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27/10/2022 | FRANCE | N°18/09725

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 27 octobre 2022, 18/09725


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2022



N° 2022/

CM/FP-D











Rôle N° RG 18/09725 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCSW3







[Z] [O] [G]





C/



Association IME MIRASOL - CROIX ROUGE FRANCAISE





















Copie exécutoire délivrée

le :

27 OCTOBRE 2022

à :

Mme [P] [E] (Délégué syndical ouvrier)
r>

Me Luc ALEMANY, avocat au barreau de MARSEILLE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 17 Mai 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F17/233.





APPELANT



Monsieur [Z] [O] [G], demeurant ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 27 OCTOBRE 2022

N° 2022/

CM/FP-D

Rôle N° RG 18/09725 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCSW3

[Z] [O] [G]

C/

Association IME MIRASOL - CROIX ROUGE FRANCAISE

Copie exécutoire délivrée

le :

27 OCTOBRE 2022

à :

Mme [P] [E] (Délégué syndical ouvrier)

Me Luc ALEMANY, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 17 Mai 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F17/233.

APPELANT

Monsieur [Z] [O] [G], demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [P] [E] (Délégué syndical ouvrier)

INTIMEE

Association LA CROIX ROUGE FRANCAISE demeurant [Adresse 2] exploitant l'IME MIRASOL ([Adresse 3]),

représentée par Me Luc ALEMANY, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Catherine BERTHOLET, avocat au barreau de MARSEILLE, et par Me Anne laure PERIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Septembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Catherine MAILHES, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2022,

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] -[G] (le salarié) a été embauché en qualité d'éducateur spécialisé à temps complet par l'association la Croix-Rouge française, (l'association) au sein de son établissement IME Mirasol sur plusieurs périodes :

du 21 au 26 juin 2004 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité,

du 6 septembre au 26 octobre 2007 dans le cadre d'un contrat à durée déterminée à temps partiel pour remplacement d'un salarié absent,

à compter du 1er octobre 2007, la relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, au poste d'éducateur technique spécialisé, position 6, palier 2, coefficient 500 ;

par avenant M. [O] -[G] a occupé un poste de travail à temps complet du 1er octobre 2017 au 11 juillet 2008 pour un remplacement partiel.

La convention collective applicable est celle du personnel salarié de la Croix-Rouge du 3 juillet 2003.

Le salarié a été élu représentant du personnel au sein des institutions représentatives de l'IME et du CCE de la Croix-Rouge française pour la période de mars 2009 à mars 2012.

Le 3 décembre 2008, il a été élu conseiller prud'hommes à Cannes, section activités diverses. Son mandat a perduré jusqu'à la fin 2017.

Le salarié a été en arrêt de travail pour maladie non professionnelle du 27 août 2014 au 12 septembre 2015.

Lors de la première visite médicale de reprise du 14 septembre 2015, le médecin du travail l'a déclaré inapte aux tâches nécessitant des contraintes posturales et de la manutention manuelle ; inapte à la reprise de son poste de travail ; serait apte à un poste de travail administratif ; reclassement en interne souhaité.

Lors de la seconde visite médicale de reprise du 1er octobre 2015, le médecin du travail a confirmé le premier avis dans les termes suivants : 'inaptitude définitive au poste de travail. Serait apte à un poste sans manutention manuelle des charges, les contraintes posturales. Serait apte à un poste de travail administratif par exemple.'

Le 18 janvier 2016, le salarié a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement.

Par courrier du 11 février 2016, il a été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement.

Le 30 mars 2017, M. [O] -[G] a saisi le conseil de prud'hommes de Grasse aux fins de voir dire que le licenciement est intervenu en violation du statut protecteur et qu'il est nul, d'ordonner sa réintégration à un poste de type administratif correspondant aux préconisations faites par la médecine du travail, de condamner son employeur à lui régler l'indemnité compensant la perte de salaire pour la période comprise entre son licenciement et sa réintégration dont la date sera fixée en tenant compte du dernier salaire de référence s'élevant à 2363,80 euros. À titre subsidiaire, à défaut de réintégration, il sollicitait la condamnation de la Croix Rouge française à lui verser les sommes de 63'801 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur, 14'182 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle ni sérieuse, 7091,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents pour 709,14 euros, 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Croix Rouge française s'est opposée aux demandes et a sollicité une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 17 mai 2018, le conseil de prud'hommes de Grasse a :

constaté le sérieux des recherches de reclassement mené par l'employeur,

dit que le licenciement de M. [O] -[G] est intervenu en violation du statut protecteur,

dit que le licenciement de M. [O] -[G] est sans cause réelle et sérieuse,

condamné la Croix Rouge française à régler à M. [O] -[G] :

