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06/10/2022 | FRANCE | N°19/13497

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 octobre 2022, 19/13497


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 06 OCTOBRE 2022

SA

N° 2022/ 392













Rôle N° RG 19/13497 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEZDG







[P] [S] épouse [G]

[Y] [S]





C/



[B] [I]

[T] [S] épouse [I]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES<

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SELARL NEMESIS,













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 19 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/02761.





APPELANTS



Madame [P] [S] épouse [G]

née le 03 Novembre 1976 à [Localité 3]

de nati...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 OCTOBRE 2022

SA

N° 2022/ 392

Rôle N° RG 19/13497 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEZDG

[P] [S] épouse [G]

[Y] [S]

C/

[B] [I]

[T] [S] épouse [I]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES

SELARL NEMESIS,

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 19 Mars 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 13/02761.

APPELANTS

Madame [P] [S] épouse [G]

née le 03 Novembre 1976 à [Localité 3]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Aurelie BERENGER de la SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Olivier BURTEZ-DOUCEDE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Monsieur [Y] [S]

né le 07 Mai 1937 à [Localité 5]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Aurelie BERENGER de la SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Olivier BURTEZ-DOUCEDE, avocat au barreau de MARSEILLE , plaidant

INTIMES

Monsieur [B] [I]

né le 20 Juillet 1937 à [Localité 7], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Jean Laurent ABBOU de la SELARL NEMESIS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Yannick GUIN, avocat au barreau de MARSEILLE , plaidant

Madame [T] [S] épouse [I]

née le 17 Mars 1942 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean Laurent ABBOU de la SELARL NEMESIS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Yannick GUIN, avocat au barreau de MARSEILLE , plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Sylvaine ARFINENGO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022,

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [P] [S] épouse [G] a déposé le 2 août 2006 une demande de permis de construire à la mairie d'[Localité 3] en vue de l'extension et de la surélévation d'une maison à usage d'habitation sis [Adresse 2].

La demande portait sur la création de 58 mètres carrés de surface hors 'uvre brut et de 83 mètres carré de surface hors 'uvre nette.

Le permis de construire n°13 001 06J0266 a été accordé, par un arrêté du maire d'[Localité 3] en date du 14 novembre 2006.

Le 20 mars 2007, la commune d'[Localité 3] a délivré à Madame [G] un permis modificatif, contre lequel Monsieur et Madame [I] ont introduit un nouveau recours contre ce permis.

Par jugement du 18 octobre 2007, le tribunal administratif de Marseille a annulé les deux arrêtés du maire d'Aix en Provence ayant ces permis de construire.

Madame [G] a présenté une nouvelle demande de permis de construire, qui a été obtenu selon arrêté du maire d'[Localité 3] du 12 décembre 2007, contre lequel les époux [I] ont introduit un référé suspension.

Par ordonnance du 16 mai 2008, leur demande a été rejetée tandis que par un jugement du 26 novembre 2009,

Monsieur et Madame [I] ont relevé appel de ce jugement.

Par un arrêt du 12 janvier 2012, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Marseille a infirmé le jugement du tribunal administratif et a prononcé l'annulation du permis de construire litigieux délivré à Madame [G], retenant, notamment, que « il ressort toutefois de la lecture des plans, que le maire de la commune d'[Localité 3] ne pouvait ignorer que ce local, doté de deux larges ouvertures évoquant des portes-fenêtres et auquel l'accès se fait par une marche, ne pouvait, eu égard à ses dimensions inappropriées au stationnement de véhicules de taille standard et à l'exiguïté de l'aire de man'uvre par laquelle les véhicules doivent passer pour y accéder, être, affecté au stationnement des véhicules ».

Par exploit d'huissier délivré le 23 avril 2013, Monsieur [B] [I] et Madame [T] [S] épouse [I] ont fait assigner Monsieur [Y] [S] et Madame [P] [S] épouse [G] devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence, en vue à titre principal, de voir prononcer la démolition de la construction illégale et, à titre subsidiaire, obtenir une réparation par équivalent par l'allocation de dommages et intérêts.

