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02/02/2023 | FRANCE | N°19/16544

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 02 février 2023, 19/16544


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 02 FEVRIER 2023

PH

N°2023/47













Rôle N° RG 19/16544 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFCKA







Société DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER VILLA MEDICIS





C/



[V] [G]































Copie exécutoire délivrée le :

à :



l'AARPI ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD
r>

Me Valérie CARDONA,







Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 16 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04007.







APPELANT



Syndicat des copropriétaires DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER VILLA MEDICIS , [Adresse 1], pris en la...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 02 FEVRIER 2023

PH

N°2023/47

Rôle N° RG 19/16544 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFCKA

Société DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER VILLA MEDICIS

C/

[V] [G]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

l'AARPI ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD

Me Valérie CARDONA,

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 16 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04007.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER VILLA MEDICIS , [Adresse 1], pris en la personne de son syndic en exercice la société AGENCE CAPITAL IMMOBILIER CAPIMMO, exerçant sous le nom commercial CAPIMMO, SARL, ayant son siège social sis, [Adresse 2], prise elle-même en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Me Grégory PILLIARD de l'AARPI ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Christelle LEROY, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIME

Maître [V] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LIFE INVEST FUND 4 INC, de droit étranger, dont le siège social est [Adresse 5], prise en son bureau de liaison sis [Adresse 4], désigné en cette qualité par jugement du Tribunal de Commerce de Fréjus du 23.07.2012 sur conversion du Redressement Judiciaire en date du 30.04.2012, domicilié [Adresse 3], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Valérie CARDONA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, et Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Patricia HOARAU, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Février 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Février 2023.

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller pour Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre empéchée et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte extrajudiciaire du 11 mai 2016, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier situé [Adresse 1], dénommé Villa Médicis (ci-après syndicat des copropriétaires) a formé opposition au paiement du prix de vente des lots n° 88 et 10, appartenant à la société Life invest fund 4 inc, société de droit américain, qui a fait l'objet d'une mesure de liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 23 juillet 2012, lequel a désigné Me [V] [G] en qualité de liquidateur.

L'opposition a été faite à hauteur de la somme de 7 727,50 euros au titre de l'arriéré des charges de copropriété.

Par jugement du 16 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Toulon a :

- débouté Me [V] [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Life invest fund 4 inc, de sa demande tendant à faire déclarer irrégulière l'opposition formée par le syndicat des copropriétaires de la copropriété Villa Médicis par acte extrajudiciaire du 11 mai 2016,

- déclaré cependant inopposables les créances du syndicat des copropriétaires à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc, faute de déclaration de ces dernières,

- dit que ce défaut de déclaration fait disparaitre le privilège immobilier spécial au syndicat des copropriétaires,

- ordonné la mainlevée de l'opposition du 11 mai 2016,

- débouté le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de son syndic en exercice, de toutes ses demandes de condamnation en paiement,

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de son syndic en exercice, à payer à Me [V] [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Life invest fund 4 inc, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires, pris en la personne de son syndic en exercice, aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le tribunal a considéré que :

- l'opposition était régulière, le texte n'imposant pas que des pièces justificatives y soient jointes,

- les créances réclamées correspondent aux exercices 2012 à 2016, une partie des sommes dues est antérieure au jugement du 30 avril 2012 ayant ouvert le redressement judiciaire de la société Life invest fund 4 inc et une partie est postérieure,

- les créances antérieures à l'ouverture de la procédure doivent être déclarées et il n'en est pas justifié, les créances sont donc inopposables à la procédure collective,

- s'agissant des créances postérieures, la société Life invest fund 4 inc n'avait aucune activité économique, ainsi il ne peut être prétendu que le paiement des charges de copropriété était nécessaire au déroulement de la procédure collective ou qu'elles sont la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, l'argumentation suivant laquelle le paiement des charges avait pour vocation de préserver le bien immobilier représentant le gage des créanciers fait une lecture extensive des textes, le syndicat des copropriétaires devait donc les déclarer et il n'en est pas justifié, les créances postérieures sont donc inopposables à la procédure collective.

