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12/01/2023 | FRANCE | N°19/19089

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 12 janvier 2023, 19/19089


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2023

PH



N° 2023/ 1













N° RG 19/19089 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFJT5







[V] [Y]

[F] [J]





C/



[D] [A]

[G] [L] épouse épouse [A]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me LORENZI



Me TOLLI

NCHI

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Président du tribunal de grande instance de GRASSE en date du 13 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04187.



APPELANTS



Madame [V] [Y]

demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Josyane LORENZI de la SELARL LORENZI ET ASSO...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2023

PH

N° 2023/ 1

N° RG 19/19089 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFJT5

[V] [Y]

[F] [J]

C/

[D] [A]

[G] [L] épouse épouse [A]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me LORENZI

Me TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Président du tribunal de grande instance de GRASSE en date du 13 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04187.

APPELANTS

Madame [V] [Y]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Josyane LORENZI de la SELARL LORENZI ET ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

assistée par Me Jennifer BARANES de l'AARPI ADONIS, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [F] [J]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Josyane LORENZI de la SELARL LORENZI ET ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

assisté par Me Jennifer BARANES de l'AARPI ADONIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [D] [A]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Jean-Michel ADAM, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Madame [G] [L] épouse [A]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée par Me Jean-Michel ADAM, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, pour Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre, empéchée et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [V] [Y] et M. [F] [J] sont propriétaires de deux villas au sein de l'ensemble immobilier sis [Adresse 2], tandis que M. [D] [A] et Mme [G] [L] épouse [A] sont propriétaires d'une villa dans le même ensemble immobilier, soumis au statut de la copropriété et composé des trois villas et d'un immeuble.

M. et Mme [A] ont sollicité et obtenu de l'assemblée générale des copropriétaires l'autorisation d'effectuer des travaux modificatifs de leur villa.

Par ordonnance de référé du 8 décembre 2010 rendue sur assignation de Mme [Y] contre M. et Mme [A] concernant l'exécution de ces travaux, un expert judiciaire a été désigné aux fins, après avoir pris connaissance des pièces versées aux débats, notamment le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 2 mars 2005, des plans et coupes remis à cette assemblée générale, du permis de construire initialement déposé le 14 décembre 2005, la demande de modification du permis de construire déposée le 17 décembre 2008 et le permis de construire délivré le 10 mars 2009 par la mairie de [Localité 4], d'apporter à la juridiction les éléments techniques et d'appréciation lui permettant de déterminer si les travaux sont conformes à ceux qui ont été autorisés par l'assemblée générale du 2 mars 2005, si les travaux tels que réalisés sont susceptibles de causer un préjudice à Mme [V] [Y] en créant notamment des vues importantes sur son lot dénommé « Mas Mecadai ».

M. [K] [W] a déposé son rapport le 10 décembre 2012.

Par exploit du 29 juin 2016, Mme [Y] et M. [J] ont fait assigner M. et Mme [A] devant le tribunal de grande instance de Grasse pour faire juger que les travaux réalisés sur leur villa ne correspondent pas à ceux autorisés par l'assemblée générale du 2 mars 2005 et obtenir la remise en état des lieux sous astreinte.

Par jugement du 13 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- débouté Mme [Y] et M. [J] de leur demande,

- débouté M. et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts,

- condamné Mme [Y] et M. [J] à payer à M. et Mme [A] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le tribunal a considéré :

- que l'expert indique qu'il ne lui a pas été justifié de documents officiels permettant de déterminer avec précision les travaux validés par l'assemblée générale,

- que les demandeurs ne produisent que deux plans, qui ne constituent pas la preuve qu'il s'agit des plans annexés à la demande d'autorisation,

- que les demandeurs ne produisent pas la convocation à l'assemblée générale du 2 mars 2005,

- que les demandeurs ne rapportent pas la preuve que les travaux exécutés ne sont pas conformes à ceux autorisés par l'assemblée générale.

