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06/10/2022 | FRANCE | N°19/13573

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 octobre 2022, 19/13573


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 06 OCTOBRE 2022

lv

N° 2022/ 395













Rôle N° RG 19/13573 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEZJG







[I] [D]





C/



SA MMA IARD

Compagnie d'assurances MMA ASSURANCES MUTUELLES IARD

SCP LBMB - ME [N] [Z]











Copie exécutoire délivrée

le :

à :





SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON



SCP

DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 14 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00616.





APPELANT



Monsieur [I] [D]

demeurant [Adresse 3]



représenté par la SC...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 OCTOBRE 2022

lv

N° 2022/ 395

Rôle N° RG 19/13573 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEZJG

[I] [D]

C/

SA MMA IARD

Compagnie d'assurances MMA ASSURANCES MUTUELLES IARD

SCP LBMB - ME [N] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 14 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00616.

APPELANT

Monsieur [I] [D]

demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Frédéric GASCARD de la SELARL CABINET FREDERIC GASCARD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

SA MMA IARD dont le siège social est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Constance DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Léa SIBONI, avocat au barreau de MARSEILLE, assistée de Me Roger TUDELA de la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

Compagnie d'assurances MMA ASSURANCES MUTUELLES IARD, dont le siège social est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Constance DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Léa SIBONI, avocat au barreau de MARSEILLE, assistée de Me Roger TUDELA de la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

SCP LBMB - ME [N] [Z] , dont le siège social est [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal en exercice, Maître [N] [Z] domiciliée en cette qualité audit siège

représentée par Me Constance DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Léa SIBONI, avocat au barreau de MARSEILLE, assistée de Me Roger TUDELA de la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022,

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [I] [D] a acquis, par acte notarié du 30 novembre 1981, un bien immobilier en état futur d'achèvement situé à [Localité 4], financé par l'apport de fonds propres et au moyens de deux emprunts contractés auprès de la CAISSE D'EPARGNE:

- le premier consenti sur ' les disponibilités du fonds d'épargne logement' pour la somme de 200.000 francs d'époque ( soit 30.490 €) s'amortissant sur une période de neuf années à compter du 5 janvier 1982, soit un terme de remboursement à janvier 1991,

- le second dit ' emprunt complémentaire ' pour la somme de 200.000 francs d'époque, s'amortissant sur une période de quinze années à compter du 5 mars 1982, soit un terme de remboursement à mars 1997.

Par acte du 21 décembre 2012 reçu par Me [N] [Z], M. [I] [D] a vendu son bien immobilier aux consorts [Y]-[P].

Après répartition du prix de vente, le notaire a constaté qu'un privilège de prêteurs de deniers avait été consenti au profit de la CAISSE D'EPARGNE en garantie des prêts souscrits par M. [D] le 12 janvier 1982 et dont ce dernier n'avait pas honoré les remboursements auprès de l'organisme emprunteur.

M. [D] s'est vu remettre le prix de la vente sans que l'organisme de crédit n'ai été désintéressé.

La CAISSE D'EPARGNE a subrogé MMA IARD SA, MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ainsi que Me [Z] dans tous ses droits et actions détenus à l'encontre de M. [D] ou de toute autre personne tenue à la dette, à savoir la somme de 36.587,76 € en principal et intérêts.

La MMA IARD, es qualité d'assureur du notaire, a réglé entre les mains de la CAISSE D'EPARGNE la somme de 20.977, 15 € tandis que le notaire a adressé à cet organisme deux chèques d'un montant de 6.618,23 € et de 8.992, 38 €.

Par acte d'huissier en date du 20 janvier 2017, la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z], ont fait assigner M. [I] [D] devant le tribunal de grande instance de Grasse afin d'obtenir sa condamnation au paiement, notamment, des sommes suivantes:

- 20.977, 15 € à la SA MMA IARD ,

- 15.610,61 € à la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z].