Le syndicat des copropriétaires a relevé appel de ce jugement, le 14 octobre 2019, en vue de sa réformation ou annulation en ce qu'il :

- a déclaré inopposables ses créances à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc, faute de déclaration de ces dernières,

- a dit que ce défaut de déclaration fait disparaitre le privilège immobilier spécial au syndicat des copropriétaires de la copropriété Villa Médicis,

- a ordonné la mainlevée de l'opposition du 11 mai 2016,

- l'a débouté de toutes ses demandes de condamnation en paiement,

- l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,

- l'a condamné à payer à Me [V] [G] es qualités, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamné aux dépens,

- a rejeté ses prétentions tendant à :

- débouter Me [V] [G] ès qualités de l'ensemble de ses prétentions,

- valider l'opposition pratiquée le 11 mai 2016 à hauteur de la somme de 7 727,50 euros,

- condamner Me [V] [G] ès qualités à lui payer la somme de 7 443,55 euros au titre des charges de copropriété impayées, arrêtées au 11 mai 2016,

- condamner la société Life invest fund 4 inc représentée par son liquidateur à lui verser la somme de 210,49 euros au titre de l'opposition outre la somme de 73,46 euros au titre de sa mainlevée,

- condamner la société Life invest fund 4 inc représentée par son liquidateur à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner la société Life invest fund 4 inc représentée par son liquidateur à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens distraits au profit de Me Grégory Pilliard, avocat aux offres de droits.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 6 novembre 2020, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :

- dire et juger régulière l'opposition pratiquée, le 11 mai 2016, pour le compte du syndicat des copropriétaires entre les mains de Me [V] [G] à hauteur de la somme de 7 727,50 euros et confirmer, en ce sens, le jugement rendu, le 16 septembre 2019,

- dire et juger que la créance d'un montant de 7 727,50 euros, que le syndicat des copropriétaires détient à l'encontre de la société Life invest fund 4 inc, correspond à des charges de copropriété impayées, appelées après le 30 avril 2012, devant être regardées comme des créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie à la société Life invest fund 4 inc, pendant cette période, au sens de l'article L. 622-17 du code de commerce et réformer, en ce sens le jugement,

- réformer le jugement en ce qu'il a notamment jugé inopposables les créances du syndicat des copropriétaires à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc, faute de déclaration de cette dernière, jugé que ce défaut de déclaration a fait disparaitre le privilège immobilier spécial au syndicat des copropriétaires, ordonné la mainlevée de l'opposition du 11 mai 2016 et débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,

- valider l'opposition pratiquée le 11 mai 2016, pour le compte du syndicat des copropriétaires entre les mains de Me [V] [G] à hauteur de la somme de 7 727,50 euros et réformer, en ce sens, le jugement rendu, le 16 septembre 2019,

- condamner la société Life invest fund 4 inc, représentée par son liquidateur judiciaire, Me [V] [G], à lui payer la somme de 7 443,55 euros au titre des charges de copropriété impayées, arrêtée au 11 mai 2016 et réformer, en ce sens, le jugement,

- condamner la société Life invest fund 4 inc, représentée par son liquidateur judiciaire, Me [V] [G], à lui payer la somme de 210,49 euros au titre de l'opposition du 11 mai 2016, outre la somme de 73,46 euros au titre de sa mainlevée et réformer, en ce sens, le jugement,

- condamner la société Life invest fund 4 inc, représentée par son liquidateur judiciaire, Me [V] [G], à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et réformer, en ce sens, le jugement,

- débouter Me [V] [G], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Life invest fund 4 inc, de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société Life invest fund 4 inc, représentée par son liquidateur judiciaire, Me [V] [G], à lui payer la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à Me [V] [G], es qualités la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, le syndicat des copropriétaires fait essentiellement valoir :

