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12/01/2023 | FRANCE | N°19/15885

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 12 janvier 2023, 19/15885


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2023



N° 2023/ 3













N° RG 19/15885 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFAO2







Compagnie d'Assurances DNA YACHT INSURANCE





C/



[V] [R]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Sébastien BADIE





Me Paul GUEDJ











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 18 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/02787.





APPELANTE



Compagnie d'Assurances DNA YACHT INSURANCE, dont le siège social est sis [Adresse 3] (PAYS BAS)



représentée par Me Sébastien BADIE ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 12 JANVIER 2023

N° 2023/ 3

N° RG 19/15885 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFAO2

Compagnie d'Assurances DNA YACHT INSURANCE

C/

[V] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 18 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/02787.

APPELANTE

Compagnie d'Assurances DNA YACHT INSURANCE, dont le siège social est sis [Adresse 3] (PAYS BAS)

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Henri NAJJAR, avocat au barreau de PARIS et de Me Arthur GIBON, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIME

Monsieur [V] [R], demeurant [Adresse 1] - BELGIQUE

représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Aurélien SARRACO, avocat au barreau de NICE.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Novembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie PARANQUE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023,

Signé par Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, pour Monsieur Pierre CALLOCH, Président empêché et Madame Marie PARANQUE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er juillet 2008, M. [V] [R] a acquis un navire de plaisance de marque Adagio 48 Sundeck qu'il a fait assurer par la société DNA Yacht Insurance.

Le 4 janvier 2015, un incendie d'origine électrique a entièrement dévasté l'intérieur du navire qui était amarré au port de plaisance de [Localité 2] (Alpes Maritimes) et l'a rendu totalement inutilisable.

Une provision de 75.000 euros a été versée par la société DNA Yacht mais aucun accord n'est intervenu sur le montant définitif du préjudice, de sorte que M. [V] [R] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse qui, par décision du 20 janvier 2016, a ordonné une expertise confiée à M. [K] [B].

Le 18 février 2018, M. [V] [R] a fait assigner au fond la société DNA Yacht Insurance devant le tribunal de grande instance de Grasse afin d'obtenir le paiement de la somme totale de 352.028,52 euros.

Par décision réputée contradictoire du 18 mars 2019 le tribunal a condamné cette société à payer la somme de 87.150,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2018, déduction faite de la provision versée par l'assureur, l'a condamnée à payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et a rejeté les autres demandes.

-------------

Par acte du 14 octobre 2019 la société DNA Yacht Insurance a interjeté appel du jugement.

--------------

Par conclusions enregistrées le 10 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société DNA Yacht Insurance fait valoir que :

-le jugement qui lui a été signifié le 24 septembre 2019 été rendu en violation des droits de la défense, du principe du contradictoire, du principe de double degré de juridiction et des règles de la profession d'avocats,

-elle ne conteste pas le coût de réparation du navire estimé par l'expert à la somme de 113.150,40 euros, somme qui a été payée de la façon suivante : 4.250 Euros au titre des frais de nettoyage, et 77.000 euros - et non 75.000 euros - à titre de provision, le solde après jugement,

-par courrier du 16 janvier 2020, M. [R] a acquiescé au solde lui restant dû au titre du coût de remise en état du navire en acceptant de percevoir la somme de 31.900,40 Euros, au titre des dommages matériels, correspondant au montant total 113.150,40 Euros arrêté par l'expert amiable, réduit des sommes de 77.000 Euros et de 4.250 Euros, déjà payées par la société DNA Yacht Insurance,

-il n'est pas justifié d'un préjudice de jouissance, de frais de réfection de sellerie, de charges payées en 2013, et des redevances annuelles d'amarrage de 2015 à 2017.

