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08/12/2022 | FRANCE | N°19/12397

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 08 décembre 2022, 19/12397


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N° 2022/ 495













N° RG 19/12397 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEV7Q







[G] [S]

[R] [E] [T] [I] épouse [S]





C/



[M] [W]

[H] [B]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ




Me Valérie CARDONA

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 23 Février 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 11-15-463.



APPELANTS



Monsieur [G] [S]

demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N° 2022/ 495

N° RG 19/12397 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEV7Q

[G] [S]

[R] [E] [T] [I] épouse [S]

C/

[M] [W]

[H] [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ

Me Valérie CARDONA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de CANNES en date du 23 Février 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 11-15-463.

APPELANTS

Monsieur [G] [S]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [R] [E] [T] [I] épouse [S]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Muriel MANENT de la SCP MONIER MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Madame [M] [W]

demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Valérie CARDONA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [H] [B]

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Valérie CARDONA, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller pour Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre, empéchée et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Les époux [S]/[I] d'une part et M. [H] [B] et Mme [M] [W] d'autre part sont propriétaires de parcelles bâties limitrophes situées [Adresse 1]). Se plaignant de différents troubles de voisinage issus des arbres plantés sur le fonds [S]/[I], les consorts [B]/[W] ont obtenu le 18 juin 2014 en référé la désignation de l'expert horticole [A] [P] qui a déposé son rapport le 20 janvier 2015.

En lecture de ses conclusions et sur assignation au fond du 20 avril 2015, les consorts [B]/[W] ont saisi le tribunal d'instance de Cannes en homologation de ce rapport, en exécution de travaux et paiement de dommages-intérêts pour préjudices matériels et moral ; les époux [S]/[I] ont conclu à la nullité de l'expertise judiciaire et ont contesté l'existence de troubles anormaux de voisinage ; selon jugement contradictoire du 23 février 2017, la juridiction d'instance a :

'ordonné la jonction des dossiers n° 15-463 et n° 16-261 ;

'débouté les époux [S]/[I] de leurs demandes de médiation préalable et en nullité d'expertise ;

'débouté les consorts [B]/[W] de leur demande d'arrachage du grand pin d'Alep ;

'condamné les époux [S]/[I] à faire procéder à l'élagage des branches d'arbres dépassant la limite séparative de propriétés sous astreinte de 50 € par jour de retard pour une durée de quatre mois passé le délai d'un mois suivant la signification du jugement ;

'débouté les consorts [B]/[W] de leurs autres demandes de travaux ;

'condamné les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] les sommes de:

*7795 € au titre des travaux préconisés par l'expert judiciaire,

*749 € pour préjudice matériel,

*3300 € pour préjudice de jouissance,

*500 € pour préjudice esthétique,

*3000 € pour préjudice moral,

'ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

'condamné les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamné les mêmes aux dépens intégrant les frais d'expertise judiciaire et de constats d'huissiers.

Les époux [S]/[I] ont régulièrement relevé appel de cette décision le 4 avril 2017. Par arrêt de cette cour en date du 25 octobre 2018, l'affaire a fait l'objet d'un retrait du rôle. Elle a été réinscrite le 15 juillet 2019 à l'initiative des consorts [B]/[W].

Les époux [S]/[I] demandent à la cour selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 23 septembre 2022 de:

'confirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute les consorts [B]/[W] de leur demande d'arrachage du grand pin d'Alep ;

'l'infirmer pour le surplus ;

'débouter les consorts [B]/[W] de leur demande d'élagage complémentaire sous astreinte ;

'chiffrer leur préjudice au titre des travaux préconisés par l'expert à la somme de 1375 € TTC correspondant au seuls travaux afférents à la dégradation de la terrasse par les racines du pin ;

'débouter les consorts [B]/[W] de leurs autres demandes de travaux ;

'les débouter de toutes leurs demandes au titre de préjudices de jouissance, esthétique et moral;

'plus généralement les débouter de l'ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires et des fins de leur appel incident ;

' les condamner au paiement d'une indemnité de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner les consorts [B]/[W] aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

Au soutien de leur appel, les époux [S]/[I] font valoir principalement que la prescription trentenaire est acquise s'agissant du grand pin d'Alep, qu'en outre sa présence résulte d'une servitude par destination du père de famille les propriétés respectives des parties provenant d'un fonds plus ample divisé, que les intimés se sont opposés à un élagage amiable proposé le 30 janvier 2014, que celui-ci a été effectué en cours de procédure et qu'un nouvel élagage du pin d'Alep pourrait causer son dépérissement, que nonobstant les sommes versées au titre de l'exécution provisoire les consorts [B]/[W] n'ont pas procédé à la coupe des racines évoluant sur leur propriété, que la présence de chenilles et d'aiguilles de pin est une contrainte inhérente à la végétation locale et que les préjudices allégués ne sont pas justifiés.