29'806,20 euros correspondant à l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur,

14'182 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de leurs autres demandes,

laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Selon déclaration d'appel du 11 juin 2018, de son défenseur syndical remise au greffe de la cour, M. [O] -[G] a régulièrement interjeté appel limité du jugement, sur le montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur et sur 'l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents'.

Par arrêt avant-dire-droit du 10 mars 2022, la cour a :

ordonné la réouverture des débats ;

révoqué l'ordonnance de clôture ;

invité les parties à conclure sur l'ampleur de la saisine de la cour au regard des dispositions des articles 901 et 954 du code de procédure civile, pour l'appelante dans le délai de trois mois à compter de ce jour et pour l'intimée dans un délai de quatre mois à compter de ce jour ;

dit que l'ordonnance de clôture interviendra le 22 août 2022 ;

renvoyé l'affaire à l'audience collégiale du 5 septembre 2022 ;

réservé à statuer sur l'entier litige.

La cour a relevé que les dernières conclusions de l'appelant ne mentionnaient pas dans leur dispositif l'objet de l'appel, à savoir la mention de l'infirmation ou de l'annulation du jugement, qu'à aucun moment l'appelant n'avait demandé à la cour d'infirmer le jugement ou de l'annuler, en sorte qu'il lui semblait que par application des dispositions des articles 954 et 901 du code de procédure civile, elle n'avait pas été saisie de la moindre demande par l'appelant, faute de délimitation de l'objet du litige et qu'elle n'était saisie que de l'appel incident.

Aux termes des écritures de son défenseur syndical remises au greffe de la cour le 27 mai 2022, M. [O] [G] demande à la cour de :

débouter l'association la Croix-Rouge française exploitant IME Mirasol de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement est intervenu en violation du statut protecteur,

infirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné l'association La Croix Rouge française à lui régler la somme de 29'806,20 euros de l'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur,

infirmer le jugement rendu en ce qu'il l'a débouté de sa demande de condamnation de l'association La Croix Rouge française à lui régler une somme de 7091,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi qu'une somme de 709,14 euros d'indemnité de congés payés sur préavis,

en conséquence,

condamner l'association La Croix Rouge française à lui régler les sommes suivantes :

63.801,00 euros correspondant à l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur,

7091,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

709,14 euros au titre des congés payés sur préavis,

confirmer le jugement entrepris dans ses autres dispositions,

débouter l'association La Croix Rouge française de toutes ses demandes et de sa demande de condamnation de M. [O] [G] à lui régler une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner aux entiers dépens,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'association La Croix Rouge française à lui régler une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner l'association La Croix Rouge française à lui régler une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

condamner l'association La Croix Rouge française aux entiers dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remis au greffe de la cour le 25 juillet 2022, l'association La Croix Rouge française demande à la cour de :

constater qu'elle n'a pas été saisie de la moindre demande par l'appelant, faute de délimitation de l'objet du litige,

en tirer toutes conséquences,

dire recevable l'appel incident,

confirmer le jugement en ce qu'il a constaté le sérieux des recherches de reclassement mené par l'employeur,

réformer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de M. [O] [G] est intervenu en violation du statut protecteur, dit et jugé que le licenciement de M. [O] [G] est sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a condamnée à régler à M. [O] [G] les sommes de 29'806,20 euros correspondant à l'indemnité au titre de la méconnaissance du statut protecteur, 14'182 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a débouté les parties de leurs autres demandes et en ce qu'il a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens,

par conséquent,

à titre principal,

constater l'obstruction de M. [O] [G] de sa réintégration dans le respect des dispositions légales et jurisprudentielles en vigueur,

constater le caractère manifestement excessif des demandes indemnitaires de perte de salaire de M. [O] [G] et les ramener à de plus justes quanta,

constater le sérieux des recherches de reclassement employeur,

constater l'impossibilité pour M. [O] [G] de cumuler l'indemnisation de la méconnaissance du statut protecteur et celle au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

le débouter de ses demandes,

à titre subsidiaire,

constater le caractère manifestement excessif des demandes de M. [O] [G],

les ramener à de plus juste quantum,

en tout état de cause,

condamner M. [O] [G] au paiement à l'association de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La clôture des débats a été ordonnée le 22 août 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la saisine de la cour

