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02/03/2023 | FRANCE | N°19/16029

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 02 mars 2023, 19/16029


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT MIXTE

(Expertise)

DU 02 MARS 2023

PH

N° 2023/ 85













Rôle N° RG 19/16029 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFA33







[B] [E]





C/



METROPOLE [Localité 24]

COMMUNE DE [Localité 22]













Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Aude DUMOUCHEL DE PREMARE



SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIE

S



SELARL WW & ASSOCIES









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 30 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 1501578.





APPELANTE



Madame [B] [E]

appelante et intimée

demeurant [Adresse 5]



re...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT MIXTE

(Expertise)

DU 02 MARS 2023

PH

N° 2023/ 85

Rôle N° RG 19/16029 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFA33

[B] [E]

C/

METROPOLE [Localité 24]

COMMUNE DE [Localité 22]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Aude DUMOUCHEL DE PREMARE

SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES

SELARL WW & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 30 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 1501578.

APPELANTE

Madame [B] [E]

appelante et intimée

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Aude DUMOUCHEL DE PREMARE, avocat au barreau de NICE substitué par Me Thimothée JOLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

METROPOLE [Localité 24], dont le siège social est [Adresse 6], pris en la personne de son représentant légal en exercice

représenté par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Philippe PETIT de la SELARL CABINET PHILIPPE PETIT ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

COMMUNE DE [Localité 22]

intimée et appelante

dont le siège social est [Adresse 4], pris en la personne de son maire en exercice

représenté par Me Isabelle WILLM de la SELARL WW & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mars 2023,

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre Conseiller et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Le litige porte sur les parcelles sises sur le site de « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22], respectivement cadastrées : [Cadastre 16] et [Cadastre 17].

Le tribunal de grande instance du Nice a statué par jugement réputé contradictoire du 13 mars 2015, sur une demande de la commune de [Localité 22] dirigée contre Mme [B] [E], tendant à voir dire qu'elle est occupante sans droit ni titre de la parcelle [Cadastre 16], ainsi que son expulsion et la démolition de constructions, et a débouté la commune de [Localité 22] de ses demandes.

Par exploit d'huissier du 6 mars 2015, la Métropole [Localité 24] a fait assigner Mme [E] devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de faire cesser l'empiètement sur la parcelle [Cadastre 17].

Par exploit d'huissier du 5 décembre 2016, la commune de [Localité 22] a fait assigner Mme [E] devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de faire cesser l'empiètement sur la parcelle [Cadastre 16] appartenant à son domaine privé.

La parcelle [Cadastre 17] a été cédée en vertu d'un acte authentique du 17 juillet 2018, par la Métropole de [Localité 24] à la commune de [Localité 22].

Après jonction des deux procédures par ordonnance du juge de la mise en état, le tribunal de grande instance de Nice, a par jugement du 30 septembre 2019, notamment :

- prononcé la mise hors de cause de la Métropole de [Localité 24],

- déclaré recevable la commune de [Localité 22] en son action concernant la parcelle [Cadastre 17],

- condamné Mme [E] à démolir les deux murs de soutènement et le portail qu'elle a fait construire sur la parcelle [Cadastre 17] et à remettre les lieux en l'état dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai, pendant six mois au-delà desquels il sera à nouveau statué,

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'expulsion de Mme [E] et de tous occupants de son chef de la parcelle [Cadastre 17],

- dit que le jugement du 13 mars 2015 a acquis l'autorité de la chose jugée,

- déclaré irrecevable l'ensemble des demandes de la commune de [Localité 22] dans son assignation du 5 décembre 2016 au titre de la parcelle [Cadastre 16], consistant à être reconnue propriétaire de la parcelle [Cadastre 16] et à voir ordonner la démolition des ouvrages qui y ont été construits par Mme [E],

- débouté Mme [E] de sa demande aux fins de se voir reconnaître propriétaire de la bande de terrain qu'elle occupe sur la parcelle [Cadastre 16], soit l'expulsion de Mme [E] de la parcelle [Cadastre 16] (sic),

- débouté la commune de [Localité 22] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de Mme [E],

- rejeté la demande d'exécution provisoire,

- débouté la commune de [Localité 22], la Métropole de Nice et Mme [E] de leur demande respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Le tribunal a considéré :

- s'agissant de la parcelle [Cadastre 17], que Mme [E] ne prouve pas l'avoir acquise par prescription, ni qu'elle bénéficie d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 17] au profit du lot 476 devenu [Cadastre 8], que la preuve de l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 8] n'est pas suffisamment rapportée,

- s'agissant de la parcelle [Cadastre 16], d'une part que les demandes de la commune de [Localité 22] sont les mêmes et sur le même fondement que celles tranchées par le jugement rendu le 13 mars 2015, d'autre part que Mme [E] ne prouve pas l'avoir acquise par prescription.

Par déclaration du 16 octobre 2019, Mme [E] a relevé appel de ce jugement en intimant la commune de [Localité 22] et la Métropole de [Localité 24].

