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17/11/2022 | FRANCE | N°18/19003

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 17 novembre 2022, 18/19003


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022



N° 2022/ 326













N° RG 18/19003 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNQZ







[X] [V]

SARL AZUR SERVICES RESTAURATION





C/



SAS SOHOVA



[X] [V]

























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Lauriane COUTELIER


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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 17 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017J00047.



APPELANTS



Maître [X] [V], demeurant [Adresse 2], ès qualités de représentant des créanciers de la SARL AZUR...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 326

N° RG 18/19003 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNQZ

[X] [V]

SARL AZUR SERVICES RESTAURATION

C/

SAS SOHOVA

[X] [V]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Lauriane COUTELIER

Me Françoise BOULAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 17 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017J00047.

APPELANTS

Maître [X] [V], demeurant [Adresse 2], ès qualités de représentant des créanciers de la SARL AZUR SERVICES RESTAURATION,

représenté par Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

SARL AZUR SERVICES RESTAURATION, dont le siège social est [Adresse 4]

représentée par Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SAS SOHOVA exploitée sous l'enseigne H HOTEL,

dont le siège social est [Adresse 1]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Nathalie BLANCHET, avocat au barreau de TOULOUSE

PARTIE INTERVENANTE

Maître [X] [V], Mandataire judiciaire demeurant [Adresse 2] pris en sa qualité de madataire liquidataire de la société AZUR SERVICES RESTAURATION, dont le siège social est [Adresse 4]

représenté par Me Lauriane COUTELIER, avocat au barreau de TOULON

INTERVENANT VOLONTAIRE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

La société Sohova, qui exploite un hôtel à [Localité 3] sous l'enseigne Hôtel H, a signé le 28 juin 2016 un contrat de sous-traitance avec la société Azur Services Restauration aux termes duquel cette dernière société était chargée d'exploiter le restaurant ainsi que le bar situés au sein de l'hôtel, dans les mêmes conditions d'ouverture à la clientèle que l'hôtel, et ce, pour une durée de deux ans. Ce contrat faisait lui-même suite à une convention similaire ayant débuté le 1er décembre 2015 sous la dénomination de « de prêt à usage'».

La société Sohova encaissait le prix des petits-déjeuners et repas pris par la clientèle de l'hôtel et les rétrocédait après déduction de «'royalties de 15 % sur les prestations et l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par le restaurant et le bar'».

A compter du 14 novembre 2016 l'hôtel et le restaurant ont été fermés pour la réalisation de travaux.

Par courrier du 15 novembre 2016 la société Sohova a signifié à la société Azur Services Restauration la résiliation de plein droit et sans indemnité du contrat de sous-traitance en faisant valoir les manquements commis par la société Azur Services Restauration.

La société Azur Services Restauration a alors émis une facture au titre de son activité pour les mois d'octobre et novembre 2016 à hauteur de la somme de 3.548,99 euros toutes taxes comprises .

En l'absence de règlement, la société Azur Services Restauration a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Toulon afin d'obtenir la paiement de cette somme et parallèlement, a saisi le tribunal de commerce de Toulon par assignation du 26 décembre 2016 afin de voir constater la résolution du contrat du fait de l'inexécution fautive par la société Sohova de ses obligations contractuelles et la voir condamner au paiement de la somme de 181.640 euros à titre de dommages et intérêts.

Le juge des référés s'est déclaré incompétent au profit du juge du fond.