Par un jugement en date du 19 mars 2015 le tribunal de grande Instance d'Aix-en Provence a, notamment, mis hors de cause Monsieur [Y] [S], ordonné la démolition de l'extension réalisée en application du permis de construire délivré à Madame [P] [G] par arrêté du maire de la commune d'[Localité 3] du 12 décembre 2007, et annulé par décision de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 janvier 2012, dit que la démolition devra intervenir dans un délai d'un an à compter du jugement devenu définitif à peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, condamné Madame [P] [G] à payer à Monsieur et Madame [I] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que :

-les travaux exécutés par Madame [G] l'ont été en vertu d'un permis de construire dont l'illégalité a été reconnue par la cour administrative d'appel le 12 janvier 2012, qui a annulé l'arrêté du maire pour excès de pouvoir,

-l'action en démolition a été engagée dans le délai de deux ans suivant cette décision,

-l'arrêt délivrant le permis de construire a été annulé en raison du dépassement de la surface hors d''uvre nette et de la méconnaissance de l'article NC14 du plan d'occupation des sols selon lequel les extensions sont autorisées à condition, pour les habitations, que la surface totale du plancher développée hors 'uvre ne dépasse pas 250 m², y compris l'existant,

-le permis de construire autorisait une construction de 79,96m² en surface hors d''uvre nette, ce qui portait la surface totale du bâtiment à 249,56m²,

-l'arrêt de la cour administrative de Marseille a requalifié la surface du local qualifié dans le permis de construire de garage de 58 m² en surface hors 'uvre nette, de sorte que cette surface a été ajoutée aux 249,56 m², dépassant, dès lors, la surface autorisée par l'article NC14,

-il y a donc eu violation d 'une règle d'urbanisme,

-le préjudice est établi par le fait qu'il ressort de la comparaison des bâtiments avant et après l'extension que les nouvelles ouvertures et fenêtres créées sur le fonds [G] sont au nombre de huit, qu'elles sont plongeantes et très proches du fonds [I], notamment sur leur jardin et leur piscine,

-le préjudice est en lien direct avec l'infraction aux règles d'urbanisme car même si ce sont principalement les fenêtres et ouvertures créées au premier étage qui sont préjudiciables, plus que celles du rez-de-chaussée, l'existence et l'emplacement de ces ouvertures et fenêtres sont directement liés au dépassement de Shon autorisée, la surface créée au rez-de-chaussée ayant permis la création de surface au premier étage.

Le 23 avril 2015, Monsieur [Y] [S] et Madame [P] [S] épouse [G] ont relevé appel de ce jugement.

Le 23 juillet 2015, Madame [G] a obtenu un permis de construire régularisant la construction.

Les époux [I] ont contesté ce permis de construire devant le tribunal administratif de Marseille.

Par un arrêt du 26 janvier 2017, la cour d'appel de ce siège a :

-confirmé le jugement dont appel en ce qu'il a mis hors de cause Monsieur [Y] [S],

-sursis à statuer sur le surplus des demandes dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction administrative portant sur le permis de construire,

-ordonné le retrait du rôle de l'affaire du répertoire général et dit qu'elle ne ne pourra être rétablie à la demande d'une partie, que sur production de la décision sus-énoncée.

Par un jugement définitif en date du 4 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête des époux [I].

Il a été procédé à la remise au rôle de l'affaire.

Selon leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 4 décembre 2019, Madame [P] [S] épouse [G] et Monsieur [Y] [S] demandent à la cour de :

-constater que l'arrêt de retrait du rôle a confirmé le jugement en ce qu'il a prononcé la mise hors de cause de Monsieur [Y] [S],

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. et Mme [I] à payer à Monsieur [S] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-le réformer pour le surplus,

-rejeter l'intégralité des demandes formulées par Monsieur et Madame [I] en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de Madame [G] [P] quel que soit le fondement juridique invoqué à savoir l'article L480-13a et L480-13b du code de l'urbanisme, la notion de trouble anormal de voisinage, la responsabilité pour faute;

-rejeter en toute hypothèse la demande d'expertise,

Reconventionnellement,

-dire et juger que la procédure engagée est manifestement abusive et constitue un abus d'ester en justice dans l'intention de nuire,

-condamner Monsieur [B] [I] et Madame [T] [I] au paiement d'une somme de 50000 euros au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive,

-les condamner à la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de son conseil.

Madame [P] [S] épouse [G] et Monsieur [Y] [S] soutiennent, essentiellement, que :

-la demande de démolition fondée sur l'article L480-13a ne saurait prospérer car le motif d'annulation retenu par la cour d'appel dans son arrêt du 12 janvier 2012 ne crée pas de préjudice dès lors qu'il a uniquement considéré que la surface du sous-sol devait être réintégrée dans la surface habitable; est sanctionnée la violation d'une règle de destination.