La commune de [Localité 22] a relevé appel du même jugement en intimant Mme [E], le 18 octobre 2019.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er mars 2021, les deux instances ont été jointes.

Dans ses conclusions d'appelante déposées et notifiées par le RPVA le 15 janvier 2020, Mme [E] demande à la cour :

Concernant la parcelle [Cadastre 17] :

A titre principal,

Vu les articles 2258, 2261 et 2272 du code civil,

- de débouter la Métropole de [Localité 24] de l'ensemble de ses prétentions,

- de dire et juger qu'elle se prévaut à juste titre de la prescription acquisitive sur la parcelle [Cadastre 17],

A titre subsidiaire,

Vu l'article 682 du code civil,

- de dire et juger que le lot n°476 lui appartenant est enclavé,

- de dire et juger que le désenclavement de ce lot se fera par la parcelle [Cadastre 17], selon le tracé existant tel que figurant sur le plan Géotech du 12 février 2013,

A titre infiniment subsidiaire,

Vu les articles 143 et suivants du code de procédure civile,

- d'ordonner, avant-dire droit, une expertise afin de donner toutes précisions, tous plans et avis sur l'état d'enclave de ce lot et les possibilités de passage par voie carrossable eu égard à l'exploitation actuelle et sur les longueurs et incommodités relatives desdits passages pour les différents fonds intéressés,

- de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

Concernant la parcelle [Cadastre 16] :

Vu l'article 122 du code de procédure civile,

Vu l'article 1355 du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

- de débouter la commune de [Localité 22] de l'ensemble de ses prétentions,

Vu l'article 70 du code de procédure civile,

Vu les articles 2258, 2261 et 2272 du code civil,

A titre reconventionnel,

- de dire et juger qu'elle se prévaut à juste titre de la prescription acquisitive de la bande de terrain qu'elle occupe sur la parcelle [Cadastre 16],

- de dire et juger que les limites de cette emprise sont celles contenues dans le plan dressé par le cabinet Géotech, ou

A titre subsidiaire

Vu les articles 143 et suivants du code de procédure civile,

- d'ordonner, avant-dire droit, une expertise afin de donner toutes précisions, tous plans et avis sur les limites de son emprise sur la parcelle [Cadastre 16],

- de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

En tout état de cause :

- de condamner la commune de [Localité 22] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me Aude Dumouchel de Premare sous sa due affirmation,

- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir (sic).

Mme [E] fait essentiellement valoir :

Sur le litige concernant la parcelle [Cadastre 17] :

- que contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, il n'y a pas de contradiction dans ses demandes qui ont mal été interprétées, s'agissant d'une demande principale tendant à l'acquisition par usucapion de la parcelle [Cadastre 17] et d'une demande subsidiaire tendant à la reconnaissance d'une servitude de passage en raison de l'enclavement de son lot,

- que le tribunal a commis une erreur d'appréciation dans la mesure où un certain nombre d'éléments permet d'établir la possession pendant plus de trente ans, qu'elle a avec son époux, puis seule, entretenu et aménagé la portion de parcelle sur laquelle ils avaient un droit de passage, soit des aménagements réalisés aux frais des époux [R], au vu et au su de tous leurs voisins, sans que cela fasse l'objet de contestation de la part de l'association syndicale, ni de la Métropole au moment où elle a acquis le terrain,

- subsidiairement, qu'il a été jugé que l'accès avec une voiture correspond à l'usage normal d'un fonds destiné à l'habitation, qu'avec son époux ils ont acquis leur propriété le 2 juin 1975 au sein de l'ensemble immobilier Les résidences de [Localité 21], qu'il n'est pas contestable qu'elle n'a jamais bénéficié d'un accès carrossable à son fonds, que si les limites du lot 476 arrivent bien en bordure de la voie publique, le terrain est très en pente de sorte qu'aucun accès direct par la voie publique ne peut être concevable, qu'aucune voie ne peut directement desservir le pavillon ni par le haut ni par le bas, qu'une délibération du conseil d'administration du 4 octobre 1979 a accepté de les autoriser à passer par la parcelle désormais cadastrée [Cadastre 17],

- à titre infiniment subsidiaire, qu'elle s'engage à démonter le portail mais qu'il lui parait impossible de remettre en état les murs de soutènement, dans la mesure où ceux-ci sont nécessaires pour soutenir les terres et la voie publique en amont, son lot étant situé en contrebas de ces murs, ce qui engendrerait un risque avéré d'éboulement.

