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09/03/2023 | FRANCE | N°19/12591

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 09 mars 2023, 19/12591


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3



ARRÊT AU FOND

DU 9 MARS 2023



N°2023/75













N° RG 19/12591 -

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEWRP







Société TRANSPORTS NJS FARAMIA





C/



SCP BTSG2

SA AXA FRANCE IARD





































Copie exécutoire délivrée

le :

à :


>Me Karine MICHEL



Me Françoise ASSUS-JUTTNER









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce d'ANTIBES en date du 12 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017006002.







APPELANTE



SAS TRANSPORTS NJS FARAMIA,

immatriculée au RCS de SALON DE PROVENCE sous le n° 390 264 646, dont le ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 9 MARS 2023

N°2023/75

N° RG 19/12591 -

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEWRP

Société TRANSPORTS NJS FARAMIA

C/

SCP BTSG2

SA AXA FRANCE IARD

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Karine MICHEL

Me Françoise ASSUS-JUTTNER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d'ANTIBES en date du 12 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017006002.

APPELANTE

SAS TRANSPORTS NJS FARAMIA,

immatriculée au RCS de SALON DE PROVENCE sous le n° 390 264 646, dont le siège social est sis, [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège

représentée par Me Karine MICHEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉES

SCP BTSG²

prise en la personne de Me [P] [C], ès qualité de Mandataire ad'hoc de la SARL [Y] [B] demeurant [Adresse 1]

défaillante

SA AXA FRANCE IARD, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Françoise ASSUS-JUTTNER de la SCP ASSUS-JUTTNER, avocat au barreau de NICE substituée par Me Alexandre MAGAUD, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Décembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Mme Béatrice MARS, Conseiller Rapporteur,

et Mme Florence TANGUY, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023 puis prorogé au 9 mars 2023.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.

Signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente et Madame Angéline PLACERES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

La société NJS Faramia, située [Adresse 5], est spécialisée dans le transport frigorifique de denrées alimentaires. Elle a été assurée auprès de la société Groupama Transport.

Selon marché signé les 31 août et 6 septembre 2007, elle a conclu avec la société [Y] [B] un marché de travaux, non révisable et non réactualisable, au prix de 182 988 euros TTC, afin de réaliser l'aménagement d'un bâtiment industriel frigorifique, situé [Adresse 4].

La maîtrise d''uvre a été confiée à M. [P] [F], architecte.

Des problèmes de température sont apparus dès le mois de décembre 2007.

Le 16 janvier 2008, les parties ont signé un avenant afin qu'un bureau de contrôle agréé vérifie l'ensemble de l'installation.

Les désordres ont persisté.

La société NJS Faramia a fait appel à la société Apave, laquelle a déposé un rapport le 10 septembre 2008, puis au cabinet ADT+ qui a déposé un rapport le mai 2009. Des dysfonctionnements liés à un défaut de puissance ont été confirmés.

La société [Y] [B] a été placée en redressement judiciaire le 6 février 2009 et en liquidation judiciaire le 25 novembre 2011.

La société NJS Faramia a déclaré sa créance pour la somme de 200'000 euros.

Par exploit d'huissier du 13 août 2009, elle a sollicité une mesure d'expertise qui a été ordonnée, suivant décision en date du 12 octobre 2010. M. [Z], désigné en qualité d'expert, a été remplacé par M. [W], puis par M. [T], et enfin par M. [O] en 2014.

M. [O], a déposé son rapport le 3 avril 2017. Il a préconisé le remplacement de l'installation et évalué les préjudices à la somme de 179 219,82 euros.

Selon acte d'huissier des 1er et 5 décembre 2017, la société Transports NJS Faramia a fait assigner la SCP BTSG2, en qualité de liquidateur, et la société Axa France Iard aux fins de mise en 'uvre de la responsabilité de la société [Y] [B], de fixation de sa créance au passif de la procédure collective à hauteur de 200'000 euros, et de condamnation de l'assureur au paiement de la somme de 200'000 euros.

Par ordonnance du 19 décembre 2018, la SCP BTSG 2 a été désignée en qualité de mandataire ad hoc, compte tenu de la clôture des opérations de liquidation judiciaire.

