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08/12/2022 | FRANCE | N°19/04958

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 08 décembre 2022, 19/04958


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N°2022/ 499













Rôle N° RG 19/04958 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEALH







[A] décédé [H]

[X] [R] épouse [H]





C/



[Y] [J]

[W] [I] divorcée [J]

[X] [R] épouse [H]

[G] [Z] [B] [H]

[C] [T] [P] [H] épouse [V]

SARL CABINET [U]



















Copie exéc

utoire délivrée le :

à :





ASSOCIATION SCHWANDER ARRIVAT



la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ



SCP JACQUIER & ASSOCIES





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de Martigues en date du 01 Février 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11 16...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

lv

N°2022/ 499

Rôle N° RG 19/04958 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEALH

[A] décédé [H]

[X] [R] épouse [H]

C/

[Y] [J]

[W] [I] divorcée [J]

[X] [R] épouse [H]

[G] [Z] [B] [H]

[C] [T] [P] [H] épouse [V]

SARL CABINET [U]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

ASSOCIATION SCHWANDER ARRIVAT

la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ

SCP JACQUIER & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de Martigues en date du 01 Février 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11 16-1048.

APPELANTS

Monsieur [A] [H] décédé le 05 juillet 2020

né le 21 Décembre 1931 à [Localité 11] (59), demeurant de son vivant [Adresse 2]

Madame [X] [R] épouse [H], tant en son nom personnel que venant aux droits de M. [A] [H] selon dévolution succesorale du 16/09/2020

née le 04 Février 1938 à [Localité 7], demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Franck LENZI de la SELARL FRANCK LENZI ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AVIGNON, plaidant

INTIMES

Monsieur [Y] [J]

assignation portant significaton de la da le 31.05.19 à étude

né le 23 Avril 1973 à [Localité 9] (13), demeurant [Adresse 1]

défaillant

Madame [W] [I] divorcée [J]

née le 16 Décembre 1977 à [Localité 6] (33), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Willi SCHWANDER de l'ASSOCIATION SCHWANDER ARRIVAT, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE , plaidant

Monsieur [G] [Z] [B] [H]

INTERVANT VOLONTAIRE

Venant aux droits de M. [A] [H] selon dévolution succesorale du 16/09/2020

né le 14 Novembre 1964 à [Localité 10], demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Franck LENZI de la SELARL FRANCK LENZI ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AVIGNON, plaidant

Madame [C] [T] [P] [H] épouse [V]

INTERVANT VOLONTAIRE

Venant aux droits de M. [A] [H] selon dévolution succesorale du 16/09/2020

demeurant [Adresse 5]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Franck LENZI de la SELARL FRANCK LENZI ET ASSOCIES, avocat au barreau D'AVIGNON, plaidant

SARL CABINET [U], dont le siège social est [Adresse 8], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice

représentée par Me Mathieu JACQUIER de la SCP JACQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Caroline CALPAXIDES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, et Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

Défaut,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller pour Madame Hélène GIAMI, Conseiller, faisant fontion de Président de chambre, empéchée et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] sont propriétaires d'une parcelle sur laquelle est édifiée une maison à usage d'habitation sise [Adresse 2], cadastrée section C n° [Cadastre 4].

M. [Y] [J] et Mme [W] [J] née [I] sont propriétaires de la parcelle voisine, [Adresse 1], cadastrée section CS n° [Cadastre 3], sur laquelle est également édifiée une maison à usage d'habitation.

Le 23 décembre 2011, un procès-verbal de bornage a été dressé par le Cabinet [U] et signé par les parties.

Par exploit d'huissier en date du 30 octobre 2012, M. [A] [H] a saisi le juge des référés du tribunal d'instance de Martigues aux fins de faire désigner un expert judiciaire avec pour mission de délimiter les limites entre les propriétés respectives des parties.

Par ordonnance en date du 11 décembre 2012, M. [H] a été débouté de sa demande en l'état de l'existence du procès- verbal de bornage signé par les parties, l'appréciation de la valeur juridique de ce procès-verbal ne relevant pas de la compétence du juge des référés.