Sur le litige concernant la parcelle [Cadastre 16] :

- qu'il n'est pas possible de revenir sur un précédent jugement devenu définitif, même s'il a été rendu avec la mention « en l'état », que le jugement appelé devra être confirmé sur ce point et la commune de [Localité 22] déclarée irrecevable en ses demandes,

- qu'en l'espèce il existe un lien suffisant entre la demande d'expulsion et la revendication reconventionnelle de la propriété de la bande de terrain par prescription acquisitive,

- que le tribunal a commis une erreur d'appréciation dans la mesure où un certain nombre d'éléments permettent d'établir la possession, soit la pose d'une clôture depuis le poteau du portail jusqu'à la route en contrebas au moment de leur emménagement, que plusieurs documents permettent de démontrer l'ancienneté de cette clôture,

- sur la demande de dommages et intérêts, que la commune de [Localité 22] est mal venue de lui reprocher une résistance abusive qui bloquerait son projet de vente du terrain, alors qu'elle est responsable de l'impossibilité de réitérer la vente, qu'elle n'a pas donné suite à son appel contre le jugement l'ayant débouté de ses demandes le 13 mars 2015, que la délibération municipale est affectée de vices.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 16 décembre 2022, la commune de [Localité 22] demande à la cour au visa des articles 544, 545 et 555 du code civil :

- de réformer le jugement en ce qu'il a dit que le jugement du 13 mars 2015 a acquis l'autorité de la chose jugée et déclaré irrecevable l'ensemble des demandes de la commune de [Localité 22] dans son assignation du 5 décembre 2016 au titre de la parcelle [Cadastre 16], consistant à être reconnue propriétaire de la parcelle [Cadastre 16] et à voir ordonner la démolition des ouvrages qui y ont été construits par Mme [E],

- d'ordonner l'expulsion de Mme [E] et celle de tous occupants de son chef, de la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22], dans le délai de huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir (sic) et ce, au besoin avec le concours de la force publique,

- de condamner Mme [E] à démolir l'ensemble des ouvrages édifiés par elle sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16], tels qu'identifiés par les rapports de police municipale en date des 24 août 2012, 21 février 2013, et 4 mars 2014, et le constat d'huissier établi par Me [I] [A] le 24 octobre 2015, et plus généralement à remettre les lieux en leur état antérieur, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré la commune de [Localité 22] recevable en son action concernant la parcelle [Cadastre 17],

- constaté que Mme [E] renonce à la fin de non-recevoir qu'elle avait initialement soulevée à l'encontre de la Métropole [Localité 24] s'agissant de sa qualité à agir concernant la parcelle [Cadastre 17],

- condamné Mme [E] à démolir les deux murs de soutènement et le portail qu'elle a fait construire sur la parcelle [Cadastre 17] et à remettre les lieux en l'état dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai, pendant six mois au-delà desquels il sera à nouveau statué,

- dit n'y avoir lieu de prononcer l'expulsion de Mme [E] et de tous occupants de son chef de la parcelle [Cadastre 17],

- de condamner Mme [E] à payer à la commune de [Localité 22] la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, en ceux compris le coût du constat d'huissier de Me [A], distraits au profit de la SELARL WW & associés représentée par Me [J] [W], sous sa due affirmation de droit.

La commune de [Localité 22] soutient en substance :

- que le 23 avril 2012, Mme [E] lui a adressé un courrier afin de lui indiquer qu'elle souhaitait engager des travaux pour créer un accès en véhicule à sa propriété, soit des travaux nécessitant la mise en place d'une servitude de passage ou la vente d'une partie de la parcelle, qu'à cette époque elle ne faisait état d'aucune prescription acquisitive et connaissait parfaitement les limites de sa propriété, qui s'arrêtent à la parcelle [Cadastre 8],

- que Mme [E] a réalisé des travaux illicites empiétant sur les parcelles cadastrées [Cadastre 16] et [Cadastre 17] sans attendre l'autorisation de la commune, que sur la parcelle [Cadastre 16] les empiètements sont matérialisés par le portail et la clôture, que sur la parcelle [Cadastre 17] les empiètements sont matérialisés par les travaux de terrassement et le mur de soutènement, que les parcelles [Cadastre 16] et [Cadastre 17] ont été remblayées par Mme [E] par l'apport de gravats et de terre,

- que Mme [E] n'a pas tenu ses engagements de remettre les lieux en leur état antérieur,

- qu'elle ne comprend pas comment le tribunal peut juger que la commune est bien propriétaire de la parcelle [Cadastre 16] mais serait irrecevable à solliciter la démolition d'ouvrages réalisés illégalement par Mme [E] sur cette parcelle, alors même que le tribunal a reconnu que Mme [E] n'avait aucun droit sur cette parcelle,

- qu'il ne peut être opposé l'autorité de la chose jugée du précédent jugement pour plusieurs raisons :

- le précédent jugement est en réalité un jugement d'irrecevabilité pour défaut de qualité à agir, même s'il est mentionné « déboute », ce qui ne l'empêche pas de réintroduire une action,

- absence d'identité de cause entre les deux actions : le précédent jugement n'a pas tranché ses demandes au regard de son titre de propriété, mais uniquement par rapport à des pièces justifiant de sa possession du terrain litigieux, soit deux causes différentes : une action possessoire contre une action pétitoire ici,

- le précédent jugement n'a pas tranché une contestation puisqu'il n'a pas désigné Mme [E] comme propriétaire, qu'il n'a fait que rejeter une demande de suppression des ouvrages,

- le précédent jugement était rendu en l'état,

- le précédent jugement est non avenu faute d'avoir été signifié en application de l'article 478 du code de procédure civile,