Selon dernières conclusions en réplique signifiées par voie électronique le 20 octobre 2020, les consorts [B]/[W] demandent à la cour de :

vu les articles 544, 651 et 671 du code civil,

vu les articles 1382 et suivants du code civil,

vu les articles 331 et suivants et 383 du code de procédure civile,

vu l'article R 221-16 du code de l'organisation judiciaire,

vu la notion de trouble anormal de voisinage,

vu la jurisprudence attachée,

vu le rapport d'expertise judiciaire de M. [A] [P] en date du 22 janvier 2015,

'confirmer le jugement déféré en ce qu'il :

*homologue le rapport d'expertise judiciaire,

*retient la responsabilité des époux [S]/[I] au niveau délictuel,

*les condamne à procéder sous astreinte à leurs frais à l'élagage des branches surplombant leur propriété [B]/[W],

*les condamne à paiement les sommes de 720 € et 749 €;

'réformer partiellement le jugement et statuant à nouveau :

'condamner les époux [S]/[I] à faire procéder à leurs frais exclusifs à la suppression du grand pin d'Alep sous astreinte de 100 € par jour, passé un délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt ;

'les condamner à défaut à verser mensuellement la somme de 720 € TTC au titre du nettoyage nécessaire des aiguilles de pin sur les allées, terrasses, toitures et gouttières jusqu'à élagage complet qui devra être constaté par procès-verbal d'huissier ;

'condamner les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] les sommes de:

*6600 € TTC au titre du traitement des racines,

*8610 € TTC au titre de la réfection de la terrasse de l'escalier,

*1680 € TTC au titre du traitement phytosanitaire des chenilles processionnaires,

*540 € TTC en remboursement des frais d'enlèvement des nids de chenilles,

*1506 € TTC au titre du nettoyage des mousses et lichens accumulés sur la toiture ;

'subsidiairement, condamner les époux [S]/[I] à réaliser l'ensemble de ces travaux tels que préconisés par l'expert judiciaire sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;

'condamner les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] les sommes de:

*13'295,84 € pour préjudice matériel,

*10'000 € pour préjudice de jouissance,

*1000 € pour coupure de la liaison télécom,

*7800 € pour perte de chance locative pour la saison 2014 2015 ;

*2000 € pour préjudice esthétique,

*10'000 € pour préjudice moral ;

'dans tous les cas, débouter les époux [S]/[I] de leurs demandes ;

'les condamner à payer la somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

'condamner les mêmes aux dépens d'appel intégrant les frais de constats d'huissiers des 27 janvier 2014, 19 mars 2015 et 28 octobre 2015.

Les consorts [B]/[W] soutiennent principalement que la nullité du rapport d'expertise judiciaire n'est plus soutenue par les appelants, que le contentieux relatif aux arbres est ancien et a fait l'objet d'un jugement correctionnel du 2 septembre 2020 condamnant M. [G] [S] pour violence avec arme, qu'ils produisent d'autres rapports d'experts judiciaires corroborant les conclusions de l'expert [P], que les troubles anormaux de voisinage sont établis par la disproportion de l'empiétement des branches, les dégâts et la dangerosité du pin d'Alep, que les appelants n'ont entrepris un élagage qu'après la première réunion d'expertise, que cet élagage demeure partiel, que la prescription et la destination du père de famille ne sont pas démontrées et que l'arrachage du grand pin est le seul remède aux désordres disproportionnés qu'ils subissent.

S'agissant de leurs demandes indemnitaires, les intimés plaident pour l'essentiel qu'elles sont justifiées au regard des dommages subis par leur propriété nécessitant une reprise de la terrasse, des escaliers et de la façade, que les appelants ne peuvent exciper de leur propre carence dans l'entretien de leur fonds, que les avis officieux qu'ils produisent pour minimiser leur responsabilité sont inopérants alors que l'expert judiciaire a mis clairement en évidence l'importance des désordres et leur causalité ainsi que la dangerosité de la situation entretenue par les époux [S]/[I].

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 4 octobre 2022.

MOTIFS de la DECISION

Les époux [S]/[I] abandonnant leurs demandes de médiation préalable et en nullité du rapport d'expertise judiciaire, la confirmation du jugement rejetant ces demandes s'impose. Pour le surplus, les parties reprennent en appel des prétentions et un argumentaire similaires à ceux soumis au premier juge.