-il n'existe aucun préjudice indemnisable,

- la simple annulation d'un permis de construire n'entraîne pas le droit à démolir, un lien de causalité devant être démontré;

-par nature, le vice affectant les sous-sol d'une construction alors que ni sa hauteur, ni son emplacement ne sont remis en cause, ne crée par de préjudice;

-les préjudices qui sont invoqués (vues sur le fonds voisin, perte d'intimité, perte d'ensoleillement) résultent de circonstances qui n'ont pas été sanctionnées par le juge administratif;

-l'action en démolition doit donc être rejetée,

-l'action indemnitaire est également vouée à l'échec car aucun préjudice ne peut être invoqué, au regard du motif d'annulation retenu. L'application des articles L480-13 b et 1382 du code civil sera écartée,

-l'action entreprise contre Madame [G], à laquelle on demande 500000 euros de dommages-intérêts, est destinée à lui nuire,

-l'action en démolition fondée sur l'article L480-13 du code de l'urbanisme est remise en question en raison de la modification du texte par la loi du 6 août 2015, d'application immédiate, puisque la démolition n'est désormais possible que si, outre l'annulation du permis de construire par la juridiction administrative, la construction se trouve dans l'un des secteurs protégés définis par le texte,

-ce texte suppose en outre que le permis de construire soit définitivement annulé: or, un nouveau permis a été délivré par la commune d'[Localité 3] le 23 juillet 2015, suite à la demande de régularisation des façades et ouvertures,

-l'application de l'article L480-13b sur le fondement duquel les demandes d'indemnités sont formées suppose que le permis ait été annulé, ce qui n'est pas le cas en l'état du nouveau permis délivré le 23 juillet 2015.

Selon leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 31 mai 2022, Monsieur [B] [I] et Madame [T] [I] demandent à la cour, sur le fondement des articles L. 480-13 du code de l'urbanisme, 544, 545 et 1382 du code civil, de:

A titre principal,

-constater que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 janvier 2012 a jugé de manière définitive l'illégalité de l'arrêté du 12 décembre 2007 par lequel le maire de la commune d'[Localité 3] a délivré un permis de construire à Mme [P] [G]

-dire et juger que l'extension illégale leur a causé un préjudice personnel et certain en raison de la création de vue directes et obliques et de la perte d'intimité et de valeur vénale de leur bien,

-dire et juger qu'il existe un lien de causalité directe de cause à effet entre la violation de la règle d'urbanisme ayant justifié l'annulation du permis de construire et leur préjudice,

-constater que le montant de l'astreinte de 50 euros par jour de retard est insuffisant pour obtenir l'exécution de la mesure de démolition,

En conséquence,

-dire et juger qu'ils ont droit à la réparation intégrale de leur préjudice.

-confirmer le jugement entrepris en ce que celui-ci a prononcé la démolition de l'extension autorisée par le permis de construire délivré par le Maire d'[Localité 3] le 12 décembre 2007 ; -réformer le jugement quant au montant de l'astreinte en faisant passer ce montant de 50 euros par jour de retard à 500 euros par jour de retard ;

A titre subsidiaire,

-condamner in solidum Madame [P] [G] et Monsieur [S] à leur verser des dommages et intérêts au titre du préjudice subi par la réalisation de la construction illégale, soit la somme de 450.000,00 €, somme à parfaire, sur le fondement des dispositions de l'article L.480-13 b) du code de l'urbanisme.

Dans ce cadre, et si la cour devait considérer ne pas être suffisamment éclairée sur l'étendue de leur préjudice pour en chiffrer l'indemnisation, il conviendra de désigner, avant dire droit, tel expert qu'il plaira, avec mission habituelle en la matière et notamment celle de :

-se rendre sur les lieux,

-recueillir toutes les explications des parties,

-De se faire communiquer toutes pièces utiles,

-De déterminer précisément les préjudices liés aux troubles dans les conditions d'existence résultant de la construction illégale sur la propriété des époux [I] et à la perte de la valeur vénale de la propriété des époux [I] située à proximité de la construction illégale de Madame [G] (perte d'ensoleillement, perte d'intimité, perte de valeur vénale du bien, préjudice de jouissance, création de vues'),

-Donner, plus généralement, tous les éléments permettant à la juridiction éventuellement saisie d'apprécier les préjudices,

-D'une façon générale et dans le cadre de la mission technique ci-dessus répondre à tous dires qui pourraient lui être soumis par les parties et donner tous les éléments d'une solution du litige à la cour qui sera appelé à statuer.