- la fin de non-recevoir soulevée par Mme [E] est irrecevable au regard de la règle de l'estoppel : en l'espèce par son argumentation, Mme [E] a implicitement mais nécessairement renoncé à se prévaloir de l'autorité attachée au jugement du 13 mars 2015,

- que tout empiètement, même le plus minime, justifie la demande formée par le propriétaire du fonds à faire cesser ledit empiètement, même si l'empiéteur est de bonne foi, qu'il est justifié de sa qualité de propriétaire par son acte d'acquisition du 12 septembre 2000,

- que Mme [E] a fait l'aveu de cet empiètement, et s'est engagée à remettre les lieux en leur état antérieur,

- que la charge de la preuve de l'usucapion pèse sur Mme [E], que Mme [E] ne justifie pas d'actes matériels de possession, ni même une intention de se comporter comme propriétaire de la parcelle [Cadastre 16],

- qu'elle renonce à sa demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 1 100 000 euros faite dans ses conclusions d'appelant,

- que s'agissant de la parcelle [Cadastre 17], Mme [E] confond droit de propriété et servitude de passage, qu'elle indique à plusieurs reprises qu'elle bénéficierait d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 17], ce qui rend inopérants tous ses développements sur l'usucapion, qu'en tout état de cause l'usucapion évoquée n'a aucun sens puisqu'elle indique que c'est la SCI La renardière et non elle-même qui disposerait de la servitude de passage sur cette parcelle, que Mme [E] ne rapporte pas le moindre commencement de preuve d'une prescription acquisitive,

- que Mme [E] est mal fondée à soutenir qu'elle est enclavée alors qu'elle ne rapporte pas la preuve que la commune de [Localité 22] a mis un terme à la tolérance de passage, que l'enclave résulte d'une situation créée par la SCI La renardière, que Mme [E] est uniquement propriétaire du lot n° 476 issu de l'assiette foncière de la copropriété SCI La renardière constituée par les parcelles [Cadastre 15], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11] et [Cadastre 3] que ce sont les travaux successifs engagés par les différents propriétaires de cette SCI qui ont supprimé l'accès commun qui existait pour accéder à la voie publique.

Dans ses conclusions d'intimée déposées et notifiées par le RPVA le 16 avril 2020, la Métropole [Localité 24] demande à la cour, au visa des articles 901 et suivants du code de procédure civile :

- de confirmer le jugement rendu le 30 septembre 2019 en ce qu'il a prononcé sa mise hors de cause,

- en toutes hypothèses, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [E] à démolir les deux murs de soutènement et le portail qu'elle a fait construire sur la parcelle [Cadastre 17] et à remettre les lieux en l'état dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai, pendant six mois au-delà desquels il sera à nouveau statué;

- de débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes dirigées contre elle,

- de condamner Mme [E] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Me Jean-François Jourdan.

La Métropole [Localité 24] argue :

- que Mme [E] n'a pas interjeté appel du chef de jugement la mettant hors de cause, qu'ainsi elle n'est pas fondée à remettre en cause ce point, alors qu'elle demande dans ses conclusions que la Métropole soit déboutée de ses demandes concernant la parcelle [Cadastre 17],

- qu'elle a vendu la parcelle [Cadastre 17] à la commune de [Localité 22].

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 20 décembre 2022.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions de la commune de [Localité 22] et de la Métropole de [Localité 24] comporte des demandes de « constater » qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens, si bien que la cour qui ne les a pas reprises dans l'exposé du litige, n'en est pas saisie.

Sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 17]

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Mme [E] se prévaut principalement, de la prescription acquisitive de la parcelle [Cadastre 17], pour s'opposer aux demandes de démolition des empiètements, formées par la commune de [Localité 22], subsidiairement, de l'état d'enclave du lot numéro 476 lui appartenant.

Aux termes de l'article 2258 du code civil, la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

L'article 2261 du même code énonce que pour prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, pendant la durée de trente ans pour la propriété immobilière, selon l'article 2272.

Mme [E] justifie de ses droits par la production de l'acte de cession de cent vingt parts sociales de la SCI dénommée HLM La Renadière (et pas La renardière comme indiqué dans les conclusions de la commune de [Localité 22]) intervenu le 2 juin 1975 au profit de M. [V] [R] et Mme [B] [E] son épouse, ces cent vingt parts sociales correspondant au lot numéro 476 situé au sein du groupe d'habitations dénommé « Hameaux La Renadière deuxième tranche », ainsi désigné :

« Une maison individuelle de type 4B (')

La parcelle de terrain sur laquelle elle sera édifiée, cadastrée section [Cadastre 12] lieudit [Adresse 20], pour une superficie de quatre cent quarante-six mètres carrés.

Le tout figurant au plan de masse de l'ensemble immobilier « Les résidences [Localité 21] » sous l'indication D 197.

Et les cinquante-huit/millièmes des parties communes du groupe d'habitations « Les Hameaux la Renadière deuxième tranche ».