Par jugement contradictoire en date du 14 mai 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a:

- constaté que le renouvellement de l'inscription hypothécaire faite sur le prêt complémentaire consenti par la CAISSE D'EPARGNE à M. [I] [D] pour un montant de 200.000 francs n'a pas été effectué dans les délais,

- rappelé que le défaut de renouvellement de l'inscription fait perdre au créancier le bénéfice de son rang d'inscription primitif, sans toutefois effacer le principe même de la dette,

- dit dès lors que le constat d'une péremption de l'inscription hypothécaire primitive faite au profit de la CAISSE D'EPARGNE n'emporte pas disparition de sa créance, ni celle des parties éventuellement subrogées dans ses droits,

- débouté M. [I] [D] de sa demande tendant au rejet des prétentions de la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] au regard de la péremption de l'inscription hypothécaire,

- condamné M. [I] [D] à payer:

* à la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 20.977,15 €,

* à la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] la somme de

15.610, 61 €,

- débouté M. [I] [D] de sa demande de délais de paiement, en l'absence de justificatifs de sa situation financière,

- condamné M. [I] [D] à payer à la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] la somme totale de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [I] [D] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Me Martine BITTARD en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration en date du 21 août 2019, M. [I] [D] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 2 mai 2020, M. [I] [D] demande à la cour de:

Vu les dispositions des articles 1343-5, 1353, 2219 et suivants, 2434 et 2435 du code civil,

Vu les anciens articles 1249 et suivants du code civil dans leur version antérieure au 1er octobre 2016,

- recevoir l'appel et le déclarer bien fondé,

- infirmer purement et simplement le jugement intervenu,

- dire et juger que l'inscription de privilège de prêteur de deniers ne saurait constituer en l'espèce un élément de preuve, d'ailleurs le seul, sur lequel repose la subrogation conventionnelle entre la CAISSE D'EPARGNE et les intimées, pour être frappée par la péremption, le prêteur ayant omis de la renouveler au-delà de l'année suivant la dernière échéance du prêt, à savoir mars 1998, le premier renouvellement litigieux datant du 4 mars 1999,

- dire et juger qu'en l'état de la subrogation conventionnelle, et pour que les demanderesses soient défaillantes dans le rapport de la preuve, le moyen tiré de la péremption de l'inscription de privilège de prêteur de deniers leur est parfaitement opposable,

- dire et juger que la créance est prescrite,

- dire et juger que la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB sont défaillantes dans la justification de la créance,

- dire et juger que la créance n'est pas certaine, liquide et exigible,

- débouter les intimées de leurs moyens, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la SCP LBMB, notaires, a réglé à la CAISSE D'EPARGNE la somme de 6.618, 23 € au moyen de fonds séquestrés sur le prix de vente du bien immobilier appartenant à M. [D],

- dire et juger que cette somme sera déduite du montant réclamé par la SCP LBMB,

- dire que le montant à régler par M. [D] à la SCP LBMB ( 15.610,01 €- 6.618,23 €) s'élève à la somme de 8.992,38 €,

- accorder à M. [D] les plus larges délais au sens des dispositions de l'article 1343-5 du code civil pour apurer les causes pécuniaires de la décision à intervenir, au regard de sa bonne foi et de sa situation personnelle, ressources et charges,

- débouter les intimées de leurs moyens, fins et prétentions,

- condamner les intimées au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Il oppose aux intimées la péremption de l'inscription du privilège de prêteur de deniers:

- une telle inscription est valable pour toute la durée du prêt ou de la partie du prêt destinée à financer le prix d'achat de l'immeuble augmentée d'une année après le paiement de la dernière échéance du crédit,

- en l'espèce, l'emprunt n° 2, pour lequel seulement la banque a pris une inscription de privilège de prêteur, a été contractée en 1982 pour une durée de 15 ans , soit un terme en avril 1997,

- la péremption est donc acquise le 5 mars 1998,

- le renouvellement de l'inscription de privilège est en date du 4 mars 1999, puis renouvellement avant terme des 10 années, soit au 26 février 2009 jusqu'au 26 février 2019,

- au 4 mars 1999, date du premier renouvellement, la péremption est acquise,

- la demande en paiement des intimées qui indiquent être subrogées dans les droits de l'organisme prêteur, repose sur le fondement de l'inscription de privilège de ce dernier et ne saurait reposer en conséquence valablement reposer sur cet élément.

