La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2023 | FRANCE | N°19/17403

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 02 mars 2023, 19/17403


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 02 MARS 2023

ph

N° 2023/ 83













Rôle N° RG 19/17403 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFE3C







[J] [P]

[Y] [P]



C/



[V] [H]

[B] [H]

















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON



la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES




r>





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 04 Décembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/04735.





APPELANTS



Madame [J] [P], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 02 MARS 2023

ph

N° 2023/ 83

Rôle N° RG 19/17403 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFE3C

[J] [P]

[Y] [P]

C/

[V] [H]

[B] [H]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 04 Décembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/04735.

APPELANTS

Madame [J] [P], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE

Monsieur [Y] [P], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Madame [V] [H], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Carole DUNAC-BORGHINI de la SCP E BORGHINI. C BORGHINI, avocat au barreau de NICE, plaidant

Monsieur [B] [H], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Carole DUNAC-BORGHINI de la SCP E BORGHINI. C BORGHINI, avocat au barreau de NICE , plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Les parties sont propriétaires de villas voisines au sein du lotissement dénommé [Adresse 1].

Par exploit d'huissier des 10 et 11 septembre 2015, M. [B] [H] et Mme [V] [H] ont fait assigner M. [Y] [P] et Mme [J] [P] ainsi que l'ASL du lotissement Victoria park devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de démolition de constructions illicites en limite de propriété.

Le tribunal de grande instance de Nice, a par jugement du 4 décembre 2017 :

- dit l'action non prescrite,

- condamné in solidum M. et Mme [P] à procéder à la démolition des constructions litigieuses, à savoir le funiculaire, les installations de départ et d'arrivée, ainsi que la suppression du rail et les rehaussements de murs en limite de propriété, sous astreinte de 50 euros par jour de retard qui courra, passé un délai de sept mois après la signification du jugement, pendant un délai de trois mois après lequel il devra être à nouveau statué,

- condamné in solidum M. et Mme [P] à payer à M. et Mme [H] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes confondues,

- condamné in solidum M. et Mme [P] à payer à M. et Mme [H] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- mis purement et simplement hors de cause l'ASL du lotissement Victoria park,

- condamné in solidum M. et Mme [H] à payer à l'ASL du lotissement Victoria park la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme [P] aux entiers dépens de l'instance avec distraction.

Le tribunal a considéré :

- qu'en se reportant aux différentes photographies on constate qu'il a été réalisé antérieurement un remonte personne de style télésiège entre le bas de la propriété [P] et le niveau de leur villa en contre haut parallèlement à un escalier, que sans qu'il soit utile de rechercher l'emplacement de l'ancienne installation, celle-ci a été détruite et remplacée pour un funiculaire avec rail avec construction d'un édicule de départ et d'arrivée en limite de propriété, que les travaux ont été réalisés en 2011,

- que le délai de prescription ne peut courir qu'à compter de la réalisation du nouvel ouvrage,

- que sur le fond, l'article 4 du cahier des charges du lotissement Victoria park stipule que tous les lots sont frappés d'une servitude non aedificandi de 2,50 mètres de largeur de chaque côté de leurs limites mitoyennes et que cet ouvrage est implanté à moins de 2,50 mètres de la limite de propriété,

- qu'il n'est pas contesté que les propriétés sont situées en zone UF, dans laquelle tout bâtiment doit être implanté à une distance des limites séparatives d'au moins 5 mètres, sauf dérogation résultant des dispositions du règlement ou du plan de composition du lotissement permettant une construction en limite de propriété, qu'aucune dérogation n'existe dans les documents du lotissement permettant une implantation en limite de deux fonds,

- que la déclaration préalable de travaux déposée par les époux [P] a fait l'objet d'une décision d'opposition du maire du 15 décembre 2010,

- que les époux [H] rapportent la preuve d'un premier préjudice résultant du trouble de jouissance paisible et d'une résistance abusive des époux [P],

- que les époux [H] ont mis en cause l'ASL Victoria park sans formuler aucune demande contre elle.

M. et Mme [P] ont relevé appel de ce jugement le 14 novembre 2019.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 16 décembre 2022, M. et Mme [P] demandent à la cour :

- de réformer dans son intégralité le jugement entrepris,

- de dire et juger prescrite l'action initiée par les époux [H],

- de les débouter en conséquence de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- subsidiairement de débouter les époux [H] de l'ensemble de leurs demandes,

- de les condamner à la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

M. et Mme [P] font essentiellement valoir :

- que la servitude sur laquelle se fondent les époux [H] vise à interdire des constructions sur une bande de 2,50 mètres de chaque côté des limites mitoyennes et qu'il était expressément précisé que dans cette zone frappée d'une servitude non aedificandi pourraient être construits des escaliers pour l'accès des immeubles, qu'un remonte pente équivaut à des escaliers, que l'ancien propriétaire a dans ce cadre, obtenu l'autorisation de l'ASL le 6 mars 1965 pour ce remonte pente,