Et les cinq cent quatre-vingt-un/dix millièmes des parties communes du dit ensemble immobilier ».

Il ressort de l'ensemble des pièces examinées, ce qui est notamment confirmé par les pièces n° 9 et 10 produites par la Métropole de [Localité 24], que des divisions et modifications parcellaires sont intervenues et que le lot numéro 476 ci-dessus désigné comme étant la maison de Mme [E] depuis le prononcé du divorce, sans que cela soit discuté par la commune de [Localité 22], est aujourd'hui situé avec d'autres dépendant du même groupe d'habitations, sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 8], laquelle jouxte la parcelle cadastrée section [Cadastre 17].

La Commune de [Localité 22] justifie avoir fait l'acquisition de la parcelle cadastrée section [Cadastre 17] le 17 juillet 2018 de la Métropole de [Localité 24], laquelle l'avait acquise avec d'autres le 18 mai 2009, de l'association syndicale La Lauette, elle-même devenue propriétaire ensuite d'un échange intervenu par acte notarié du 21 mai 1981 concernant notamment la parcelle anciennement cadastrée section [Cadastre 13] d'une contenance de 2 ares 35 centiares devenue [Cadastre 17] d'une contenance de 1 are 66 centiares, étant précisé que l'acte notarié du 21 mai 1981 indique que cette parcelle avec d'autres, fait partie de l'assiette foncière de l'ensemble immobilier dénommé « Les résidences [Localité 21] », dont le lot numéro 476 de Mme [E] dispose de millièmes et dont les statuts ne sont pas communiqués, s'agissant du règlement général et cahier des charges du 13 décembre 1972 avec état de division parcellaire visé dans l'acte de cession de parts sociales au profit de M. [R] et Mme [E].

A l'appui de sa prétention selon laquelle elle s'est comportée en propriétaire de la parcelle [Cadastre 17] depuis l'origine, Mme [E] verse aux débats plusieurs pièces.

Les témoignages qui évoquent tous un « passage » ou un « accès » par le haut autorisé, ne permettent néanmoins pas de rapporter la preuve que Mme [E] et son époux postérieurement à l'acquisition des parts sociales correspondant au lot numéro 476 en juin 1975, puis Mme [E] seule, se sont comportés comme propriétaires de la parcelle par laquelle ils accédaient à la maison.

Il en est de même de la délibération du conseil d'administration de la SCC Frais Vallon du 4 octobre 1979, statuant sur une demande de M. [R] et l'acceptant, mais dont le contenu n'est pas précisé.

Quant au procès-verbal de constat établi le 17 décembre 2008, l'huissier y notait : « La maison ne bénéficie d'aucun accès véhicule puisqu'une barrière métallique est ancrée dans le sol à proximité du portail de sa maison. On pénètre dans la propriété [E] par un portail métallique à double battant qui ouvre sur une rampe béton qui s'étend jusqu'à l'escalier de desserte de la maison, située en contrebas, au milieu de la parcelle. (') ».

Aux termes des plans de situation des lieux sur lesquels sont matérialisées les parcelles et du procès-verbal d'huissier du 12 octobre 2015, produit par la commune de [Localité 22], les piliers du portail sont situés sur la parcelle [Cadastre 17] pour le pilier de gauche comportant le numéro 47 lorsqu'on y fait face en partie haute, et le pilier de droite sur la parcelle [Cadastre 16].

Cela est à mettre en lien avec la demande de Mme [E] adressée au maire de [Localité 22], le 23 avril 2012, en ces termes : « J'envisage de réaliser des travaux dans ma propriété située à [Localité 21] : créer un espace pour stationner mon véhicule à l'intérieur de ma propriété (') Comme vous pouvez le constater sur les photos ci-jointes, l'accès à mon domicile est aujourd'hui impossible ». Il lui a été répondu que deux hypothèses allaient être examinées :

- soit l'instauration d'une servitude de passage par la commune à son profit (en tenant compte de la cession à venir de la parcelle [Cadastre 17] par la Métropole de [Localité 24] à la commune), avec déplacement du portail en limite de propriété et indication que « l'arceau actuellement fixé à l'entrée de la parcelle [Cadastre 17] sera remplacé par un arceau escamotable pour lequel une clef sera mise à votre disposition à usage exclusif »,

- soit la cession d'une partie de la parcelle [Cadastre 17] au droit du lot 476 et l'installation d'une servitude de passage par la commune à son profit, sans déplacement du portail.

Au regard de l'ensemble de ces éléments et même s'il est établi qu'il existe sur la parcelle [Cadastre 17], un portail construit depuis plusieurs années sans précision de la date exacte, mais qui ne peut servir à l'accès en voiture depuis plusieurs années sans précision de la date exacte et en tout état de cause en 2008, Mme [E] propriétaire du lot numéro 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8] ne démontre pas avoir prescrit paisiblement pendant trente ans, en tant que propriétaire, la propriété de la parcelle voisine [Cadastre 17], ce qui est en outre contradictoire avec le fait qu'elle soutienne qu'elle disposait d'un droit de passage sur une portion de la parcelle [Cadastre 17], sans contestation de l'association syndicale, puis de la Métropole de [Localité 24] après avoir acquis le terrain.