La société DNA Yacht Insurance demande ainsi à la cour de :

-confirmer le jugement entrepris et juger que le coût des travaux de remise en état du navire s'élève à la somme de 113.150,40 Euros ;

-constater que M. [V] [R] a été indemnisé du coût de ces travaux de remise en état du navire;

En conséquence,

-débouter M. [V] [R] de toute demande de condamnation à l'encontre de la société DNA Yacht Insurance au titre du coût des travaux de remise en état du navire,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [V] [R] de toute demande au titre de la réfection de la sellerie, du remboursement des charges 2013 et du remboursement des redevances annuelles d'amarrage de 2015 à 2017,

-infirmer le jugement entrepris et débouter M. [V] [R] de toute demande au titre du préjudice de jouissance allégué,

-condamner M. [V] [R] à payer à la société DNA Yacht Insurance la somme de 5.000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile

-------------

Par conclusions enregistrées le 10 août 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [V] [R] rétorque que :

-l'expertise judiciaire s'est achevée le 7 juin 2017,

-il demande l'homologation de ce rapport,

-les frais de nettoyage n'ont pas été compris dans le montant de l'indemnité évaluée par l'expert de 113.150,40 euros,

-il n'a perçu une provision que de 75.000 euros et non de 77.000 euros ; l'appelante doit être condamnée au frais de remise en état d'un montant de 6.250 euros,

-il justifie des frais de sellerie pour 2.745,54 euros ainsi que des frais d'amarrage et frais divers,

-il a subi un préjudice de jouissance du fait de la résistance abusive de l'assureur à l'indemniser puisque depuis le 7 juin 2017, il a été dans l'incapacité de remettre son navire en état,

-il fixe son préjudice en évaluant le coût de location à 1500 euros par jour, sur quatre mois avec 10% estimé de jours non navigables, et au cours des années 2017 à 2020, soit 480 jours.

M. [V] [R] demande dès lors à la cour de :

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] une somme de 113.150,40 euros au titre des frais de remise en état de son navire portant intérêt légal à compter du 28 février 2018,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu une faute à l'encontre de la société DNA Yacht Insurance pour réticence abusive et condamné cette dernière à la réparation d'un préjudice de jouissance distinct,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes de remboursement des frais d'amarrage et de réfection de la sellerie,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le préjudice spécifique à 50.000 euros,

Statuant à nouveau, de :

-condamner la société DNA Yacht Insurance à solder à M. [V] [R] l'indemnité de frais de remise en état qui demeure impayée à concurrence de 6.250 euros,

-condamner la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [R] une somme de 36.144 euros au titre des frais d'amarrage à parfaire au jour du règlement total de l'indemnité de frais de remise en état ainsi qu'une somme de 2.745,54 euros au titre des frais de réfection de la sellerie non pris en compte dans le cadre de l'expertise judiciaire,

-condamner la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [R] une somme de 645.000 euros au titre du préjudice spécifique de jouissance causé par le non-règlement de l'indemnité de remise en état depuis le 7 juin 2017,

-condamner la société DNA Yacht Insurance au paiement d'une somme d'un montant de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

------------

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 17 octobre 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 14 novembre 2022.

A cette date, l'affaire a été retenue et mise en délibéré au 12 janvier 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

En outre, les mentions insérées au dispositif des conclusions tendant à voir «acter » ou « réserver les droits à conclure » ne constituent pas des prétentions.

Il en résulte qu'aucune conséquence ne peut être tirée du fait que la société appelante soutient dans les motifs de ses conclusions que le jugement attaqué aurait été rendu en violation des droits de la défense, du principe du contradictoire, du principe de double degré de juridiction et des règles de la profession d'avocats dès lors que la nullité de la décision n'est pas soutenue.

En tout état de cause, en raison de l'effet dévolutif de l'appel, l'affaire est réexaminée par la cour.

Sur le montant des réparations du navire :

Les parties ne contestent pas le montant des frais de remise en état du navire pour une somme de 113.150,40 euros chiffrée par l'expert judiciaire dans son rapport déposé le 7 juin 2017. Elles demandent la confirmation du jugement à ce titre, étant observé que le tribunal a fixé cette indemnité à 87.150,40 euros du fait du paiement d'une provision par l'assureur.

La société DNA Yacht conteste le montant du préjudice de jouissance retenu par le tribunal à hauteur de 50.000 euros tandis que M. [R] a formé appel incident pour solliciter la fixation de ce préjudice à la somme de 645.000 euros outre le paiement de divers frais qu'il estime non inclus à l'évaluation faite par M. [K] [B], expert judiciaire.