Parallèlement à cette procédure, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a débouté la SA Helvetia Assurances, venant aux droits de la société Groupama transport, assureur de la SAS NJS Faramia, de toutes ses demandes à l'encontre de la société Axa France Iard, assureur de la SARL [Y] [B], suivant arrêt en date du 14 juin 2018. Cette décision a été cassée partiellement par arrêt en date du 19 décembre 2019 rendu par la Cour de cassation. La cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 26 novembre 2020, dit que la SARL [Y] [B] a engagé sa responsabilité contractuelle dans le sinistre survenu le 22 et 26 décembre 2007, condamné la SA Axa France Iard à payer à la SA Helvetia Assurances la somme de 77 647,37 € et à la société Transport NJS Faramia la somme de 7 051,48 euros.

*

Vu le jugement en date du 12 juillet 2019 aux termes duquel le tribunal de commerce d'Antibes, statuant sur l'assignation délivrée par la SAS NJS Faramia, a débouté cette dernière de toutes ses demandes, fins et conclusions ; dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de la SA Axa France Iard, celle-ci n'étant pas appelée en garantie ; condamné la société NJS Faramia à payer à SA Axa France Iard la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Vu l'appel relevé le 31 juillet 2019 par la société NJS Faramia ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 26 septembre 2022, par lesquelles la société NJS Faramia demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles L 121-1 et suivants, L 124-1 et suivants du code des Assurances, de l'article 1147 devenu 1231-1 et suivants du code civil,

Vu l'action directe dont bénéficie le tiers lésé contre l'assureur du responsable des dommages ;

Vu les pièces versées au débat et le rapport d'expertise déposé par M. [O]

Vu l'ordonnance de désignation du mandataire ad hoc

Vu l'arrêt du 19/9/2019 rendu par la Cour de cassation sur pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 14/6/2018

- juger recevable son action et son appel,

- juger que l'installation réalisée par la société [Y] [B] était insuffisante et non conforme aux règles de l'art,

- juger la société [Y] [B], représentée par son mandataire ad hoc, responsable contractuellement des désordres,

- fixer au passif de la société [Y] [B] la créance de la société NJS Faramia à hauteur de 197.016,55 euros,

- condamner la société Axa France Iard, en sa qualité d'assureur de la société [Y] [B], au paiement de la somme de 197.016,55 euros,

- condamner les requis au paiement de la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer le jugement opposable au mandataire ad hoc et au liquidateur de la société [Y] [B],

- condamner les requis aux entiers dépens dont l'intégralité des consignations et frais d'expertise ;

Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 avril 2020, par lesquelles la société Axa France Iard demande à la cour de :

Vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil,

Confirmer le jugement dont appel ;

A titre principal,

- dire et juger que l'installation frigorifique du bâtiment industriel de NJS Faramia est un élément d'équipement dont la fonction exclusive est de permettre l'exercice de l'activité professionnelle et industrielle de la société NJS Faramia,

- dire et juger que l'installation frigorifique installée par [Y] [B] ne relève pas du régime légale de la responsabilité civile décennale des constructeurs mais de la responsabilité contractuelle de droit commun tel que l'article 1792-7 du code civil en dispose,

- dire et juger que ce matériel échappe à l'objet de l'assurance souscrite auprès d'Axa France Iard au titre de la garantie décennale,

- dire et juger que la compagnie Axa France Iard ne doit dès lors pas de garantie décennale,

- dire et juger que la société NJS Faramia agit à l'encontre de la société [Y] [B] pris en la personne de son liquidateur et d'Axa uniquement sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun de la société [Y] [B] tirée des articles 1134 et 1147 ancien du code civil,

- dire et juger que la compagnie d'assurances Axa est l'assureur en responsabilité civile de [Y] [B] au titre d'un contrat Responsabilité civile de l'entreprise n°3486309504,

- dire et juger que, conformément à sa police n°3486309504 et aux articles 4.28 et 4.29 des conditions générales, Axa ne garantit pas le prix du travail effectué et/ou du produit livré par l'assuré et/ou ses sous-traitants et les frais engagés pour réparer, parachever ou refaire le travail et remplacer tout ou partie du produit,