Sur la situation d'enclave, l'article 682 du code civil énonce : « Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner. »

Mme [E] soutient que l'accès avec une voiture correspond à l'usage normal d'un fonds destiné à l'habitation, que si les limites du lot numéro 476 arrivent bien en bordure de la voie publique, le terrain est très en pente de sorte qu'aucun accès direct par la voie publique ne peut être concevable, qu'aucune voie ne peut directement desservir le pavillon ni par le haut ni par le bas.

Selon le procès-verbal de constat établi le 17 décembre 2008 produit par Mme [E], la maison située sur le lot numéro 476, borde l'avenue Maurice Langlet au Nord, mais aussi au Sud, que l'accès principal se fait par le Nord. En 2008, l'huissier notait : « La maison ne bénéficie d'aucun accès véhicule puisqu'une barrière métallique est ancrée dans le sol à proximité du portail de sa maison. On pénètre dans la propriété [E] par un portail métallique à double battant qui ouvre sur une rampe béton qui s'étend jusqu'à l'escalier de desserte de la maison, située en contrebas, au milieu de la parcelle. (') Le jardin est bordé au Sud par un mur de soutènement, sous lequel s'étend un talus en friche très pentu qui descend sur plusieurs mètres jusqu'au [Adresse 19]. »

Un rapport d'expertise judiciaire établi le 15 février 2011 par M. [M] [P] sapiteur désigné par M. [Z] [D], lui-même désigné par le tribunal de grande instance de Nice par jugement du 7 septembre 2009 dans le cadre du partage de l'indivision post divorce, décrit ainsi la maison : « maison jumelée par un seul côté sur un terrain en copropriété avec jouissance privative (') L'accès principal de la maison s'effectue depuis la [Adresse 25] par un sentier qui se termine par un escalier assez raide sur environ 100 ml. (') L'accès est difficile car la villa est située à flanc de colline sans accès véhicule. Seul un escalier escarpé dessert par le haut la villa. Il existe une possibilité d'en créer un, beaucoup plus court, depuis la route au Sud. Toutefois ce dernier n'existe pas actuellement. Le stationnement reste aisé mais les véhicules sont très éloignés de la maison et il n'existe aucun visuel dessus. D'après le cadastre il semble exister une aire de stationnement en bordure de voie au-dessus de la maison. Mais lors de la réunion sur place Mme [E] a précisé que les voisins s'étaient accaparés cette aire de stationnement ».

La commune de [Localité 22] e a évoqué en juin 2012, deux hypothèses, soit d'autoriser le passage, soit de céder une partie de la parcelle [Cadastre 17], mais n'y a pas donné suite après avoir fait l'acquisition de la parcelle [Cadastre 17] en juillet 2018, et le présent litige est né compte tenu des travaux engagés et poursuivis par Mme [E] sur les parcelles [Cadastre 17] et [Cadastre 16].

En l'état de ces pièces il convient de conclure que Mme [E] démontre qu'elle ne peut accéder en voiture à son lot, ce que la jurisprudence aujourd'hui considère comme correspondant à l'usage normal d'un lot à usage d'habitation.

Les pièces produites ne permettent pas de déterminer si le lot 476, compte tenu de sa configuration de « villa située à flanc de colline sans accès véhicule », est susceptible d'accueillir un véhicule en stationnement, seule cette hypothèse permettant d'envisager un désaclenvament.

Il convient donc d'ordonner avant dire droit une mesure d'expertise afin d'avoir les éléments techniques permettant de statuer d'une part sur l'existence d'une possibilité de stationnement sur le lot 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8] et dans l'hypothèse positive, des modalités de désenclavement possibles.

Sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16]

Même si cette prétention ne figure pas dans le dispositif des conclusions de Mme [E], mais seulement dans les motifs de ses conclusions, la cour est saisie de la question de la recevabilité de la demande de la commune de [Localité 22] comme portant atteinte à l'autorité de la chose jugée par le jugement du 13 mars 2015.

En effet, la commune de [Localité 22] a interjeté appel sur ce point en opposant :

- que le précédent jugement est en réalité un jugement d'irrecevabilité pour défaut de qualité à agir, même s'il est mentionné « déboute », ce qui ne l'empêche pas de réintroduire une action,

- qu'il n'y a pas d'identité de cause entre les deux actions, dès lors que le précédent jugement n'a pas tranché ses demandes au regard de son titre de propriété, mais uniquement par rapport à des pièces justifiant de sa possession du terrain litigieux, soit deux causes différentes : une action possessoire contre une action pétitoire ici,

- que le précédent jugement n'a pas tranché une contestation puisqu'il n'a pas désigné Mme [E] comme propriétaire, qu'il n'a fait que rejeter une demande de suppression des ouvrages,

- que le précédent jugement était rendu en l'état,

- que le précédent jugement est non avenu faute d'avoir été signifié en application de l'article 478 du code de procédure civile,

- que la fin de non-recevoir soulevée par Mme [E] est irrecevable au regard de la règle de l'estoppel : en l'espèce par son argumentation, Mme [E] a implicitement mais nécessairement renoncé à se prévaloir de l'autorité attachée au jugement du 13 mars 2015.