- que l'opposition délivrée comportait huit pages et les indications exigées par l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967, ainsi que le détail des sommes déclarées selon leur nature et les lots objets de la vente, que ni les dispositions de l'article 5-1, ni la jurisprudence n'imposent au syndicat des copropriétaires d'annexer à son opposition l'ensemble des appels de fonds,

- qu'il ressort des dispositions combinées des articles L. 641-13 et L. 622-17 du code de commerce que pour bénéficier du statut de créance postérieure non soumise à l'obligation de déclaration au passif, la créance doit être chronologiquement postérieure au jugement d'ouverture et régulièrement née en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, que la jurisprudence considère que les charges de copropriété appelées auprès d'une société en procédure collective, nées postérieurement au jugement d'ouverture, constituent des créances postérieures dès lors qu'elles ont vocation à permettre la conservation de l'actif du propriétaire et correspondent à une contrepartie d'une prestation fournie par le syndicat des copropriétaires, qu'il s'ensuit que la créance d'un montant de 7 727,50 euros correspondant à des charges de copropriété impayées appelées après le 30 avril 2012, doivent être regardées comme des créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie à la société Life invest fund 4 inc,

- que les dispositions de l'article L. 622-17 I du code de commerce applicables au dossier, n'obligent pas afin de privilégier les créances postérieures, qu'elles soient liées à une prestation fournie pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours, comme le prévoient les dispositions de l'article L. 641-13, que cette position est confirmée par la jurisprudence,

- que sont produits les procès-verbaux de l'assemblée générale des copropriétaires adoptant les budgets au titre des charges appelées objet de l'opposition, que la méconnaissance par la société Life invest fund 4 inc de son obligation de régler les charges de copropriété, l'a contraint à former opposition, dont les frais doivent donc être mis à sa charge,

- que la cour déboutera Me [V] [G] ès qualités de la fin de non-recevoir tirée de l'interdiction des poursuites individuelles, le syndicat des copropriétaires agissant dans le cadre de l'article L. 641-13, au titre des charges nées postérieurement à l'ouverture de la procédure collective,

- que l'instance introduite par Me [V] [G] ès qualités nuit à la copropriété qui n'a pas bénéficié des fonds devant lui permettre d'assurer la conservation et l'entretien de l'immeuble,

- que Me [V] [G] ès qualités soutient que la créance privilégiée pourrait être fixée à 428,80 euros, ce qu'il démontre que l'appel est fondé et qu'aucune condamnation aux frais irrépétibles ou dépens ne saurait être prononcée contre lui.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 8 novembre 2022, Me [V] [G] ès qualités demande à la cour :

Vu les dispositions des articles 19-1 et 20 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée par la loi du 24 mars 2014,

Vu les dispositions de l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967,

Vu les dispositions de l'article L. 622'26 du code de commerce,

Vu les dispositions de l'article L. 641-13 du code de commerce, dans sa version applicable au litige (redressement judiciaire du 30 avril 2012 et conversion en liquidation judiciaire du 23 juillet 2012),

- de recevoir Me [V] [G] es qualités en son appel incident,

- de le dire bien fondé,

- d'infirmer le jugement de première instance mais uniquement en ce qu'il a dit l'opposition régulière et, statuant de nouveau, dire et juger l'opposition formée par le syndicat des copropriétaires le 11 mai 2016 irrégulière faute de détailler suffisamment les sommes réclamées et donc de respecter les dispositions de l'article 5'1 du décret du 17 mars 1967 et la jurisprudence attachée,

- de confirmer le jugement de première instance en toutes ses autres dispositions et au besoin, statuant de nouveau :

- retenir que la créance du syndicat des copropriétaires a perdu son privilège pour être uniquement chirographaire,

- ordonner la main levée de l'opposition formée par le syndicat des propriétaires le 11 mai 2016,

- retenir que la créance alléguée par le syndicat des copropriétaires au titre des charges de copropriété postérieures au jugement d'ouverture, appartient à la catégorie des créances postérieures non éligibles au traitement préférentiel, au sens des dispositions de l'article L. 641'13 du code de commerce et des jurisprudences multiples produites par le liquidateur judiciaire es qualités,

