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30/09/2022 | FRANCE | N°21/09647

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 30 septembre 2022, 21/09647


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 30 SEPTEMBRE 2022



N°2022/.















Rôle N° RG 21/09647 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHWVK





Société [2]

Société [6]





C/



Organisme URSSAF



















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Dominique IMBERT-REBOUL



- URSSAF







r>




















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 27 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/01277.





APPELANTES





Société [7], représentée par son mandataire liquidateur la Société [2], demeurant [Adresse 8]



représentée par Me Dominique...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 30 SEPTEMBRE 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/09647 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHWVK

Société [2]

Société [6]

C/

Organisme URSSAF

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Dominique IMBERT-REBOUL

- URSSAF

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 27 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/01277.

APPELANTES

Société [7], représentée par son mandataire liquidateur la Société [2], demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Estelle VALENTI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]

représenté par M. [Y] [U], Inspecteur Juridique en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Juin 2022 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

A l'issue d'un contrôle portant sur l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de la garantie des salaires au sein de la société [6] et sur les années 2013 à 2015, concernant ses établissements de [Localité 3], de [Localité 5] et de [Localité 4], l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur lui a notifié une lettre d'observations en date du 24 octobre 2016 comportant pour l'établissement de [Localité 3] un redressement total de cotisations de 57 313 euros (lié à trois chefs de redressement).

Après échanges d'observations, l'URSSAF a notifié à la société [6] , pour cet établissement, une mise en demeure en date du 26 décembre 2016, d'un montant total de 64 605 euros (dont 57 313 euros au titre des cotisations et 7 292 euros au titre des majorations de retard), puis lui a fait signifier le 10 février 2017, une contrainte en date du 08 février 2017 portant sur les mêmes montants en cotisations et majorations de retard.

La société [6] a saisi le 16 février 2017 le tribunal des affaires de sécurité sociale de son opposition à cette contrainte, étant précisé que la commission de recours amiable a rejeté le 26 juillet 2017 son recours.

La société [6] a fait l'objet le 03 septembre 2019 d'une liquidation amiable et la société [2] a été désignée en qualité de liquidateur.

Par jugement en date du 27 mai 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* rejeté l'exception de procédure tenant à l'irrégularité pour manquement au principe du contradictoire de la demande de documents en cours de contrôle,

* confirmé le bien fondé de la position de la commission de recours amiable du '28 septembre 2017",

* débouté la société Team Côte d'Azur de son recours exercé envers la contrainte décernée le 08 février 2017 par le directeur de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur et signifiée le 10 février 2017,

* validé la voie de recours querellée emportant condamnation de la société [6] à hauteur globale de la somme de 64 605 euros dont 57 313 euros de cotisations et 7 292 euros en majorations de retard,

* mis les dépens à la charge de la société [6],

* dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société [6] a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions récapitulatives visées par le greffier le 22 juin 2022, reprises et modifiées oralement à l'audience avec confirmation des rectifications transmise par remise par voie électronique le 24 juin 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [6], représentée par son liquidateur amiable, la société [2], sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de juger que:

- les opérations de contrôle sont entachées d'irrégularités ce qui entraîne la nullité du contrôle et du redressement en raison de l'existence de demandes comminatoires d'envoi de documents par mail de la part de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur,

-le chef de redressement relatif aux réductions générales des cotisations: entreprise de travail temporaire s'élevant à la somme de 36 487 euros n'est pas fondé,

- le chef de redressement relatif aux réductions générales des cotisations: entreprise de travail temporaire - heures à prendre en compte d'un montant de 3 948 euros n'est pas fondé et n'est, dans tous les cas, pas d'un montant de 7 230 euros,

- le chef de redressement relatif aux frais professionnels non justifiés de M. [O] s'élevant à la somme de 16 878 euros n'est pas fondé,

et de:

* annuler le redressement,

* annuler la mise en demeure du 26 décembre 2016,

* déclarer recevable et bien fondée son opposition à contrainte,

* annuler la contrainte du 8 février 2017,

* infirmer la décision de la commission de recours amiable du 26 juillet 2017.

Dans tous les cas, elle sollicite la condamnation de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 22 juin 2022, reprises et modifiées oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de:

* confirmer le bien-fondé de la position adoptée par la commission de recours amiable au titre des trois points de redressement portant sur le calcul des réductions générales de cotisations au titre des points 9 et 10 de la lettre d'observations du 24 octobre 2016 et sur les frais professionnels au titre du point 11 de la lettre d'observations du 24 octobre 2016,

* débouter la société [6], représentée par son liquidateur, de son opposition à la contrainte décernée le 8 février 2017 pour son montant de 64 605 euros,

* déclarer la contrainte 62600718 frappée d'opposition parfaitement valide pour son montant de 64 605 euros soit 57 313 euros de cotisations et 7 292 euros de majorations de retard,

* condamner la société [6], représentée par son liquidateur, au paiement de la contrainte pour son montant initial de 64 605 euros,

* dire que la contrainte frappée d'opposition reprend son plein et entier effet pour son montant de 64 605 euros soit 57 313 euros de cotisations et 7 292 euros de majorations de retard,

* condamner la société [6], représentée par son liquidateur, au paiement de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais de signification de 72.23 euros.