Il conclut à l'absence de fondement de la dette invoquée, soulevant à ce titre les quatre moyens suivants:

- la prescription de la somme due à la CAISSE D'EPARGNE:

* le débiteur peut opposer la prescription de l'action au subrogé,

* au regard de l'ancienneté des sommes prétendument impayées, à savoir des échéances de 1982 à 1997, toute action de la CAISSE D'EPARGNE à son encontre, se heurterait à la prescription extinctive,

* il ne ressort des débats aucun acte interruptif de prescription avant la délivrance de l'assignation à son encontre par les subrogés le 20 janvier 2017,

- sur la charge de la preuve:

* il appartient aux intimées d'établir le non remboursement par lui du prêt complémentaire ayant servi à l'acquisition du bien immobilier vendu, créance qui aurait fait l'objet de la subrogation,

* cette preuve n'est pas rapportée, la CAISSE D'EPARGNE n'ayant engagé aucune poursuite jusqu'à la date de la subrogation, soit le 9 décembre 2013 alors que le terme du prêt date de 1997, que les seules pièces produites émanant de cet organisme ne sont pas probantes, la transaction conclue entre la CAISSE d'EPARGNE et la MMA et le notaire n'étant pas communiquées,

* il n'a reçu aucune mise en demeure, aucune commandement de payer, aucun blocage de compte et n'a fait l'origine d'aucune procédure judiciaire en saisie immobilière de la part du créancier depuis l'origine de leur relation contractuelle en 1983,

* il n'est pas communiqué les éléments invoqués par la banque dans son courrier du 11 octobre 2013, à savoir la copie exécutoire et les courriers de recouvrement adressés au débiteur ainsi que les sommations,

- sur le paiement de la créance par le débiteur: il a remboursé son prêt complémentaire auprès de la CAISSE D'EPARGNE , raison pour laquelle aucune preuve d'un quelconque impayé n'est rapportée,

- sur le montant de la créance prétendument due:

* s'il était établi qu'il était redevable d'un reliquat de prêt auprès de la CAISSE D'EPARGNE, il ne saurait être tenu que du montant principal et d'éventuels frais accessoires,

* faute de disposer de la transaction conclue entre le subrogé et le subrogeant, il ignore les sommes et les causes sur lesquels porte l'acte, de sorte que la créance n'est ni certaine, ni liquide, ni exigible,

* or la transaction porte sur un litige qui éteint toute action relative à la responsabilité du notaire et il existe une incohérence entre la multiplicité des sommes invoquées ( il existe un différentiel substantiel entre la somme réclamée à l'instance et les sommes apparentes dans les pièces versées aux débats, passant de 30.490 € en principal en 1982 à 185.983, 53 € avec les intérêts échus en octobre 2013, puis 30.427 € en juillet 2016 et enfin 36.587, 76 € dans l'assignation).

S'agissant du montant réclamé par le notaire, il souligne que le paiement fait par le notaire au moyen des fonds séquestrés sur le prix de vente, à savoir des fonds lui revenant, n'a pas été fait sur les deniers de l'étude notariale et ne peuvent en conséquence lui être réclamés.

La SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z], suivant leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 15 janvier 2021, demande à la cour de:

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse le 14 mai 2019 en ce qu'il a:

* rappelé que le défaut de renouvellement de l'inscription fait perdre au créancier le bénéfice de son rang d'inscription primitif, sans toutefois effacer le principe même de la dette,

* dit dès lors que le constat d'une péremption de l'inscription hypothécaire primitive faite au profit de la CAISSE D'EPARGNE n'emporte pas disparition de sa créance, ni celle des parties éventuellement subrogées dans ses droits,

* débouté M. [I] [D] de sa demande tendant au rejet des prétentions de la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] au regard de la péremption de l'inscription hypothécaire,

* condamné M. [I] [D] à payer:

* à la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 20.977,15 €,

* à la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] la somme de

15.610, 61 €,

* débouté M. [I] [D] de sa demande de délais de paiement, en l'absence de justificatifs de sa situation financière,

* condamné M. [I] [D] à payer à la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] la somme totale de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné M. [I] [D] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Me Martine BITTARD en application de l'article 699 du code de procédure civile,

* ordonné l'exécution provisoire de la décision,

Mais la cour constatera que tant la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES que la SA MMA IARD sont les créancières bénéficiaires de la condamnation,

Et statuant,

- dire et juger recevables et bien fondées les demandes de MMA IARD et de la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] à l'encontre de M. [D],