- retenir que les dispositions de l'article L. 622-17 du code de commerce sont inapplicables à la totalité de la créance alléguée et ne pourraient l'être qu'au titre de la créance issue de la période d'observation antérieure au prononcé de la liquidation judiciaire, à savoir uniquement pour la somme de 428,80 euros sur les 7 443,55 euros réclamés, la différence soit la somme de 7 014,75 euros demeurant une créance postérieure à la liquidation judiciaire non éligible au traitement préférentiel et donc inopposable à la procédure collective,

- rejeter en ce sens les moyens d'appel soutenus par le syndicat des copropriétaires comme étant inapplicables au cas d'espèce,

- prononcer l'inopposabilité à la procédure collective de la créance alléguée par le syndicat des copropriétaires à hauteur de la somme de 7 014,75 euros, déduction faite de la somme de 428,80 euros issue de la période d'observation, faute d'avoir été régulièrement déclarée selon les dispositions de l'article L. 622-24 du code de commerce, applicable en liquidation judiciaire au titre de l'article L. 641'3,

- débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation en paiement de la créance alléguée, comme étant irrecevable au vu du principe d'interdiction des poursuites individuelles au sens des dispositions de l'article L. 622'21, applicables en liquidation judiciaire selon les dispositions de l'article L. 641-3 du code de commerce,

- débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, laquelle est injustifiée et infondée,

- condamner le syndicat des copropriétaires à payer lui payer ès qualités la somme de 1 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance,

Dans tous les cas,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions plus amples et contraires,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer ès qualités la somme de 5 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens au titre de la procédure d'appel.

Il fait valoir en substance :

- que pour pouvoir être régulière et emporter règlement, l'opposition doit être justifiée en son principe, sa nature et son quantum et non uniquement respecter le formalisme prescrit, qu'il n'est pas envisageable de régler un syndicat des copropriétaires sur sa simple affirmation de charges qui seraient dues sans pouvoir le vérifier, que le syndic n'a pas détaillé les sous-catégories de charges article 10 et article 30, que le syndicat des copropriétaire n'ignore pas cette carence car il tente de la pallier en produisant les justificatifs de charges, que cette production est tardive, que cette position stricte a été réaffirmée à plusieurs reprises par la jurisprudence,

- que la sanction de l'irrégularité de l'opposition est la perte du privilège et entraîne sa mainlevée,

- que le caractère postérieur de la créance alléguée n'est pas contestable ni contesté, que son moyen d'inopposabilité est tiré du texte de l'article L. 641-13 du code de commerce en sa version applicable au litige, soit celle issue de l'ordonnance du 18 décembre 2022 (sic mais en réalité 2008),

- qu'à la lecture de cet article dans sa version en vigueur à la date du litige, il existe deux catégories de créances postérieures, celles qualifiées de méritantes et éligibles au traitement préférentiel et les autres, que pour être méritante la créance doit appartenir à l'une des catégories « besoins du déroulement de la procédure », « maintien provisoire de l'activité », « contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant ce maintien de l'activité », qu'en l'espèce il n'y a pas eu maintien de l'activité dans le jugement prononçant la liquidation, qu'en conséquence les charges de copropriété bien que correspondant à des créances nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur n'entrent pas dans la catégorie des créances méritantes, que la jurisprudence confirme cette analyse,

- que l'article L. 622-17 n'est applicable que pour la période allant de l'ouverture du redressement judiciaire jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire, que sur les 7 443,55 euros réclamés, seuls 428,80 euros correspondent à une créance issue de la période d'observation du redressement judiciaire, que seule cette dernière créance pourrait donc potentiellement être concernée par le caractère privilégié des créances postérieures, pour le surplus, seul le texte relatif à la liquidation judiciaire, soit l'article L. 641-13 est applicable,

- que les jurisprudences citées par la partie adverse sont isolées par rapport aux très nombreuses jurisprudences qu'il produit, que certains arrêts sont hors débat dès lors que la question n'a pas été débattue dans un cas, et qu'il s'agissait d'un redressement judiciaire dans l'autre cas,

- que les créances postérieures autres que celles mentionnées au I de l'article L. 622-17 sont soumises aux dispositions de l'article, que les délais courent à compter de la date d'exigibilité de la créance, que la sanction de l'absence de déclaration est l'inopposabilité de la créance à la procédure collective.