Par jugement du 3 octobre 2017 la société Azur Services Restauration a été placée en redressement judiciaire

Par jugement en date du 17 octobre 2018 le tribunal de commerce de Toulon a':

-pris acte de l'intervention volontaire de Maître [X] [V] es qualité de représentant des créanciers de la société Azur Services Restauration,

-constaté la résiliation du contrat de sous-traitance entre la société Sohova et la société Azur Services Restauration du fait de l'inexécution fautive de la société Sohova de ses obligations contractuelles,

-constaté que la société Sohova doit à la société Azur Services Restauration la somme de 3.548,99 euros,

-constaté que la société Azur Services Restauration doit à la société Sohova la somme de 4.175,34 euros,

-condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 24.098,91 euros à titre de dommages et intérêts et débouté la société Azur Services Restauration du surplus de ses demandes à ce titre,

-ordonné la compensation des sommes dues par chaque partie et condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 23.472,56 euros déduction faite des 4.175,34 euros au titre de la taxe foncière,

-condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre aux dépens et débouté la société Azur Services Restauration du surplus de sa demande au titre dudit article,

-rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions,

-ordonné l'exécution provisoire du jugement

-------------

Par acte du 3 décembre 2018 la société Azur Services Restauration et Maître [X] [V] ont interjeté appel du jugement.

La société Azur Services Restauration a été placée en liquidation judiciaire simplifiée le 17 décembre 2019, convertie en liquidation judiciaire ordinaire par jugement du 15 septembre 2020.

--------------

Par dernières conclusions enregistrées le 3 octobre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, la société Azur Services Restauration et Maître [V], pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société suivant jugement du 17 décembre 2019, font valoir que':

-le contrat a été résilié à l'initiative de la société Sohova, laquelle ne cherchait qu'un prétexte pour mettre fin au contrat sans indemnité et se débarrasser de son locataire en vue des travaux à venir au sein de l'hôtel et du restaurant,

-aucune faute ne peut lui être imputée dès lors que le restaurant n'était pas ouvert le midi, ni le dimanche soir, rendant les constatations de l'huissier de justice inopérantes'; le défaut d'entretien des locaux ne peut davantage lui être imputé, ces locaux ainsi que les frigos étant partagés avec l'hôtel qui se chargeait directement des petits-déjeuners'et avec les employés de l'hôtel';

-elle réfute tout vol de matériel tel qu'invoqué par la société Sohova,

-sa créance à hauteur de 3.548,99 euros n'est pas contestée'; elle a été en outre contrainte de licencier son personnel, soit un coût évalué à 24.098,91 euros selon attestation comptable'; elle a subi une perte de chiffre d'affaires d'un montant de 176.000 euros représentant 85% de la moyenne du chiffre d'affaires réalisé sur les dis-huit mois du contrat restant à courir,

-la taxe foncière calculée prorata temporis ne tient pas compte du fait que la surface des locaux est partagée avec l'hôtel

Ainsi, les appelants demandent à la cour de':

-confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat conclu le 28 juin 2006 du fait de l'inexécution fautive de la société Sohova de ses obligations contractuelles,

-infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 24.098,91 euros à titre de dommages et intérêts,

Et jugeant à nouveau,

-condamner la société Sohova à lui payer la somme de 200.098,91 euros à titre de dommages et intérêts,

-infirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la société Azur Services Restauration doit à la société Sohova la somme de 4.175,34 euros, et débouter la société Sohova de sa demande de paiement de la somme de 4.175,35 euros au titre de la taxe foncière,

-infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la compensation des sommes dues par chaque partie et débouter la société Sohova de sa demande de compensation,

-condamner la société Sohova au paiement de la somme de 5.000 euros au profit de la société Azur Services Restauration

------------

Par dernières conclusions enregistrées le 5 octobre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Sohova (SAS) réplique que':

-le tribunal de commerce a reconnu les manquements de la société Azur Services Restauration à ses obligations mais a prononcé la résiliation du contrat aux torts de la société Sohova en raison du prétendu non-respect par celle-ci des conditions de forme prévues au contrat'; le délai d'un mois prévu à la clause de résiliation est un délai de préavis de sorte que le courrier du 15 novembre n'était pas une mise en demeure mais une lettre de résiliation et il importait peu que les travaux aient commencé le 14 novembre'; en tout état de cause, un non-respect des conditions de forme ne saurait entraîner une résiliation du contrat à ses torts';

