La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2022 | FRANCE | N°21/02769

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 13 octobre 2022, 21/02769


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 13 OCTOBRE 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/02769 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG74N







S.A.S. [2]



C/



CPAM DES BOUCHES DU RHONE









Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Isabelle RAFEL



- CPAM















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du

Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 22 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/09971.





APPELANTE



S.A.S. [2], demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Isabelle RAFEL, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Alexandra TELLE, avocat au barreau de...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 13 OCTOBRE 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/02769 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG74N

S.A.S. [2]

C/

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Isabelle RAFEL

- CPAM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 22 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/09971.

APPELANTE

S.A.S. [2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Isabelle RAFEL, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Alexandra TELLE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 3]

représentée par Mme [Y] [U] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Aurore COMBERTON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Octobre 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Mme Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par lettre reçue le 3 août 2017, la société par actions simplifiées (SAS) [2] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille, aujourd'hui pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, d'un recours tendant à contester une décision de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône, fixant à 100 %, à la date du 24 mai 2016, le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) résultant de la maladie professionnelle reconnue à son salarié, [N] [R], au titre d'une exposition à l'amiante ayant causé un cancer broncho-pulmonaire primitif.

[N] [R] est décédé des suites de la pathologie et ce décès a également été pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le tribunal a ordonné une consultation sur pièces confiée au docteur [G] avec pour mission de donner son avis sur le taux d'IPP reconnu à [N] [R] au vu des lésions constatées par le médecin conseil de la caisse et au regard du guide barème en vigueur. L'expert consulté a conclu a un taux d'IPP de 100 %.

Par jugement du 22 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a :

- rejeté la demande d'inopposabilité,

- dit que le taux d'IPP, résultant de la maladie professionnelle reconnue à [N] [R] a été justement fixé à 100 %,

- condamné la société [2] aux dépens,

- dit que la CPAM supportera les frais de consultation médicale.

Par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 19 février 2021, la SAS [2], a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

A l'audience du 8 septembre 2022, la SAS [2] reprend oralement les conclusions déposées et visées par le greffe le jour même. Elle demande à la cour de :

- déclarer que le taux d'IPP fixé au bénéfice d'[N] [R] qui lui est opposable doit être ramené à 0%,

- à titre subsidiaire, dire que le taux d'IPP opposable doit être ramené à 30%,

- à titre encore plus subsidiaire, ordonner une mesure de consultation sur pièces aux fins de :

- prendre connaissance du dossier soumis à la juridiction,

- donner son avis sur les éléments médicaux de celui-ci,

- décrire l'état général d'[N] [R],

- fixer le taux d'IPP,

- condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle fait d'abord valoir que le rapport du médecin conseil de la caisse, communiqué au médecin conseil qu'elle a désigné, n'est pas complet de sorte qu'il ne donne pas toutes les informations nécessaires permettant de conclure à l'existence d'un cancer bronchopulmonaire primitif provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante, conformément aux dispositions de l'article L.143-10 du code de la sécurité sociale. Elle en conclut qu'elle n'est pas mise en mesure de donner un avis éclairé sur la fixation du taux d'IPP.

Elle fait ensuite valoir que le tabagisme massif d'[N] [R] n'est pas pris en compte par le médecin conseil de la caisse alors que le barème exige de tenir compte de l'état antérieur de la victime pour fixer le taux d'IPP.

Enfin, elle justifie sa demande de consultation par la nécessité d'éclairer la cour sur l'existence d'un état antérieur et la fixation conséquente du taux d'IPP.

La CPAM des Bouches-du-Rhône reprend oralement les conclusions déposées et visées par le greffe le jour de l'audience et sollicite de la cour la confirmation du jugement du tribunal judiciaire de Marseille rendu le 22 janvier 2021 et le débouté de la société [2].

Au soutien de ses prétentions, elle fait d'abord valoir que sa seule obligation légale est de communiquer le rapport d'IPP de son médecin conseil au médecin mandaté par la société employeur et que cette obligation a été respectée.