Le salarié considère qu'en indiquant les chefs de jugement critiqués au sein de la déclaration d'appel, cela impliquait qu'il demandait la confirmation du reste du jugement, compte tenu de l'application différée de la jurisprudence de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 17 septembre 2020 n°18-23.623 et qu'en tout état de cause, elle a précisé ses demandes dans les dernières conclusions.

L'association La Croix Rouge française considère que l'appel principal n'a saisi la cour que des chefs portant sur l'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur et l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et s'en rapporte à justice en ce qui concerne l'objet de l'appel.

La cour constate que la déclaration d'appel du salarié n'a pas opéré dévolution sur le chef de dispositif selon lequel le licenciement a été déclaré sans cause réelle et sérieuse, ne s'agissant pas d'un chef dépendant de ceux critiqués, à savoir le montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur ou du montant de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents.

Pour autant, l'association a interjeté appel incident sur cette disposition, en sorte que la cour est saisie d'un appel portant sur la cause réelle et sérieuse du licenciement mais non sur le rejet de la demande de nullité du licenciement.

Par ailleurs, s'agissant d'un appel antérieur au 17 septembre 2020, le corps des conclusions de l'appelant permet de considérer qu'il sollicitait l'infirmation du jugement. Il a en outre précisé l'objet du litige dans ses dernières conclusions, permettant à la cour de statuer en connaissance de celui-ci, à savoir de : l'infirmation du jugement sur le montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur et sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et de la confirmation du surplus des chefs dévolus.

Sur la rupture du contrat de travail

1/ Sur la violation du statut protecteur et l'indemnité pour violation de ce statut

Le salarié soutient qu'il bénéficiait du statut protecteur en sa qualité de conseiller prud'homme par application des dispositions des articles L.2411-1 et L.2411-22 du code du travail et que l'employeur l'a licencié sans autorisation administrative, en violation de ce statut. Il soutient que l'employeur avait connaissance de son mandat de conseiller prud'homme qui avait débuté le 3 décembre 2008 et qui à l'échéance initiale de l'année 2012 avait été prolongé de 5 ans jusqu'à la fin 2017, comme il ressort des attestations de l'organisme de formation agréé des conseillers prud'homme et de relevés d'absences internes où son nom est suivi du sigle ' conseil de prud'hommes'.

Il conteste par ailleurs l'authenticité du questionnaire d'embauche produit par l'employeur sur lequel il aurait mentionné ne pas être salarié protégé, celui-ci n'étant pas signé de sa part.

Il estime ainsi que son licenciement est nul et que ne demandant pas sa réintégration, il a droit à une indemnité au titre de la violation du statut protecteur égale à la rémunération brute qui aurait due être perçue entre la date de la rupture et l'expiration de la période de protection dans la limite de 30 mois de salaire, soit pendant 27 mois à compter du 11 février 2016, précisant que le mandat a expiré le 31 décembre 2017 et que la période de protection a couru jusqu'au 30 juin 2018.

Il fait grief au conseil de prud'hommes d'avoir retranché de la somme les allocations versées par le Pôle emploi, au mépris de la jurisprudence établie, précisant qu'il s'agit d'une indemnisation ayant un caractère forfaitaire, exclusive de soustraction.

L'association conteste le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le licenciement était intervenu en violation du statut protecteur, et fait valoir que, reconnaissant ne pas avoir sollicité l'autorisation de licencier le salarié, elle pensait en toute bonne foi que ce dernier n'exerçait plus son mandat de conseiller prud'homme. Elle soutient d'une part qu'elle n'avait pas été informée au plus tard lors de l'entretien préalable que ce mandat persistait, la charge de la preuve de l'information appartenant au salarié et d'autre part que le salarié s'est montré de mauvaise foi, puisqu'il a sciemment précisé qu'il n'était pas salarié protégé au sein du questionnaire de reclassement qu'il a signé et qu'il s'est volontairement tu tout au long de la procédure sur sa qualité de salarié protégé.