Selon les dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Aux termes de l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans le dispositif.

En l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que par assignation du 17 juin 2014, la commune de [Localité 22] a saisi le tribunal de grande instance de Nice, pour obtenir l'expulsion de Mme [E] de la parcelle [Cadastre 16], condamner Mme [E] à démolir les constructions édifiées sur la parcelle [Cadastre 16], condamner Mme [E] à payer une indemnité d'occupation mensuelle jusqu'à libération de la parcelle [Cadastre 16].

Par jugement du 13 mars 2015 réputé contradictoire, le tribunal de grande instance de Nice a débouté la commune de [Localité 22] de ses demandes, aux motifs que la commune de [Localité 22] ne rapporte pas la preuve que la parcelle [Cadastre 16] ferait partie de son domaine privé, que l'empiètement allégué n'est démontré que par des documents et plans émanant de la commune, qu'il n'est produit aucun constat d'huissier, aucun plan ou rapport contradictoire de géomètre.

La commune de [Localité 22] a interjeté appel de cette décision et par ordonnance du 8 octobre 2015, rendue au contradictoire de Mme [E] qui avait constitué avocat, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel faute de dépôt des conclusions d'appelant dans le délai imparti par l'article 908 du code de procédure civile.

Dans l'assignation du 5 décembre 2016 à l'origine de la présente instance, la commune de [Localité 22] formule exactement les mêmes demandes à savoir l'expulsion, la démolition, l'indemnité d'occupation. En dernier lieu, elle réclame toujours l'expulsion et la démolition, sur le fondement des articles 544, 545 et 555 du code civil, en arguant d'empiètements sur sa parcelle.

Cependant, elle s'oppose aussi, reconventionnellement aux prétentions de Mme [E], laquelle revendique la propriété de partie de la parcelle [Cadastre 16], acquise par prescription trentenaire.

Il y a donc lieu de conclure que l'instance du fait de la demande reconventionnelle formée par Mme [E] a une nature différente de celle tranchée par le jugement du 13 mars 2015, puisqu'elle tend désormais à statuer sur la propriété de la parcelle [Cadastre 16], alors qu'elle ne tendait précédemment qu'à statuer sur des atteintes au droit de propriété alléguées par la commune de [Localité 22].

En conséquence, Mme [E] sera déboutée de son exception d'irrecevabilité des demandes de la commune de [Localité 22] comme s'opposant à l'autorité de la chose jugée du jugement du 13 mars 2015 et le jugement appelé sera infirmé sur ce point.

Mme [E] se prévaut de la prescription acquisitive de la bande de terrain occupée sur la parcelle [Cadastre 16].

La commune de [Localité 22] de son côté, verse aux débats l'acte notarié de vente à son profit, du 2 septembre 2000, des parcelles [Cadastre 14] et [Cadastre 16], par M. [Y] [U]-[T] et M. [I] [U], lesquels les avaient reçues dans la succession de Mme [H] [O] décédée le 3 juillet 1998, laquelle les avaient reçues dans la succession de son père décédé le 23 juin 1968.

La parcelle [Cadastre 16] confronte au Sud la parcelle [Cadastre 17] et à l'Est le lot numéro 476 de Mme [E], situé sur la parcelle [Cadastre 8].

Mme [E] qui ne conteste pas les empiètements reprochés, ne produit aucune pièce de nature à démontrer qu'elle s'est comportée en propriétaire de la bande de terre occupée sur la parcelle [Cadastre 16], alors qu'il ressort du rapport de police municipale du 23 août 2012, que les travaux de terrassement étaient en cours en juillet 2012, pour créer une descente avec une pente plus douce qu'auparavant et une plateforme de stationnement au niveau du mur de soutènement, proche de l'habitation et qu'en août 2012 une clôture a été érigée depuis le portail d'entrée en haut jusqu'en bas de manière linéaire, en s'appropriant d'une partie de la parcelle [Cadastre 16].

Ainsi, Mme [E] propriétaire du lot numéro 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8] ne démontre pas avoir prescrit paisiblement pendant trente ans, en tant que propriétaire, la propriété de la bande de terrain occupée sur la parcelle voisine [Cadastre 16].

Le jugement appelé sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [E] de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire de la bande de terrain occupée sur la parcelle [Cadastre 16].

Dès lors, la demande d'expertise formée pour donner toute précision et avis sur les limites de son emprise, n'a pas d'objet.

Aux termes de la pièce numéro 1 de la commune de [Localité 22], confirmée par le rapport de police municipale du 4 mars 2014 (pièce numéro 7 de la commune de [Localité 22]) et le procès-verbal de constat d'huissier du 12 octobre 2015, précédemment cités, le pilier de droite du portail, un mur de soutènement et une clôture ont été érigés sur la parcelle [Cadastre 16].