Mme [Y] et M. [J] ont relevé appel de ce jugement, le 16 décembre 2019, en vue de sa réformation, en ce qu'il :

- les a déboutés de leur demande,

- a débouté M. et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts,

- les a condamnés à payer à M. et Mme [A] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 16 juin 2022, Mme [Y] et M. [J] demandent à la cour, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 699 et 700 du code de procédure civile :

- d'infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts,

- de condamner solidairement M. et Mme [A] à remettre les lieux dans l'état dans lesquels ils se trouvaient avant la réalisation des travaux de leur maison sans autorisation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

- de débouter M. et Mme [A] de leurs demandes, fins et prétentions,

- en tout état de cause de condamner solidairement M. et Mme [A] à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au soutien de leur appel, ils font essentiellement valoir :

- que les travaux réalisés par M. et Mme [A] ne sont pas ceux qui ont été autorisés par l'assemblée générale du 2 mars 2005,

- que M. [A] est un professionnel du bâtiment, qui a usé de man'uvres pour tromper les copropriétaires qui n'ont pas pu voter de manière éclairée, qu'ils ont remis des plans différents en vue de l'assemblée générale et pour le permis de construire, qu'ils ont aussi fait preuve de résistance au cours de l'expertise en refusant de remettre les plans de l'existant,

- que de ce fait, les opérations d'expertise ont été menées de manière incomplète et qu'il y a eu un véritable parti pris à leur détriment, alors que l'expertise révèle qu'il y a eu un rehaussement de 32 centimètres de la maison de M. et Mme [A], qui a permis l'aménagement d'un deuxième étage, que l'expert n'a pas obtenu la communication du marché relatif au lot gros 'uvre mais n'en a pas tiré les conséquences, que l'expert n'a pas non plus relevé que le modificatif du permis de construire n'a jamais été soumis au vote des copropriétaires en assemblée générale,

- que ces travaux qui modifient l'aspect extérieur de la villa, n'ont pas été autorisés et que M. et Mme [A] doivent être condamnés à remettre les lieux en l'état,

- que les travaux portent atteinte aux parties communes, créent un préjudice de vue pour Mme [Y], créent un problème d'évacuation des eaux pluviales.

Par conclusions d'intimé déposées et notifiées par le RPVA le 17 juin 2020, M. et Mme [A] demandent à la cour au visa des articles 3 de la loi du 10 juillet 1965 et 954 du code de procédure civile :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [Y] et M. [J] de leurs demandes,

- de réformer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts,

- de condamner Mme [Y] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- de condamner les appelants au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, distraits au profit de la SCP Tollinchi Perret-Vigneron Bujoli-Tollinchi, avocats aux offres de droit.

Ils font valoir en substance :

- que leur villa est une partie totalement et exclusivement privative, qui n'est pas soumis à l'arbitraire des copropriétaires mais seulement au contrôle par ceux-ci de la préservation de leur droit, de la destination de l'immeuble conforme au règlement de copropriété, de la préservation de l'aspect extérieur de l'ensemble immobilier, qu'aucun de ces objectifs n'est poursuivi par les requérants,

- que les demandes sont insuffisamment fondées au regard de l'article 954 du code de procédure civile, la loi du 10 juillet 1965 étant visée sans davantage de précision,

- que les demandeurs ne rapportent pas la preuve des non-conformités alléguées, que les plans approuvés par l'assemblée générale ne sont pas annexés au procès-verbal de l'assemblée générale, difficulté à laquelle a été confronté l'expert, qu'à l'époque Mme [Y] était syndic et secrétaire de l'assemblée générale, qu'à supposer qu'une erreur ait été commise, ce qui n'est pas démontré, cette erreur en reviendrait à Mme [Y],

- subsidiairement, qu'il n'y a pas de grief apparent, que la seule non-conformité par rapport au plan présenté comme celui qui aurait été soumis à l'assemblée générale du 2 mars 2005, qui serait visible de chez Mme [Y], serait une petite fenêtre à deux vantaux au lieu de deux petits fenestrons, c'est dire l'incroyable faiblesse de l'enjeu,

- que cela démontre l'abus de procédure de Mme [Y], demande qu'ils ne maintiennent pas contre M. [J], son fils et nouveau copropriétaire, dont les liens avec l'instance ne sont que de nature filiale.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 18 octobre 2022.