A titre infiniment subsidiaire,

-condamner in solidum Madame [P] [G] et Monsieur [S] à leur verser des dommages et intérêts au titre du préjudice subi par la réalisation de la construction illégale, soit la somme de 450.000,00 €, somme à parfaire, sur le fondement des dispositions des articles 544 et 545 du code civil, tenant compte des troubles anormaux du voisinage supportés par les demandeurs.

Dans ce cadre, et si la cour devait considérer ne pas être suffisamment éclairée sur l'étendue de leur préjudice pour en chiffrer l'indemnisation, il conviendra de désigner, avant dire droit, tel expert qu'il plaira, avec mission habituelle en la matière et notamment celle de :

-De se rendre sur les lieux,

-De recueillir toutes les explications des parties,

-De se faire communiquer toutes pièces utiles,

-De déterminer précisément les préjudices liés aux troubles dans les conditions d'existence résultant de la construction illégale sur leur propriété et à la perte de la valeur vénale de leur propriété, située à proximité de la construction illégale de Madame [G] (perte d'ensoleillement, perte d'intimité, perte de valeur vénale du bien, préjudice de jouissance, création de vue'),

-Donner, plus généralement, tous les éléments permettant à la juridiction éventuellement saisie d'apprécier les préjudices,

-d'une façon générale et dans le cadre de la mission technique ci-dessus répondre à tous dires qui pourraient lui être soumis par les parties et donner tous les éléments d'une solution du litige à la cour qui sera appelée à statuer.

A titre infiniment, infiniment, infiniment subsidiaire,

-condamner in solidum Madame [P] [G] et Monsieur [S] à leur verser des dommages et intérêts au titre du préjudice subi par la réalisation de la construction illégale, soit la somme de 450.000,00 €, somme à parfaire, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil, tenant compte des troubles anormaux du voisinage supportés par les demandeurs.

-Dans ce cadre, et si la cour devait considérer ne pas être suffisamment éclairée sur l'étendue du préjudice des époux [I] pour en chiffrer l'indemnisation, il conviendra de désigner, avant dire droit, tel expert qu'il plaira, avec mission habituelle en la matière et notamment celle de :

-De se rendre sur les lieux,

-De recueillir toutes les explications des parties,

-De se faire communiquer toutes pièces utiles,

-de déterminer précisément les préjudices liés aux troubles dans les conditions d'existence résultant de la construction illégale sur leur propriété et à la perte de la valeur vénale de leur propriété située à proximité de la construction illégale de Madame [G] (perte d'ensoleillement, perte d'intimité, perte de valeur vénale du bien, préjudice de jouissance, création de vue'),

-donner, plus généralement, tous les éléments permettant à la juridiction éventuellement saisie d'apprécier les préjudices,

-d'une façon générale, et dans le cadre de la mission technique ci-dessus répondre à tous dires qui pourraient lui être soumis par les parties et donner tous les éléments d'une solution du litige à la cour qui sera appelée à statuer.

En tout état de cause,

-condamner Madame [G] à leur payer la somme de 10.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Jean-Laurent Abbou, avocat aux offres de droit, lequel sera autorisé à recouvrer conformément aux articles 696 et 699 du code de procédure civile.

-ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

Monsieur et Madame [I] soutiennent que la mesure de démolition doit être confirmée dès lors que :

-le permis de construire a été annulé pour excès de pouvoir,

-il existe une décision administrative définitive depuis moins de deux ans jugeant illégal le permis de construire sur la base duquel la construction litigieuse a été édifiée,

-par un arrêt définitif du 12 janvier 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé l'arrêté du maire d'[Localité 3]

-leur demande en démolition intervient dans le délai de deux ans à compter de la notification de l'arrêt de la cour.

-ils justifient d'un préjudice personnel, direct et certain,

-la construction illégale de Madame [G], réalisée sur deux niveaux et sur une restanque, donne des vues directes et plongeantes sur leur fonds, et leur cause une perte d'intimité,une perte de valeur vénale de leur bien immobilier ainsi qu'une perte d'ensoleillement,

-l'illégalité de la construction n'est pas régularisable par l'obtention d'un permis de construire modificatif le bâtiment actuel, qui totalise une Shon de 307,56 m2, comporte un excédent de plus de 57 m2. Seule la démolition peut permettre de mettre un terme à cette illégalité.

