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22/11/2022 | FRANCE | N°19/15402

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-2, 22 novembre 2022, 19/15402


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2



ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2022



N°2022/366











Rôle N° RG 19/15402

N° Portalis DBVB-V-B7D-

BE7BV





[D] [O]



C/



PROCUREUR GENERAL

























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me François-philippe DE CASALTA-BRAVO



MINISTERE PUBLIC





D

cision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 20 juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00477.



APPELANT



Monsieur [D] [O]

né le 14 juillet 1972 à [Localité 2]

de nationalité comorienne,

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me François-ph...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2

ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2022

N°2022/366

Rôle N° RG 19/15402

N° Portalis DBVB-V-B7D-

BE7BV

[D] [O]

C/

PROCUREUR GENERAL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me François-philippe DE CASALTA-BRAVO

MINISTERE PUBLIC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 20 juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00477.

APPELANT

Monsieur [D] [O]

né le 14 juillet 1972 à [Localité 2]

de nationalité comorienne,

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me François-philippe DE CASALTA-BRAVO, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

PROCUREUR GENERAL,

[Adresse 3]

comparant en la personne de M. Thierry VILLARDO, Avocat général

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 septembre 2022, en chambre du conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président Rapporteur, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président

Madame Michèle CUTAJAR, Conseiller

Madame Hélène PERRET, Conseiller

Greffier présent lors des débats : Madame Jessica FREITAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022,

Signé par Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président et Madame Jessica FREITAS greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 10 février 2009, 1e directeur des services de greffe judiciaire du tribunal d'instance de Marseille a réfusé de délivrer un certificat de nationalité francaise au profit de M. [D] [O], au motif que son état civil était dépourvu de tout caractère probant au sens de l'article 47 du code civil.

Par exploit d'huissier de justice en date du 23 février 2018, M. [D] [O] a fait attraire le Procureur de la République du tribunal judiciaire de Marseille devant ce tribunal, aux fins de voir juger qu'il est de nationalité française par filiation paternelle sur le fondement de l'article 18 du code civil.

Par jugement en date du 20 juin 2019, le tribunal a débouté M. [D] [O] de ses demandes et a constaté son extranéité. Cette décision a fait l'objet d'une signification le 5 septembre 2019.

Par déclaration en date du 4 octobre 2019, M. [D] [O] a interjeté appel de la décision.

Les formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ont été remplies.

Dans le dernier état de ses conclusions, enregistrées le 2 décembre 2019, et auxquelles il est expressément fait renvoi pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [D] [O] demande à la cour de:

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- juger que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré,

- juger nul le refus de certificat de nationalité française opposé par le tribunal d'instance de Marseille le 10 février 2009,

- juger que l'appelant est le fils de M. [Y] [R], de nationalité française, et qu'en application de l'article 17 du Code de la nationalité française, il est lui-même de nationalité française,

- ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité,

- ordonner les mentions prévues à l'article 28 du code civil,

- condamner l'intimé à verser à M. [D] [O] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner l'intimé aux entiers dépens.

Dans le dernier état de ses conclusions, enregistrées le 23 septembre 2022, et auxquelles il est expressément fait renvoi pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, le Ministère Public demande à la cour de :

- constater que le récepissé prévu par l'article 1043 du code de procedure civile a été délivré,

- confirmer le jugement rendu le 20 juin 2019 par le tribunal judiciaire de Marseille,

- débouter M. [D] [O] de l'ensemble de ses demandes,

- dire que M. [D] [O], se disant né le 14 juillet 1972 à [Localité 2] (COMORES) n'est pas de nationalité francaise,

- ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la régularité de la procédure

Aux termes de l'article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en delivre récépissé. En l'espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé. La condition de l'article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. La procédure est donc régulière.

Sur l'action déclaratoire de nationalité francaise

En application de l'article 30 alinéa l du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu'il n'est pas déjà titulaire d'un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

M. [D] [O] ne disposant pas d'un certificat de nationalité française, c'est à lui qu'incombe la charge de la preuve de sa nationalité française. En l'occurrence, il revendique l'application de l'article 17 du code de la nationalité française, comme étant né le 14 juillet 1972.

La mise en oeuvre de ce texte suppose rapportée la preuve d'un lien de filiation légalement établi à l'égard d'un parent francais par la production d'actes d'état civil probants, au sens de l'article 47 du code civil, selon lequel tout acte de 1'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

M. [D] [O]se prévaut de la nationalité française de celui qu'il présente comme étant son père, M. [Y] [R], né en 1936 à [Localité 2]-M'Tsangani (Comores), lequel est français sur le fondement de la déclaration souscrite le 27 octobre 1982 devant le tribunal de première instance de Mamoudzou en application de l'article 10 de la loi du 3 juillet 1975 et de l'article 9 de la loi du 31 décembre 1975.

M. [D] [O] produit aux débats:

- une copie simple d'un jugement d'annu1ation de l'acte de naissance n° 1546/16 rendu par le tribunal de premiere instance de Mutsamudu le 5 novembre 2016 selon lequel, au visa d'un autre jugement supplétif n° 582 du 10 octobre 2009, non produit, est annulé l'acte de naissance n° 351 du 11 novembre 2009; ce jugement dit néanmoins que l'acte de naissance n°351, bien qu'annulé, devra être rétabli par jugement supplétif de naissance rendu par le tribunal de première instance de Mutsamudu.

