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24/11/2022 | FRANCE | N°19/10116

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 24 novembre 2022, 19/10116


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 24 NOVEMBRE 2022



N° 2022/338













N° RG 19/10116 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEPIY







SAS SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION SCT





C/



SARL MARINA SYRACUSE





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Martine GUERINI



Me Agnès ERMENEUX



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce d'Antibes en date du 05 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2018001927.





APPELANTE



SAS SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION SCT, dont le siège social est sis [Adresse 2]



représentée par Me...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 24 NOVEMBRE 2022

N° 2022/338

N° RG 19/10116 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEPIY

SAS SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION SCT

C/

SARL MARINA SYRACUSE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Martine GUERINI

Me Agnès ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d'Antibes en date du 05 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2018001927.

APPELANTE

SAS SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION SCT, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Martine GUERINI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SARL MARINA SYRACUSE, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Frédéric PIAZZESI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie PARANQUE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

La Société COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATIONS (ci-après SCT TELECOM) qui proposent des services et matériels de téléphonie fixe et mobile, a signé avec la société MARINA SYRACUSE, pour les besoins de son activité hôtelière, deux contrats datés 30 septembre 2014, l'un portant sur un service de téléphonie fixe, pour un montant mensuel de 204 euros TTC, le second sur des prestations d'installation, accès Web et maintenance, pour un montant mensuel de 109,80 euros TTC.

La société MARINA SYRACUSE a résilié ces contrats par courrier du 31 mars 2017.Par courrier du 14 juin 2017, la société SCT TELECOM a sollicité, à titre d'indemnité de résiliation anticipée du service de téléphonie fixe, la somme de 7.942,58 euros TTC. Elle a établi une facture à hauteur de ce montant le 31 octobre 2017.

Après mise en demeure restée infructueuse par courrier du 22 février 2018, la société SCT TELECOM a fait assigner, par acte du 14 mai 2018, la société MARINA SYRACUSE devant le tribunal de commerce d'Antibes aux fins d'obtenir la condamnation de cette société à lui régler les indemnités de résiliation.

Par jugement du 5 avril 2019, le tribunal de commerce d'Antibes a :

- Prononcé la nullité des deux contrats datés du 30 septembre 2014 signés entre la société MARINA SYRACUSE et SCT TELECOM,

- Débouté la société MARINA SYRACUSE de sa demande de remboursement de la somme de 3.248,64 euros,

- Condamné la société SCT TELECOM à payer à la société MARINA SYRACUSE la somme de 289,06 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- Condamné la société SCT TELECOM à payer à la société MARINA SYRACUSE la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

La société SCT TELECOM a relevé appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 24 juin 2019.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 12 septembre 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 13 octobre 2022.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 23 décembre 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société SCT TELECOM demande à la cour de :

-Vu les dispositions des anciens articles 1134 et 1147 du Code Civil,

Vu les pièces versées aux débats,

ll est demandé à la Cour de :

-RECEVOIR la société SCT TELECOM en son appel, le déclarer recevable et bien fondé.

-REFORMER le jugement rendu le 5 avril 2019 par le Tribunal de Commerce d'ANTIBES en ce qu'il a prononcé la nullité des deux contrats datés du 30 septembre 2014-signés entre les sociétés MARINA SYRACUSE et SCT TELECOM

- débouté la société SCT TELECOM de sa demande de condamnation de la société MARINA SYRACUSE à lui payer la somme de 7.942,58 € au titre des indemnités de résiliation,

- débouté la société MARINA SYRACUSE de sa demande en remboursement de la somme

de 3248,64 €

-condamné la société SCT TELECOM à payer a Ia SARL MARINA SYRACUSE la somme de 289,06 € avec intérêt au taux légal à compter de la signification du présent jugement.

- condamné la société SCT TELECOM au paiement de la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du CPC.

En conséquence,

DECLARER bien fondée les demandes de la société SCT TELECOM à l'encontre de la

société MARINA SYRACUSE,

CONSTATER Ia résiliation du contrat de téléphonie aux torts exclusifs de la société MARINA SYRACUSE,

DEBOUTER la société MARINA SYRACUSE de ses demandes.

CONDAMNER Ia société MARINA SYRACUSE à payer à la société SCT TELECOM la

somme de 7.942,58 € TIC au titre des indemnités de résiliation.

CONFIRMER le jugement pour le surplus.

CONDAMNER la société MARINA SYRACUSE à payer à la société SCT TELECOM la

somme de 3.000 € par application de l'article 700 CPC.

CONDAMNER la société MARINA SYRACUSE aux entiers dépens, ceux d'appel distraits

au profit de Maitre Martine GUERINI, avocat, conformément a l'article 699 du Code de

Procédure Civile.