Par acte du 23 décembre 2016, M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] ont fait assigner M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et la SARL Cabinet [U] devant le tribunal d'instance de Martigues aux fins, notamment de:

- prononcer la nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 pour insanité d'esprit de M. [A] [H],

- à titre subsidiaire, prononcer la nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 201, le consentement des époux [H] ayant été vicié par le dol des époux [J], avec la complicité de la SARL [U] qui a manqué à son obligation d'information,

- condamner in solidum les parties défenderesses au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts,

- très subsidiairement, faire droit à l'action en rescision de M. et Mme [H] sur le fondement de l'article 2053 du code civil et procéder à la désignation d'un expert judiciaire.

Par jugement contradictoire en date du 1er février 2019, le tribunal d'instance de Martigues a:

- déclaré recevable et non prescrite l'action engagée par M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à l'encontre de M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et de la SARL Cabinet [U],

- rejeté la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 pour insanité d'esprit de M. [A] [H],

- rejeté la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 et rescision pour lésion pour vice du consentement et manquement à l'obligation d'information,

- rejeté la demande en bornage et désignation d'un expert concernant la propriété des parcelles appartenant à M. et Mme [H] et à M. et Mme [J],

- rejeté les demandes de condamnation en dommages et intérêts,

- rejeté les autres demandes pour le surplus,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] aux dépens,

- condamné M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à payer à M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à payer à la SARL Cabinet [U] la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 26 mars 2019, M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] ont interjeté appel de ce jugement.

M. [A] [H] est décédé le 5 juillet 2020.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 27 septembre 2022, Mme [X] [R] épouse [H], venant aux droits de M. [A] [H] selon dévolution successorale du 16 septembre 2020, appelante, M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V], venant aux droits de M. [A] [H] selon dévolution successorale du 16 septembre 2020, intervenants volontaires, demandent à la cour de:

Vu les articles 2224, 2229, 2241 et 2244 du code civil,

Vu les articles 414-1, 646, 1130, 1132 et 1137 du code civil,

Vu le décret du 31 mai 1996 portant règlement de la profession de géomètre-expert et code des devoirs professionnels,

-recevoir Mme [X] [R] épouse [H], M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V], venant aux droits de M. [A] [H], en leurs demandes, fins et conclusions,

- confirmer partiellement le jugement entrepris sur ce seul point:

* déclare recevable et non prescrite l'action engagée par M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à l'encontre de M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et de la SARL Cabinet [U],

- infirmer le jugement du tribunal d'instance de Martigues en date du 1er février 2019 sur les chefs suivants:

* rejette la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 pour insanité d'esprit de M. [A] [H],

* rejette la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 et rescision pour lésion pour vice du consentement et manquement à l'obligation d'information,

* rejette la demande en bornage et désignation d'un expert concernant la propriété des parcelles appartenant à M. et Mme [H] et à M. et Mme [J],

* rejette les demandes de condamnation en dommages et intérêts,

* rejette les autres demandes pour le surplus,

* condamne M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] aux dépens,

* condamne M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à payer à M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamne M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à payer à la SARL Cabinet [U] la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- ordonner le bornage des propriétés des époux [H] et de M. [Y] [J] et Mme [W] [J] née [I],

- préalablement, pour y parvenir, désigner tel géomètre-expert avec mission de:

* se rendre sur les lieux,

* rechercher les limites des propriétés respectives des parties,

* faire une proposition de bornage des propriétés respectives des parties pour que, sur son rapport, il soit ultérieurement statué par le juge,

- condamner solidairement M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et la SARL Cabinet [U] à verser aux consorts [H] la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts,

- condamner solidairement M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et la SARL Cabinet [U] à verser aux consorts [H] la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Ils précisent que devant la cour, ils abandonnent le moyen tiré de l'insanité d'esprit de M. [A] [H].

Ils sollicitent le rejet de la fin de non recevoir tirée de la prescription de leur action aux motifs que:

- l'action a été introduite dans le délai de 5 ans, conformément aux articles 2224 et 2229 du code civil:

* le procès-verbal de bornage a été signé le 23 décembre 2011 et ils ont délivré leur assignation le 22 décembre 2016, soit un jour avant la date butoir du 23 décembre 2016,

* une assignation signifiée interrompt valablement la prescription sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette assignation a été remise au greffe,

* c'est l'envoi de l'assignation ( et non sa réception) qui interrompt la prescription,

- la prescription a été interrompue par l'action en référé au visa de l'article 2241 du code civil, d'autant que les deux actions intentées par eux tendaient au seul et même but, à savoir la remise en cause de la délimitation des propriétés actées par procès-verbal.