- dire et juger que la société NJS Faramia sollicite la condamnation d'Axa à supporter les moyens mis en 'uvre dans l'urgence, les interventions d'urgence de [B], les rajouts de fluide de [B] (400 Kg), les frais des experts judiciaires, la nouvelle installation frigorifique, le remplacement des éléments majeurs de l'installation [B], les tracasseries administratives,

- dire et juger que ces demandes tendant à voir Axa supporter les moyens mis en 'uvre dans l'urgence, les interventions d'urgence de [B], les rajouts de fluide de [B] (400 Kg), les frais des experts judiciaires, la nouvelle installation frigorifique, le remplacement des éléments majeurs de l'installation [B], les tracasseries administratives correspondent aux exclusions de garantie prévue par la police d'assurance de la société AX police aux articles 4.28 et 4.29A,

- mettre Axa purement et simplement mis hors de cause,

- débouter la SARL Transports NJS Faramia et/ou toutes les autres parties qui pourraient le solliciter de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre sur le fondement de la responsabilité civile contractuelle de la société [Y] [B],

- dire et juger que l'expert judiciaire [O] reconnait, en page 11 de son rapport, qu'il lui était impossible d'examiner techniquement l'installation de la société [Y] [B], dans la mesure où celle-ci avait subi de nombreuses interventions.

- dire et juger que l'expert judiciaire, après investigations techniques et après avoir analysé les causes possibles sus-énoncées, conclut à un défaut de conception et de réalisation de l'installation frigorifique, alors que de l'aveu même de l'expert judiciaire, les constations matérielles des dysfonctionnements de l'installation de [Y] [B] étaient impossibles dans la mesure où les travaux de reprise avaient été effectuées,

- dire et juger que les investigations et les conclusions de M. [O] sont sujettes à caution, plus que contestables et incomplètes dans la détermination des causes des griefs allégués, et ne sauraient permettre à la cour d'établir la responsabilité de [Y] [B],

- dire et juger que les investigations techniques menées par l'expert judiciaire ne peuvent permettre d'établir une quelconque responsabilité de [Y] [B] dans la mesure où les investigations de l'expert judiciaire ont été réalisées à une période où l'installation de [Y] [B] a été reprise par d'autres entreprises et que les investigations ont été effectuées sur une installation qui n'est plus l'installation de la société [Y] [B] d'origine,

- dire et juger que les investigations et les conclusions de M. [O] sont sujettes à caution et plus que contestables et incomplètes dans la mesure où les enregistreurs de température se sont révélés défaillants lors des investigations,

- dire et juger que les conclusions de l'expert [O] doivent être écartées,

- dire et juger que la responsabilité de la SARL [Y] [B] n'est pas établie,

- mettre Axa purement et simplement mis hors de cause.

- débouter la SARL Transports NJS Faramia et/ou toutes les autres parties qui pourraient le solliciter de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la Compagnie Axa France Iard,

- dire et juger que l'expert judiciaire n'a aucunement évalué les préjudices de la société NJS Faramia et s'est contenté de reprendre le chiffrage proposé par l'expert de la société Helvetia, assureur de NJS Faramia,

Sur le préjudice,

- dire et juger que la société NJS Faramia se base sur le rapport de son propre expert, M. [E], qui a pris en considération dans son chiffrage les 9 rolls refusés le 22.12.07,

- dire et juger que la société NJS Faramia sollicite la condamnation d'Axa à la somme de 70.324,80 euros au titre des travaux de reprise et de la nouvelle installation frigorifique.

- dire et juger que la société NJS Faramia a déjà été indemnisée en août 2008 du coût de ces travaux par son assureur Helvetia et qu'elle a donné quittance subrogative à son assureur,

- dire et juger que la société NJS Faramia ne saurait être indemnisée deux fois de son préjudice,

- débouter purement et simplement la société NJS Faramia de sa demande à hauteur de 70.324,80 euros, cette dernière ayant déjà été indemnisée de son préjudice,

- dire et juger que les travaux de remise en état ayant été indemnisés en 2008 par l'assureur Helvetia, la société NJS Faramia ne peut plus se prévaloir d'aucun préjudice postérieurement au mois d'août 2008 à l'encontre de [Y] [B] et d'Axa, dans la mesure où l'installation frigorifique mise en 'uvre par [Y] [B] a été remplacée, après que la société NJS Faramia ait été indemnisée, par l'installation frigorifique Axima,