- que la créance postérieure du syndicat des copropriétaires n'étant pas éligible au traitement préférentiel, l'action se heurte au principe d'interdiction des poursuites individuelles, que la règle de l'arrêt des poursuites individuelles constitue une fin de non-recevoir,

- qu'au vu de l'irrégularité de fond de l'acte d'opposition, il n'a fait qu'user ès qualités, de son droit d'agir.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 novembre 2022.

L'arrêt sera contradictoire, puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la régularité de l'opposition formée

Selon les dispositions de l'article 20 I de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 dans sa rédaction à la date de l'opposition faite le 11 mai 2016, « Lors de la mutation à titre onéreux d'un lot, et si le vendeur n'a pas présenté au notaire un certificat du syndic ayant moins d'un mois de date, attestant qu'il est libre de toute obligation à l'égard du syndicat, avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l'immeuble par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété. Avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut former au domicile élu, par acte extrajudiciaire, opposition au versement des fonds dans la limite ci-après pour obtenir le paiement des sommes restant dues par l'ancien propriétaire. Cette opposition contient élection de domicile dans le ressort du tribunal de grande instance de la situation de l'immeuble et, à peine de nullité, énonce le montant et les causes de la créance. Le notaire libère les fonds dès l'accord entre le syndic et le vendeur sur les sommes restant dues. A défaut d'accord, dans un délai de trois mois après la constitution par le syndic de l'opposition régulière, il verse les sommes retenues au syndicat, sauf contestation de l'opposition devant les tribunaux par une des parties. Les effets de l'opposition sont limités au montant ainsi énoncé. '. L'opposition régulière vaut au profit du syndicat mise en 'uvre du privilège mentionné à l'article 19-1. »

L'article 5-1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 à la même date énonce que « Pour l'application des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée, il n'est tenu compte que des créances du syndicat effectivement liquides et exigibles à la date de la mutation. L'opposition éventuellement formée par le syndic doit énoncer d'une manière précise :

1° Le montant et les causes des créances du syndicat afférentes aux charges et travaux mentionnés aux articles 10 et 30 de la loi du 10 juillet 1965 de l'année courante et des deux dernières années échues ;

2° Le montant et les causes des créances du syndicat afférentes aux charges et travaux mentionnés aux articles 10 et 30 de la loi du 10 juillet 1965 des deux années antérieures aux deux dernières années échues ;

3° Le montant et les causes des créances de toute nature du syndicat garanties par une hypothèque légale et non comprises dans les créances privilégiées, visées aux 1° et 2° ci-dessus ;

4° Le montant et les causes des créances de toute nature du syndicat non comprises dans les créances visées aux 1°, 2° et 3° ci-dessus. '. »

Par acte d'opposition signifié à Me [V] [G] en qualité de liquidateur de la société Life invest fund 4 inc, le 11 mai 2016, le syndicat des copropriétaires a fait opposition sur le prix de la vente intervenue entre la société Life invest fund 4 inc et la société Theia, pour le montant de la somme de 7 727,50 euros comprenant le coût de l'acte et le coût de la mainlevée.

Le décompte joint, rédigé en respectant la présentation prévue par l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967, reprend les quatre paragraphes cités en les complétant des montants réclamés au titre de chacun d'eux.

Les montants réclamés sont précisément détaillés s'agissant d'appels budget trimestriels dont la période est indiquée, et de travaux, concernant les lots n° 10 et 88 qui sont distingués, pour les exercices 2014, 2015 et 2016 (visés dans le paragraphe 1°), pour les exercices 2012 et 2013 (visés par le paragraphe 2°) ainsi que des frais (visés dans le paragraphe 4°).