Elle soutient par ailleurs que le salarié a expressément renoncé à sa réintégration et qu'il a refusé de se rendre à la visite médicale organisée à cette fin le 6 juin 2017, ne formulant par ailleurs aucune réponse positive à la proposition de poste qu'elle lui avait faite, et qu'en raison de son inertie dolosive, il ne peut prétendre à la moindre indemnité. Elle précise que l'obligation de réintégration ne porte que sur le poste occupé préalablement au licenciement, à savoir celui d'éducateur technique spécialisé et qu'à défaut, l'employeur doit suivre les préconisations du médecin du travail en vue du reclassement du salarié. Elle ajoute que durant la période de recherche de reclassement, aucun poste de chef de service n'était vacant dans les établissements de la région Paca et que le salarié ne disposait pas des compétences pour occuper un poste de directeur d'établissement.

Elle soutient par ailleurs qu'il n'est pas possible de cumuler l'indemnisation au titre de la méconnaissance du statut protecteur et celle au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse

et subsidiairement que les revenus de remplacement doivent être pris en considération, faisant valoir que seule la violation d'une liberté ou d'un droit fondamental consacré par un texte constitutionnel peut donner lieu à une réparation forfaitaire, et que l'exercice d'un mandat prud'homal ne constitue ni une liberté ni un droit fondamental consacré par un texte constitutionnel.

En application des dispositions de l'article L.2411-1, 17° le conseiller prud'homme bénéficie de la protection contre le licenciement prévue au code du travail 

Selon les dispositions de l'article L.2411-22 du code du travail, le licenciement du conseiller prud'homme ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. Cette autorisation est requise pour le conseiller prud'homme ayant cessé ses fonctions depuis moins de six mois et pour le salarié candidat aux fonctions de conseiller prud'homme dès lors que l'employeur a reçu notification de la candidature du salarié ou lorsque le salarié fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature et pendant une durée de six mois après la publication des candidatures par l'autorité administrative.

Le salarié, titulaire d'un mandat de conseiller prud'homal mentionné par l'article L. 2411-1,17° du code du travail ne peut se prévaloir de cette protection que si, au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, ou, s'il s'agit d'une rupture ne nécessitant pas un entretien préalable, au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, il a informé l'employeur de l'existence de ce mandat ou s'il rapporte la preuve que l'employeur en avait alors connaissance (soc.14 septembre 2012- soc. 30 septembre 2015 n°14-17.748).

Les fiches intitulées 'Mirasol Infos' concernant les trois semaines du 27 au 31 janvier 2014, du 10 au 14 février 2014 et du 3 au 7 mars 2014 au sein desquelles il est noté, pour la première : '[Z] [R] abs pour CPHmardi matin', pour la seconde : 'jeudi après-midi [Z] [S] Abs ( CPH)' et pour la dernière : 'mardi 4 : [Z] [R] abs en CPHle matin...mercredi 5 : [Z] [R] en CPH' sont insuffisamment précises pour établir que le salarié visé était effectivement M. [O] [G].

Par ailleurs, il ne justifie pas que le questionnaire qu'il a remis à l'employeur au sein duquel il est indiqué qu'il n'était pas salarié protégé, était rempli à la main et non en ligne. La valeur probante du questionnaire versé aux débats par l'employeur et présenté comme ayant été rempli par le salarié n'est pas utilement remise en cause.

Certes, il résulte de l'attestation de l'Institut spécialisé de formation des conseillers prud'hommes salariés Prudis Cgt que M.[O] [G] a participé sans interruption à un stage de cet organisme du 16 juin au 20 juin 2014. Cependant, ces pièces sont insuffisantes pour établir que l'employeur était informé de la prolongation du mandat électif ou de la réélection de ce salarié en qualité de conseiller prud'homme jusqu'à la fin de l'année 2017 ou qu'il en avait été informé par d'autres voies.