-la résiliation doit donc être prononcée aux torts exclusifs de la société Azur Services Restauration : le restaurant a été fermé les 2, 3, 4 et 6 novembre 2016 en violation de la clause du contrat prévoyant que le restaurant-bar devait être ouvert «'les jours où l'hôtel est lui-même ouvert'» et les constatations de l'huissier ne couvrent pas toutes les autres périodes'; les locaux et le matériel n'étaient pas entretenus'; la société Azur Services Restauration a étendu son activité à d'autres locaux qui n'avaient pas été mis à sa disposition et enfin, elle a subtilisé divers matériels appartenant à la société Sohova,

-la société Azur Services Restauration n'a pas été empêchée d'exécuter le contrat par sa faute,

-la demande de dommages et intérêts de la société Azur Services Restauration fondée sur la perte de chiffre d'affaires n'est pas étayée'; le préjudice ne serait constitué que de la marge nette après imputation des charges et de la fiscalité et correspondrait en réalité à une perte de chance'; le lien de causalité entre les frais de licenciement et la résiliation n'est pas établi et le quantum non justifié';

-la taxe foncière a été calculée au prorata de la surface occupée par la société Azur Services Restauration

La société intimée demande ainsi à la cour de':

-réformer le jugement en ce qu'il a jugé que la résiliation de la convention devait être prononcée aux torts de la société Sohova, et en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 24.098,91 euros à titre de dommages et intérêts,

-juger que la résiliation de la convention de sous-traitance doit être prononcée aux torts de la société Azur Services Restauration à raison des manquements contractuels de cette dernière,

-juger n'y avoir lieu à condamnation de la société Sohova de ce chef

Pour le surplus,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Azur Services Restauration à payer à la société Sohova la somme de 4.175,34 euros et débouté la société Azur Services Restauration du surplus de ses demandes,

-condamner Maître [X] [V], ès qualité de mandataire liquidateur de la société Azur Services Restauration à lui verser une somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens

------------

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 4 avril 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 5 mai 2022. A cette date, l'affaire a été renvoyée pour la régularisation de l'intervention de Maître [X] [V] en qualité de mandataire liquidateur de la société Azur Services Restauration et non en qualité de représentant des créanciers en l'état de la décision de placement en liquidation judiciaire de la société le 17 décembre 2019.

A l'audience du 6 octobre 2022 l'affaire a été retenue et mise en délibéré au 17 novembre 2022.

MOTIFS

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :

Au visa des articles 907, 802 et 803 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats postérieurement à l'ordonnance de clôture, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, à l'exception des demandes en intervention volontaire, des conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, et à l'exception également des demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et des conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

Par ailleurs, l'ordonnance de clôture peut être révoquée s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

En l'espèce, en l'état du renvoi ordonné le 5 mai 2022 aux fins de régularisation de l'intervention de Maître [V] en qualité de mandataire liquidateur de la société Azur Services Restauration et en l'état des conclusions prises en ce sens le 3 octobre 2022, il existe un motif suffisant justifiant que la clôture de l'instruction soit reportée.

En conséquence, il convient d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le'4 avril 2022 et de reporter la clôture au'6 octobre 2022, date des débats.

Sur la résiliation du contrat :

Aux termes de l'article 1134 ancien du code civil, applicable aux contrats signés avant le 1er octobre 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Par ailleurs, conformément à l'article 1184 ancien du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Il est cependant loisible aux parties, dans le cadre de leurs relations contractuelles, de convenir d'une clause résolutoire de plein droit, qui permet aux parties de soustraire la résolution d'une convention à l'appréciation des juges, sauf la possibilité donnée à ces derniers de recouvrer leur pouvoir d'appréciation en cas de contestation sur les modalités d'application de ladite clause au visa de l'article 1134 susvisé.

En l'espèce, par courrier du 15 novembre 2016, la société Sohova, se prévalant de la clause VI du contrat, a notifié à la société Azur Services Restauration la résiliation du contrat conclu le 28 juin 2016 en invoquant une fermeture du restaurant les 2, 3, 4 et 6 novembre 2016, un mauvais entretien des lieux et un entreposage de matériel et objets dans des locaux non mis à disposition.