Il en ressort que l'opposition qui comporte le détail des sommes réclamées selon leur nature en précisant chacun des lots auxquels les sommes sont afférentes, est régulière, aucune autre pièce notamment les appels de fonds, n'étant exigée par les textes précités.

Le jugement appelé sera donc confirmé sur ce point.

Sur le bien-fondé de l'opposition

Me [G] ès qualités, soutient que les créances du syndicat des copropriétaires sont inopposables à la procédure collective, pour n'avoir pas été déclarées conformément aux règles prévues dans le code de commerce.

Aux termes de l'article L. 641-3 du code de commerce dans sa rédaction en vigueur au jour de l'opposition du 11 mars 2016, « Le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux qui sont prévus en cas de sauvegarde par les premier et troisième alinéas du I et par le III de l'article L. 622-7, par les articles L. 622-21 et L. 622-22 par la première phrase de l'article L. 622-28 et par l'article L. 622-30. Le juge-commissaire peut autoriser le liquidateur ou l'administrateur lorsqu'il en a été désigné à payer des créances antérieures au jugement, pour retirer le gage ou la chose légitimement retenue ou encore pour lever l'option d'achat d'un contrat de crédit-bail. ' Les créanciers déclarent leurs créances au liquidateur selon les modalités prévues aux articles L. 622-24 à L. 622-27 et L. 622-31 à L. 622-33'. »

L'article L. 641-13 I à la même date, énonce « Sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire :

-si elles sont nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L. 641-10 ;

-si elles sont nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours décidée par le liquidateur ;

-ou si elles sont nées des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique.

En cas de prononcé de la liquidation judiciaire, sont également payées à leur échéance, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire mentionnées au I de l'article 622-17. »

L'article L. 622-17 précise que « Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance. »

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires réclame le règlement de créances de charges de copropriété échues entre le 1er janvier 2012 (sous réserve d'un solde restant dû antérieur de 180,28 euros) et le 1er avril 2016, à la société Life invest fund 4 inc placée en redressement judiciaire par jugement du 30 avril 2012, puis en liquidation judiciaire par jugement du 23 juillet 2012.

Les créances échues antérieurement à la date du redressement judiciaire sont en dernier lieu, celles appelées le 1er avril 2012.

L'article L. 622-24 du code de commerce dans sa rédaction alors en vigueur énonce : « A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat. Lorsque le créancier a été relevé de forclusion conformément à l'article L. 622-26, les délais ne courent qu'à compter de la notification de cette décision ; ils sont alors réduits de moitié. Les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié sont avertis personnellement ou, s'il y a lieu, à domicile élu. Le délai de déclaration court à l'égard de ceux-ci à compter de la notification de cet avertissement. '.

Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture, autres que celles mentionnées au I de l'article L. 622-17 sont soumises aux dispositions du présent article.

Les délais courent à compter de la date d'exigibilité de la créance. Toutefois, les créanciers dont les créances résultent d'un contrat à exécution successive déclarent l'intégralité des sommes qui leur sont dues dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. .. ».

« Les créances non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus », selon l'article L. 622-26 du code de commerce.

Il n'est pas prétendu ni justifié que les créances antérieures au redressement judiciaire, ont été déclarées à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc dans le délai de deux mois de la publication du jugement d'ouverture, conformément aux prescriptions légales de l'article L. 622-24 du code de commerce.

La créance de charges de copropriété appelées jusqu'au 1er avril 2012 est donc inopposable à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc.

Les créances échues postérieurement, soit à compter du 1er juillet 2012 outre les avances travaux appelées le 3 mai 2012, à une époque où la société Life invest fund 4 inc était en redressement judiciaire, peuvent être qualifiées de créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure de redressement, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période.

En effet, l'objectif d'une procédure de redressement judiciaire est notamment de permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise et l'apurement du passif et il n'est pas contestable que le règlement des charges de copropriété permet de contribuer à l'entretien du bien et par suite à la poursuite de l'activité.