- que le fondement utilisé est donc non seulement erroné, mais en outre contredit par l'autorisation obtenue en 1965, qui démontre que la servitude non aedificandi n'a pas pour effet d'interdire la construction de remonte pente ou ascenseur, que la commune vient de le confirmer dans son PLU, que c'est la raison pour laquelle les époux [H] ne se sont pas opposés pendant la durée des travaux et ont attendu qu'ils aient le projet de vendre leur propriété pour subitement découvrir ces travaux,

- que l'installation actuelle est située en dessous du niveau de la propriété des intimés et leur occasionne beaucoup moins de troubles que la précédente qui permettait un surplomb sur leur propriété,

- que l'installation ancienne était située dans la zone non aedificandi proche de la limite de propriété et pas au milieu de leur parcelle,

- subsidiairement, que l'action est prescrite leurs auteurs ayant obtenu l'autorisation de réaliser les travaux d'installation d'un remonte pente le 6 mars 1965, travaux effectués en 1965, que la jurisprudence considère que le non usage trentenaire éteint définitivement la servitude non aedificandi,

- que c'est à tort que le tribunal a considéré que la servitude non aedificandi n'avait pas disparu,

- que les époux [H] gênés par les attestations produites, demandent que deux d'entre elles soient déclarées irrecevables pour non-conformité aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, mais que ces attestations sont accompagnées d'un document d'identité et que l'irrégularité alléguée n'est pas susceptible d'entraîner une nullité, qu'à charge de démontrer un grief, ce que les époux [H] ne cherchent pas à soutenir,

- que la servitude alléguée ne peut faire obstacle à la réalisation d'un ascenseur incliné,

- qu'il résulte de ce qui précède que l'action initiée est infondée et abusive.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 15 décembre 2022, M. et Mme [H] demandent à la cour de confirmer le jugement du 4 décembre 2017 en toutes ses dispositions, sauf à augmenter le montant de l'astreinte et des dommages intérêts, le réformant sur ces points et statuant à nouveau :

Vu le 4ème livre du code de l'urbanisme et les articles L 111-1-1, R 111-2, et suivants du code de l'urbanisme,

Vu le cahier des charges de l'ASL Victoria park fixant une zone non aedificandi imposée à tous les colotis,

Vu le POS applicable,

- d'ordonner aux époux [P] la démolition des constructions illicites consistant en la suppression du funiculaire, des installations de départ et d'arrivée, et du rail ainsi que des murs construits en limite de propriétés et les longeant, et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter de la signification de la décision à intervenir,

- de condamner les époux [P] à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et injustifiée et pour trouble de jouissance paisible des lieux et trouble lié au désagrément esthétique dépréciant la valeur de leur propriété,

- de dire et juger que leur action n'est pas prescrite, du fait que la construction date de 2011, au vu de l'assignation délivrée,

- d'écarter des débats les pièces 11 et 12 qui ne respectent pas les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile,

- de débouter les époux [P] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- de condamner les époux [P] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, s'ajoutant à la condamnation de première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner les époux [P] aux entiers dépens.

M. et Mme [H] soutiennent en substance :

- qu'il n'est pas question de construction d'escaliers, mais d'un rail avec un engin immobilisé sur ledit rail, s'agissant d'un ascenseur de trois mètres de hauteur,

- que la construction litigieuse est récente, que l'installation de 1965 a été faite à un autre endroit et n'a rien à voir avec l'installation actuelle, pour ce qui concerne son emplacement et la nature de la construction,

- que contrairement à ce qu'ils affirment, les époux [P] n'ont pas fait de révision de l'installation, mais ont fait une véritable nouvelle construction dans la zone non aedificandi,

- qu'il ressort de leurs propres écritures que les époux [P] ont fait réaliser les travaux avant d'obtenir le permis de construire, que la situation administrative n'a jamais été régularisée,

- que les époux [P] se prévalent d'une construction préexistante, mais que la charge de la preuve leur appartient,

- qu'il y a lieu d'écarter les pièces 11 et 12 qui ne mentionnent pas qu'elles peuvent être produites en justice,

- qu'ils produisent des attestations démontrant que l'installation de 1965 était au milieu du terrain et qu'il s'agissait d'un « 'uf » et non pas d'un rail avec un funiculaire ascenseur,

- que le tribunal a retenu à raison, une violation des règles du lotissement et celles de l'urbanisme.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 20 décembre 2022.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des parties, comporte des demandes de « dire et juger » qui ne constituent pas toutes des prétentions, mais des moyens, ce qui explique qu'elles n'aient pas été toutes reprises dans l'exposé des prétentions des parties.