-plus de trois ans et demi après l'arrêt définitif de la cour administrative et le jugement dont appel ayant prononcé la démolition de l'extension, les consorts [S] n'ont toujours pas demandé de permis de construire régularisant la construction,

-la parcelle des époux [I] n'est pas située en zone urbaine, zone à l'intérieur de laquelle les vues sur son fonds sont inévitables, mais en zone NC au plan d'occupation des sols d'[Localité 3] qui est « une zone naturelle destinée exclusivement à l'exercice d'activités agricoles»,

-la construction irrégulière a permis la création d'un nouveau logement,

-le bâtiment initial et son extension accueillent deux familles dans deux logements distincts en totale violation avec les dispositions de la zone NC du POS d'[Localité 3] qui interdisent la création de logements nouveaux dans le cadre de la réalisation d'une extension

-seule une démolition de l'ensemble de l'extension illégale permettra la réparation intégrale du préjudice dans la mesure où le second niveau prend appui sur la partie déclarée illégale du bâtiment, à savoir ce qui avait été présenté par Madame [G] comme un garage. Dès lors, démolir la partie illégale du bâtiment implique, par voie de conséquence, la démolition du niveau supérieur dans la mesure où ce niveau prend appui sur cette dernière.

-la nouvelle rédaction de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme, à supposer que celle-ci fasse obstacle au prononcé d'une mesure de démolition, ne peut s'appliquer aux situations qui se sont constituées avant son entrée en vigueur.

-à supposer que la démolition ne soit pas prononcée, une indemnisation de leur préjudice devra leur être allouée, soit sur le fondement de l'article L480-13 b, soit sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, soit enfin sur celui de l'article 1382 du code civil.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 juin 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

Motifs de la décision :

1-Dans le dispositif de leurs dernières conclusions, qui seul lie la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, Monsieur et Madame [I] persistent à poursuivre la condamnation de Monsieur [Y] [S] à leur verser des dommages-intérêts alors que l'arrêt de cette cour en date du 26 janvier 2017 a confirmé le jugement dont appel en ce qu'il a mis hors de cause Monsieur [Y] [S]. Cette disposition du jugement est définitive, ce qui n'autorise pas le prononcé d'une condamnation à l'encontre de Monsieur [S].

2- Dans le dispositif de leurs dernières conclusions, qui seul lie la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, Monsieur et Madame [I] formulent diverses demandes sous la forme « constater que », « dire et juger que » qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens auxquels il sera répondu dans le corps de l'arrêt, et non dans le dispositif.

3-L'article 480-13 du code de l'urbanisme, dans la rédaction que lui a donnée la loi n° 2015-990 du 6 aout 2015, dispose que :

Lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire:

1° Le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative et si la construction est située dans l'une des zones suivantes :

a) Les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard mentionnés au II de l'article L. 145-3, lorsqu'ils ont été identifiés et délimités par des documents réglementaires relatifs à l'occupation et à l'utilisation des sols ;

b)Les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques mentionnés à l'article L. 146-6, lorsqu'ils ont été identifiés et délimités par des documents réglementaires relatifs à l'occupation et à l'utilisation des sols ;

c)La bande de trois cents mètres des parties naturelles des rives des plans d'eau naturels ou artificiels d'une superficie inférieure à mille hectares mentionnée à l'article L. 145-5 ;

d)La bande littorale de cent mètres mentionnée au III de l'article L. 146-4 ;

e) Les c'urs des parcs nationaux délimités en application de l'article L. 331-2 du code de l'environnement ;

f) Les réserves naturelles et les périmètres de protection autour de ces réserves institués en application, respectivement, de l'article L. 332-1 et des articles L. 332-16 à L. 332-18 du même code ;

g) Les sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 dudit code ;

h) Les sites désignés Natura 2000 en application de l'article L. 414-1 du même code ;