L'arrêt sera contradictoire, puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des intimés comporte des demandes de « dire » et « constater » qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens, ce qui explique qu'elles n'aient pas été toutes reprises dans l'exposé des prétentions des parties.

Sur la demande de remise en état des lieux

Mme [Y] et M. [J] contestent les travaux effectués sur la villa de M. et Mme [A], aux motifs qu'ils ne correspondent pas à l'autorisation donnée en assemblée générale des copropriétaires.

Selon les dispositions de l'article 9-I alinéa 1er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, « Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble. »

L'article 9 du code de procédure civile énonce qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La villa litigieuse fait partie de la copropriété horizontale régie par le règlement de copropriété du 6 novembre 1963 qui concernait à l'origine trois maisons d'habitation, lequel précise :

- que « les trois maisons (dont deux existent actuellement) auront chacune la jouissance privative, exclusive et perpétuelle d'une partie de terrain attenant, destiné à leur servir de jardin d'agrément »,

- que « les parties privatives sont celles qui appartiennent exclusivement à chacun des copropriétaires qui seront celles affectées à son usage exclusif et particulier, c'est-à-dire le sol sur lequel est construit chacune des maisons un, deux et trois et lesdites maisons et leurs dépendances ».

Ce règlement de copropriété a manifestement été modifié ainsi qu'il ressort notamment d'un document intitulé « modificatif du règlement de copropriété du 19 novembre 1964 » joint à la convocation à l'assemblée générale de la copropriété horizontale [Adresse 2], du 2 mars 2005, dont il n'est produit que quelques pages, ne permettant pas d'avoir une information précise sur l'état actuel du règlement de copropriété.

La convocation à l'assemblée générale du 2 mars 2005 comporte un point 16, intitulé « Travaux de modification de la maison du lot 20 (décision prise à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965) » et vise qu'y sont jointes plusieurs pièces dont les plans relatifs aux modifications de la maison du lot 20, s'agissant de la villa de M. et Mme [A].

L'expert judiciaire [W] donne les informations suivantes :

- il n'y a pas de documents officiels (signés par les copropriétaires) permettant de déterminer avec précision les travaux validés par l'assemblée générale, avec la mention « les cotes manuscrites ont été rapportées après autorisation du syndicat des copropriétaires par Mme [Y] »,

- il a pu examiner les plans et coupes en original du permis de construire initial, du permis de construire modificatif, la date réglementaire d'ouverture du chantier, mais pas le « DAT et conformité », ni le marché de travaux confié à l'entreprise Batazur,

- il a eu recours à un sapiteur M. [X] géomètre-expert, qui a déposé un rapport daté du 18 juin 2012 transmis aux parties le 2 août 2012 ; ce rapport n'est produit par aucune des parties, notamment pas par les appelants qui s'y réfèrent ; l'expert reporte les propos suivants « en ce qui concerne ces états des lieux, l'altimétrie a été calée sur le regard situé avenue Giraud (348,93). Les écarts d'altimétrie sur les toits se voient sur les plans avec scan et la différence est de 20 à 32 cm environ. Les écarts en altimétrie sur le plan coupe sont de 4 cm sur le plancher de la loggia »,

- il a comparé dans un tableau, le projet soumis et accepté à l'assemblée générale et le permis de construire du 12 mai 2005, parce que cela lui a été demandé par le juge des référés,

- sur le préjudice de vue, il a pris des photographies depuis la fenêtre en rez-de-chaussée séjour côté Ouest et depuis la fenêtre du premier étage chambre côté Ouest, et précise que la villa de Mme [Y] est localisée « en léger contrebas de plusieurs immeubles, qui tout comme celui des époux [A] surplombent et donc offre une vue sur jardin et accès à la villa de Mme [Y] »,

- les parties bien que sollicitées par l'expert, n'ont pas communiqué d'autres éléments relatifs aux préjudices qu'elles estimeraient subir,

- il y a une différence de mesures entre le terrain naturel (TN) et le premier étage selon la côte du permis de construire et la côte établie par M. [X], lequel a apporté la réponse suivante à un dire : « le relevé en altimétrie a été rattaché au regard situé avenue Giraud, altitude 348,93, les côtes du permis de construire sont des altitudes du projet. La villa [A] n'a probablement pas été implantée par un géomètre ».

