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17/11/2022 | FRANCE | N°22/03062

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 17 novembre 2022, 22/03062


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT SUR DEFERE

DU 17 NOVEMBRE 2022



N° 2022/ 334













N° RG 22/03062 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BI6N6







[M] [Y]





C/



SAS IS CONSEIL





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Valérie BARDI



Me Philippe KLEIN













Décision déf

érée à la Cour :



Ordonnance du Conseiller de la mise en état de la Chambre 3-4 de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 10 Février 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 2018/15479.





DEMANDEUR AU DEFERE



Monsieur [M] [Y]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Valé...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT SUR DEFERE

DU 17 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 334

N° RG 22/03062 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BI6N6

[M] [Y]

C/

SAS IS CONSEIL

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Valérie BARDI

Me Philippe KLEIN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Conseiller de la mise en état de la Chambre 3-4 de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 10 Février 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 2018/15479.

DEMANDEUR AU DEFERE

Monsieur [M] [Y]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Valérie BARDI, avocat au barreau de GRASSE, assisté de Me Georges BENELLI, avocat au barreau de PARIS, plaidant

DEFENDERESSE AU DEFERE

SAS IS CONSEIL, dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Pierre CALLOCH, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant jugement daté du 11 septembre 2018, le tribunal de grande instance de NICE a condamné la société d'expertise comptable IS CONSEIL à verser à monsieur [Y] la somme de 59 568 € au titre de dommages-intérêts pour manquement à son devoir d'information et de conseil, outre 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société IS CONSEIL a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 1er octobre 2018.

Elle a signifié ses conclusions à monsieur [Y] le 27 décembre 2018. Monsieur [Y] a signifié ses conclusions en réplique le 22 mars 2019.

Suivant avis adressé le 29 avril 2021, les parties ont été avisées de la fixation de l'affaire à l'audience de plaidoirie le 14 septembre 2021.

Monsieur [Y] a saisi le conseiller de la mise en état le 7 mai 2021 d'un incident tendant à faire constater la péremption de l'instance.

Suivant ordonnance datée du 10 février 2022, le conseiller de la mise en état a débouté monsieur [Y] de sa demande.

Monsieur [Y] a déféré cette décision à la cour par requête le 25 février 2022.

A l'appui de son déféré, suivant conclusions déposées par voie électronique le 30 septembre 2022, monsieur [Y] rappelle les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile et qu'en l'espèce l'avis de fixation est intervenu plus de deux ans après la dernière diligence accomplie, la signification de ses conclusions le 22 mars 2019. Contestant la motivation du conseiller de la mise en état, il soutient qu'un appel téléphonique entre avocats est par nature confidentiel et ne présente pas les caractéristiques d'une diligence interruptive du délai de péremption. Il précise que cet appel avait pour objet de se renseigner sur les justificatifs RPVA de la signification des conclusions et que le courriel adressé par son conseil le 30 juillet 2020 n'était qu'une réponse à cette conversation téléphonique. Rappelant la jurisprudence de la Cour de cassation, il affirme qu'il appartient aux parties de vérifier le bon déroulement de la procédure. Il conclut en conséquence à l'infirmation de l'ordonnance déférée et demande à la cour de constater que l'instance est périmée, que le jugement du tribunal de grande instance a acquis autorité de la chose jugée et de condamner la société IS CONSEIL au paiement de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société IS CONSEIL, suivant conclusions déposées par voie électronique le 30 septembre 2022, rappelle les dispositions du décret du 9 décembre 2009 et soutient qu'en l'espèce, elle n'avait aucune possibilité d'accomplir une diligence de nature à faire progresser l'instance dans l'attente de la fixation de l'affaire par le conseiller de la mise en état. Elle rappelle les dispositions du code de l'expropriation, transposables en son esprit à la procédure d'appel, et indique que les dispositions de l'article 2 du code de procédure civile doivent s'interpréter en fonction des règles spécifiques de cette

procédure d'appel. Une fois les échanges de pièces et conclusions intervenus entre les parties, il ne pourrait leur être reproché de ne pas être intervenu auprès du conseiller de la mise en état pour demander la fixation de l'affaire.

La société IS CONSEIL indique en outre avoir téléphoné au mois de juillet 2020 au conseil de monsieur [Y] en l'absence de signification de toute conclusion. Ce dernier lui a indiqué par courriel le 30 juillet 2020 en lui faisant parvenir les justifications de la signification par RPVA.