Sur les troubles anormaux de voisinage :

Si l'article 544 du code civil confère le droit de jouir « de la manière la plus absolue » des choses dont on est propriétaire, leur usage ne peut s'exercer en contrariété des lois et règlements, ni être source pour la propriété d'autrui, bénéficiant des mêmes prérogatives, d'un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage ; l'anormalité s'apprécie en fonction des circonstances locales, de la destination normale et habituelle du fonds troublé, de la perception ou de la tolérance des personnes qui s'en plaignent, doit revêtir une gravité certaine et être établie par celui qui s'en prévaut. Le dommage s'entend pour les personnes de toutes dégradations des conditions de vie et pour les biens de tous désordres affectant le fonds voisin. S'agissant d'un régime de responsabilité autonome, fondé sur un fait objectif à l'exclusion de toute faute ou négligence, les dispositions des articles 1382 à1384 anciens du code civil, aujourd'hui 1240 à 1242 lui sont inapplicables.

En l'espèce, les procès-verbaux de constat produits par les intimés et le rapport de l'expert judiciaire [P] montrent que sont implantés sur le fonds [S]/[I] des pins d'Alep d'une hauteur de 15 à 20 mètres, deux eucalyptus d'une hauteur de 13 à 15 mètres, qu'un grand cyprès et un pin d'Alep sont implantés à moins de 2 mètres de la limite séparative, que plusieurs branches de ces arbres surplombent la propriété [B]/[W], constituent une dangerosité en raison de chute possible par vent fort et la présence de chenilles processionnaires, que la chute importante d'aiguilles du gros pin d'Alep oblige à un nettoyage fréquent des allées, terrasses et toitures et obstrue la circulation des eaux pluviales dans les gouttières, que ses racines ont déformé une terrasse en ciment et un escalier de la villa des intimés ; il est admis enfin qu'en janvier 2014 une branche d'eucalyptus est tombée brutalement sur leurs fonds occasionnant des dommages à un jeu d'enfants (cf rapport page 5).

Les consorts [B]/[W] ne peuvent être contraints au curage répété des gouttières en toiture, au balayage constant d'amas conséquents d'aiguilles de pin, à la déformation du bâti par des racines invasives et à vivre dans la crainte permanente de chutes de branches imposantes sur leurs personnes, celles de leurs proches et de tous visiteurs ainsi que sur leur habitation. Le trouble anormal de voisinage est donc caractérisé.

Sur les travaux de reprise :

Il n'est pas douteux que l'arrachage du gros pin d'Alep constituerait le remède adapté et pertinent à la cessation du trouble mais les appelants objectent, en lecture du point n°2 du rapport d'expertise (cf page 4) que celui-ci, âgé de 50 à 60 ans a nécessairement dépassé les 2 mètres de hauteur depuis plus de 30 ans et que l' arrachage prévu à l'article 672 du code civil est prescrit ; en revanche, ils ne peuvent se prévaloir de leur propre carence dans l'entretien et l'élagage de cet arbre pour s'opposer à l'éradication de ses racines destructrices et ce quand bien même l'arbre viendrait à dépérir s'agissant d'un droit imprescriptible ainsi qu'il ressort de l'article 673 du même code. En page 6 du rapport précité, l'expert note d'ailleurs l'urgence à y procéder « pour arrêter leur propagation et éviter de nouveaux dégâts ».

Il préconise la mise en place le long de la clôture séparative d'une barrière anti racines après creusement d'une tranchée au droit de l'emplacement du pin litigieux ; l'expert évalue le coût de ces travaux à la somme non contestée de 5500 € HT, soit 6600 € TTC qu'il convient d'allouer aux intimés.

La nécessité de procéder à la coupe des branches en surplomb est également admise, bien que les parties s'imputent mutuellement l'échec d'une intervention amiable ; le jugement condamnant les époux [S]/[I] à l'entreprendre sous astreinte est confirmé sauf à en augmenter le montant pour éviter tous atermoiements futurs.

Sur les préjudices :

Au vu de ce qui précède, les consorts [B]/[W] ont été contraints à un nettoyage de la toiture et des gouttières pour un montant estimé et non critiqué de 720 € qui sera reconduit ; il en va de même du montant de 749 € correspondant au préjudice matériel consécutif à la chute de la branche d'eucalyptus intervenue en janvier 2014 nécessitant l'intervention d'un jardinier et le remplacement du trampoline détruit (cf pièces n° 15 et 16 du dossier des intimés).

