-juger que les époux [L] refusent sans justes motifs de régler le solde du prix de vente et les travaux modificatifs réalisés d'un montant total de 208 207 euros TTC selon le détail suivant :

*la somme de 83 900 euros correspondant à l'appel de fond « Achèvement »

*la somme de 41 950 euros correspond à l'appel de fond « Mise à disposition »

*la somme de 82 357 euros due au titre des travaux modificatifs acquéreurs

En conséquence,

-condamner les époux [L] au paiement de la somme de 208 207 euros TTC et en toute hypothèse au paiement de la somme de 196 210 euros TTC majorée des pénalités contractuelles de retard de 1% par mois à compter du 22 juin 2017 date à compter de laquelle la maison aurait dû être livrée';

-limiter le préjudice des époux [L] à la somme de 28 800 euros TTC correspondant aux frais de relogement exposés entre le mois de mars 2016 et le 22 juin 2017';

-condamner les époux [L] au paiement de la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner les époux [L] aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence, représentée par Maître Romain Cherfils ;

Vu les conclusions de la Banque Populaire Méditerranée, notifiées par voie électronique le 7 décembre 2022, au terme desquelles il est demandé à la cour de':

Vu l'article 32 du code de procédure civile ;

Vu les articles R.261-1 et R.261-24 du code de la construction et de l'habitation ;

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce ;

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 27 septembre 2019 ;

Vu la GFA émise le 6 décembre 2012 par la BPCA aux droits et obligations de laquelle vient

la BPMED ;

-déclarer irrecevables les demandes formées à l'encontre de Banque Populaire Côte d'Azur ;

Subsidiairement,

-confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 27 septembre 2019 en ce qu'il a débouté les époux [L] des demandes formées à l'encontre de la Banque Populaire Méditerranée ;

Plus subsidiairement,

-condamner la SNC Villa Sainte Marguerite à relever et garantir la Banque Populaire Méditerranée de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;

-débouter les appelants de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la Banque Populaire Méditerranée ;

-condamner les appelants au paiement d'une indemnité de procédure d'un montant de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-les condamner aux dépens qui seront recouvrés par Me Renaud Essner, dans les conditions

prévues à l'article 699 du code de procédure civile ;

L'ordonnance de clôture est en date du 16 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION':

- Sur le retard de livraison :

Les époux [L] soutiennent que le retard imputable à la SNC Villa Sainte Marguerite est de 50 mois'et sollicitent en réparation de leur préjudice une somme de 250 000 euros. Ils font valoir que cette société ne justifie pas des intempéries invoquées'; que la défaillance d'une entreprise sur le chantier ne revêt pas le caractère de force majeure'; que le retard pris en ce qui concerne le choix des matériaux relève de la responsabilité de la SNC Villa Sainte Marguerite en raison de changements d'offres fréquentes.

La SNC Villa Sainte Marguerite réplique qu'en cours de chantier les époux [L] ont voulu, à plusieurs reprises, modifier le projet initial concernant notamment l'aménagement en partie basse de la villa d'un studio, l'installation d'un plancher chauffant, le remplacement du carrelage d'origine pour l'ensemble de la villa, qui l'ont amenée à leur soumettre divers devis pour lesquels ils ont tardé à émettre un choix. Elle indique qu'ils ont sollicité le prononcé d'une expertise judiciaire ce qui a entraîné un arrêt des travaux durant les opérations expertales et qu'ils ont réglé avec retard les appels de fonds.

Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement signé le 11 mai 2012 a prévu une date contractuelle de livraison au 30 septembre 2013. Les conditions générales de ventes annexées à ce contrat prévoient que ce délai pourra être différé en présence soit d'un cas de force majeur soit d'une des causes légitimes de report, notamment les intempéries au sens de la réglementation du travail applicable aux chantiers du bâtiment, toutes situations exceptionnelles et en particulier la grève, le règlement ou la liquidation judiciaire et enfin la simple défaillance d'une entreprise participant au chantier et le délai nécessaire pour la recherche d'une entreprise venant se substituer à celle-ci (') en cas de survenance d'une ou de plusieurs causes légitimes de suspension du délai de livraison, l'époque de livraison sera différée d'autant.