- condamner M. [I] [D] à payer et porter:

* à la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et à la SA MMA IARD la somme de 20.977,15 € outre intérêts aux taux légal à compter du 20 juillet 2016,

* à la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z], la somme de

15.610, 61 €, outre intérêts aux taux légal à compter du 20 juillet 2016,

- débouter M [D] de tous ses moyens, fins et prétentions,

- dire et juger que sa demande de délais de paiement ne pourra être admise que si M. [D] prouve cette nécessité au regard de sa situation, ce qu'il ne fait pas,

Y ajoutant,

- condamner M. [I] [D] à payer et porter à la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et à la SA MMA IARD la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [I] [D] aux entiers dépens.

Elles rappellent que l'action de MMA IARD est fondée sur l'article 1250 ( subrogation conventionnelle) mais également 1251 ( subrogation légale) du code civil, que lors de la vente du bien immobilier et la répartition du prix, le notaire ayant reçu l'acte n'a pas assuré le remboursement des prêts garantis par une inscription de privilège de prêteurs de deniers prise par la CAISSE D'EPARGEN en 1982, puis renouvelée en 1999 et 2009, avec pour conséquence que M. [D] a reçu une partie du prix de vente sans que la banque ne soit désintéressée.

Elles relatent qu'afin d'éviter une procédure en responsabilité contre le notaire, engageant par là des frais supplémentaires, MMA IARD, assureur responsabilité civile de Me [Z] a été contrainte d'indemniser l'organisme prêteur et bénéficie en conséquence d'une subrogation légale à l'encontre de M. [D]. Elles précisent que le règlement effectué par MMA IARD entre les mains de la CAISSE D'EPARGNE l'a été en exécution d'une obligation de garantie du contrat d'assurance liant MMA IARD au notaire et la charge définitive de la dette doit peser sur l'appelant, véritable débiteur de la banque en vertu de son engagement contractuel.

Elles ajoutent que ce mode de subrogation ne fait pas obstacle à ce que l'assureur se fasse subroger conventionnellement dans les droits du créancier qu'il désintéresse, ce qui est le cas en l'espèce, la CAISSE D'EPARGNE ayant marqué sa volonté claire de subroger MMA IARD et le notaire à l'instance même du paiement de la somme globale de 36.587,76 € dans tous ses droits détenus à l'encontre de M. [D].

Sur l'argument tiré de la péremption de l'inscription de privilège, elles font valoir que:

- l'appelant ne peut pas se prévaloir d'une telle péremption pour faire échec à leurs demandes en paiement,

- si à l'expiration du délai, l'inscription qui n'a pas été renouvelé cesse de produire effet, l'hypothèque n'est pas éteinte par la péremption de l'inscription en ce que le créancier conserve son caractère de créancier hypothécaire mais perd le bénéfice du rang que lui assurait la prescription périmée,

- le moyen d'éviter la péremption est d'en requérir le renouvellement avant l'expiration du délai après lequel elle cesse de produire ses effet, qu'en l'espèce l'inscription a été renouvelée le 4 mars 1999 puis le 26 février, ce qui a pour effet de conserver le rang de l'hypothèque primitive,

- l'hypothèque, par le jeu des renouvellements successifs requis avant l'expiration du délai de péremption peut être validée indéfiniment et le moyen tiré de la péremption de l'inscription de privilège ne peut être que rejeté,

- en tout état de cause, le tribunal a retenu à juste titre, que le défaut de renouvellement de l'inscription fait perdre au créancier le bénéfice de son rang d'inscription primitif, sans toutefois effacer le principe même de la dette,

- l'inscription de privilège est un type de garantie du prêt immobilier et donc de la créance, laquelle existe indépendamment, du fait de l'emprunt souscrit par le débiteur,

- les conséquences d'une péremption ne portent pas sur l'existence de la créance, d'autant qu'elles agissent sur un double fondement, à savoir tant la subrogation légale que conventionnelle.