Ils concluent à la nullité du procès-verbal de bornage litigieux pour vice du consentement et manquement à une obligation d'information/ conseil:

- sur la réalité d'un dol en ce que l'établissement du procès-verbal en cause a été établi dans des conditions telles qu'elles ont eu pour effet de tromper les époux [H]:

* ils n'ont pas été convoqué aux opérations de bornage, au mépris du guide bornage édité par l'Ordre des Géomètres-experts et ont simplement reçu un appel téléphonique deux jours avant leur demandant d'assister à une réunion sur le terrain des époux [J],

* la présence de son épouse sur les lieux n'était pas guidée par des raisons d'ordre juridique puisque le bien appartenait à l'époque à M. [H] uniquement, de sorte qu'il ne peut être considéré que celui-ci était valablement assisté par son épouse,

* le plan de bornage a été dressé le 21 décembre 2011, de sorte que le 23 décembre, il leur a été demandé de signer un document préétabli par le géomètre-expert,

* le cabinet [U] ne leur a jamais demandé la production de leur titre de propriété ou de tout élément nécessaire à l'opération envisagée,

* les époux [J], aidés de M. [U], ont fait pression sur les époux [H] pour leur amener à singer ce procès-verbal, de telles pressions étant facilitées par l'état de vulnérabilité de M. [A] [H], à la fois très âgé et très malade, ainsi qu'il en ressort des multiples certificats médicaux qui sont communiqués,

- sur la réalité d'un procès-verbal et d'un plan de bornage manifestement infestés d'erreurs et d'inexactitudes:

* ils ont soumis ces documents à l'expertise d'un autre géomètre-expert, M.[S], qui a mis en relief un certain nombre d'erreurs,

* leur maison ne figure même pas sur le procès-verbal de bornage, laissant ainsi penser que le terrain qui la supporte serait un terrain à bâtir,

* le nom de personnes décédées depuis de nombreuses années figure sur lesdits documents, mettant en évidence que le Cabinet [U] ne s'est pas renseigné avant les opérations de bornage,

* le plan de bornage est inachevé en ce qu'il n'est pas établi que le géomètre a examiné les actes de propriétés des parties et les plans annexés,

* la ligne divisoire ne correspond pas à la réalité des titres mais à une seule réalité cadastrale qui ne saurait être prise en considération,

* la ligne divisoire ne correspond à aucun élément devant être pris en compte dans le cadre d'un bornage, notamment la possession,

* M. [H] a fait l'objet de manoeuvres dolosives de la part des intimés, lesquels ont obtenu sa signature en vue d'étendre leur propriété au détriment de la sienne,

* M. [H] n'aurait jamais signé un tel document qui lui était clairement défavorable tant en termes de surface de propriété que de difficultés d'accès à la martelière,

- sur le défaut d'impartialité du Cabinet [U]:

* aucune réunion n'a été organisée, de sorte qu'aucune occasion n'a été donnée à M. [H] de s'exprimer sur ce sujet et encore moins de fournir des documents en sa possession,

* la preuve de la violation du principe du contradictoire est donc avérée,

* le géomètre-expert a manqué à son devoir de conseil et d'information à l'égard.

Mme [W] [J] née [I], suivant ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 28 février 2022, demande à la cour de:

Vu les articles 646 et 1382 du code civil,

Vu les articles 145, 696, 848 et 849 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Martigues du 1er février 2019 en ce qu'il a:

* rejeté la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 pour insanité d'esprit de M. [A] [H],

* rejeté la demande en nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 et rescision pour lésion pour vice du consentement et manquement à l'obligation d'information,

* rejeté la demande en bornage et désignation d'un expert concernant la propriété des parcelles appartenant à M. et Mme [H] et à M. et Mme [J],

* condamné M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] aux dépens,

- infirmer le jugement du tribunal d'instance de Martigues du 1er février 2019 en ce qu'il a:

* déclaré recevable et non prescrite l'action engagée par M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à l'encontre de M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] et de la SARL Cabinet [U],

* rejeté les demandes de condamnation en dommages et intérêts,

* rejeté les autres demandes pour le surplus,

- réformer le jugement du tribunal d'instance de Martigues du 1er février 2019 en ce qu'il a:

