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08/12/2022 | FRANCE | N°19/14822

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 08 décembre 2022, 19/14822


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N°2022/501













Rôle N° RG 19/14822 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5FN







[M] [U]

[X] [B] épouse [U]

Société civile DEMANDOLS





C/



SCI OLABE























Copie exécutoire délivrée le :

à :



SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON



M

e Marie-Christine MOUCHAN





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 17 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/02464.





APPELANTS



Monsieur [M] [U]

né le 14 Février 1969 à [Localité 12], demeurant [Adresse 9]



représenté ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N°2022/501

Rôle N° RG 19/14822 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5FN

[M] [U]

[X] [B] épouse [U]

Société civile DEMANDOLS

C/

SCI OLABE

Copie exécutoire délivrée le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Me Marie-Christine MOUCHAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 17 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/02464.

APPELANTS

Monsieur [M] [U]

né le 14 Février 1969 à [Localité 12], demeurant [Adresse 9]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Magali JUHAN, avocat au barreau de NICE

Madame [X] [B] épouse [U]

née le 16 Mars 1972 à [Localité 12], demeurant [Adresse 9]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Magali JUHAN, avocat au barreau de NICE

Société civile DEMANDOLS

dont le siège social est [Adresse 9], pris en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Magali JUHAN, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SCI OLABE, dont le siège social est [Adresse 11], agissant par son Gérant de droit, M. [S] [T] [N], domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Marie-Christine MOUCHAN, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, et Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller pour Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre, empéchée et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

***

EXPOSE DU LITIGE

La SCCV DEMANDOLS a acquis en 2006 de la SCI IRIS les parcelles cadastrées AB [Cadastre 1] et [Cadastre 10] sur la commune de [Adresse 13], pour une opération immobilière consistant dans la réalisation d'un immeuble et la construction de trois chalets individuels.

Les parcelles cadastrées AB [Cadastre 1] et [Cadastre 10] ont fait l'objet d'une division dont sont issues les parcelles [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7] et [Cadastre 8].

Par acte du 26 novembre 2010, la SCCV DEMANDOLS a cédé les parcelles cadastrées section AB [Cadastre 3] et [Cadastre 7] aux époux [U] et les parcelles cadastrées section AB [Cadastre 2] et [Cadastre 6] à la SCI DU CIAVALET.

La parcelle cadastrée AB [Cadastre 4] est devenue la propriété indivise des époux [U] et de la SCI DU CIAVALET.

La SCCV DEMANDOLS s'est par ailleurs engagée à obtenir un permis de construire au bénéfice des époux [P], représentants de la SCI PUCIKEN, en vue de l'édification d'un chalet sur les parcelles cadastrées section AB [Cadastre 5] et [Cadastre 8].

Par jugement du tribunal de grande instance du 9 décembre 2013, confirmé par un arrêt de cette cour du 2 décembre 2014, la vente entre la SCCV DEMANDOLS et la SCI PUCIKEN, portant sur un chalet non achevé édifié sur les parcelles de terrain cadastrées section AB [Cadastre 5] et [Cadastre 8], a été déclarée parfaite.

Suivant acte du 9 février 2015, la SCI PUCIKEN a revendu son bien à la SCI OLABE, le chalet étant alors en cours de construction.

Soutenant qu'un empiètement aurait été commis sur son fonds à l'occasion des travaux de construction du chalet avoisinant des époux [U] réalisés par la SCCV DEMANDOLS, la SCI OLABE les a fait assigner, par acte du 26 avril 2017, devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de les voir condamner solidairement au versement d'une somme de 45.000 € en réparation du préjudice matériel résultant de l'empiètement dénoncé, outre 20.000 € à titre de dommages et intérêts en raison des manquements répétés des parties défenderesses.

Le tribunal de grande instance de Nice, par jugement contradictoire en date du 17 septembre 2019 a:

- déclaré irrecevables les demandes faites à l'encontre de la SCI PUCIKEN,

- rejeté le moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes de la SCI OLABE,

- condamné in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] à payer à la SCI OLABE la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices matériels, financiers et de jouissance,

- condamné in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] à payer à la SCI OLABE:

* la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

* la somme de 5.000 e en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné in solidum les défendeurs aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 20 septembre 2019, la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] ont interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées et signifiées le 13 octobre 2022, la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] demandent à la cour de:

Vu l'article 232 du code de procédure civile,

Vu les articles 1355 et 1240 du code civil,

- recevoir la SCCV DEMANDOLS et les époux [U] en leur appel et les y déclarant bien fondés,