La société Sohova se prévaut également, dans le cadre de la procédure judiciaire, du vol de certains matériels par la société Azur Services Restauration.

Ainsi, aux termes de la clause VI «'en cas d'inexécution de l'une des conditions du présent contrat, celui-ci sera résilié de plein droit et sans indemnité un mois après notification de l'infraction par acte extrajudiciaire'».

En premier lieu, s'agissant de la non-exploitation du restaurant aux dates susvisées, il ressort des deux procès-verbaux établis par huissier de justice qu'il a été constaté que le 2 novembre à 14 heures, le 3 novembre à 13h40, le 4 novembre à 13h15 et le dimanche 6 novembre à 19h30, le restaurant était vide de clientèle et de personnel, et que le 2 novembre certains éléments de la cuisine étaient sales et des denrées périmées.

Pour autant, au regard de la seule mention au contrat prévoyant que «'le restaurant doit être ouvert tous les jours où l'Hôtel est lui-même ouvert. Lors de certains événements (séminaires, soirées à thèmes ') le restaurant devra être ouvert aux mêmes horaires'» il ne peut en être déduit que la société Azur Services Restauration était tenue d'assurer l'ensemble des services de restauration de midi et du soir, les parties n'ayant donné aucune précision sur les services assurés.

Cette assertion est d'ailleurs démentie par les témoignages d'anciens salariés de l'hôtel, notamment Mesdames [F] [S] (réceptionniste) et [N] [H] (réceptionniste) qui relatent que le restaurant était fermé le midi et le dimanche. Cette organisation est par ailleurs confirmée par les époux [Y], chargés de la cuisine et du service en salle, dont les témoignages attestent que leur service était limité au soir, l'ouverture le midi étant conditionnée à une demande expresse.

En conséquence, ce grief n'était pas de nature à caractériser une faute de la part de la société Azur Services Restauration, aucune demande expresse de la part de la société Sohova ne ressortant des pièces du dossier pour les dates concernées et la société Sohova ne démontrant pas elle-même que la société Azur Services Restauration avait en charge le service de restauration du midi et du soir pour tous les jours de la semaine.

En second lieu, il n'est pas contesté que la cuisine mise à la disposition de la société Azur Services Restauration était partagée avec les employés de l'hôtel qui y prenaient leur déjeuner et qui assuraient les petits-déjeuners de la clientèle. Dès lors, le motif tiré du mauvais entretien des locaux, outre qu'il est relatif et ne met en exergue que les points litigieux, ou de la présence de produits périmés, ne peut de facto être imputé à la société Azur Services Restauration, étant relevé en outre qu'aucune observation ou mise en garde n'a été effectuée à l'égard de la société Azur Services Restauration avant la résiliation notifiée le 15 novembre 2016.

Enfin, et en dernier lieu, s'agissant du matériel entreposé dans des locaux non mis à disposition et du matériel volé, il apparaît qu'aucune des parties n'a produit l'inventaire contradictoire visé à l'article I-2 du contrat de sous-traitance permettant d'appréhender la teneur des locaux et du matériel mis à disposition au moment de la prise de fonction de la société Azur Services Restauration.

Il en résulte qu'aucune comparaison n'est permise entre l'entrée dans les lieux et la sortie, de nature à imputer à la société Azur Services Restauration la responsabilité de «'l'emprise'» dénoncée au courrier de résiliation et pas davantage à lui imputer le vol de matériel, étant précisé qu'en tout état de cause, ce grief est postérieur à la résiliation du contrat.

En conséquence, il ressort de ce qui précède que la résiliation prononcée par la société Sohova le 15 novembre 2016 sur la base de fautes commises par la société Azur Services Restauration n'est pas justifiée, sans qu'il soit nécessaire d'apprécier les conditions de forme de la lettre de résiliation, cet élément n'étant pas de nature à caractériser une faute contractuelle de la part de la société Sohova.