Contrairement à ce qui était soulevé en premier instance et à l'ordre de présentation de leurs demandes dans le dispositif de leurs conclusions, les appelants soutiennent principalement que leur construction est conforme aux règles du lotissement et aux règles d'urbanisme, et seulement subsidiairement qu'ils ont prescrit la servitude non aedificandi par non usage pendant trente ans.

Sur la recevabilité des pièces numéros 11 et 12 des appelants

Selon l'article 202 du code de procédure civile : « L'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés.

Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles.

Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales.

L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature. »

M. et Mme [H] demandent que les attestations numéros 11 et 12 soient écartées des débats pour non-conformité, faute de précision qu'elles peuvent être communiquées en justice.

Cependant, il est constaté que le texte précité qui ne prévoit pas de sanction, laisse au juge du fond toute latitude pour apprécier la force probante des attestations. Si bien que l'exception d'irrecevabilité de ces pièces sera rejetée.

Sur la conformité de la construction

Il n'est pas discuté que la propriété de M. et Mme [P] (cadastrée section IV n° [Cadastre 3]), comme celle de M. et Mme [H] (cadastrée section IV n° [Cadastre 4]), dépend du lotissement dénommé Victoria park, dont l'article 4 du cahier des charges énonce : « 'Tous les lots du présent lotissement sont frappés d'une servitude de non aedificandi de deux mètres cinquante centimètres de largeur de chaque côté de leurs limites mitoyennes et sur toute la longueur de ces limites ainsi qu'il sera ci-après sous le titre « hygiène » ' ».

Il ressort du procès-verbal de constat du 9 décembre 2015 et des photographies versées aux débats et il n'est d'ailleurs pas contesté que le funiculaire construit par M. et Mme [P] en remplacement de la précédente installation, est situé contre le mur mitoyen de la propriété de M. et Mme [H].

En outre, il est démontré que par décision du 13 septembre 2010, le maire de [Localité 5] s'est opposé au projet de M. [P] intitulé « installation d'un remonte-personnes et de ses stations ' construction de locaux techniques (coffrets machinerie) » sur la section IV n° [Cadastre 3], au visa du code de l'urbanisme, des prescriptions d'urbanisme du lotissement, du plan d'occupation des sols, de la servitude non aedificandi, les dispositions de l'article UF7-1 du plan d'occupation des sols qui énonce notamment que « tout bâtiment doit être implanté à une distance des limites séparatives d'au moins cinq mètres (') » et de l'article UF7-3 qui liste les constructions et aménagements autorisés dans cette marge de recul, malgré l'avis favorable de l'architecte des bâtiments de France du 10 août 2010 dépendant de la Direction générale des services techniques, de l'aménagement, des travaux et du développement durable de la ville de [Localité 5].

M. et Mme [P] se prévalent d'une note technique établie le 3 avril 2020 par M. [G] [K], géomètre-expert, comparant la précédente installation et l'installation actuellement critiquée, et qui énonce :

- que l'installation ancienne consistait en un système de transport par câble comprenant une cabine, se situait au-dessus du niveau des murs de séparation avec le fonds contigu section IV n° [Cadastre 4], les câbles se situant de 1,70 mètre à 4,80 mètres au-dessus des murs de séparation, avait été autorisée par les colotis lors d'une assemblée générale annuelle du 15 février 1964,

- que le système actuel consiste en une cabine mobile sur rail, sans ouvrage en élévation de plus de 60 centimètres, excepté la machinerie en partie haute qui s'élève à 80 centimètres au-dessus du terrain de 2016,

- que ce dispositif semble de prime abord ne constituer aucune gêne visuelle,

- qu'il semblerait que ce dispositif n'entre pas dans la loi des 5 mètres, ce qui est confirmé par un courriel du 1er février 2018 de M. [N] [O], membre de la direction de l'aménagement et de l'urbanisme de la métropole [Localité 5] Cote d'Azur reproduit en ces termes « Je vous confirme également que dans la bande de cinq mètres en bordure des limites séparatives, les escaliers de secours et ascenseurs rajoutés à un bâtiment existant sont autorisés ».

Cependant cette note qui n'évoque que la hauteur de la construction litigieuse, ne fait état que d'une hypothèse de son auteur, contredite par la décision précitée du maire de [Localité 5], lequel s'est clairement opposé au projet de M. et Mme [P] en visant les textes d'urbanisme et la servitude non aedificandi.

La production d'attestations sur la durée des travaux d'installation pendant six mois en 2011 et le fait que M. et Mme [H] auraient apprécié la qualité du travail de l'entrepreneur intervenu et eu recours à ses services ensuite pour leur portail, ne pouvant signifier de la part de ceux-ci l'approbation de la construction litigieuse dans la zone non aedificandi.