- dire et juger que si un préjudice doit être allégué postérieurement aux travaux de reprise mise en 'uvre par Axima en 2008, les demandes d'indemnisation doivent être dirigées en toute logique contre Axima et non contre Axa,

- dire et juger que les demandes portant sur le remplacement du compresseur positif en juin 2011, le remplacement groupe complet février 2013 et les corrections du sous refroidissement par Axima pour un montant totale de 45.620 euros concernent toutes des interventions postérieures à 2008, date du changement de l'installation frigorifique réalisée par [Y] [B] en 2007,

- débouter purement et simplement la société NJS Faramia de sa demande dirigée contre Axa tendant au paiement de la somme de 45.620 euros,

- dire et juger que la société NJS Faramia ne saurait être indemnisée deux fois de son préjudice.

- dire et juger que la société NJS Faramia sollicite l'indemnisation de la surconsommation électrique qu'elle évalue à 20.000 euros de manière forfaitaire.

- dire et juger que ledit préjudice de surconsommation électrique n'est établi par aucune pièce produite aux débats et qu'il n'est pas établi par le rapport d'expertise judiciaire de M. [O],

- dire et juger que cette demande de dommages et intérêts de NJS Faramia pour un montant de 20.000 euros est d'autant moins justifiée que le préjudice allégué par n'est absolument pas établi et qu'il est fixé forfaitairement sans la moindre justification qui pourrait se matérialiser par des factures par exemples,

- dire et juger que l'évaluation forfaitaire du préjudice est prohibée,

- dire et juger qu'il en est de même pour la demande de préjudice au titre des désagréments qui est chiffré forfaitairement et sans la moindre justification à 10.000 euros,

- dire et juger qu'un préjudice doit être démontré tant dans son principe que dans son quantum, ce qui n'est pas le cas en l'espèce concernant le préjudice allégué relatif à la surconsommation d'électricité et au titre des désagréments.

- débouter purement et simplement la société NJS Faramia de ses demandes de préjudice à hauteur de 20.000 euros et de 10.000 euros, ces derniers n'étant pas établis et fixés forfaitairement,

A propos des moyens mis en 'uvre pour sauvegarder les marchandises,

- dire et juger que la société Helvetia assureur de la société NJS Faramia a déjà indemnisé ces mesures et est subrogée à ce titre dans les droits de NJS Faramia,

- dire et juger que le préjudice de NJS Faramia évalué au total à 197.016,55 euros n'est pas justifié tant dans son principe que dans son quantum,

- débouter purement et simplement la société NJS Faramia de ses demandes de préjudice formulées globalement et forfaitairement à 197.016,55 euros,

En tout état de cause,

- dire et juger la franchise contractuelle fixée à 10% du montant des dommages avec un minimum de 1 500 euros et un maximum de 6 000 euros et le plafond de garantie prévus contractuellement dont le montant est pour les dommages immatériels non consécutifs de 286.000 euros opposables à la société NJS Faramia et à l'ensemble des parties présentes à la procédure,

- condamner la SARL NJS Faramia à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ;

Vu la signification de la déclaration d'appel à la société BTSG2, en qualité de mandataire ad hoc, selon acte d'huissier en date du 24 octobre 2019 et des conclusions d'appelante selon acte d'huissier du 28 octobre 2019 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 18 novembre 2022 ;

SUR CE, LA COUR

Sur les désordres

Dans son rapport en date du 19 mai 2009, le cabinet ADT + note que 'la chambre froide négative n'est pas à la température requise souhaitée ; la puissance frigorifique délivrée par cette installation est faible ; cela conduit à des temps de fonctionnement trop longs, voire un plafonnement de la température, lors des périodes de fortes chaleurs et avec une efficacité énergétique réduite'.

Dans son rapport en date du 25 août 2011, M. [I], ingénieur-conseil en génie frigorifique, relève le déficit de la puissance frigorifique de la chambre négative et les interventions répétitives de dépannage. Il rappelle que toute installation doit être exempte de fuite et que ceci doit être pensé dès la conception et lors de l'exécution.

