COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Hospitalisation sans consentement
1-11 HO
ORDONNANCE
DU 27 OCTOBRE 2022
N° 2022/0158
Rôle N° RG 22/00158 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKG4U
[I] [K]
C/
LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE (ARS)
LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER VALVERT
ATP (ASSOCIATION TUTELAIRE PROTECTION)
LA PROCUREURE GENERALE
Copie délivrée :
par courriel
le : 28 Octobre 2022
- au Ministère Public
- jld ho-Marseille
-Le directeur
-L'avocat
-Le curateur
par LRAR et LS
- le patient
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 14 octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n°22/09706.
APPELANTE
Madame [I] [K]
née le 12 Décembre 1942, demeurant [Adresse 2]
comparante en personne, assistée de Me Laurie CALMET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office
INTIME
Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE (ARS)
[Adresse 3]
non comparant et non représenté
ETABLISSEMENT D'HOSPITALISATION
Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER VALVERT
[Adresse 5]
non comparant et non représenté
CURATEUR
ATP (ASSOCIATION TUTELAIRE PROTECTION)
[Adresse 1]
non comparant et non représenté
PARTIE JOINTE
Madame LA PROCUREURE GENERALE
demeurant COUR D'APPEL - [Adresse 4]
non comparante, ayant déposé des réquisitions écrites communiquées aux parties présentes à l'audience
*-*-*-*-*
DÉBATS
L'affaire a été débattue le 27 Octobre 2022, en audience publique, devant Madame Laurence DEPARIS,
Conseillère, déléguée par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,
Greffière lors des débats : Madame Michèle LELONG,
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2022.
ORDONNANCE
Réputée contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2022
Signée par Madame Laurence DEPARIS, Conseillère et Madame Michèle LELONG, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire,
RAPPEL DE LA PROCÉDURE
Mme [K] a fait l'objet le 8 décembre 2021 d'un arrêté du préfet des Bouches du Rhône l'admettant en soins psychiatriques contraints.
Cette mesure a été prolongée par arrêtés préfectoraux en date des 8 avril 2022 et 3 octobre 2022.
Par ordonnance en date du 14 octobre 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille a rejeté la demande de mainlevée de la mesure de soins psychiatriques contraints de Mme [K] reçue le 4 octobre 2022.
Par lettre en date du 22 octobre 2022 reçue et enregistrée le 24 octobre 2022 au greffe de la chambre de l'urgence, Mme [K] a interjeté appel de la décision précitée.
Le ministère public a conclu par écrit en date du 26 octobre 2022 à la confirmation de la décision querellée et il a été donné connaissance aux parties présentes à l'audience de ces conclusions.
A l'audience du 27 octobre 2022, Mme [K] a comparu et déclare : 'Je suis en programme de soins, j'ai agressé ma voisine. Elle m'a volé des papiers importants, tous les jours, et un jour je l'ai menacé avec un couteau en 2011. Je ne supporte pas mes médicaments c'est pour ça que je ne peux plus marcher depuis 2019. Ils devaient m'aider à marcher, je suis resté trois mois à l'hôpital. Je veux rester en hôpital de jour, mais je ne veux plus prendre mes médicaments; Jusqu'en 2019 je marchais bien; Mais depuis que je prends des médicaments, je ne peux plus marcher. Mes médicaments sont trop forts. Je n'ai pas vu le docteur [T] le 25 octobre. Je l'ai vu l'an dernier. J'habite seule, et des infirmiers viennent à la maison. Je prends le taxi pour aller à l'hôpital. Au 4ème, ma voisine est partie, son propriétaire a vendu l'appartement.'
Son avocat, entendu, conclut à la mainlevée de la mesure en raison du défaut de notification des arrêtés du 08 avril 2022 et du 03 octobre 2022 à Madame [K] ; par ailleurs, le certificat médical du 25 octobre a été fait sans entretien avec Madame [K], c'est un copier coller du précédent certificat médical, on ne peut en tenir compte. Je demande la mainlevée de la mesure actuelle.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'appel interjeté dans le délai de 10 jours prévu par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique apparaît recevable.
L'article L. 3211-12 I dispose que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu'en soit la forme.
Mme [K] a fait l'objet d'une mesure de soins sans consentement dans les circonstances ci-dessus précisées, les conditions de cette mesure étant énumérées à l'article L 3213-1 du code de la santé publique, selon lesquelles l'intéressé doit présenter des troubles mentaux qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.
Il est justifié de la prise de décisions préfectorales de maintien de la mesure de soins psychiatriques dans les conditions prévues par l'article L 3213-4 du code de la santé publique.
Le dossier comporte les certificats médicaux mensuels établis depuis le dernier arrêté préfectoral en date du 8 avril 2022 exigés par la loi, à savoir les certificats médicaux établis les 6 mai 2022, 3 juin 2022, 30 juin 2022, 5 août 20222 septembre 2022 et 3 octobre 2022.
Le dernier certificat médical mensuel en date du 3 octobre 2022 établi par le Dr [D] mentionne que l'état de Mme [K] est relativement stable, qu'elle adhère à la prise en charge à l'hôpital de jour, que persistent cependant des idées de persécution diffuses. Elle ajoute que Mme [K] remet en cause le traitement médicamenteux, que sa participation affective reste peu importante et qu'elle demeure dans le déni de la pathologie avec une adhésion aux soins très précaire.
Le certificat de situation en date du 25 octobre 2022 fait état des mêmes éléments que ceux-sus-visés et conclut à la nécessité de maintenir la mesure en l'état.
Sur le moyen tiré de l'absence de notification de la décision de maintien des soins psychiatriques
L'article L. 3216-1 du code de la santé publique prévoit que la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire. Le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1. Dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.
Par ailleurs, l'article L. 3211-3 du code de la santé publique prévoit qu'avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;
b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.
L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.
En l'espèce, il n'y a pas lieu de s'attacher au défaut de notification de l'arrêté en date du 8 avril 2022 qui prévoyait une période de soins du 8 avril 2022 au 8 octobre 2022, période révolue au moment du contrôle exercé par le juge.
Il ne résulte pas de la procédure que l'arrêté portant maintien d'une mesure en soins psychiatriques en date du 3 octobre 2022 ait été notifié à Madame [K]. Il ne résulte pas non plus des pièces produites que les décisions mentionnées ci-dessus aient fait l'objet auparavant de tentatives de notifications qui auraient été reportées du fait de l'état de santé de Madame [K]. Cette dernière évoque son grief indiquant ne pas avoir eu connaissance de cette décision ni des dates de reconduction de son programme de soins.
Dans ces conditions, il importe de conclure que l'absence de notifications de la décision sus-visée a fait grief à Madame [K], et il convient d'accueillir ce moyen de nullité et d'ordonner la mainlevée de la mesure.
Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R 93-2° du code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire.
Déclarons recevable l'appel formé par [I] [K]
Infirmons la décision déférée rendue le 14 octobre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE.
Ordonnons la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques d'[I] [K].
Laissons les dépens à la charge du trésor public.
La greffière,La présidente,