Ces créances bénéficient donc de la dispense de déclaration de créance et auraient dû être payées à leur échéance en application de l'article L 622-17.

S'agissant enfin des créances nées postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire, intervenu le 23 juillet 2012, soit à partir du 1er octobre 2012, elles relèvent de l'article L. 641-13 I précité, qui énonce trois cas limitatifs, dans lesquels une créance peut être dispensée de l'obligation de déclaration à la procédure collective :

- créance née pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L. 641-10,

- créance née en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours décidée par le liquidateur,

- créance née des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique.

En l'espèce, le débiteur est une personne morale.

Si les charges de copropriété peuvent intégrer la catégorie des créances nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, cet article applicable à la liquidation judiciaire, exige que l'activité soit maintenue, ce qui n'est pas le cas.

En conséquence, il ne peut qu'être conclu que la créance de charges de copropriété échue postérieurement au jugement de liquidation judiciaire, n'entre pas dans la catégorie des créances postérieures éligibles au traitement préférentiel de l'article L. 641-13 et doit être déclarée.

Il n'est pas prétendu ni justifié que ces créances ont été déclarées à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc. Elles sont donc inopposables à la procédure collective de la société Life invest fund 4 inc.

Au final, le jugement appelé sera donc confirmé sauf en ce qu'il a déclaré inopposable à la procédure collective la créance échue postérieurement au jugement de redressement judiciaire jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire.

Il est constaté que Me [G] ès qualités reconnaît une créance de charges de copropriété de 428,80 euros correspondant à des charges échues pendant la période d'observation du redressement judiciaire.

Ces charges sont étayées par la production du procès-verbal d'assemblée générale correspondant et les appels de fonds.

Il convient donc de fixer la créance du syndicat des copropriétaires, assortie du privilège immobilier spécial, à la somme de 428,08 euros et de limiter l'opposition sur le prix de vente à ce montant.

L'opposition étant fondée en partie, le syndicat des copropriétaires doit être accueilli dans sa demande concernant les frais de celle-ci, à hauteur de 210,49 euros, outre la somme de 73,46 euros au titre de sa mainlevée, soit au total 283,95 euros au titre des frais liés à l'opposition, nécessaire à la mise en 'uvre du privilège immobilier spécial.

Sur la demande de dommages et intérêts

Selon les dispositions de l'article 1231-6 dernier alinéa du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires, ce qui suppose de rapporter la preuve de la mauvaise foi, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

Au regard de la solution du litige, la résistance à paiement de Me [G] ès qualités, des charges de copropriété échues pour l'essentiel postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire de la société Life invest fund 4 inc, sans respect par le syndicat des copropriétaires des règles prévues en matière de procédure collective, n'est pas démontrée.

Le syndicat des copropriétaires sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 596 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient d'infirmer le jugement appelé dans ses dispositions concernant les dépens et les frais irrépétibles.

Me [G] ès qualités sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, qui seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires les frais exposés pour les besoins de la procédure et non inclus dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris sauf :

- en ce qu'il a déclaré inopposable à la procédure collective la créance échue postérieurement au jugement de redressement judiciaire jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire,

- sur les dépens,

- sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe la créance du syndicat des copropriétaires Villa Médicis sis [Adresse 1], représenté par son syndic, à la somme de 428,08 euros (quatre cent vingt-huit euros et huit centimes) au titre des charges de copropriété et à la somme de 283,95 euros (deux cent quatre-vingt-trois euros et quatre-vingt-quinze centimes) au titre des frais ;

Valide l'opposition du 11 mai 2016 entre les mains de la SCP Nicolas Denjean-Pierret - Amaury Vernange, sur le prix de la vente entre la société Life invest fund 4 inc et la société Theia, à hauteur de ces montants ;

Condamne Me [V] [G], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Life invest fund 4 inc, aux dépens de première instance et d'appel, qui seront employés en frais privilégiés de procédure collective ;

Déboute le syndicat des copropriétaires Villa Médicis sis [Adresse 1], représenté par son syndic, de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/16544
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;19.16544 ?
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