- constater l'absence d'intérêt à agir de la SCI OLABE et la déclarer irrecevable en ses demandes,

- débouter la SCI OLABE de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- réformer le jugement rendu le 17 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Nice en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que les enrochements réalisés par la société DEMANDOLS étaient nécessaires à la réalisation du chalet C et ne sont pas de nature à empiéter sur la propriété de la SCI OLABE,

A défaut, et en toutes hypothèses,

- dire et juger que la simple constatation d'une atteinte au droit de propriété ne suffit pas à ouvrir droit à réparation en application du nouvel article 1240 du code civil,

- dire et juger que la responsabilité de la SCCV DEMANDOLS et des époux [U] n'est pas engagée en l'absence de faute envers la SCI OLABE leur étant imputable et de préjudice réel, direct et certain subi par la SCI OLABE,

- dire et juger que les conditions de la responsabilité civile ne sont pas remplies,

- dire et juger que la SCI OLABE ne justifie pas valablement d'un préjudice ni en son principe, ni en son quantum,

- condamner la SCI OLABE à payer à la SCCV DEMANDOLS et aux époux [U] la somme de 5.000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Ils concluent, à titre principal, à l'absence d'intérêt à agir de la SCI OLABE et à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour du 26 janvier 2017, confirmant un jugement du juge de l'exécution du 2 novembre 2015 qui avait été saisi par la SCI PUCIKEN de demandes qui sont exactement les mêmes que celles présentées par la SCI OLABE dans le cadre de la présente procédure. Ils ajoutent que cet arrêt du 26 janvier 2017 est opposable à la la SCI OLABE qui était intervenue volontairement à la procédure.

Ils contestent l'existence d'un quelconque empiètement, en rappelant qu'une telle notion implique nécessairement d'apprécier le relief d'origine des lieux et des limites de propriété pour en déterminer une éventuelle existence et réalité.

Ils rappellent que pour faciliter la lecture des pièces techniques, le chalet appartenant à la société intimée est dénommé C et celui des époux [U] comme étant le chalet A.

Ils font valoir que:

- il ne peut être déduit de l'attestation du géomètre [Z] un quelconque empiètement d'une parcelle sur l'autre,

- le cabinet LANZINI, architecte du programme, indique que la réalisation d'un mur de soutènement par la SCCV DEMANDOLS était obligatoire pour des impératifs de sécurité et par ailleurs prévue par le marché de travaux,

- la SCI OLABE confond la présence de talus naturels existants confortés par un talutage de pierre cyclopéen ( grosses pierres) à l'intérieur du périmètre de sa propriété et un empiètement qui aurait été la conséquence d'une avancée du talus à l'intérieur de la propriété du chalet C,

- en outre, le relief préexistait aux travaux et la construction du chalet C a nécessité le nivellement d'une partie de cette restanque pour permettre de l'implanter au niveau de la voie publique passant en aval,

- la SCCV DEMANDOLS n'a fait qu'exécuter la construction du chalet C conformément au permis de construire accordé, la SCI PUCIKEN et la SCO OLABE étant parfaitement informées de la configuration des lieux et des contraintes imposées par l'autorisation de construire, étant rappelé que l'enrochement a été réalisé dès 2011,

- le chalet C est implanté à cheval sur un plateau et un talus,

- la confusion de la SCI OLABE est de croire que le talus a été créé sur sa parcelle, alors que le chalet C a été implanté en terrassant un talus dont la partie amont a été laissée en place afin de permettre l'accès au local à ski de ce chalet situé en amont de la façade arrière.

Ils considèrent en outre que la SCI OLABE ne justifie d'aucun préjudice, que l'atteinte à un droit de propriété ne constitue un fait générateur de responsabilité qu'à la condition d'être fautive et de causer un préjudice et que la commission d'une simple voie de fait ne suffit pas à caractériser une faute de son auteur. Ils relèvent que la SCI OLABE reconnaît avoir acquis en connaissance de cause la propriété du chalet de la SCI PUCIKEN, que les enrochements avaient été réalisés dès 2011, de sorte qu'ils n'ont commis aucune faute à l'encontre de l'intimée, qui n'était pas titrée au moment de la réalisation des travaux. Ils soulignent que seule la SCI OLABE a la jouissance de cette bande de terrain tenue par l'enrochement et séparée par une clôture posée en limite de propriété.