Sur l'absence de fondement de la dette invoquée, elles soutiennent que:

- sur la prescription de la somme due à la CAISSE D'EPARGNE:

* la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription,

* l'appelant a fait des règlements pour un montant total de 3.000 € entre octobre 2019 et décembre 2020, admettant ainsi le principe de la dette,

* il a renoncé à invoquer la prescription puisque cette reconnaissance intervient postérieurement à l'expiration du délai de prescription,

* en tout état de cause, MMA IARD invoque la subrogation légale de l'article 1251 du code civil, en sa qualité d'assureur de la responsabilité civile professionnel du notaire,

* l'assureur avait intérêt à s'acquitter de la dette, ce qu'il fait sans que puisse lui être opposée la prescription, dès lors que si la banque n'avait pas été désintéressée, la vente n'aurait pas pu produire ses effets au regard de la garantie prise par la banque sur le bien, objet de la vente,

* au jour de la vente, M. [D] restait débiteur d'une somme de 185.983, 53 € , créance qui bénéficiait d'une garantie valable puisque renouvelée dans son dernier effet du 26 février 2009 jusqu'au 26 février 2019,

* la vente du bien grevé a eu lieu le 21 décembre 2012 et le prix de vente remis par le notaire à l'appelant en 2013, de sorte que dès cette date les acquéreurs avaient la possibilité de poursuivre le notaire si la banque avait exercé son droit de suite, et celle-ci bénéficiait de la même possibilité contre le notaire en vertu de la garantie prise sur le bien,

* le notaire restait exposé à un recours en responsabilité jusqu'en 2018 ( 5 ans à compter de 2013),

* la MMA IARD avait donc 5 ans pour agir contre le débiteur originel, M. [D], à compter du paiement subrogatoire, étant tenu au paiement de la dette en vertu de sa qualité d'assureur responsabilité du notaire,

* l'assignation a été délivrée le 20 janvier 2017 et l'action menée par MMA n'est pas prescrite,

- sur la charge de la preuve:

* en l'espèce, elles rapportent la preuve du bien fondé de leur créance alors que l'appelant en rapporte pas la preuve de son paiement,

* ce dernier est de parfaite mauvaise foi quand il prétend avoir réglé la totalité de l'emprunt, alors qu'il a été destinataire d'un courrier que lui a adressé le 19 octobre 2007 par la CAISSE D'EPARGNE, le mettant en demeure de régler les sommes dues, à savoir 186.799, 19 € à cette date,

- il ne peut soutenir ignorer les sommes et les causes sur lesquels porte l'acte:

* cette argumentation est inopérante dès lors que la subrogation a lieu à hauteur du paiement effectué,

* s'agissant du différentiel entre la somme réclamée à l'instance et les sommes ' apparentes dans les pièces versées', elle s'explique par le fait somme réclamée correspond au montant garanti par le privilège de prêteur de deniers, à savoir 36.587,76 €, somme qui a été effectivement payée et sert de base à la présente réclamation.

Elles ajoutent que l'argument d'un paiement fait par le notaire avec des fonds séquestrés est totalement inopérant en ce qu'elles fondent leur demande sur la subrogation de l'article 1251 3° et non l'article 1251 1° du code civil.

Elles s'opposent à tout délai de paiement, en ce que l'appelant ne justifie aucunement de ses charges et que sa situation n'est pas obérée.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 14 juin 2022.

MOTIFS

Sur la péremption de l'inscription de privilège de prêteur de deniers

En vertu de l'article 2434 du code civil, l'inscription conserve le privilège ou l'hypothèque jusqu'à la date que fixe le créancier en se conformant aux dispositions qui suivent.

Si le principal de l'obligation garantie doit être acquitté à une ou plusieurs dates déterminées, la date extrême d'effet de l'inscription prise avant l'échéance ou la dernière échéance prévue est, au plus postérieure de un an à cette échéance, sans toutefois que la durée de l'inscription puisse excéder cinquante années.

Conformément à l'article 2435, l'inscription cesse de produire effet si elle n'a pas été renouvelée au plus tard à la date visée au premier alinéa de l'article 2434. Chaque renouvellement est requis jusqu'à une date déterminée. Cette date est fixée comme il est dit à l'article 2434 en distinguant suivant que l'échéance ou la dernière échéance, même si elle résulte d'une prorogation de délai est ou non déterminée et qu'elle est ou non postérieure au jour du renouvellement.