Cette copie porte la mention d'une légalisation par M. [X], consul des Comores en France, de l'acte n° 1546/ 16 authentifié par le parquet dc Mutsamudu et visé par le ministère des relations exterieures.

- une copie simple d'un jugement supplétif de naissance n° 1565/2016 rendu par le tribunal de premiere instance de Mutsamudu le 9 novembre 2016 selon lequel [D] [O] est né le 14 juillet 1972 à [Localité 2] (Comores), fils de [Y] [R] né vers 1936 à [Localité 2] et de [S] [L], née le 15 août 1942 à [Localité 2].

Cette copie porte la mention d'une légalisation des signatures du cadi et du secrétaire-greffier par Fatima Ali Abdou M.ARWASSE, puis, la légalisation de l'acte n° 1565/2016, authentifié par le parquet de Mutsamudu et visé par le ministère des relations extérieures par M. [X], consul des Comores en France.

L'appelant produit encore une copie d'une expédition certifiée conforme delivrée le 14 décembre

2021 de ce même jugement supplétif de naissance, néanmoins dépourvue de toute légalisation.

- la copie délivrée le 27 janvier 2017 par le centre d'état civil de [Localité 2] d'un acte de naissance n° 56 du 26 janvier 2017 dressé sur jugement supplétif de naissance n°l565/2016 du 9 novembre 2016 rendu par le tribunal de cadi de Mutsamudu. Cette pièce est signée par [F] [G] [K], maire de la commune de [Localité 2], officier de l'état civil.

Cette copie porte la mention d'une légalisation de la signature de '[F] [G]' par le ministère des affaires étrangères de l'Union des Comores, puis la légalisation de 'l'acte n°56/26.01.2017 authenfié par le Parquet de Mutsamudu" par M. [X], consul des Comores en France.

Cependant le jugement d'annulation d'acte de naissance du 9 novembre 2016 n'est pas produit en expédition certifiée conforme, ce qui prive ce documents de toute valeur probante.

Malgré l'abrogation de l'ordonnance de la Marine d'août 1681, la formalité de la légalisation des actes de l'état civil établis par une autorité étrangère et destinés à être produits en France demeure obligatoire, selon la coutume internationale, et sauf convention contraire. Or, dans les rapports entre la France et 1'Union des Comores, aucune convention dispensant les actes d'état civil comoriens de légalisation n'a été conclue.

Pour qu'un acte d'état civil comorien puisse satisfaire aux exigences de la légalisation, celle-ci doit porter sur la signature de l'officier d'état civil qui a délivré la copie de l'acte de naissance, ou sur la signature des juge et greffiers, pour un jugement. Qui plus est, cette légalisation doit obligatoirement émaner soit du consul général de France aux Comores, soit du consul des Comores en France.

Force est de relever en premier lieu que l'appelant ne produit pas les originaux des jugements et acte de naissance dont il se prévaut, mais de simples photocopies. Néanmoins, cette difficulté n'est pas soulevée par le ministère public.

En l'espèce, la mention de légalisation apposée par le consul des Comores sur les copies du jugement du 5 novembre 2016 portant annulation d'acte de naissance, du jugement du 9 novembre 2016 supplétif d'acte de naissance, et de la copie de l'acte de naissance délivrée le 27 janvier 2017, ne précise ni le nom ni la qualité de l'officier d'état civil ou du greffier dont la signature est légalisée. En effet, il est simplement fait rappel que l'acte est authentifié par le parquet de Mtsamundu et visé par le ministère des affaires étrangères de l'Union des Comores. Cette légalisation ne peut donc valablement attester de la véracité de la signature et de la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi.

Enfin la photocopie de la copie certifiée conforme du jugement du 9 novembre 2016 ne comporte trace d'aucune légalisation, et elle est en tant que telle inopposable en France.

Faute de légalisation régulière, les pièces produites par M. [D] [O] ne font pas la preuve d'un état civil permettant d'assurer la chaîne de filiation entre lui et M. [R] [Y].

Surabondamment, le ministère public souligne à juste titre qu'en l'absence d'un acte de mariage des parents allégués de M. [D] [O] - puisque ce dernier ne produit qu'un jugement supplétif d'acte de naissance et non un jugement d'état - aucun lien n'est établi entre l'appelant et M. [R] [Y].

M. [D] [O] ne peut donc revendiquer la nationalité française.

Il sera dès lors débouté de l'ensemble de ses demandes, et la décision frappée d'appel sera confirmée.

Sur la mention prévue par l'article 28 du code civil

Aux termes de l'article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintegration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité.

En conséquence, cette mention sera en l'espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'artic1e 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par decision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. M. [D] [O], qui succombe, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure regulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procedure civile,

Déboute M. [D] [O] de l'ensemble de ses demandes,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement frappé d'appel,

Juge que M. [D] [O], se disant né le 14 juillet 1972 à [Localité 2] (Union de Comores) n'est pas de nationalité française,

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil,

Condamne M. [D] [O] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-2
Numéro d'arrêt : 19/15402
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;19.15402 ?
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