Ce faisant, le salarié ne peut se prévaloir de la violation par l'employeur du statut protecteur lié à la qualité de conseiller prud'homme et la cour déclarera qu'il n'y a pas eu violation du statut protecteur par l'association La Croix Rouge française.

Le salarié sera en conséquence débouté de sa demande d'indemnité au titre de la méconnaissance du statut protecteur.

Le jugement entrepris qui a considéré qu'il était inimaginable que le service du personnel de L'IME MIRASOL/CROIXROUGE n'ait pas eu connaissance du fait que le mandat prud'homal de M. [O] [G] qui débutait le 3 décembe 2008 était renouvelé en 2012, sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement est intervenu en violation du statut protecteur et en ce qu'il a condamné l'association La Croix Rouge française à verser à M. [O] [G] une somme de 29.806,20 euros correspondant à l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur.

2/ sur la cause du licenciement

Pour contester le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'association La Croix Rouge française soutient avoir sérieusement et loyalement rempli ses obligations de reclassement en application des dispositions de l'article L.1226-2 du code du travail, qu'elle avait ainsi repéré et proposé six postes de reclassement au salarié qui ont été refusés par ce dernier le 24 novembre 2015 et le 4 janvier 2016, que lors de la réunion du comité d'établissement les représentants du personnel n'ont pas émis d'observations particulières et en l'absence de toute autre possibilité de reclassement, elle a dû procéder au licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle. Elle conteste toute obligation d'évolution de carrière du salarié sur un poste administratif de chef de service de directeur adjoint, qu'ainsi le recrutement sur le poste de directeur adjoint de l'IME Mirasol était quasi-effectif en septembre 2015 alors que le salarié n'était pas encore déclaré inapte et le salarié ne disposait pas des compétences professionnelles exigées pour y accéder.

Le salarié qui conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, soutient que l'obligation de reclassement n'a pas d'objet compte tenu du caractère illicite du licenciement et qu'il n'y a pas lieu d'en débattre.

Le salarié ne soutenant pas que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, étant précisé qu'il n'a pas interjeté appel du jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il l'a débouté de sa demande de nullité du licenciement, alors que la conséquence de droit de la violation du statut protecteur est effectivement la nullité du licenciement et non l'absence de cause réelle et sérieuse, la cour ne peut que considérer que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement du salarié est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement

1/ Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, en sorte que le salarié ne peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de la somme de 14 182 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2/ Sur l'indemnité compensatrice et les congés payés afférents

Le salarié fait grief au jugement de le débouter de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférente, considérant y avoir droit en conséquence de la nullité du licenciement, et pouvoir bénéficier du doublement de son montant en application des dispositions de l'article L.5213-9 du code du travail, précisant que la qualité de travailleur handicapé lui avait été reconnue par la Maison départementale des personnes handicapées le 17 février 2015.

En l'absence de toute nullité du licenciement, l'inexécution du préavis par le salarié inapte ne donne pas lieu à versement d'une indemnité compensatrice, en application des dispositions de l'article L.1226-4 in fine du code du travail. Le salarié sera donc débouté de toute demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Le salarié succombant sera condamné aux entiers dépens de l'appel et de première instance. Il sera en conséquence débouté de toute demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné l'association au paiement au salarié d'une indemnité de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

L'équité ne commande toutefois pas de faire bénéficier l'association des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sa demande d'indemnité à ce titre sera rejetée.

Il sera ajouté à ce titre au jugement.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;

Déclare que la cour est saisie par l'appelant principal de l'infirmation du jugement portant sur les chefs relatifs au montant de l'indemnité pour violation du statut protecteur et à l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et par l'appel incident ;

Dans la limite de la dévolution ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [O] -[G] est intervenu en violation du statut protecteur, en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [O] -[G] est sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a condamné la Croix Rouge française à régler à M. [O] -[G] : 29'806,20 euros correspondant à l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur,14'182 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; en ce qu'il a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Déclare qu'il n'y a pas eu violation du statut protecteur de conseiller prud'homme par l'association La Croix Rouge française ;

Déclare que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Déboute M. [O] [G] de ses demandes d'indemnité pour violation du statut protecteur, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [O] [G] aux entiers dépens de première instance ;

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [O] [G] aux entiers dépens de l'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/09725
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;18.09725 ?
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