Outre ce rapport d'expertise les appelants versent aux débats :

- en pièces 3-3, cinq plans : façade Ouest, façade Est, façade Nord, façade Sud, coupe AA du projet, sur chacun desquels il est mentionné « plan établi pour l'assemblée générale de copropriété du 2 mars 2005 » et signé par le BET Chiossone,

- la demande de permis de construire datée du 2 mai 2005 et l'attestation établie par le BET Chiossone le 2 février 2005, contresigné par le syndic, par laquelle le cabine Chiossone atteste avoir été mandaté par M. et Mme [A] « pour déposer un dossier de permis de construire de création d'un garage, réhabilitation et extension de leur villa'.ce projet'ne modifie en rien les hauteurs actuelles du bâtiment existant'. », sur lesquels est apposé un tampon « annexé à l'arrêté en date du 14 décembre 2005 »,

- l'arrêté du 14 décembre 2005 constituant permis de construire pour « extension de la maison et création d'un garage »,

- la demande de modification d'un permis délivré en cours de validité datée du 1er décembre 2008 déposée le 17 décembre 2008, concernant « suppression des jardinières de la terrasse à créer ' suppression des volets et création de barreaudages sur une fenêtre. Création d'une marquise sur la porte d'entrée », sur laquelle est apposée le tampon « annexé à l'arrêté en date du 10 mars 2009 », à laquelle est jointe l'attestation de non contestation de la DAACT (déclaration attestant de l'achèvement et la conformité des travaux) datée du 16 juin 2011, avec la précision « chantier ouvert le 03/04/2006, achevé le 14.05.2011 »,

- un jugement du 4 mars 2016 rendu entre M. [P] [S] et M. [O] [A] dont la copie transmise à la juridiction est incomplète, permettant de comprendre que M. [O] [A] a été condamné à modifier l'implantation de ses garde-corps sous astreinte, sur le fondement de l'article 678 du code civil, pour non-respect de la distance légale de la terrasse qui se situe en limite de propriété,

- un courrier recommandé adressé par M. [F] [J] à M. et Mme [A] le 9 mai 2019, pour demander des explications sur trois canalisations qui sont dans sa cave, et sur le lieux d'écoulement des eaux pluviales de la descente d'eau I et II,

- un document daté du 12 mai 2022 établi par M. [E] [T], architecte, adressé à Mme [Y] qui l'a sollicité pour avis, qui conclut que le permis de construire est entaché d'erreurs, ainsi que l'attestation de non contestation de la DAACT du 16 juin 2011, qu'un nouveau permis de construire doit être déposé, qu'une nouvelle répartition des tantièmes de copropriété doit être établie.

Il ressort de l'ensemble de ces pièces, que les plans examinés par l'expert judiciaire, ont bien été joints à la convocation à l'assemblée générale, faisant état d'une absence de modification des hauteurs du bâtiment existant. Cependant, une incertitude persiste sur le point de savoir ce qui a été voté par les copropriétaires qui étaient tous présents ou représentés et ont voté à l'unanimité pour autoriser les travaux, au regard de la mention de l'expert selon laquelle « les cotes manuscrites ont été rapportées après autorisation du syndicat des copropriétaires par Mme [Y] ». Quant au permis modificatif, il n'a pas été soumis à l'assemblée générale des copropriétaires, étant observé qu'il ne vise pas une modification substantielle du permis de construire, à mettre en relation avec le règlement de copropriété, aux termes duquel les villas constituent des parties privatives, dont le copropriétaire peut jouir librement à condition de ne pas nuire aux autres copropriétaires ni à la destination de la copropriété.

Ainsi les appelants sur qui pèse la charge de la preuve, ne démontrent pas que les modifications apportées à leur villa par M. et Mme [A] ne correspondent pas à l'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires, notamment quant à la surélévation contestée non vérifiable en l'absence de production du rapport du sapiteur, alors en tout état de cause, que l'attestation de non contestation de la DAACT a été obtenue.

