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17/11/2022 | FRANCE | N°19/08611

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 17 novembre 2022, 19/08611


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022



N° 2022/ 329













N° RG 19/08611 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEK2P







SAS JURA FILTRATION





C/



SARL GENERAL TRANSPORTS SERVICES





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Angélique SERAFINI BRIGNON



Me Julien AYOUN













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 08 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F02768.





APPELANTE



SAS JURA FILTRATION, devenue la SAS HIFI FILTER FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]



représentée par M...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 329

N° RG 19/08611 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEK2P

SAS JURA FILTRATION

C/

SARL GENERAL TRANSPORTS SERVICES

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Angélique SERAFINI BRIGNON

Me Julien AYOUN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 08 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F02768.

APPELANTE

SAS JURA FILTRATION, devenue la SAS HIFI FILTER FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Angélique SERAFINI BRIGNON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Guillaume MONNET, avocat au barreau de BESANCON

INTIMEE

SARL GENERAL TRANSPORTS SERVICES, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Julien AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE, assisté de Me Mélanie RASSENEUR, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

La société Jura Filtration a fait appel à la société Général Transports Services afin d'assurer le transport de marchandises en provenance de Tunisie.

La société Général Transports Services n'ayant pas l'agrément de commissionnaire en douane lui permettant d'effectuer les formalités d'importation et le règlement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) d'importation auprès du bureau des Douanes, la société Jura Filtration a donné mandat à la société Promotransit de la représenter afin d'effectuer ces formalités par acte du 27 janvier 2014.

La société Promotransit, au lieu de facturer directement ses prestations à la société Jura Filtration, mandataire, les a facturées à la société Général Transports Services, laquelle les a répercutées à hauteur d'une somme totale de 38.301,11 euros à la société Jura Filtration entre le 22 juillet 2014 et le 25 février 2015. Ces factures ont été réglées par la société Jura Filtration à la société Général Transports Services.

Le 14 avril 2015 et le 10 février 2017 la direction régionale des Douanes a cependant délivré deux avis de mise en recouvrement à la société Jura Filtration en indiquant que la société Promotransit ne s'était pas acquittée du paiement des droits d'importation et avait été placée en liquidation judiciaire dans l'intervalle.

Ainsi, le 20 décembre 2017, après s'être acquittée deux fois du montant de la taxe et après avoir initié une première procédure devant le juge des référés, la société Jura Filtration a assigné la société Général Transports Services devant le tribunal de commerce de Marseille afin d'obtenir le remboursement à titre principal de la somme de 38.301,11 euros.

Par jugement en date du 8 janvier 2019 le tribunal de commerce de Marseille a :

- déclaré valables les factures émises par la société Général Transports Services à l'ordre de la société Jura Filtration et réglées par cette dernière,

- débouté la société Jura Filtration de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamné la société Jura Filtration à payer à la société Général Transports Services la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement

------------

Par acte du 27 mai 2019 la société Jura Filtration a interjeté appel du jugement.

------------

Par conclusions enregistrées le 12 mars 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Jura Filtration, devenue Hifi Filter France fait valoir que :

-à titre principal, les factures émises par la société Général Transports Services à l'ordre de la société Jura Filtration ne reposent sur aucune contrepartie puisque la TVA d'importation n'a jamais été réglée ; cette absence de contrepartie constitue une absence de cause au visa de l'article 1131 du code civil ; les factures émises sans cause sont nulles et de nul effet,

- à titre subsidiaire, la société Général Transports Services était tenue d'une obligation de résultat quant au paiement de la TVA d'importation en contrepartie de la facturation émise et a manqué à ses obligations contractuelles,

- à titre plus subsidiaire, la société Général Transports Services a agi pour le compte de la société Jura Filtration dans le cadre d'un mandat et la société Promotransit en qualité de sous-mandataire ; la société Général Transports Services a manqué à son obligation de prudence et d'information dans le cadre du mandat donné par la société Jura Filtration au visa des articles 1991 et suivants du code civil ; la demande de dommages et intérêts n'est pas nouvelle puisqu'elle tend aux mêmes fins, même si le fondement juridique est différent

Ainsi, la société appelante demande à la cour, au visa des articles 1131, 1134, 1147 et 1991 et suivants du code civil, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement et statuant à nouveau, de :

- condamner la société Général Transports Services à lui payer la somme de 38.301,11 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1° mars 2015, et subsidiairement, à compter du 6 novembre 2017,

- condamner la société Général Transports Services à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens

-----------

Par conclusions enregistrées le 1° avril 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Général Transports Services (SARL) réplique que :

- malgré la défaillance de la société Promotransit attestée par l'administration des Douanes, la société Jura Filtration n'a pas déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de cette société et ne l'a pas mise en cause dans le cadre des procédures judiciaires, préférant se retourner contre un débiteur solvable,