Dans son rapport, l'expert retient plusieurs causes de retard':

*abandon de l'entreprise de VRD et nécessité de procéder à son remplacement (entre juin 2013 et décembre 2013);

*intempéries de l'hiver 2013 ayant rendu le terrain impraticable (entre décembre 2013 et avril 2014)'

*tergiversations, mésentente, dialogue de sourds et man'uvres dilatoires entre les parties sur les prestations de second 'uvre permettant de terminer la villa (entre juillet 2014 et novembre 2015), l'expert en réponse à un dire du 23 décembre 2014 précisant même pour le choix des matériaux suite aux modifications demandées par les époux [L] qu'il a assisté impuissant pendant plus d'un an aux positions radicalement opposées des parties avant au final à un retour au choix des matériaux de base par les époux [L] en raison de leur refus des devis proposés par la SNC Villa Sainte Marguerite.

En conséquence, il convient donc :

* de retenir des causes légitimes de suspension (intempérie et défaillance d'une entreprise) pour la période de juin 2013 à avril 2014.

* pour celle de mai 2014 à février 2016 (date de livraison prévue à l'origine par l'expert et qui n'a pu avoir lieu) si la SNC Villa Sainte Marguerite ne justifie pas de cause légitime de suspension et doit se voir imputer le retard intervenu du fait des travaux réparatoires ayant du être engagés suite aux désordres constatés par l'expert (désordres dus à la non mise hors d'eau hors d'air de la villa ) il n'en demeure pas moins que les époux [L], en sollicitant diverses modifications au projet d'origine, en manifestant leur désaccord aux propositions de la SNC Villa Sainte Marguerite et en ne s'acquittant pas, aux dates prévues, des appels de fonds (les époux [L] ayant été condamnés par ordonnance du 2 juin 2014 au paiement de la somme de 125 850 euros correspondant à l'appel de fonds du 12 septembre 2013) ont également concouru au retard de livraison.

* de février 2016 jusqu'au 22 juin 2017, date de livraison proposée par la SNC Villa Sainte Marguerite, cette société ne justifie d'aucune cause légitime de retard.

* par courrier en date du 15 juin 2017, la SNC Villa Sainte Marguerite a convoqué les époux [L] pour une livraison du bien le 22 juin 2017 à la suite de l'attestation d'achèvement des travaux établie le 6 juin 2017. Cependant, faute pour ces derniers d'avoir réglé les sommes contractuellement prévues de 83 900 euros due au stade de l'achèvement et 41 950 euros correspondant à l'appel de fond « mise à disposition » ainsi que le montant de travaux supplémentaires, la livraison n'a pu avoir lieu.

* le 27 mars 2018 les époux [L] ont été autorisés à saisir à titre conservatoire la somme de 208 207 euros. La SNC Villa Sainte Marguerie a refusé la livraison du bien en juin 2018.

Il résulte des éléments ci dessus rappelés qu'une partie du retard de livraison est imputable à la SNC Villa Sainte Marguerite. Il convient de relever qu'aucune pénalité de retard n'a été contractuellement prévue. Dès lors, les époux [L] sont en droit, sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, de solliciter l'indemnisation du préjudice causé par l'inexécution par leur vendeur de ses obligations et d'obtenir réparation du préjudice résultant de l'obligation dans laquelle ils se sont trouvés d'engager des frais pour se loger en l'attente de la livraison de leur bien. Cependant, leur demande à hauteur de 250 000 euros pour un retard de 50 mois qui n'est justifiée ni dans son principe ni dans son montant sera rejetée.

Les époux [L] indiquent avoir exposé une somme de 110 088,11 euros au titre de frais de logement et produisent'diverses quittances de loyer, factures de garde-meubles, d'électricité.

Ces documents font ressortir les frais engagés par les époux [L] aux fins de se loger. La décision du premier juge sera confirmée en ce qu'il leur a été alloué, pour la période de juin 2014 à janvier 2016, tenant compte du fait que les époux [L] ont concouru au retard de livraison comme il a été indiqué, la somme de 21 000 euros, pour la période de février 2016 à juin 2017 une somme de 30 600 euros et pour juin 2018 celle de 1800 euros, soit la somme totale de 53 400 euros, étant précisé qu'une erreur sur le montant total affecte le jugement de première instance.