La société OLABE, suivant ses dernières conclusions signifiées le 17 octobre 2022, demande à la cour de:

Vu les articles 544, 545 et 1382 ancien du code civil,

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Nice du 17 septembre 2019 en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes de la SCI OLABE,

- confirmer ce jugement en ce que, tirant les conséquences de ses propres constatations, le tribunal de grande instance de Nice a décédé que les enrochements litigieux empiètent sur le terrain de la SCI OLABE, la limite de son fonds et de celui des époux [U] passant par les points 507 ( clou), 506 ( broche) et 505 ( broche sur le plan de matérialisation avant bornage de M. [Y] du 24 décembre 2014) correspondant aux bornes 419 et 421 sur le plan de M. [Z] des 15 juillet 2009 et 28 octobre 2011, cet empiètement pouvant être évalué approximativement selon l'échelle du plan à 3 mètres du côté Nord Est et un peu du côté Nord Ouest avec cette particularité que le mur en enrochement s'appuie directement sur l'angle du chalet,

- confirmer ce jugement en ce qu'il a condamné in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] à payer à la SCI OLABE la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices matériels, financiers et de jouissance,

- faire droit à l'appel incident de la SCI OLABE,

- porter l'indemnité réparatrice de son préjudice matériel à la somme de 45.000 € et la sanction des fautes délibérées commises par les appelants à la somme de 20.000 €,

- débouter la SCCV DEMANDOLS et les époux [U] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- les condamner sous la même solidarité à verser à la SCI OLABE une indemnité de 8.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles d'appel,

- les condamner aux entiers dépens.

S'agissant de son intérêt à agir, elle précise que:

- le juge de l'exécution ne peut être saisi que des difficultés d'exécution d'une décision de justice rendue sur le fond et il s'agit de l'action que la SCI PUCIKEN a entendu exercer, se plaignant de ce que la SCCV DEMANDOLS n'avait pas déféré à son obligation de délivrance et n'avait donc pas correctement exécuté l'arrêt rendu par la cour le 2 décembre 2014, déclarant la vente portant sur le chalet litigieux parfaite entre ces parties,

- la vente conclue entre la SCI PUCIKENB et la SCI OLABE le 9 janvier 2015 a transféré à celle-ci les droits attachés à la propriété de l'immeuble vendu et notamment celui de combattre les atteintes qui peuvent y âtre apportées en dénonçant les empiètements litigieux.

Elle soutient que la réalité de l'empiètement est incontestable au regard des éléments suivants:

- le plan topographique valant plan de division dressé par M. [Z] le 15 juillet 2009 et récolé le 28 octobre 2011, plan qui permet de délimiter le terrain d'assiette du chalet C pour une superficie de 4 ares et 99 centiares,

- le procès-verbal de constat du 20 juillet 2011 montrant le chalet en cours d'édification, les photographies qui sont annexées concernant l'arrière du chalet et la limite de propriété avec le terrain d'assiette du chalet A ne mettent en évidence aucun enrochement,

- le procès-verbal de constat du 6 janvier 2015 mettant en évidence la présence d'un enrochement correspondant au mur de soutènement du chalet situé en amont,

- le plan d'état des lieux et de matérialisation avant bornage dressé par M. [Y] montrant l'emprise sur le terrain d 'assiette du chalet C des enrochements réalisés par les appelants,

- deux autres attestations ( d'un géomètre-expert et du conducteur de travaux) corroborent cette situation et confirment que le mur de soutènement qui était obligatoire pour le terrain d'assiette du chalet A ( celui des époux [U]) a été édifié sur le terrain du chalet C,

- ces éléments démontrent qu'elle est victime d'un empiètement sur son héritage, commis par la SCCV DEMANDOLS, maître d'ouvrage de l'opération de construction, en violation des propres plans de délimitation réalisés à sa demande et qui profite exclusivement aux époux [U].

Elle considère que les pièces produites par les parties adverses sont dépourvues de valeur probante ou n'ont strictement aucun intérêt, qu'elle a parfaitement compris que, en raison de la déclivité du terrain, il était nécessaire de réaliser un ouvrage de soutènement du terrain formant l'assiette du chalet A appartenant aux époux [U], mais que cependant les appelants ont trouvé plus commode de réaliser cet ouvrage sur l'assiette du terrain du chalet C . Elle ajoute que la circonstance qu'elle ait acquis l'immeuble en connaissance de l'état des lieux n'est pas de la nature à la priver du droit d'exercer l'action qu'elle a reçue de sa venderesse comme ayant cause de celle-ci et que peu importe le caractère minime de l'empiètement, la démolition de la partie de la construction reposant sur le fonds voisin doit être ordonnée quand le propriétaire de ce fonds l'exige. Elle précise que l'empiètement n'était pas matérialisé au jour du procès-verbal de constat dressé à la requête de la SCI PUCIKEN le 20 juillet 2011 et n'a été découvert qu'à la fin de l'année 2014 au moment où la SCI PUCIKEN, régulièrement titrée, a pu prendre possession de l'immeuble.