Elle se fonde sur le barème indicatif d'invalidité maladie professionnelle prévoyant en son chapitre 6.6.1 un taux compris entre 67 et 100% pour les séquelles d'un cancer broncho-pulmonaire primitif et sur le fait qu'en l'espèce, le cancer a été classé pT3N3M1 et que la victime en est décédée deux mois plus tard, pour justifier le taux retenu par son médecin conseil.

Elle considère que le seul argumentaire de la partie adverse relève de la contestation du caractère professionnel de la maladie, alors que la remise en cause de la maladie professionnelle n'est pas l'objet du présent litige.

Enfin, elle explique que la société [2] ne rapporte aucun élément médical nouveau et sérieux pour justifier de sa demande d'expertise.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

 

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

L'article R.434-32 du même code prévoit qu'au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.

Les annexes I et II au code de la sécurité sociale prises en application de cet article définissent les barèmes indicatifs d'invalidité applicables en matière d'accidents du travail et de maladie professionnelle et rappellent que le barème n'a qu'un caractère indicatif. Les taux d'incapacité proposés sont des taux moyens, et le médecin chargé de l'évaluation garde, lorsqu'il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier, l'entière liberté de s'écarter des chiffres du barème ; il doit alors exposer clairement les raisons qui l'y ont conduit.

Ce barème indicatif a pour but de fournir les bases d'estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l'article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole. Il ne saurait se référer en aucune manière aux règles d'évaluation suivies par les tribunaux dans l'appréciation des dommages au titre du droit commun.

Le taux d'incapacité permanente partielle doit s'apprécier à la date de consolidation du 23 mai 2016 pour le cas d'espèce, et les situations postérieures ne peuvent être prises en considération.

Seules les séquelles résultant des lésions consécutives à la maladie professionnelle prise en charge par la caisse primaire doivent être prises en compte pour l'évaluation du taux d'incapacité permanente attribué à la victime en application de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

Il résulte du barème indicatif d'invalidité en annexe 2 à l'article R.434-32 du code de la sécurité sociale, en son point 6.6.1, que le taux d'IPP attribué aux victimes de cancers broncho-pulmonaires primitifs est fixé entre 67 et 100% en fonction du code TNM (T = tumeur, N= nodule, M= métastase) et des suites thérapeutiques.

Compte tenu du classement du cancer dont soufffrait [N] [R] en pT3N3M1, non discuté par la société employeur, et du fait que la victime est décédée le 26 juillet 2016, soit deux mois suivant la consolidation de son état, le médecin conseil de la caisse a conclu, selon les critères posés par le barème indicatif, a un taux d'IPP de 100%.

Son avis est confirmé par l'expert consulté en première instance.

Il n'est pas justifié dans quelle mesure le défaut de présentation des résultats anatomopathologiques et immuno histochimiques dans le rapport du médecin conseil, comme le souligne le docteur [P] désigné par la société employeur, serait de nature à remettre en cause les deux avis du médecin conseil de la caisse et de l'expert consulté qui sont à la fois convergents et conformes aux indications du barème.

De même, le défaut de mention, dans le rapport du médecin conseil, des antécédents tabagiques de la victime, n'est pas non plus de nature à contredire sérieusement les deux avis médicaux convergents dès lors que leur existence n'est pas démontrée.

Enfin, c'est en vain que la société remet en cause le caractère professionnel de la pathologie en invoquant la cause tabagique de celle-ci dans la mesure où la cour n'est saisie que de l'évaluation du taux d'incapacité permanente résultant du cancer broncho-pulmonaire primitif d'[N] [R], et non pas de sa prise en charge au titre de la législation professionnelle.

En conséquence, sans qu'il soit besoin d'une nouvelle mesure d'instruction, la SAS [2] sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions, la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de fixer le taux d'IPP d'[N] [R] à 100% doit lui être déclarée opposable. Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

La SAS [2], succombant à l'instance, sera condamnée au paiement des dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

 

PAR CES MOTIFS,

 

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 22 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille en toutes ses dispositions,

Déboute la SAS [2] de l'ensemble de ses prétentions,

 

Condamne la SAS [2] aux éventuels dépens de l'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/02769
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;21.02769 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award