Pour le surplus, s'agissant du remboursement de la taxe d'habitation qui relève de leur qualité de propriétaire et des dépenses courantes ( assurance habitation, eau, électricité, chauffage ) que les époux [L] auraient exposés dans tout les cas, leurs demandes seront rejetées.

Enfin, ces derniers ne justifient pas du préjudice moral et des pertes financières invoqués dont ils réclament la réparation, sans distinction, à hauteur de 50 000 euros.

- Sur la piscine et le défaut de planimétrie :

Les époux [L] invoque un préjudice lié à l'impossibilité de construire une piscine sur leur terrain ce qui était, selon eux «'une condition déterminante du choix de la maison ». Ils évaluent ce préjudice, s'agissant «'d'une moins-value », sans autre précision, à la somme de 50 000 euros.

La SNC Villa Sainte Marguerite fait valoir qu'elle ne s'est pas engagée, aux termes de l'acte notarié, à la construction d'une piscine, qui reste réalisable sur le terrain des époux [L].

L'acte de réservation et l'acte notarié du 6 septembre 2012 prévoient la construction par la SNC Villa Sainte Marguerite d'une villa à usage d'habitation avec garage attenant. Aucun élément ne démontre un engagement de cette société quant à la mise en oeuvre d'une piscine, alors que le seul courrier du président de l'ASL Saint Julien du Park du 14 décembre 2017 ne peut suffire à établir une impossibilité totale de la réaliser.

De même les époux [L] n'apporte aucun élément précis quant « au défaut de planimétrie du terrain » reproché et sur le préjudice dont ils demandent réparation.

Leurs demandes sur ces points seront donc rejetées.

- Sur l'achèvement de la villa :

Les époux [L] sollicitent la condamnation solidaire de la SNC Villa Sainte Marguerite et de la Banque Populaire Méditerranée venant aux droits de la BPCA à achever leur villa sous astreinte. Ils contestent l'attestation d'achèvement des travaux du 6 juin 2017 établie par la société Maisons du Midi et soutiennent qu'elle ne concerne qu'une partie de la maison, que cette société n'avait pas qualité à l'établir'et qu'elle n'est pas conforme aux articles R 261-24 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

La SNC Villa Sainte Marguerite rétorque que l'achèvement des travaux a été constaté par le maître d''uvre « Maisons du Midi », conformément à ce que prévoit l'acte de vente.

La Banque Populaire Méditerranée soulève devant la cour l'irrecevabilité de la demande formée à l'encontre de la BPCA par les époux [L]. Elle expose qu'elle a été dissoute sans liquidation à l'issue de l'opération de fusion-acquisition ayant pris effet le 22 novembre 2016, qu'elle a été radiée du registre du commerce et des sociétés de Nice depuis le 18 janvier 2017'et qu'elle est donc dépourvue de personnalité juridique.

Sur ce point, les époux [L] sollicitent dans leurs conclusions à titre principal de voir

«'condamner la SNC Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la Banque Populaire Méditerranée (venant aux droits de la BPCA) à achever la Villa C 7 » et, à titre subsidiaire, de voir «'condamner la SNC Villa Sainte Marguerite conjointement et solidairement avec la BPCA à achever la Villa C7, sous astreinte de 1 000 euros par jour, et à lever les réserves évoquées ci dessus ». Cette demande subsidiaire est irrecevable.

Aux termes de l'article R261-1 du code de la construction et de l'habitation (dans sa version applicable à la présente instance), l'immeuble vendu en l'état futur d'achèvement est réputé achevé lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement qui sont indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat. Pour l'appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation.

En l'espèce, les époux [L] ne produisent aucun élément de nature à établir qu'à la date du 6 juin 2017 le bien était affecté de non conformités ayant un caractère substantiel ou de désordres décennaux. La liste'de réserves adressée par courrier du 13 avril 2017 à la SNC Villa Sainte Marguerite est antérieure à la livraison et cette société indique que la société Maisons du Midi avait fait procéder à la levée de toutes les réserves.

En conséquence, la demande d'achèvement des travaux formée à l'encontre de la SNC Villa Sainte Marguerite et de la Banque Populaire Côte d'Azur sera rejetée, étant précisé que la banque ayant accordé une caution solidaire d'achèvement qui est une garantie permettant le financement de l'achèvement du chantier, elle ne peut être condamnée à une obligation de faire.