L'intimée critique le rapport d'expertise judiciaire qu'elle estime incomplet.

Néanmoins, le fait pour l'expert de ne pas avoir pu examiner techniquement l'installation, dans la mesure où celle-ci avait fait l'objet d'interventions, ne saurait remettre en cause son analyse technique, alors que des relevés ont été effectués au mois d'août 2015 à partir d'enregistrements, que M. [O] a examiné, de manière circonstanciée, les documents communiqués et les différents rapports qui avaient été établis, les relevés de température et de puissance réalisés. Il a répondu aux observations des parties et aux chefs de missions qui lui ont été confiés, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter le rapport d'expertise judiciaire.

L'expert judiciaire, M. [O], reprend des extraits des rapports antérieurs et confirme que la conception de l'installation est génératrice désordres ainsi que le non-respect des règles de l'art.

Il conclut notamment :

- les installations frigorifiques réalisées par la société [Y] [B] dans les entrepôts de la société NJS Faramia ne permettent pas l'utilisation dans des conditions normales de cet entrepôt de stockage frigorifique. La puissance frigorifique a été sous-estimée. La conception génère des désordres provoquant un fonctionnement aléatoire. La réalisation n'est pas conforme aux règles de l'art, la puissance installée est inférieure à l'estimation qui avait été faite ;

- une nouvelle installation est nécessaire ;

- les préjudices sont évalués à la somme de 179 219,82 euros ;

- la société Helvetia assurances (anciennement Groupama) a effectué des versements à la société NJS Faramia pour la somme de 77 647,37 euros.

Sur la responsabilité contractuelle

L'appelante conteste le jugement entrepris et fait valoir que l'existence d'un marché de travaux n'enlève rien à la responsabilité contractuelle de la SARL [Y] [B]. Elle se prévaut du devis que celle-ci a rédigé, du marché conclu, du cahier des clauses administratives particulières et des différents rapports versés aux débats.

Les termes du débat soumis à la cour ne portent pas sur la responsabilité décennale de l'entreprise.

Au vu des défauts et dysfonctionnements clairement établis de l'installation frigorifique, des constatations techniques effectuées, du rapport d'expertise judiciaire et en l'absence de pièces qui viendraient remettre en cause celui-ci, la responsabilité contractuelle de la SARL [Y] [B], qui a clairement manqué à ses obligations contractuelles dans la conception et l'exécution des travaux en cause, à l'origine d'un dommage, doit être retenue.

Sur les préjudices

L'appelante ne maintient pas sa demande au titre des avaries sur marchandises.

Elle sollicite les sommes suivantes :

- sauvegarde des marchandises par suite du dysfonctionnement du 12 au 15 juillet 2008 (facture 08000540 : 6 436,82 euros)

- interventions d'urgence (factures mars 2009) et rajout de 400 kg de fluide entre 2008 et 2009 : 30'381 euros

- interventions des techniciens spécialisés : audit ADT+ 4544,80 euros ; réunion d'expertise judiciaire ADT 1794 euros ; audit M. [I] juin 2011 : 7 176 euros ; expertise du compresseur HS 739,13 euros ;

- surconsommation électrique : 20'000 euros

- nouvelle installation frigorifique auprès de Axima : 70 324,80 euros

- remplacement des éléments majeurs de l'installation [B] : 45 620 euros

- tracasseries administratives, emploi du personnel à la suite de dysfonctionnements et d'avaries : 10'000 euros.

Les justificatifs qu'elle produit, notamment les factures, leur libellé, leur contenu et le chiffrage qui y figure, permettent de faire droit aux demandes suivantes : 6 436,82 euros (coûts de sauvegarde) + 30 381 euros (interventions d'urgence et rajouts de fluide) + 10'524,80 euros (maîtrise d''uvre) + 59'800 euros (installation Axima) + 42'159 euros (remplacements compresseur positif et groupe de production).

Les dysfonctionnements durables et répétés de l'installation ont généré, de manière certaine, un préjudice de gestion administrative et logistique qui sera ramené à de plus justes proportions à la somme de 2 000 euros.