i) Les zones qui figurent dans les plans de prévention des risques technologiques mentionnés au I de l'article L. 515-16 dudit code, celles qui figurent dans les plans de prévention des risques naturels prévisibles mentionnés aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du même code ainsi que celles qui figurent dans les plans de prévention des risques miniers prévus à l'article L. 174-5 du code minier, lorsque le droit de réaliser des aménagements, des ouvrages ou des constructions nouvelles et d'étendre les constructions existantes y est limité ou supprimé ;

j) Les périmètres des servitudes relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement instituées en application de l'article L. 515-8 du code de l'environnement, lorsque les servitudes instituées dans ces périmètres comportent une limitation ou une suppression du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages ;

k) Les périmètres des servitudes sur des terrains pollués, sur l'emprise des sites de stockage de déchets, sur l'emprise d'anciennes carrières ou dans le voisinage d'un site de stockage géologique de dioxyde de carbone instituées en application de l'article L. 515-12 du même code, lorsque les servitudes instituées dans ces périmètres comportent une limitation ou une suppression du droit d'implanter des constructions ou des ouvrages ;

l) Les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine créées en application de l'article L. 642-1 du code du patrimoine ;

m) Les périmètres de protection d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques prévus aux quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 621-30 du même code ;

n) Les secteurs délimités par le plan local d'urbanisme en application des 2° et 5° du III de l'article L. 123-1-5 du présent code ;

o) Les secteurs sauvegardés créés en application de l'article L. 313-1.

L'action en démolition doit être engagée dans le délai de deux ans qui suit la décision devenue définitive de la juridiction administrative ;

2° Le constructeur ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à des dommages et intérêts que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir ou si son illégalité a été constatée par la juridiction administrative.

L'action en responsabilité civile doit être engagée au plus tard deux ans après l'achèvement des travaux.

Lorsque l'achèvement des travaux est intervenu avant la publication de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, la prescription antérieure continue à courir selon son régime ».

Ce texte s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où il rentre en vigueur, indépendamment de la date d'achèvement des travaux.

Dès lors, il se déduit :

-d'une part, du fait qu'il n'est pas établi que la construction en cause serait située dans l'un des secteurs spécifiques de préservation du patrimoine ou de prévention des risques limitativement énumérés par ce texte,

-d'autre part, de la délivrance à Madame [G] d'un permis de construire le 23 juillet 2015, régularisant la construction litigieuse,

que la démolition ne peut pas être ordonnée sur le fondement du texte précité, le jugement dont appel ne pouvant qu'être infirmé de ce chef.

4-Monsieur et Madame [I] sollicitent, à titre subsidiaire, l'indemnisation du préjudice qu'ils estiment subir d'abord, sur le fondement de l'article L480-13 b, à défaut sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage au visa des articles 544 et 545 du code de procédure civile, et à titre «  infiniment, infiniment, infiniment » subsidiaire sur le fondement des troubles normaux du voisinage au visa de l'article 1382 du code civil.

Cependant, en l'état de la délivrance à Madame [P] [G] d'un permis de construire le 27 juillet 2015, régularisant la construction litigieuse, la demande de dommages-intérêts formée sur le fondement de l'article L480-13 b ne peut pas prospérer.

Il convient donc d'analyser le fondement subsidiaire invoqué, celui de la théorie des troubles anormaux de voisinage.

L'article 544 du code civil énonce que la propriété est le droit de jouir et diposer des biens de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Cependant, le droit d'un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, est limité par l'obligation qu'il a de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage excédant les inconvénients anormaux de voisinage.

Il s'agit d'une cause de responsabilité objective et il appartient à la partie qui s'en prévaut de rapporter la preuve qu'elle subit, indépendamment de toute faute de son voisin, un trouble, qui par son caractère excessif lié notamment à son intensité, sa durée ou à sa répétitivité, excède les inconvénients ordinaires.

Le dommage doit être évalué in concreto en fonction de l'environnement spécifique des nuisances invoquées. Il faut ainsi désigner par dommage anormal celui que les voisins n'ont pas l'habitude de subir dans telle région et à telle époque.

Au cas particulier, Monsieur et Madame [I] déplorent que la reconstruction, par Madame [G], de la ruine située sur son fonds, a eu pour effet de créer un niveau supplémentaire et d'engendrer des vues directes sur leur jardin ainsi que des vues obliques sur leur piscine.

Les vues ainsi dénoncées par les intimés ne doivent pas, sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, correspondre exactement aux critères énoncés par le code civil.