Au titre des frais de nettoyage, le devis de la société Port Pin Rolland en fait état en page 1 et ce devis a été retenu par l'expert au titre de l'évaluation des dommages. Il n'est pas justifié d'autres dépenses au titre des frais de nettoyage, de sorte que la demande présentée à ce titre par l'intimé est rejetée.

S'agissant des frais d'amarrage, M. [R] remet des états de frais établis à son nom par le Yacht Club pour la période d'avril 2015 à mars 2018. Ces frais ont été exposés alors que le bateau était inutilisable. Il convient d'allouer à l'intimé la somme de 10.671 euros en réparation de ce préjudice.

En ce qui concerne le coût de remplacement de la sellerie, l'expert a spécifié qu'aucun document ne lui avait été remis à ce titre. M. [R] produit néanmoins dans le cadre de l'instance une facture du 7 juillet 2010, relatif à la confection d'un bain de soleil par M. [T] pour la somme de 2.745.64 euros.

M. [T] indique dans un courrier du 6 mai 2020, que n'ayant plus le logiciel de facturation, le nom figurant sur la facture a été porté à la main. Il atteste de la véracité des mentions portées sur la facture.

Il convient donc de condamner la société DNA Yacht au paiement de cette somme.

Concernant le préjudice de jouissance que l'intimé chiffre à la somme de 645.000 euros, il convient de relever que suite à l'incendie survenu le 4 janvier 2015 l'assureur a payé, au cours de la procédure de référé une somme de 75.000 euros qui était manifestement insuffisante pour la remise en état du navire. Si une seconde provision a été versée, elle ne l'a été qu'en 2020 (31.900,40 euros le 17 février 2020).

Le rapport d'expertise judiciaire non contesté par l'assureur a été déposé le 7 juin 2017.

Le refus de la société DNA Insurance de payer l'indemnité fixée par l'expert judiciaire était donc injustifié et a constitué une faute dont elle doit réparation dès lors que M. [R] a été privé de la possibilité d'user librement de son bateau en l'absence des fonds nécessaires à sa remise en état complète.

Pour autant, l'intimé ne justifie pas qu'il donnait son navire à la location et qu'en outre un contrat de location aurait pu être conclu pendant 480 jours.

Comme l'a relevé à juste titre le tribunal, il n'est produit en outre aucune facture relative à la location d'un navire de substitution.

En conséquence, le préjudice de jouissance imputable à la faute de l'assureur dans le retard de règlement peut-être fixé à la somme de 50.000 euros, telle qu'évaluée par le tribunal.

Par ailleurs, la société appelante, qui soutient avoir versé une indemnité provisionnelle de 77.000 euros et non de 75.000 euros, n'en rapporte nullement la preuve. Elle produit aux débats un courrier du 11 août 2015 écrit dans une langue autre que le français et non traduite qui n'établit pas le versement effectif de la somme de 77.000 euros. Pour le surplus, le courrier émis par son Conseil n'engage que sa cliente et ne saurait constituer une preuve de paiement dès lors que M. [R] n'a pas formellement acquiescé à ce décompte.

En outre aucune demande en ce sens n'est mentionnée dans le dispositif de la société DNA Yacht Insurance.

Ainsi, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a évalué à 113.150,40 euros le montant des frais de remise en état du navire.

Il échet également de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que les frais irrépétibles et les dépens.

Sur les frais et dépens :

Il convient de condamner la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a évalué à la somme de 113.150,40 euros le montant des frais de remise en état du navire avec intérêt légal à compter du 28 février 2018, et condamne la société DNA Yacht à payer cette somme à M. [V] [R], déduction faite des provisions versées à hauteur de 75.000 euros et 31.900,40 euros,

Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre les frais irrépétibles et les dépens,

Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

Condamne la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] :

-la somme de 2.745.64 euros au titre de la réfection de la sellerie,

-la somme de 10.671 euros au titre des frais d'amarrage,

Condamne la société DNA Yacht Insurance aux dépens de la procédure d'appel recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société DNA Yacht Insurance à payer à M. [V] [R] une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/15885
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;19.15885 ?
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