Par conséquent, la violation de la servitude non aedificandi est établie, faute de respecter la distance imposée de deux mètres cinquante centimètres.

Sur la demande subsidiaire de prescription de la servitude non aedificandi par non usage

En application de l'article 2227 du code civil, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

M. et Mme [P] prétendent que la nouvelle construction a été réalisée au même endroit que l'ancienne installation datant de 1965 et autorisée en assemblée générale du lotissement et que son non usage trentenaire éteint définitivement la servitude non aedificandi.

Il est établi que le système de transport par câble avec cabine préexistait depuis 1965, seul étant discuté le positionnement sur le terrain de M. et Mme [P], dans la zone non aedificandi de deux mètres cinquante centimètres ou au-delà de cette zone.

La charge de cette preuve appartient à celui qui s'en prévaut.

Aux termes des attestations produites par M. et Mme [H], l'installation était implantée sensiblement au milieu de la bande de terrain, ce à quoi M. et Mme [P] opposent une impossibilité technique dans la mesure où leur maison est implantée en milieu de propriété.

Cependant au regard de la forme de la parcelle cadastrée IV n° [Cadastre 3], à savoir une bande de terre partant de l'[Adresse 2], s'élargissant ensuite et de la photographie correspondant au projet de piscine de la villa [H] le 10 mars 2003, il doit être conclu que l'ancienne installation n'était pas édifiée dans la zone non aedificandi.

M. et Mme [P] seront donc déboutés de leur demande de prescription de la servitude non aedificandi par non usage et au constat de la violation à la fois des règles d'urbanisme et du lotissement, le jugement appelé sera confirmé en ce qu'il a ordonné la démolition des constructions litigieuses.

En application de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision.

M. et Mme [H] ont formé un appel incident sur le montant de l'astreinte, fixée par le premier juge à 50 euros par jour de retard passé un délai de sept mois après la signification du jugement, pendant un délai de trois mois.

Afin de contraindre M. et Mme [P] qui ont passé outre l'opposition du maire, il y a lieu d'infirmer le jugement et de fixer le montant de l'astreinte provisoire à 500 euros par jour de retard, à l'expiration d'un délai de sept mois à compter de la signification de la présente décision et pour une durée de trois mois.

Sur la demande principale de dommages et intérêts

M. et Mme [H] sollicitent la réformation du jugement de première instance qui leur a alloué la somme de 5 000 euros toutes causes de préjudice confondues et réclament la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice causé par la résistance abusive de M. et Mme [P], ainsi que par le trouble de jouissance paisible des lieux et le trouble lié au désagrément esthétique dépréciant la valeur de leur propriété.

Selon les dispositions de l'article 1382 devenu 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause préjudice à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, ce qui impose la triple démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

En l'espèce, il ressort des développements ci-dessus, une violation des règles d'urbanisme et des règles du lotissement par M. et Mme [P] depuis l'année 2011 et qui persiste à ce jour, imposant à M. et Mme [H] les allées et venues du funiculaire litigieux en limite immédiate de leur propriété, justifiant l'allocation d'une indemnisation des troubles de jouissance subis. En revanche, le désagrément esthétique n'est pas établi. Quant à la résistance abusive alléguée, elle est insuffisamment démontrée, dès lors que la défense à une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer un abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol.

En considération de ces éléments, il convient de confirmer le quantum retenu par le premier juge, sauf à préciser qu'il ne s'agit que de l'indemnisation du préjudice de jouissance.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts

Il est constant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer un abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1382 devenu 1240 du code civil.

Compte tenu de la solution du litige, M. et Mme [P] seront déboutés de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts et le jugement appelé confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement et y ajoutant de condamner M. et Mme [P] aux dépens d'appel ainsi qu'à des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Rejette l'exception d'irrecevabilité des pièces numéros 11 et 12 des appelants ;

Confirme le jugement appelé sauf en ce qu'il a :

- fixé l'astreinte à 50 euros par jour de retard,

- condamné M. et Mme [P] à payer à M. et Mme [H] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes confondues ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Fixe le montant de l'astreinte provisoire à 500 euros (cinq cents euros) par jour de retard ;

Condamne M. [Y] [P] et Mme [J] [P] à payer à M. [B] [H] et Mme [V] [H] la somme de 5 000 euros (cinq mille euros), en réparation de leurs troubles de jouissance ;

Condamne M. [Y] [P] et Mme [J] [P] aux dépens d'appel ;

Condamne M. [Y] [P] et Mme [J] [P] à payer à M. [B] [H] et Mme [V] [H] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/17403
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;19.17403 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award