Cette démarche constituerait une diligence au sens de l'article 386 du code de procédure civile et le courriel en réponse, non couvert par la confidentialité des échanges entre avocats, constituerait lui aussi une diligence interruptive. La société IS CONSEIL demande en conséquence à la cour de confirmer la décision déférée, de débouter monsieur [Y] de toutes ses prétentions et de le condamner au paiement d'une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 386 du code de procédure civile dispose que l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.

L'article 2 du code de procédure civile, lui, pose le principe selon lequel les parties conduisent l'instance ou les charges qui leur incombent, et qu'il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis jusqu'à la clôture des débats.

Lorsque le conseiller de la mise en état, au terme des échanges de conclusions prévus par les articles 908 à 910 du code de procédure civile, n'a ni fixé les dates de clôture de l'instruction et des plaidoiries, ni établi un calendrier des échanges, les parties, qui en application de l'article 2 du même code conduisent l'instance, peuvent jusqu'à la clôture de l'instruction invoquer de nouveaux moyens et conclure à nouveau.

Le maintien du dossier en attente de fixation ne prive pas les parties de la maîtrise de la procédure et ne les dispense pas d'accomplir les diligences pour faire avancer l'affaire et faire obstacle à l'acquisition de la péremption; elles peuvent solliciter la fixation de l'affaire à une audience, demande utile puisqu'elle interrompt la péremption.

La péremption peut être interrompue par tout acte qui traduit la volonté certaine des parties de poursuivre l'instance et de faire progresser le litige vers sa solution par une démarche d'impulsion processuelle.

En l'espèce, il n'est ni contesté, ni contestable que la société IS CONSEIL a interjeté appel par déclaration enregistrée au greffe le 1er octobre 2018, puis a déposé ses conclusions d'appelant le 27 décembre 2018 ; monsieur [Y] a, lui, déposé ses conclusions par voie électronique le 22 mars 2019 puis aucun acte n'a été remis au greffe par l'une des parties jusqu'à l'envoi par le greffe d'un avis de fixation le 29 avril 2021, soit plus de deux ans plus tard.

Il apparaît en conséquence qu'au jour de l'envoi de l'avis de fixation, aucun acte n'avait été accompli depuis plus de deux ans et que l'instance était atteinte par la péremption ; la société IS CONSEIL soutient cependant que le délai de péremption avait été interrompu d'une part par l'appel téléphonique adressé en juillet 2020 par son conseil au conseil de monsieur [Y] pour s'étonner de l'absence de conclusions de l'intimé au RPVA, et d'autre part par la réponse faite par courriel envoyé le 30 juillet, courriel auquel était joints les conclusions et le bordereau de pièces.

Le fait de s'enquérir auprès de la partie adverse de l'existence de conclusions et de demander les justificatifs de signification ne peut s'interpréter comme une diligence traduisant la volonté de faire progresser le litige, sauf éventuellement à prouver un dysfonctionnement du RPVA ayant empêché le demandeur d'avoir connaissance des écritures et de vérifier la régularité de la signification ; au cas d'espèce, la société IS CONSEIL n'apporte aucun élément concernant l'existence d'un tel dysfonctionnement et ne justifie pas que son appel téléphonique était motivé par l'impossibilité de prendre connaissance des conclusions et pièces adverses ; de même, la réponse effectuée par le conseil de monsieur [Y], le 30 juillet, consistant à adresser les justifications de la signification des pièces et conclusions via le RPVA s'analyse en un geste de confraternité et de courtoisie, mais ne démontre pas la volonté de faire progresser le litige ; c'est donc à tort que la société IS CONSEIL soutient que cet échange d'informations relatives à des événements figurant déjà au RPVA constitue des diligences au sens de l'article 386 du code de procédure civile ; l'ordonnance du conseiller de la mise en état sera en conséquence infirmée et la cour fera droit aux demandes présentées par monsieur [Y] concernant la péremption et l'autorité de chose jugée attachée au jugement.

Les circonstances de l'espèce imposent en équité de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la partie succombante.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

- INFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état datée du 10 février 2022 dans l'intégralité de ses dispositions, sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau

- CONSTATE la péremption de l'instance engagée par la société IS CONSEIL et enrôlée sous le numéro 18/15479.

- DIT que la décision frappée d'appel a autorité de la chose jugée.

- CONSTATE l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour.

Ajoutant à la décision déférée,

- DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- MET l'intégralité des dépens à la charge de la société IS CONSEIL.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 22/03062
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;22.03062 ?
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