L'acte authentique reçu par Me [R], notaire à [Localité 4], le 30 novembre 1981, prévoit en page 26 que la CAISSE D'EPARGNE consent à l'emprunteur deux prêts:

- un prêt ' plan d'épargne logement' d'un montant de 200.000 francs d'une durée de neuf années, le point de départ de l'amortissement étant fixé au 5 janvier 1982, soit un terme de remboursement au 5 janvier 1992,

- un prêt complémentaire d'un même montant d'une durée de quinze années, s'amortissant à compter du 5 mars 1982, soit un terme de remboursement au 5 mars 1997.

S'agissant des modalités de ces prêts, les paragraphes 10 et 11 ( page 27) précisent que:

- pour le premier prêt: l'inscription est de premier rang et périme le 5 janvier 1993,

- pour le second prêt: l'inscription est de deuxième rang et périme le 5 mars 1998.

M. [D] invoque la péremption de l'inscription de privilège s'agissant du prêt complémentaire, au motif que la péremption était acquise à la date du premier renouvellement de l'inscription effectué le 4 mars 1999.

Or, un tel moyen ne peut pas faire échec à la demande en paiement formulée par les parties intimées, dès lors que si à l'expiration du délai fixé à l'article 2434 du code civil, l'inscription qui n'a pas été renouvelée cesse effectivement de produire effet, le créancier conserve son caractère de créancier hypothécaire mais il perd simplement le bénéfice du rang primitif que lui assurait l'inscription périmée. En d'autres termes le principe même de la dette n'est pas effacée, les conséquences d'une péremption ne portant que sur la garantie par le rang d'inscription mais pas sur l'existence de la créance.

Comme l'a retenu à juste titre le tribunal, le renouvellement opéré le 4 mars 1999 doit s'entendre comme une nouvelle inscription prenant rang à sa date d'enregistrement avec pour conséquence que si la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z] ne peuvent plus se prévaloir d'une inscription de privilège de deniers de deuxième rang, ils n'en sont pas moins fondés à réclamer le paiement de la créance qu'ils estiment avoir à l'encontre de l'appelant, du fait de leur subrogation dans les droits de l'organisme prêteur.

Le moyen tiré de la péremption de l'inscription de privilège de prêteur de deniers comme faisant obstacle à la demande en paiement formulée par les parties intimées sera donc rejeté.

Sur la créance invoquée par la SA MMA IARD, la compagnie d'assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et la SCP LBMB, notaires, représentée par Me [N] [Z]

L'article 1249 du code civil précise que la subrogation dans les droits du créancier au profit d'une tierce personne qui le paye est conventionnelle ou légale.

L'article 1250 1° du code civil stipule que la subrogation est conventionnelle lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans les droits, actions, privilèges et hypothèques contre le débiteur; cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement.

En application de l'article 1251 3° du même code, la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

En l'espèce, la CAISSE D'PEARGNE a marqué sa volonté de subroger les MMA IARD / MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ainsi son assuré, Me [N] [Z] dans tous les droits et actions détenus à l'encontre de M. [D] ou de toute autre personne pouvant être tenu à la dette à l'instant même du paiement de la somme de 36.587,76 € en principal et intérêts ainsi qu'il en ressort de la quittance subrogative en date du 9 décembre 2013 ( pièce 10 des intimées), de sorte que ces dernières bénéficient de la subrogation conventionnelle de l'article 1250 1° susvisé.

Par ailleurs, la société MMA IARD, assureur responsabilité civile professionnelle de Me [Z], bénéficie également de la subrogation légale édictée à l'article 1251 3° en ce qu'elle avait intérêt à payer cette somme pour le compte de son assuré, qui avait commis une faute en procédant au paiement de M. [I] [D] sans désintéresser au préalable la banque lors de la vente du bien immobilier le 21 décembre 2012.

En effet, l'assureur de responsabilité du notaire qui indemnise le créancier, victime de l'erreur du notaire, est légalement subrogé dans les droits du créancier à l'égard du débiteur.

Compte tenu de cette subrogation légale, l'appelant ne peut opposer la prescription au seul motif que compte tenu de l'ancienneté de la dette, toute action initiée par la CAISSE D'EPARGNE se heurterait à la prescription extinctive.