* condamné M. [A] [H] et Mme [X] [H] née [R] à payer à M. [Y] [J], Mme [W] [J] née [I] la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- déclaré la demande de Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] prescrite,

- déclarer, en conséquence, Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] irrecevables en leur demande d'annulation du procès-verbal de bornage pour vice du consentement,

- débouter Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

- condamner in solidum Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] à payer à Mme [W] [J] la somme de 10.000 € en réparation du préjudice moral causé,

- condamner in solidum Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] à payer à Mme [W] [J] la somme de 1.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,

Y ajouter,

- condamner in solidum Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] à payer à Mme [W] [J] la somme de 3.500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner Mme [X] [H], Mme [C] [V] et M. [G] [H] aux dépens d'appel.

Elle fait grief au tribunal d'avoir rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action des époux [H] en faisant valoir que:

- le procès-verbal a été signé le 23 décembre 2011 alors que la citation du 22 décembre 2016,

- cependant à défaut d'avoir été remise au rôle du tribunal d'instance de Martigues le 23 décembre 2016 au plus tard, l'action est prescrite, en ce que la demande en justice, pour être interruptive de prescription, est une demande enrôlée,

- l'assignation en référé n'a pu interrompre le délai de prescription:

* elle a été signifiée à la seule requête de M. [A] [H] et non à celle de son épouse,

* celui-ci ne demandait pas au juge des référés d'annuler le procès-verbal mais de le tenir pour inexistant pour des irrégularités purement formelles et entendait lui voir substituer un bornage judiciaire,

* les deux actions ne tendaient pas au même but en ce que l'action en bornage judiciaire est bien distincte par son objet de l'action en nullité d'un procès- verbal de bornage amiable.

Sur le fond et s'agissant de la nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 pour vice du consentement et manquement à une obligation d'information et de conseil, elle soutient que:

- la prétendue vulnérabilité de M. [A] [H] n'est absolument pas démontrée, les certificats médicaux produits n'ayant pas été établis de manière contradictoire et en tout état de cause, ne permettant pas d'établir l'existence, au moment de la signature du document contesté, d'un trouble mental grave, d'une abolition du discernement ou d'une faiblesse intellectuelle quelconque,

- ces pièces médicales ne concernent que M. [A] [H] et non son épouse, qui a pourtant signé le procès-verbal de bornage et dont il n'est pas allégué que son discernement ait été altéré,

- ils ne rapportent pas la preuve d'un quelconque dol, étant rappelé qu'ils habitent dans leur maison depuis 1964 et étaient donc à mêmes de localiser avec précision ce qu'ils considéraient comme étant la ligne divisoire de leur propriété,

- M. [A] [H] a attendu près d'un an après la signature de ce document pour saisir le juge des référés, contestant le procès-verbal pour des irrégularités de forme mais sans invoquer les circonstances ayant présidé à sa signature,

- débouté de ses prétentions, il a attendu 4 ans pour découvrir en 2016, qu'à la date de la signature du procès-verbal, il n'était pas sain d'esprit ou que le couple avait été victime de manoeuvres dolosives,

- la réunion ne s'est nullement tenue à l'improviste en ce que les appelants avaient été prévenus de la réunion deux jours avant,

- les multiples erreurs contenues dans le procès-verbal et le plan de bornage ne sont pas établies, étant rappelé que:

* le géomètre a positionné des marques A et B entre lesquelles est représentée la limite séparative des fonds respectif, matérialisée par un trait rouge distinct de la couleur verte employée pour la représentation de la haie de cyprès,

* le procès-verbal est un document unique comportant la signature des époux [J] mais aussi de M. et Mme [H],

* la haie de cyprès n'a jamais été la ligne divisoire des fonds,

* le bornage amiable est totalement étranger à la notion même de propriété et il ne constitue pas un titre de propriété.

La SARL Cabinet [U], par ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 3 mars 2022, demande à la cour de:

Vu les articles 646 et 2044 du code civil,

Vu les articles 6 et 146 du code de procédure civile,

- rejeter l'ensemble des demandes et prétentions des époux [H],

- condamner les époux [H] à payer au Cabinet [U] la somme de 4.000€ pour procédure abusive,

- condamner les époux [H] à payer au Cabinet [U] la somme de 2.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle souligne que les époux [H] ont librement signé le procès-verbal qu'elle a établi démontrant leur accord sur le bornage, étant rappelé qu'étant propriétaires de leur bien depuis 1964, ils ont nécessairement une parfaite connaissance de leur terrain.