En application des articles 544 et 545 du code civil précités, la commune de [Localité 22] est donc bien fondée, pour retrouver la libre jouissance de sa parcelle, d'obtenir l'expulsion de Mme [E], occupante sans droit ni titre, ainsi que sa condamnation à démolir le mur de soutènement et la clôture qu'elle a fait construire sur la parcelle [Cadastre 16] et à remettre les lieux en état, sous astreinte, sans qu'il soit besoin d'accorder à la commune de [Localité 22], le concours de la force publique, au regard de la fixation d'une astreinte.

Sur les demandes accessoires

Au regard de la nature mixte du présent arrêt, il convient de réserver à statuer sur les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mixte,

Sur la parcelle [Cadastre 16],

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il :

- a dit que le jugement du 13 mars 2015 a acquis l'autorité de la chose jugée,

- a déclaré irrecevable l'ensemble des demandes de la commune de [Localité 22] dans son assignation du 5 décembre 2016 au titre de la parcelle [Cadastre 16], consistant à être reconnue propriétaire de la parcelle [Cadastre 16] et à voir ordonner la démolition des ouvrages qui y ont été construits par Mme [B] [E],

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [B] [E] de son exception d'irrecevabilité des demandes de la commune de [Localité 22] concernant la parcelle [Cadastre 16] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22], comme s'opposant à l'autorité de la chose jugée du jugement du 13 mars 2015 ;

Déboute Mme [B] [E] de sa demande tendant à l'acquisition prescriptive de la parcelle [Cadastre 16] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22] ;

Ordonne l'expulsion de Mme [B] [E] de la parcelle cadastrée [Cadastre 16] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22] ;

Condamne Mme [B] [E] à démolir le mur de soutènement et la clôture qu'elle a fait construire sur la parcelle [Cadastre 16] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22] et à remettre les lieux en état ;

Assortit l'expulsion et la condamnation à démolir et remettre en état, d'une astreinte de 50 euros (cinquante euros) par jour de retard passé ce délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt ;

Sur la parcelle [Cadastre 17],

Déboute Mme [B] [E] de sa demande tendant à l'acquisition prescriptive de la parcelle [Cadastre 17] sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22] ;

Avant dire droit sur la situation d'enclave du lot 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8], ordonne une mesure d'expertise judiciaire et commet pour y procéder

[L] [X]

géomètre expert

SGE LEVIER-CASTELLI [Adresse 7]

[Adresse 7]

Tél : [XXXXXXXX02] Fax : [XXXXXXXX01]

Mèl : [Courriel 18]

Avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux, se faire remettre tous documents utiles,

- fournir les éléments techniques permettant de statuer sur l'existence d'une possibilité de stationnement sur le lot 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8],

- dans l'hypothèse positive, rechercher les solutions possibles pour désenclaver le lot 476 situé sur la parcelle [Cadastre 8], sise sur le site de la « [Localité 21] » lieudit [Localité 23] à [Localité 22], et indiquer le trajet le plus court de la voie publique à l'emplacement de stationnement en le fixant dans l'endroit le moins dommageable au fonds servant,

- indiquer l'assiette, la largeur, le tracé et les conditions d'aménagement du passage ainsi déterminé, et établir le plan, si plusieurs tracés apparaissent possibles,

- fournir toutes précisions permettant de déterminer celui qui serait le plus court et le moins dommageable,

- préciser en fonction des emprises et des travaux d'aménagement qui seraient nécessaires pour l'établissement de ce passage, les éléments d'évaluation des indemnités proportionnées aux dommages qu'il peut occasionner ;

Fixe à la somme de 2 000 euros (deux mille euros) la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être consignée par Mme [B] [E], au greffe de la cour (régie) dans le délai de DEUX MOIS à compter de la présente décision, sans autre avis ;

Dit que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque, à moins que le conseiller, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de caducité. L'instance sera poursuivie sauf à ce qu'il soit tiré toute conséquence de l'abstention ou du refus de consigner ;

Dit que lors de la première réunion, ou au plus tard de la seconde réunion des parties, l'expert dressera un programme de ses investigations et évaluera d'une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et débours ;

Dit qu'à l'issue de cette réunion, l'expert fera connaître au conseiller, la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d'une consignation complémentaire ;

Dit que l'expert devra déposer au greffe rapport de ses opérations dans le délai de SIX MOIS à dater de la consignation, sauf prorogation dûment autorisée, et qu'il en délivrera copie à chacune des parties en cause ;

Dit qu'au cas où les parties viendraient à se concilier, il devra constater que sa mission est devenue sans objet et en faire rapport ;

Dit qu'en cas d'empêchement, refus ou négligence, l'expert commis pourra être remplacé par ordonnance rendue sur simple requête de la partie la plus diligente ;

Désigne le conseiller de la mise en état de la chambre 1-5 pour contrôler les opérations d'expertise ;

Réserve les dépens et les demandes au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/16029
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;19.16029 ?
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