Elle fait valoir que :

- Le contrat dédié au service de téléphonie fixe présente des conditions générales et particulières parfaitement lisibles qui sont opposables à la société MARINA SYRACUSE, et prévoit expressément une durée de 63 mois, de sorte qu'aucune erreur sur la durée du contrat ne peut être retenue,

- Les dispositions du code de la consommation ne peuvent être invoquées, la société MARINA SYRACUSE étant un professionnel, et les deux cocontractants des sociétés commerciales,

- Les indemnités de résiliation prévues par le contrat de téléphonie mobile relèvent d'une clause de dédit et non d'une clause pénale, s'agissant de la contrepartie d'un droit de repentir.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 15 novembre 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société MARINA SYRACUSE demande à la cour de :

A titre principal,

CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la nullité du contrat conclu entre la société MARINA SYRACUSE et SCT TELECOM le 20 septembre 2014,

CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société SCT TELECOM au paiement d'une somme de 289,06 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

En conséquence,

DEBOUTER la société SCT TELECOM de son appel,

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER abusive la clause du contrat conclu entre la société MARINA SYRACUSE et SCT le 20 septembre 2014 prévoyant une durée d'engagement de 64 mois,

CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a condamnée SCT au paiement d'une somme de 289,06 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

En conséquence,

DEBOUTER la société SCT de son appel et de ses demandes,

A titre d'appel incident,

REFORMER la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la société MARINA SYRACUSE de sa demande de condamnation au titre de l'inexécution contractuelle de la société SCT,

En conséquence,

CONDAMNER la société SCT au paiement de la somme de 3.248,64 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2014,

En tout état de cause,

CONDAMNER la société SCT au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- Les dispositions de l'article L121-1 du code de la consommation sont applicables,

- Son consentement a été vicié, la durée de l'engagement étant une condition essentielle du contrat, et cette durée ne ressort pas de mentions claires sur la première page des contrats, mais est inscrite dans les conditions générales et particulières de chacun des contrats au verso et dans des caractères de petite taille les rendant peu intelligibles,

- La clause litigieuse est abusive et doit être annulée, en application de l'article L442-6, I,2° du code de commerce

- La société SCT n'a jamais fourni la prestation de fourniture et maintenance de matériel téléphonique, qu'elle a cependant réglé la redevance mensuelle correspondante et ce en pure perte, soit 3.248,64 euros .

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'annulation des deux contrats

Aux termes de l'article L121-1 du code de la consommation en vigueur du 19 mars 2014 au 01 juillet 2016, une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :
(')2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;
b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;
c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;
d) Le service après-vente, la nécessité d'un service, d'une pièce détachée, d'un remplacement ou d'une réparation ;
e) La portée des engagements de l'annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ;

f) L'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;
g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ;
3°) Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en 'uvre n'est pas clairement identifiable

II- Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte ('). »

III-  Le I est applicable aux pratiques qui visent les professionnels.

Aux termes de l'article 1130 ancien du code civil, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

Au cas présent, les dispositions de l'article L 121-1 du code de la consommation sont invoquées à juste titre au soutien de la demande d'annulation pour dol au regard de l'absence de mentions claires sur la première page des contrats de leur durée minimale de 63 ans, laquelle n'est libellée que dans les conditions particulières rédigées avec des caractères que leur petite taille rend peu intelligibles, et seulement en 2ème partie, aucune signature, ni tampon de la société MARINA SYRACUSE n'étant au demeurant apposée.

La société MARINA SYRACUSE est fondée à se prévaloir d'un consentement non éclairé sur la durée de ses engagements, élément substantiel au sens de l'article 1110 ancien du code civil.

La preuve rapportée des man'uvres dolosives résultant de documents contractuels manifestement établis et agencés de façon peu lisible et intelligible, et du défaut de consentement doit conduire à faire droit à la demande de nullité des contrats signés par la société MARINA SYRACUSE.

Le jugement à la motivation duquel il convient de se référer, qui a prononcé la nullité des contrats, sera confirmé de ce chef, la société SCT étant, en conséquence déboutée de sa demande en paiement de l'indemnité de résiliation.

Sur l'appel incident et la demande de la société MARINA SYRACUSE visant à voir condamner la société SCT TELECOM au titre de la non-exécution du contrat au paiement de la somme de 3.248,64 euros

La société MARINA SYRACUSE fait état, aux termes de ses écritures, d'un préjudice à hauteur de redevances mensuelles qui auraient été indûment perçues par la société SCT, à hauteur de la somme de 3.248,64 euros.

Le tribunal a retenu que ces redevances n'avaient pas été facturées, ce que ne conteste pas la société MARINA SYRACUSE. En revanche, elle soutient que ce montant aurait été inclu dans la demande d'indemnité de résiliation, et que ce calcul a été maintenu en cause d'appel.

Aucune nouvelle pièce à cet égard n'a été communiquée en appel. Il sera observé que la société SCT a été déboutée de sa demande d'indemnité de résiliation.

Le jugement, qui a débouté la société MARINA SYRACUSE à ce titre, sera par conséquent confirmé.

Ainsi le jugement, à la motivation duquel il convient de se référer pour le surplus, est confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

La société SCT, partie perdante est condamnée à payer à la société MARINA SYRACUSE une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

-CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Antibes le 5 avril 2019,

Y ajoutant

- CONDAMNE la SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION (SCT) à payer à la société MARINA SYRACUSE une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- DEBOUTE les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

- CONDAMNE la SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION (SCT) aux dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/10116
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;19.10116 ?
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