Elle estime que la vulnérabilité de M. [H] désormais invoquée en cause d'appel n'est pas justifiée, les certificats médicaux produits datant de 2016, soit 4 ans après la survenance des faits litigieux, que M. [H] n'a jamais été placé sous un régime de protection quelconque et en tout état de cause, Mme [H], dont la santé mentale n'est pas remise en cause, a signé ledit procès-verbal.

Elle considère avoir parfaitement exécuté sa mission comme en attestent le devis et la facture versés aux débats détaillant les prestations accomplies, démontrant notamment que les parties ont bien été dûment convoquées, qu'en réalité ils tentent de jeter le discrédit sur le travail du géomètre car la réalité ne correspond ni à leur désir, ni à leur croyance.

Elle ajoute que rien n'indique qu'elle ait commis une erreur dans l'établissement de la ligne divisoire, que le document établi par M. [S] n'est pas une étude en vue d'un bornage mais une étude sur trois solutions proposées par son client.

Elle conteste, dans ces conditions, avoir commis une quelconque faute, l'existence d'une collusion frauduleuse avec les époux [J] ne ressortant d'aucun élément.

M. [Y] [J], régulièrement assigné par acte du 31 mai 2019 déposé en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire, n'a pas constitué avocat. Le présent arrêt sera rendu par défaut.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 4 octobre 2022.

MOTIFS

Il convient de recevoir M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V], venant aux droits de M. [A] [H] décédé, en leurs interventions volontaires.

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action engagée par les consorts [H]

Mme [W] [J] née [I] oppose aux consorts [H] l'irrecevabilité de leur action comme étant prescrite.

En vertu de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'article 2229 énonce que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli.

Enfin, conformément à l'article 2241, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

En l'espèce, le procès-verbal de bornage a été signé le 23 décembre 2011 et les époux [H] ont fait assigner les parties intimées par acte d'huissier délivré le 22 décembre 2016, soit dans le délai de cinq ans qui leur était imparti en application de l'article 2224 du code civil.

Contrairement à l'analyse de Mme [W] [J] née [I] , une assignation signifiée interrompt valablement la prescription sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette assignation a été remise au greffe.

En conséquence, la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action des appelants sera rejetée.

Sur la nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011

En cause d'appel, les consorts [H] renoncent au moyen tiré de l'insanité d'esprit de M. [H].

Ils concluent à la nullité du procès-verbal de bornage querellé pour vice du consentement et manquement à une obligation d'information et de conseil.

Ils invoquent plus particulièrement des manoeuvres dolosives tenant aux circonstances d'établissement du procès- verbal de bornage et à l'état de vulnérabilité de M. [A] [H], qui ont eu pour objet et pour effet de les tromper afin de les amener à signer ledit procès-verbal.

L'article 1116 ancien du code civil, applicable au présent litige, dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Les consorts [H] prétendent que l'établissement dudit procès-verbal n'a été précédé d'aucune convocation préalable, que le Cabinet [U] ne leur a réclamé aucune pièce et leur demandé de signer un document préétabli auquel ils n'ont pas participé et qui est de surcroît affecté de nombreuses erreurs et incertitudes.

Le devis et la facture établis par la SARL Cabinet [U] à l'attention de M. et Mme [Y] [J] mentionnent notamment au titre des diligences accomplies ' Convocation des voisins, reconnaissance des limites, recherche d'accord signature du procès-verbal de bornage, pose des bornes', aucun élément produit par les appelants ne venant contredire la réalité de ces prestations, ces derniers se contentant de procéder, sur ce point, par voie d'affirmations.

Il n'est pas contesté que les consorts [H], demeurant dans cette maison depuis 1964, connaissaient parfaitement et étaient donc à aptes à localiser ce qu'ils considéraient comme étant la ligne divisoire et séparative de leur propriété. L'examen du procès-verbal de bornage met en évidence qu'ils n'ont pas pu être trompés s'agissant de la ligne divisoire en ce que:

- cette ligne est indiquée en rouge sur le plan, avec à chaque extrémité la précision ' marque' également en rouge,

- la haie de cyprès apparaît en vert et est clairement mentionnée comme telle.