En revanche, il y a lieu de juger que la société Sohova a invoqué de mauvaise foi la clause résolutoire contenue au contrat, et ce, alors même qu'elle entreprenait des travaux dès le 14 novembre 2016, l'obligeant à fermer l'hôtel et le restaurant, tel que cela ressort des divers échanges postés sur des listes de discussions relatives au référencement des hôtels, et ce, alors qu'aucun des griefs invoqués n'avait fait l'objet d'une mise en garde préalable.

Le jugement doit dès lors, par substitution de motifs, être confirmé en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat en raison de la faute commise par la société Sohova.

Sur les dommages et intérêts :

La résiliation fautive du contrat, en ce qu'elle a eu lieu de façon anticipée, à l'issue de six mois d'exécution sur une durée initiale de deux ans, a fait perdre une chance à la société Azur Services Restauration de percevoir les rétrocessions sur le prix des repas encaissé par la société Sohova et justifie dès lors une indemnisation de son préjudice.

Par ailleurs, elle a été contrainte de procéder au licenciement des époux [Y] en l'état de la fin de son activité, dont il n'est pas contesté qu'elle avait débuté en réalité le 1° décembre 2015. Ces licenciements doivent être considérés comme une conséquence directe de la cessation brutale du contrat liant les deux sociétés.

A cet égard, la société Azur Services Restauration produit un bilan du 1° décembre 2015 au 31 décembre 2016 attestant d'un chiffre d'affaires de 120.815 euros. Pour autant, ce chiffre d'affaires ne tient pas compte des charges pesant sur la société et qui ont, du fait de la résiliation, été évitées par ailleurs.

En outre, la perte de chance ne peut être évaluée exactement au gain attendu ou réalisé l'année précédente mais sert de référence à l'évaluation du préjudice s'agissant en l'espèce d'une facturation, non pas fixe, mais conditionnée aux aléas de gestion et de fréquentation de l'hôtel-restaurant.

Ainsi, en l'état des éléments communiqués, et des frais rendus nécessaires par le licenciement de deux employés, il y a lieu d'évaluer le préjudice subi par la société Azur Services Restauration à la somme totale de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera dès lors infirmé en ce qu'il a alloué à la société Azur Services Restauration la somme de 24.098,91 euros à titre de dommages et intérêts et la société Sohova sera condamnée à lui payer la somme totale de 80.000 euros à ce titre.

Sur les autres demandes financières :

Il n'est pas contesté que la société Azur Services Restauration détient une créance à hauteur de 3.548,99 euros au titre des prestations effectuées aux mois d'octobre et novembre 2016.

En revanche, étant rappelé que le contrat constitue la loi des parties au visa de l'article 1134 du code civil rappelé ci-dessus, aucun motif ne justifie de dispenser la société Azur Services Restauration du paiement de la somme de 4.175,34 euros au titre de la taxe foncière dès lors que son paiement et ses modalités ont été convenus entre les parties.

Le jugement sera dès lors confirmé de ce chef.

Sur les frais et dépens :

La société Sohova conservera la charge des dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

En outre, la société Sohova sera tenue de payer à la société Azur Services Restauration, prise en la personne de son mandataire liquidateur, la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le'4 avril 2022 et reporte la clôture au'6 octobre 2022, date des débats,

Confirme le jugement rendu le 17 octobre 2018 par le tribunal de commerce de Toulon sauf en ce qu'il a':

-condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 24.098,91 euros à titre de dommages et intérêts et débouté la société Azur Services Restauration du surplus de ses demandes à ce titre,

-ordonné la compensation des sommes dues par chaque partie et condamné la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration la somme de 23.472,56 euros déduction faite des 4.175,34 euros au titre de la taxe foncière

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration, prise en la personne de son mandataire liquidateur, la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société Sohova aux entiers dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Sohova à payer à la société Azur Services Restauration, prise en la personne de son mandataire liquidateur, la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 18/19003
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;18.19003 ?
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