Elle ajoute que si l'enrochement était nécessaire, il devait être réalisé sur le terrain des époux [U] et que l'empiètement étant parfaitement caractérisé, il ouvre droit à réparation.

La procédure a été clôturée le 18 octobre 2022.

MOTIFS

Sur l'absence d'intérêt à agir de la société OLABE et l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour de céans du 26 janvier 2017

Il n'est pas contesté que la SCI PUCIKEN avait alors saisi le juge de l'exécution se plaignant de ce que la SCCV DEMANDOL n'avait pas déféré à son obligation de délivrance en n'exécutant pas correctement l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 2 décembre 2014 déclarant la vente du chalet litigieux parfaite entre les parties.

La cour d'appel, dans son arrêt du 26 janvier 2017, a confirmé le jugement du juge de l'exécution du 9 novembre 2015, déclarant la demande irrecevable aux motifs que si l'arrêt du 2 décembre 2014 a décidé que la vente avait un caractère parfait, dans le cadre de cette précédente procédure, les juridictions n'avaient pas été saisies d'un problème de limite des fonds ou d'empiètement et n'avaient pas condamnées le vendeur à une obligation de faire, de sorte qu'une telle demande devant le juge de l'exécution n'était pas recevable en ce qu'elle modifiait le dispositif de la décision servant de fondement aux poursuites.

Ainsi ce moyen d'irrecevabilité tenant à la saisine antérieure du juge de l'exécution n'est pas de nature à priver la SCI OLABE, actuel propriétaire du chalet en vertu de l'acte de vente du 9 février, de saisir la juridiction au fond afin de dénoncer les empiètements réalisés par la SCCV DEMANDOLS et les époux [U] sur son héritage et obtenir réparation des préjudices en résultant.

Le jugement querellé en ce qu'il a rejeté le moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes de la SCI OLABE sera donc confirmé.

Sur la réalité de l'empiètement

La SCI OLABE soutient qu'un empiètement a été commis sur son fonds par la réalisation d'un mur en enrochement édifié par la SCCV DEMANDOLS au profit des époux [U].

Les appelants contestent la réalité d'un tel empiètement.

Il n'est discuté par aucune des parties que, sur les différents documents graphiques qui sont versés au dossier, le chalet C correspond à celui de la société OLABE tandis que le chalet des époux [U] est identifié comme étant le chalet A. Par ailleurs, la SCCV DEMANDOLS ne conteste pas être l'auteur des travaux d'édification des murs en enrochement.

Pour démontrer la réalité de l'empiètement, la SCI OLABE se prévaut des éléments suivants:

- le plan topographique régulier partiel valant plan de division dressé par M. [S] [Z] le 15 juillet 2009 et recolé le 28 octobre 2011, qui permet de délimiter le terrain d'assiette du chalet, à savoir les parcelles cadastrées section AB [Cadastre 5] et [Cadastre 8]. Il est à noter que sur ce plan, figurent des bornes sur une limite divisoire teintée en bleu, lesdites bornes portant les numéros 4047, 4046, 4014, 4015, 4016, 4019 et 4021;

- un procès-verbal de constat dressé par Me [R] le 20 juillet 2011 et les photographies qui sont annexées montrant le chalet de la SCI OLABE en cours de construction et notamment en page 4 l'arrière de ce chalet et la limite de propriété avec le terrain d'assiette du chalet A situé en amont, aucun enrochement n'étant alors visible,

- un procès-verbal de constat établi par le même huissier le 6 janvier 2015, ce dernier notant ( page 12) ' la présence d'un enrochement correspondant au mur de soutènement du chalet, situé sur la partie supérieure en amont et qui vient directement se positionner contre le chalet de la société requérante, voire même à l'intérieur de la sortie Nord. Je fais les mêmes observations de cet enrochement en partie Est'

- des photographies établissant qu'à l'arrière du chalet de l'intimée et côté amont, deux murs en enrochement ont été réalisés dont l'un s'appuie directement sur l'arrière de ce chalet,

- le plan d'état des lieux établi par M. [Y], géomètre-expert, le 11 décembre 2014, qui reprend les indications figurant sur le plan susvisé dressé par M. [Z] et sur lequel figure le chalet de la SCI OLABE implanté sur les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 8].