Sur ce point, Madame [G] a régulièrement produit aux débats un rapport amiable établi, à sa demande, par Madame [E] et Madame [J] le 7 mai 2019, soumis à la discussion contradictoire des parties.

Or, la circonstance que, selon ce rapport, la reconstruction litigieuse ait été réalisée conformément au règlement d'urbanisme, qu'elle ait respecté l'architecture initiale correspondant au plan napoléonien et aux vestiges, et qu'elle ne crée aucune vue directe qui ne serait pas conforme au code civil, est sans incidence sur la caractérisation d'un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage dont l'existence s'apprécie indépendamment du respect des dispositions législatives ou règlementaires.

En réalité, Monsieur et Madame [I] déplorent une perte d'intimité ainsi qu'un préjudice de jouissance, exposant que voulant jouir de leur jardin ou de leur piscine, ils seront fortement exposés à la vue de leur voisin, dès lors que les fenêtres en cause sont situées, pour l'essentiel, au premier étage.

Les intimés estiment également subir une perte de la valeur vénale de leur bien.

Il sera tout d'abord relevé que nul ne peut prétendre à la pérennité de son environnement.

Par ailleurs, les fonds des parties à l'instance sont situés à Puyricard.

Ils sont mitoyens, ce qui n'est pas contesté.

Au soutien de leur demande d'indemnisation, les intimés produisent divers clichés photographiques, des extraits des plans de façade du permis de construire, des procès-verbaux de constat d'huissier, dont il résulte que les fonds des parties sont situés dans un environnement naturel, boisé, et préservé, sans voisinage immédiat.

Des éléments peuvent ainsi être recueillis dans la notice paysagère, établie par Madame [W] [M], architecte DPLG à [Localité 4], pour la maison de Madame [S], selon laquelle l'environnement est composé de chênes centenaires, de cèdres du Liban et de feuillus de Provence, l'architecte évoquant la nécessité de « garder intact l'écrin végétal majestueux existant ».

De même, le rapport d'estimation immobilière de la propriété de Monsieur et Madame [I] établi en février 2004 par le cabinet d'expertise immobilière Bertrand Morard-Henri Baur, évoque :

-un secteur résidentiel protégé et prisé, celui de la Chaîne de la Trévaresse, ayant conservé son caractère rural,

-des parcelles en nature de terre d'environ 7 hectares,

-d'autres parcelles, d'environ 13 hectares, boisées de pins d'Alep, de chênes verts et de chênes blancs, le rapport précisant que « ce boisement contribue à l'agrément du site »,

-la situation de la propriété, au regard du plan d'occupation des sols, en vigueur à l'époque, en secteur NC, réservé aux activités agricoles,

-un site éloigné des sources de nuisances.

Cependant, alors même que Monsieur et Madame [I] dénoncent une perte d'intimité, ce rapport a relevé, non seulement la proximité, mais la « proximité immédiate » de la propriété bâtie d'un tiers (il s'agit des constructions édifiées sur la parcelle [Cadastre 6] appartenant à Madame [G]), l'expert ayant relevé un « ensemble de constructions immédiatement accolées », situation qui a été analysée par l'auteur du rapport d'estimation immobilière comme « un évident facteur minorant » de la valeur de la propriété des époux [I] et a été prise en considération dans l'estimation du bien à la baisse.

Or, l'observation contenue dans ce rapport, relative à la proximité des constructions du fonds voisin et à la décote subséquente du fonds [I], est importante pour la solution du litige : le rapport a, en effet, été établi en février 2004, soit antérieurement à l'édification, par Madame [G], de la construction litigieuse. Il a été sollicité par les époux [I] en vue d'obtenir un avis sur la valeur vénale de leur propriété et de recueillir des éléments sur un projet de partage de la propriété entre leurs quatre enfants.

Il en résulte que la pertinence de l'avis de valeur émis le 30 septembre 2011, à la requête des époux [I], par le cabinet Monthorin, faisant état d'une « nouvelle mitoyenneté apparue avec la construction attenante représentant une maison imposante à proximité immédiate », sur le fondement de laquelle il a appliqué une décote de la valeur « de 30% pour cette nuisance », alors qu'il est acquis aux débats que les fonds des parties sont mitoyens, ont une origine commune, et que dès 2004, avait été constatée la proximité immédiate de la propriété bâtie de Madame [G], n'est, en l'état de ces éléments, pas démontrée.