- elle n'est à l'origine d'aucune défaillance contractuelle dès lors qu'elle a réglé à Promotransit les prestations facturées par celle-ci et a transmis les factures correspondantes ; la seule défaillance contractuelle est celle commise par Promotransit,

- la contestation de la société Jura Filtration est tardive ; elle ne s'est jamais engagée à régler la TVA d'importation à l'administration des Douanes mais seulement à régler les factures de la société Promotransit,

- la demande de dommages et intérêts formée par la société Jura Filtration à titre infiniment subsidiaire est nouvelle en appel et donc irrecevable ; subsidiairement, elle est mal-fondée

La société intimée demande ainsi à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et en conséquence de débouter la société Jura Filtration de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de déclarer irrecevables les demandes formées à titre infiniment subsidiaire.

La société Général Transports Services sollicite en outre l'octroi de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

------------

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 1er septembre 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 3 octobre 2022.

A cette date, l'affaire a été retenue et mise en délibéré au 17 novembre 2022.

MOTIFS

Sur la demande en paiement formée par la société Jura Filtration :

Aux termes de l'article 1131 du code civil l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

En l'espèce, la société Jura Filtration ne peut soutenir, en premier lieu, que son obligation de paiement au profit de la société Général Transports Services était dépourvue de cause en l'absence de règlement par celle-ci des droits d'importation auprès de l'administration des Douanes.

En effet, la société appelante ne pouvait ignorer que la société Général Transports Services était dépourvue de capacité en vue de procéder aux démarches relatives au paiement des taxes d'importation en l'absence d'agrément en tant que commissionnaire en douane, cette circonstance l'ayant d'ailleurs contrainte à donner mandat à la société Promotransit pour la représenter selon contrat signé le 27 janvier 2014 au visa des dispositions de l'article 5.2 alinéa 1er du code des douanes.

De même, l'erreur sur la cause de l'engagement ne peut être valablement invoquée dès lors que la société Jura Filtration n'a pu se méprendre sur les rôles respectifs de ses interlocuteurs au vu du mandat donné à la société Promotransit.

Pour le surplus, il n'est pas contesté que la société Général Transports Services a elle-même acquitté le montant des factures au titre des droits d'importation auprès de la société Promotransit, de sorte que le paiement fait en règlement de la créance détenue par la société Général Transports Services n'est pas dépourvue de cause. Au demeurant, la société Général Transports Services n'a bénéficié d'aucun enrichissement sans cause, à l'inverse de la société Promotransit qui aurait encaissé le règlement effectué par la société Général Transports Services sans pour autant reverser les droits au titre de la TVA d'importation auprès des services des Douanes.

En second lieu et pour les mêmes motifs, il ne peut être soutenu que la société Général Transports Services était tenue d'une obligation de résultat consistant à acquitter la TVA d'importation au regard du mandat donné à la société Promotransit et de l'absence d'agrément de la société Général Transports Services.

Enfin, si la société Jura Filtration a donné mandat à la société Général Transports Services d'acheminer des marchandises pour son compte, en provenance de la société Sofima située en Tunisie, la société Jura Filtration ne démontre pas lui avoir également donné mandat en vue de réaliser les formalités d'importation ni de procéder au règlement des droits et taxes dues en raison de l'importation des marchandises, que ce soit de façon expresse ou tacite.

En conséquence, considérant que la société Jura Filtration a procédé volontairement au paiement des taxes et frais d'importation directement auprès de la société Général Transports Services, sans ignorer que celle-ci n'avait pas mandat de procéder elle-même au règlement de ces sommes à l'administration des douanes, et considérant qu'il n'est pas contesté que la société Général Transports Services a elle-même réglé les factures d'importation qui lui ont été adressées par la société Promotransit, la société Jura Filtration ne peut arguer d'une faute commise par la société Général Transports Services ni de l'absence de cause à son engagement.

En tout état de cause, il convient de rappeler que le paiement adressé à celui qui n'aurait pas pouvoir de recevoir pour le créancier oblige le débiteur à s'acquitter une deuxième fois de sa dette entre les mains du créancier.

En outre, au visa des articles 1991 et suivants invoqués par la société Jura Filtration, le mandataire, en l'occurrence la société Promotransit, doit répondre non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. Pour autant, en l'état de la liquidation judiciaire de cette société, la société Jura Filtration n'a attrait en justice que la société Général Transports Services et n'a pas déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire.

Le jugement sera dès lors confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais et dépens :

La société Jura Filtration, partie succombante, conservera la charge des dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et sera tenue de payer à la société Général Transports Services la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 janvier 2019 par le tribunal de commerce de Marseille,

Y ajoutant,

Dit que la société Jura Filtration, devenue Hifi Filter France, conservera la charge des dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Jura Filtration, devenue Hifi Filter France, à payer à la société Général Transports Services la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/08611
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;19.08611 ?
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