La reprise de la terrasse est évaluée à la somme non contestée de 1375 € TTC. Les parties débattent en revanche des dommages en façade par infiltrations d'eaux pluviales et à l'escalier en produisant pour l'appelant le rapport de l'expert officieux [V] [Y] et pour les intimés celui de [D] [L] ; l'expert judiciaire n'a pas pour sa part réalisé de constatations circonstanciées et contradictoires sur ces éléments ; en outre, les dommages sont invoqués à titre d'éventualité en page 5 de son rapport ; l'expert officieux [Y] explique le 1er mars 2016 avoir relevé des infiltrations d'eaux au droit des fenêtres qu'il explique par une désolidarisation du cadre des menuiseries bois et que la fissure située à la jonction des deux murets en partie haute de l'escalier est inhérente au mode de construction ; le rapport postérieur de l'expert [L] du 22 juin 2019 ne remet pas en cause cette analyse. En conséquence, il n'y a pas lieu d'allouer de sommes complémentaires à ce titre.

Les intimés sont irrecevables à solliciter la condamnation pour l'avenir des époux [S]/[I] à enlever les nids éventuels de chenilles prossessionnaires pouvant parasiter leurs arbres mais sont fondés à être indemnisés dans les termes du rapport d'expertise (cf rapport page 7) de la destruction de celui constaté par l'huissier [F] dans son procès-verbal du 7 janvier 2014, soit 540 € TTC.

Le préjudice de jouissance n'est pas contestable en ce que les consorts [B]/[W] ont été privés d'ensoleillement et de l'usage de leur terrasse ; de même il n'est pas contesté que la chute de la branche d'eucalyptus a interrompu la liaison télécom de l'habitation pendant trois jours ; ces chefs de préjudice sont indemnisés à hauteur de 5000 € pour le premier et 300 € pour le second.

Le préjudice esthétique est exactement qualifié en ce que l'expert retient la vision dégradée de la terrasse déformée, de sols et d'une toiture jonchés d'aiguilles de pin ; les consorts [B]/[W] expliquent à bon droit qu'il ne se confond pas avec le trouble de jouissance évoqué ci-dessus ; il est évalué à la somme de 1000 €.

Ces derniers justifient, par un échange de courrier avec l'agence immobilière Mercure, de la difficulté de louer leur villa en location saisonnière ou à l'année compte tenu des nuisances permanentes l'affectant (cf pièce n° 10 de leur dossier) ; les appelants admettent d'ailleurs que ce préjudice s'analyse en une perte de chance dont l'indemnisation n'est jamais égale à l'avantage que la chance aurait procuré si elle s'était réalisée ce qui exclut nécessairement l'octroi de dommages-intérêts à hauteur des loyers attendus ; en revanche ces loyers (7800 € en période estivale) permettent d'évaluer le préjudice pour la période 2014-2015 à la somme de 2000 €.

Enfin, les intimés ont occupé leur villa dans la crainte constante d'un dommage corporel et/ou matériel et d'un risque tout aussi avéré d'incendie tenant au caractère hautement inflammable des aiguilles de pin. Leur préjudice moral est certain et doit être évalué au regard de sa durée à la somme de 3'000 €.

***

Contraints de comparaître une seconde fois en justice et de supporter les frais inhérents de conseil et de représentation, les consorts [B]/[W] sont fondés en leur demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [S]/[I] qui succombent dans leurs prétentions sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel en application de l'article 696 du même code, étant rappelé que les constats d' huissiers effectués à l'initiative d'une partie à titre de preuves des faits qu'elle allègue ne relèvent pas des frais taxables.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu l'arrêt de retrait du rôle en date du 25 octobre 2018,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il :

-déboute les époux [S]/[I] de leurs demandes en renvoi de l'affaire en médiation et en nullité du rapport d'expertise,

-retient l'existence d'un trouble anormal de voisinage,

-déboute les consorts [B]/[W] de leur demande d'arrachage du grand pin d'Alep,

-condamne les époux [S]/[I] à faire procéder à l'élagage des branches d'arbres dépassant la limite séparative des propriétés sous astreinte -portée à 100 € - par jour de retard sur une durée de quatre mois à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt,

-condamne les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] la somme de 3 000 € au titre du préjudice moral,

-fait application de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

Condamne les époux [S]/[I] à payer aux consorts [B]/[W] les sommes de:

-6600 € TTC pour le traitement des racines du grand pin d'Alep,

-2009 € au titre du préjudice matériel,

-1375 € TTC au titre des travaux de réfection de la terrasse,

-5300 € au titre du préjudice de jouissance,

-1000 € au titre du préjudice esthétique,

-2000 € pour perte de chance locative,

-2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne les époux [S]/[I] aux dépens de première instance et d'appel intégrant ceux de la procédure de référé en désignation d'expert et les frais d'expertise judiciaire.

Le Greffier Pour le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/12397
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;19.12397 ?
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