En revanche, la société NJS Faramia a fait le choix de recourir, dans le cadre d'investigations, à des techniciens successifs dont le coût des honoraires ne saurait être directement imputé à la SARL [Y] [B]. Elle sera, par suite, déboutée de ce chef.

Le préjudice de surconsommation électrique n'est étayé par aucune pièce. Il sera donc rejeté.

En conséquence des développements qui précèdent, il convient de fixer la créance de la société NJS par Amiens au passif de la société [Y] [B] représentée par son mandataire ad hoc à la somme de 151 301,62 euros.

Sur la garantie de l'assureur

L'appelante rappelle que le procès initié avec la compagnie Helvetia assurance concerne la réparation des dommages causés sur la marchandise avariée en raison de la non-conformité de l'installation frigorifique mise en place par la société [Y] [B] et que le présent procès concerne la défectuosité de l'installation. Elle souligne les dispositions de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 19 septembre 2019 qui ont cassé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui avait retenu les dommages exclus de la garantie.

L'intimée confirme être l'assureur responsabilité civile de M. [Y] [B] au titre d'un contrat n°3486309504, lequel définit les activités garanties. Elle invoque les exclusions de garantie prévues par les articles 4.28 et 4.29 des conditions générales et commente chacun des préjudices avancés par l'appelante.

Il est prévu au chapitre IV "Exclusions générales"que ne sont pas garantis :

article 4.28 : Le prix du travail effectué et/ou du produit livré par l'assuré et/ou ses sous-traitants,

article 4.29 : Les frais engagés pour :

- réparer, parachever ou refaire le travail,

- remplacer tout ou partie du produit.

Or, les dommages résultant du fonctionnement défectueux de l'ouvrage ou de l'équipement livré par la société [Y] [B] n'entrent pas dans le champ des exclusions stipulées aux articles 4.28 et 4.29 des conditions précitées.

Et la société Axa échoue à rapporter la preuve que les conditions d'exclusion de la garantie sont réunies.

Les quittances en date du 21 juillet 2008 font ressortir que les règlements suivants :

- 66 711,54 euros concernent les avaries (déduction faite du sauvetage), les frais d'analyse et de transport ;

- 10'935,83 euros concernant les frais d'entreposage.

Contrairement aux allégations de la société Axa, il ne s'agit pas d'indemniser deux fois le préjudice de la société NJS Faramia et les travaux de remise en état n'ont pas été indemnisés en 2008. Elle conteste tout aussi vainement les frais postérieurs en lien direct avec le dommage, tels qu'ils ont été précédemment retenus. Il convient de rappeler, à l'instar du rapport d'expertise judiciaire et des différents documents versés aux débats par l'appelante, que la société Axima est intervenue dans un premier temps pour assurer la maintenance de l'installation et régler des problèmes de fuite. Après plusieurs audits (ADT+ et M. [I]), elle a réalisé une nouvelle installation, par l'ajout notamment d'une production négative, et procédé au remplacement du compresseur positif et du groupe de production afin que l'installation défaillante soit enfin réparée et fonctionnelle.

Par application du contrat d'assurance, l'intimée doit sa garantie et sera, en conséquence, condamnée, à verser à la société NJS Faramia la somme de 151 301,62 euros euros. Cependant, elle est fondée à opposer au tiers lésé la franchise contractuelle et, le cas échéant, le plafond de garantie.

Sur les frais irrépétibles

Il sera alloué à l'appelante la somme de 10'000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt de défaut

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Fixe la créance de la société NJS Faramia au passif de la procédure collective la SARL [Y] [B], représentée par la société BTSG2 en qualité de mandataire ad hoc désigné à ces fonctions par ordonnance en date du 19 décembre 2018, à la somme de 151 301,62 euros, outre la somme de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens d'appel ;

Rejette le surplus des demandes de la société NJS Faramia ;

Condamne la société Axa France Iard à verser à la société NJS Faramia la somme de 151 301,62 euro et la somme de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que la société Axa France Iard est fondée à opposer au tiers lésé la franchise contractuelle et, le cas échéant, le plafond de garantie.

Condamne la société Axa France Iard aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertises judiciaires.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-3
Numéro d'arrêt : 19/12591
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;19.12591 ?
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