En effet, il ressort des pièces produites qu'au jour de la vente de son bien immobilier, l'appelant ne s'était pas acquitté de ses obligations envers la CAISSE D'EPARGNE, au titre des prêts souscrits, pour une une somme globale de 186.799, 19 €, que suite à l'erreur commise par le notaire, les époux [Y], acquéreurs, ont été inquiétés à l'issue de la vente en ce que la CAISSE D'EPARGNE refusait de procéder à la mainlevée de la garantie prise sur le bien en l'absence de règlement de sa créance comme l'attestent le courrier adressé le 5 décembre 2013 par le conseil des époux [Y] à Me [Z], lui demandant si une issue amiable du litige pouvait intervenir par l'intermédiaire de son assureur responsabilité civile professionnelle et précisant qu'à défaut, il intenterait une action à son encontre.

Le prix de vente a été remis à l'appelant par le notaire en 2013 qui s'est trouvé exposé à une action en responsabilité professionnelle à compter de cette date, ce qui a justifié l'intervention de la société MMA, tenue au paiement de la dette en cette qualité et en exécution d'une obligation de garantie du contrat d'assurance la liant à Me [Z].

L'assureur avait donc cinq ans pour agir contre le débiteur originel à compter de la découverte de la faute commise par son assuré en 2013.

L'assignation a été délivrée le 20 janvier 2017, de sorte que l'action n'est pas prescrite.

En l'espèce, MMA IARD justifie avoir réglé entre les mains de la CAISSE D'EPARGNE une somme totale de 20.977, 15 € le 18 décembre 2013.

La SCP LBMB, notaires à Paris, représentée par Me [Z] établit également avoir réglé le 14 janvier 2014, les sommes de 6.618, 23 € au titre du solde du compte séquestre et 8.992, 38 €, correspondant au montant de la franchise restée à sa charge.

Dès lors, les intimées rapportent la preuve du bien fondé de leur créance alors que M. [D] qui prétend avoir réglé la totalité de l'emprunt litigieux, ne le démontre aucunement et une telle affirmation est d'ailleurs formellement contredite par la mise en demeure qui lui a été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception par la CAISSE D'EPARGNE le 19 octobre 2017 .

Quant aux différences notables entre les sommes qui lui sont réclamées dans le cadre de la présente procédure et celles qui figurant à titre de créance de l'organisme prêteur dans les pièces produites aux débats, il y a lieu de préciser que la créance revendiquée par les parties intimées n'est pas celle correspondant à la dette de M. [D] envers la CAISSE D'EPARGNE mais celle résultant de la subrogation née d'une prise en charge partielle des sommes aux termes d'un accord transactionnel entre MMA IARD et la banque en date du 29 novembre 2013 à hauteur de 36.587,76 € et de la quittance subrogative émise le 9 décembre 2013 pour ce montant.

En outre, comme le soulignent les intimées cette somme correspond au montant garanti par le privilège de prêteur de deniers tel que figurant sur le bordereau de renouvellement du 26 février 2009, soit 36.587, 76 €.

En effet, il doit être rappelé si le créancier a perdu le bénéfice de son rang d'inscription primitif ( sûreté de 2ème rang), le renouvellement opéré le 4 mars 1999 s'entend comme une nouvelle inscription prenant rang à sa date d'enregistrement, nouvelle inscription qui a été renouvelée 26 février 2009.

Enfin, le paiement effectué par le notaire sur des fonds séquestrés est sans incidence sur le montant de la créance, au regard des dispositions de l'article 1251 3° du code civil.

M. [D] sollicite, à titre subsidiaire, les plus larges délais de paiement mais se contente de produire un extrait partiel de son avis d'imposition sur les revenus 2018, les taxes locales 2019 et le relevé des charges de copropriété dont il serait redevable, mais ne justifie ni de ses charges, ni davantage de son patrimoine immobilier ou mobilier. La cour n'est pas en mesure d'apprécier sa capacité à s'acquitter de sa dette dans les délais impartis par les textes.

En définitive le jugement sera confirmé, sauf à préciser que tant la société MMA IARD que la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES sont les créancières bénéficiaires de la condamnation en leurs qualités de co-assureurs.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse déféré en toutes ses dispositions sauf à préciser que tant la société MMA IARD que la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES sont les créancières bénéficiaires de la condamnation.

Y ajoutant,

Condamne M. [I] [D] à payer à la société MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [I] [D] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/13573
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;19.13573 ?
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