A cela s'ajoute le fait que cet avis de valeur est très succinct, qu'il prend pour base le rapport d'estimation élaboré par le cabinet d'expertise immobilière Bertrand Morard-Henri Baur et qu'il ne résulte pas des énonciations qui y sont contenues que l'évaluateur se serait déplacé sur les lieux.

Par ailleurs, il ne ressort pas, des clichés photographiques produits aux débats, qu'un dispositif ait été mis en place, du type haie végétale, brise-vue ou pergola, qui pourrait contribuer à préserver l'intimité de chaque fonds.

Enfin, Monsieur et Madame [I] invoquent également une perte d'ensoleillement qui n'est pas documentée, et ne ressort pas suffisamment des pièces produites aux débats, les photographies ne permettant pas de s'en convaincre.

Dès lors, la cour, pleinement éclairée par les éléments ci-dessus, sans qu'il lui soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, considère qu'au regard du caractère mitoyen des propriétés respectives des parties, de la proximité des constructions qui y ont été édifiées bien antérieurement à la construction litigieuse, qui ont nécessairement créé des vues de part et d'autre, et donc engendré, une perte d'intimité, l'édification par Madame [G] d'une construction supplémentaire avec des ouvertures à l'étage, dont il n'est pas démontré que toutes donneraient sur le jardin ou la piscine des intimés, ne constitue pas un trouble qui excède, au cas particulier, les inconvénients normaux du voisinage, ouvrant droit à réparation en faveur des époux [I].

5-Monsieur et Madame [I] sollicitent enfin une indemnisation sur le fondement de l'article 1382 du code civil, « tenant compte des troubles anormaux du voisinage supportés par les demandeurs »

Selon ce texte, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En application de l'article 1382 du code civil, il incombe à la partie qui poursuit la responsabilité d'une autre partie de rapporter la triple démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité directe entre eux.

Or, outre la contradiction qui existe dans la formulation-même de la demande entre l'application de l'article 1382 du code civil, qui édicte une responsabilité pour faute, et la téhorie des troubles anormaux du voisinage qui est une cause de responsabilité objective, indépendante de la commission d'une faute, la construction édifiée par Madame [P] [G] ne peut être regardée comme fautive en l'état du permis de construire qu'elle a obtenu le 23 juillet 2015.

En conséquence, Monsieur et Madame [I] seront également déboutés de leur demande d'indemnisation sur ce fondement.

6-L'action en justice constitue l'exercice d'un droit. En outre l'appréciation erronée qu'une partie fait de ses droits ne caractérise pas, en soi, un abus, sauf démonstration d'une intention malveillante, d'une volonté de nuire ou d'une faute.

Au cas particulier, il n'est pas établi que Monsieur et Madame [I] aient fait assigner les consorts [S] [G] pour leur porter préjudice, alors même qu'ils ont obtenu gain de cause devant la juridiction administrative d'appel.

Dès lors, la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de Monsieur et Madame [I] pour procédure abusive sera rejetée.

7-La demande, présentée par les époux [I], tendant à voir « ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir » n'a pas de sens au regard de l'article 579 du code de procédure civile selon lequel le pourvoi en cassation n'est pas suspensif d'exécution de l'arrêt contre lequel il est formé.

8-Vu les articles 696 à 699 et 700 du code de procédure civile,

Dans un souci d'apaisement entre les parties, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile, ni en première instance, ni en cause d'appel, sauf par confirmation de la disposition du jugement qui l'a appliqué en faveur de Monsieur [Y] [S] à hauteur de 500 euros.

Par ces motifs,

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 19 mars 2015 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence mais uniquement en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [I] à verser à Monsieur [Y] [S] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau,

Déboute Monsieur [B] [I] et Madame [T] [S] épouse [I] de leur demande de démolition de l'extension réalisée en application du permis de construire délivré à Madame [P] [G], annulé par la juridiction administrative.

Dit n'y avoir lieu à expertise.

Déboute Monsieur [B] [I] et Madame [T] [S] épouse [I] de leur demande de dommages-intérêts.

Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Dit n'y avoir lieu à plus ample application de l'article 700 du code de procédure civile, en première instance, comme en cause d'appel.

Dit que les dépens de première instance et d'appel, seront partagés par moité entre les parties, distraits au profit de Maître Xavier Blanc et de Me Jean-Laurent Abbou, qui en ont fait la demande.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/13497
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;19.13497 ?
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