Ainsi, la décision qui a condamné les époux [L] à payer les sommes de 83 900 euros due au stade de l'achèvement et 41 950 euros correspondant à l'appel de fond « mise à disposition » soit la somme totale de 125 850 euros sera confirmée.

La SNC Villa Sainte Marguerite sollicite une somme de 82 357 euros au titre de travaux supplémentaires ou a minima celle de 70 360 euros.

Les époux [L] s'opposent au paiement de ces sommes. Ils contestent avoir commandé et reçu les travaux dont il est fait état.

Au soutien de sa demande, la SNC Villa Sainte Marguerite produit un devis signé par les époux [L] concernant l'aménagement en partie basse de la villa pour 33,06 m² moyennant la somme de 48 550 euros et le remplacement du carrelage et des plinthes de l'ensemble de la villa pour 21 310 euros.

Cependant, cette société ne produit aucun élément démontrant que les travaux afférents à ce devis ont bien été réalisés alors que, concernant le studio, les courriers de la société Maisons du Midi produits ne font état que de la possibilité de raccordement d'un «'futur studio » et que, comme le retient l'expert, la modification notamment du carrelage est l'une des causes du retard de livraison du bien les époux [L], lesquels ont décidé d'un retour au choix des matériaux de base. Enfin, il n'est pas justifié, conformément aux stipulations contractuelles, de l'établissement d'un avenant concernant ces travaux supplémentaires. La demande formée à ce titre par la SNC Villa Sainte Marguerite sera donc rejetée.

Cette société fait valoir que les sommes réclamées étaient exigibles depuis le 22 juin 2017 et demande que soit appliquée la pénalité contractuelle de retard prévue à l'acte de vente s'élevant à 1%.

L'acte notarié du 6 septembre 2012 énonce'que toute somme faisant partie du prix qui ne serait pas payée à son exacte échéance serait, de plein droit et sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure, passible d'un intérêt de 1 % par mois de retard, tout mois commencé étant compté en entier.

Comme l'indique, à juste titre, le premier juge, si la fraction du prix correspondant à l'achèvement, soit la somme de 83900 euros, était due dès le 16 juin 2017, celle au titre de la mise à disposition ne peut l'être à compter de cette date, puisque la SNC Villa Sainte Marguerite ne s'est pas présentée le jour prévu pour la livraison du bien. De même, la pénalité de 1 % par mois de retard apparaît comme manifestement excessive et crée un déséquilibre entre les co-contractants, étant observé qu'aucune pénalité de retard n'a été prévue au contrat à la charge du vendeur. Elle sera donc réduite au montant des intérêts légaux et la décision du premier juge sur ce point confirmée.

- Sur la saisie conservatoire':

Il n'appartient pas à la cour de «'valider » une décision du juge de l'exécution. Les époux [L] seront donc déboutés de leur demande formée à ce titre.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile':

Aucune considération d'équité ne justifie en la cause de laisser à la charge de la Banque Populaire Méditerranée les frais engagés dans la présente instance. M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] seront condamnés à lui payer, à ce titre, une somme de

1 500 euros. Les autres demandes relatives aux frais irrépétibles seront rejetées.

PAR CES MOTIFS':

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire';

Déclare irrecevable la demande formée à titre subsidiaire par M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] à l'encontre de la Banque Populaire de la Côte d'Azur';

Confirme le jugement en date du 27 septembre 2019, sauf dans sa disposition ayant condamné la SNC Villa Sainte Marguerite à payer à M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] la somme de 65 218 euros, à titre de dommages et intérêts, en indemnisation du préjudice résultant pour eux du retard de livraison, provision ordonnée par le juge de la mise en état non déduite';

Statuant à nouveau de ce chef':

Condamne la SNC Villa Sainte Marguerite à payer à M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L], ensemble, la somme de 53 400 euros, à titre de dommages et intérêts, en indemnisation du préjudice résultant pour eux du retard de livraison, provision ordonnée par le juge de la mise en état non déduite';

Condamne M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] à payer à la Banque Populaire Méditerranée une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne M. [N] [L] et Mme [U] [B] épouse [L] aux dépens d'appel, avec recouvrement direct au profit des avocats de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-3
Numéro d'arrêt : 19/16212
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;19.16212 ?
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