Reste à examiner si les modifications apportées par M. et Mme [A] à leur villa, sont de nature à porter atteinte aux parties communes, créer un préjudice de vue pour Mme [Y], créer un problème d'évacuation des eaux pluviales, comme soutenu par les appelants.

Il est constaté que l'atteinte aux parties communes et le problème d'évacuation des eaux pluviales n'ont pas été évoqués au cours des opérations d'expertise qui se sont ouvertes le 9 mars 2011, ont donné lieu à un pré-rapport daté du 4 octobre 2012 et se sont achevées le 10 décembre 2012, alors qu'il a été demandé aux parties de faire connaître leurs doléances.

Les appelants se plaignent d'une modification de l'aspect extérieur de la villa [A], sur chacune de ses façades. Il ressort des comparaisons effectuées par l'expert que notamment la loggia côté Sud-Ouest a été abandonnée, que sur la façade Est les deux fenestrons à l'étage ont été remplacés par une fenêtre à deux vantaux, que sur la façade Ouest également, que sur la façade Ouest au niveau rez-de-chaussée une fenêtre à deux vantaux a été créée à droite de la porte palière, que côté Nord-Ouest les deux fenestrons ont été remplacés par une fenêtre à deux vantaux. Cependant en l'état des pièces produites, il n'est pas établi que le règlement de copropriété comporte des prescriptions ou restrictions quant à l'aspect extérieur des villas, parties privatives auxquelles sont affectés des millièmes de parties communes correspondant à la superficie de la parcelle sur laquelle chacune d'elle est ou sera édifiée. Ainsi aucune atteinte aux parties communes n'est établie.

S'agissant du problème d'évacuation des eaux pluviales, le courrier rédigé par M. [F] [J] et l'avis technique donné par M. [E] [T] sont manifestement insuffisants à rapporter la preuve de leur réalité. En effet l'absence affirmée de bassin de rétention correspondant à 60 l/m², retenue par l'architecte dans son avis, n'est manifestement pas motivée par les pièces qu'il liste et dit avoir examinées et n'est confortée par aucune autre pièce. Ainsi aucune atteinte à l'évacuation des eaux pluviales n'est établie.

S'agissant du préjudice de vue directe, sur lequel l'expert a été appelé à se prononcer depuis la façade Ouest, de la fenêtre à deux vantaux créée au lieu des deux fenestrons prévus initialement, l'expert estime que la vue sur le parking depuis la fenêtre du premier étage est quasi similaire avec celle depuis la fenêtre du rez-de-chaussée. Il a également pris une photo axée sur la villa de Mme [Y] à la demande expresse de celle-ci, qui révèle une vue sur le dernier étage de la villa de Mme [Y]. Cependant au regard de la distance entre les deux villas, Mme [Y] n'est pas fondée à se prévaloir de l'article 678 du code civil, aux termes duquel « On ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage' », comme elle semble le suggérer en produisant la décision ayant bénéficié à un voisin de M. et Mme [A]. Ainsi aucun préjudice de vue directe n'est établi.

En considération de l'ensemble de ces éléments, Mme [Y] et M. [J] seront déboutés de leur demande de remise en l'état antérieur de la villa et le jugement appelé confirmé.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Il s'agit de la demande formée par M. et Mme [A] uniquement contre Mme [Y], sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.

Selon les dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

Au regard du fondement exclusif de leur demande sur ledit article qui concerne l'amende civile, M. et Mme [A] seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Le jugement appelé qui déboute M. et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts, sera donc confirmé.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement entrepris.

Mme [Y] et M. [J] qui succombent, seront condamnés aux dépens d'appel distraits au profit du conseil de M. et Mme [A] ainsi qu'au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Condamne Mme [V] [Y] et M. [F] [J] aux dépens d'appel, distraits au profit de la SCP Tollinchi Perret-Vigneron Bujoli-Tollinchi ;

Condamne Mme [V] [Y] et M. [F] [J] à payer à M. [D] [A] et Mme [G] [L] épouse [A], la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/19089
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;19.19089 ?
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