Ce dernier plan de M. [Y] met clairement en évidence les deux enrochements réalisés de part et d'autre du chalet situé en amont ( chalet A) et qui empiètent sans contestation possible sur l'assiette du terrain du chalet C:

- le premier enrochement, situé au Nord -Ouest vient s'appuyer sur l'arrière même du chalet C,

- le second enrochement, au Nord-Est s'appuie quant à lui sur un escalier bâti sur l'assiette du terrain du chalet C.

L'attestation du géomètre [Z] en date du 8 avril 2015 corrobore une telle situation en ce que ce dernier expose que ' Il apparaît que le chalet C est implanté à cheval entre un plateau et un talus ayant comme différence altimétrique, entre le pied de talus et le plateau, 3 mètres environ. Cette différence de niveau a conduit le promoteur à stabiliser les terres, après la construction, par un enrochement rendu nécessaire. Les limites définies par la division réalisée le 21 avril 2010 ont été, préalablement au plan d'implantation, matérialisées sur le terrain, définissant ainsi parfaitement les parcelles n° [Cadastre 5] et [Cadastre 8]. Par conséquent, les enrochements construits se situent à l'intérieur du lot C et ne constituent en rien une limite naturelle du terrain détaché'.

S'il n'est pas contesté, au regard notamment de l'attestation du cabinet LANZANI, architecte du programme, que la réalisation d'un mur de soutènement était obligatoire pour le terrain d'assiette du chalet A ( celui des époux [U]) et prévue par les marchés de travaux, il n'en demeure pas moins que les enrochements ont été édifiés sur le terrain du chalet C et ont permis de définir une bande de terrain sensiblement plat

Les appelants ne peuvent utilement soutenir, s'appuyant pour ce faire sur un procès-verbal de constat du 25 juillet 2022, que la SCI OLABE qui peut jouir parfaitement de cette bande de terrain qu'elle a aménagée en espace vert, ce qui est parfaitement normal puisque cette portion lui appartient tout en supportant néanmoins les enrochements qui empiètent sur son héritage.

La circonstance que la SCI OLABE, alors représentée par Mme [O], ait pu procéder à la réception du chalet C le 6 janvier 2015 sans émettre de réserve quant à la présence de l'enrochement sur sa propriété et sur l'existence d'un empiètement, n'est pas de nature à démontrer son consentement à aliénation d'une partie de sa propriété et en conséquence à la priver du droit d'exercer l'action aux fins de faire cesser cette situation.

En conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que les deux enrochements litigieux empiètent sur le terrain de la SCI OLABE, sera confirmé.

Le propriétaire du fonds qui subit un empiètement sur son terrain a le choix entre réclamer la condamnation du propriétaire qui empiète à procéder aux travaux de nature à supprimer cet empiètement ou l'obtention de dommages et intérêts.

En l'espèce, la SCI OLABE a choisi d'être indemnisée de ses préjudices, sans que les parties appelantes ne puissent lui opposer qu'elle a acquis le bien en l'état ou l'absence de faute de leur part, l'empiètement sur la propriété d'autrui suffisant à caractériser une faute.

Les préjudices de la société OLABE sont constitués de la valeur du nombre de mètres carrés qui ont été accaparés, de la perte de la valeur de l'immeuble résultant notamment du fait que le fonds amont se situe à certains endroits contre le chalet de la SCI OLABE et du préjudice de jouissance définitif résultant de cette situation.

Le tribunal a fait une exacte appréciation de ces différents préjudices en allouant à l'intimée une somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts.

En revanche, les préjudices de la SCI OLABE ne peuvent être constitués, en sus, du coût des travaux de remise en état permettant de rétablir son fonds dans ses limites, puisque précisément elle a fait le choix de ne pas réclamer la suppression de l'empiètement.

Elle sera donc déboutée de son appel incident sur ce point.

L'existence de fautes commises par les appelants n'est en revanche pas de nature à caractériser un préjudice qui soit distinct des autres préjudices retenus et pour lesquels la SCI OLABE est déjà indemnisée.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné les époux [U] et la SCCV DEMANDOLS à payer à la SCI OLABE une somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Nice déféré sauf en ce qu'il a condamné in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] à payer à la SCI OLABE la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déboute la SCI OLABE de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

Y ajoutant,

Déboute la SCI OLABE de son appel incident,

Condamne in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] à payer à la SCI OLABE la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne in solidum la SCCV DEMANDOLS, M. [M] [U] et Mme [X] [B] épouse [U] aux dépens de la procédure d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/14822
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;19.14822 ?
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