La mention du second prénom de M. [H] et l'absence d'indication sur la parcelle [H] de l'existence d'un bâti sont sans incidence en ce le plan indique très clairement les deux parcelles contiguës [Cadastre 3] et [Cadastre 4], objets du bornage amiable avec le tracé d'une ligne séparative en rouge permettant de constater sans équivoque possible qu'elle est distincte de la haie de cyprès coloriée en vert, que les appelants considéraient comme étant leur limite séparative.

Quant à la prétendue vulnérabilité de M. [A] [H], âgé et malade à l'époque des faits de nature à faciliter les pressions pour l'amener à signer le procès-verbal de bornage, il sera observé que:

- son épouse, dont il n'est pas allégué d'une quelconque fragilité, était présente et également signé le procès-verbal, aucun élément ne permettant d'établir qu'elle ait attiré l'attention du géomètre ou des époux [J] sur une difficulté quelconque de compréhension de M. [A] [H] en raison de son état de santé, la circonstance que seul ce dernier était alors propriétaire de son bien est indifférente en ce qu'elle a bien participé aux opérations de bornage, aux côtés de son époux,

- les certificats médicaux établis en 2016, 2017 et 2018 à la demande de l'intéressé dans des termes très généraux, plusieurs années après la signature du procès-verbal en décembre 2011, évoquent une prise en charge neurologique de M. [A] [H] qu'à compter de 2016 ainsi qu'une dégradation lente de ses capacités neurologiques depuis 2000 sans plus de précision,

- aux termes de son assignation délivrée le 30 octobre 2012 devant le juge des référés, M. [A] [H] contestait le procès-verbal, arguant de son irrégularité formelle et de la perte d'une bande de 50 centimètres qui aurait été la sienne mais sans invoquer les circonstances ayant présidé à la signature de ce document, aucune manoeuvre dolosive, vulnérabilité ou pression n'étant alors alléguée,

- débouté de sa demande en référé, M. [H] a attendu encore plus de quatre ans pour s'apercevoir que son consentement avait été vicié au moment de la signature du procès-verbal de bornage.

Il n'est donc produit aucune pièce permettant d'établir que les époux [H] n'ont pas consenti aux éléments de ce procès-verbal, le document dont ils se prévalent établi par M. [K] [S] n'etant pas une étude en vue d'un bornage mais une étude sur trois solutions proposées par son client, ce géomètre ayant travaillé en vue d'une revendication de propriété mais nullement d'un bornage, ce qui est totalement différent.

La preuve de manoeuvres frauduleuses de la part des époux [J] ayant vicié le consentement des appelants, avec la complicité de la SARL cabinet [U], laquelle aurait manqué à son obligation de conseil, n'est nullement rapportée. Sur ce dernier point, il sera relevé que les consorts [H] se contentent de procéder par pures affirmations, sans étayer les fautes reprochées au géomètre-expert par une quelconque pièce.

La demande de nullité du procès-verbal de bornage du 23 décembre 2011 ne sera pas accueillie et les appelants seront, par voie de conséquence, déboutés de leurs prétentions tendant à ordonner le bornage des propriétés des parties, de désignation préalable d'un géomètre-expert et de condamnation des intimés à leur verser des dommages et intérêts.

Mme [W] [J] née [I] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice moral en lien direct avec l'engagement de cette procédure par les consorts [H] et encore moins à hauteur du quantum de 10.000 € réclamé.

La SARL Cabinet [U] ne justifiant pas de la part des appelants d'une erreur grossière équipollente au dol, ni de l'existence d'une volonté de nuire, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,

Reçoit M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V], venant aux droits de M. [A] [H] décédé, en leurs interventions volontaires,

Confirme le jugement du tribunal d'instance de Martigues déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme [W] [J] née [I] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Déboute la SARL Cabinet [U] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne Mme [X] [R] épouse [H], M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V] à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, les sommes de:

- 3.000 € à Mme [W] [J] née [I],

- 2.000 € à la SARL Cabinet [U],

Condamne Mme [X] [R] épouse [H], M. [G] [H] et Mme [C] [H] épouse [V] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/04958
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;19.04958 ?
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