MOTIFS

* sur la régularité de la procédure de contrôle:

Sans aucun visa de support textuel, l'appelante sollicite l'annulation du contrôle au motif que l'organisme de recouvrement n'a pas respecté les règles du contrôle sur place et ne peut imposer l'envoi de documents par mail, la charte du cotisant précisant que lors d'un contrôle sur place, les documents et supports nécessaires au contrôle sont examinés sur place, alors qu'à plusieurs reprises l'URSSAF lui a demandé de manière comminatoire par mail que lui soient remis des documents, ce qui n'a pas permis une discussion contradictoire avec elle. Elle en tire la conséquence que le contrôle est entaché d'irrégularités.

L'intimée lui oppose d'une part que le tribunal a jugé après avoir examiné la teneur des échanges, que la société n'a pas fourni lors des visites en entreprise les documents figurant dans l'avis de contrôle contraignant les inspecteurs à solliciter la communication des extractions de son logiciel de paye et que le principe du contradictoire n'est entendu, en matière de contrôle de l'application de la législation sociale, qu'à compter de l'envoi de la lettre d'observations, le cotisant disposant du droit d'y répondre.

L'article R.243-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n°2013-1107 du 3 décembre 2013, applicable à la date de l'avis de contrôle en date du 26 février 2016, disposait que tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé "Charte du cotisant contrôlé" présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code. (....)

L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.

Les employeurs, personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7, dénommés inspecteurs du recouvrement, tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle. (...)

A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle (...).

L'appelante n'étaye pas sa contestation de la régularité du contrôle faute de soumettre à l'appréciation de la cour le moindre courriel de l'URSSAF lui demandant communication d'une pièce quelconque.

La cour constate que:

* l'avis de contrôle liste précisément les documents que les inspecteurs du recouvrement ont demandé à la société de mettre à leur disposition lors du contrôle sur place,

* dans leur réponse en date du 07 décembre 2016 à ses observations, ils font référence à des justificatifs demandés en rappelant qu'il avait été convenu que 'nous faisons ensemble a minima en fin de semaine un point de situation sur l'avancement de la vérification et des éventuelles erreurs constatées ou documents à produire pour avancer dans notre vérification',

* les courriels dont l'URSSAF justifie, en date des 1er juin 2016, 03 juin 2016 et 07 septembre 2016, se réfèrent à des différences constatées dans les montants figurant sur les documents que la société leur a communiqués et s'inscrivent en réalité dans le cadre d'une demande de précisions au regard de ce qui caractérise une anomalie, avant de retenir dans la lettre d'observations un redressement.

La cour relève que dans leur courriel du 03 juin 2016, les inspecteurs du recouvrement indiquent notamment 'nous finissons cette nouvelle semaine de travail dans vos locaux (...) Nous faisons donc le point des documents et explications encore attendus' et listent 'les dossiers complets pour la vérification INS à fournir pour la semaine du 13/06".

Contrairement à ce qui est allégué par la société, les courriels des inspecteurs du recouvrement, pendant la procédure de contrôle, avaient donc uniquement pour objet de permettre lors de la vérification sur place la communication de documents ou pièces manquantes alors que des différences avaient été relevées notamment 'entre le montant des réductions figurant sur les livres de paie, celui sur les bordereaux de cotisations et celui sur les extractions Excel fournies'.

Ces courriels qui s'inscrivaient au contraire dans un cadre contradictoire n'avaient aucun caractère comminatoire.

La société est dés lors mal fondée ce moyen d'annulation du contrôle tiré de l'irrégularité de la procédure de contrôle (étant observé que ce moyen ne constitue pas comme retenu par erreur par les premiers juges une exception de procédure).

* sur le fond:

Concernant l'établissement de [Localité 3], la lettre d'observations retient trois chefs de redressements relatifs à:

* la réduction générale des cotisations: entreprise de travail temporaire (n°9),

* la réduction générale des cotisations: entreprise de travail temporaire-heures à prendre en compte (n°10),

* aux frais professionnels non justifiés (n°11).

- sur le redressement n°9 au titre de la réduction générale des cotisations: entreprise de travail temporaire, d'un montant total de 36 487 euros (années 2014 et 2015):

L'appelante expose que les réductions Fillon sont calculées de manière informatisée, que durant le contrôle les inspecteurs n'ont cessé de lui répéter qu'il y avait des différences entre le montant figurant sur les états de contrôle et le montant déduit sur le tableau récapitulatif annuel qu'elle a établi sans lui donner d'explication précise comme le nom des salariés pour lesquels il était constaté un écart ou la période concernée.

Elle reconnaît s'être aperçue après réception de la lettre d'observations que certains des états de contrôle qu'elle avait fournis étaient erronés, les masses salariales ne correspondant pas à la réalité pour être inférieures aux masses salariales déclarées.

Tout en qualifiant ce chef de redressement de 'curieux', elle reconnaît pour l'année 2014 qu'il existe une différence qu'elle chiffre à 9 527 euros déduits en trop et non un écart de 21 501 euros comme retenu par l'URSSAF et que pour l'année 2015 il existe une différence de 14 986 euros déduits en trop.

Elle sollicite néanmoins l'annulation de ce chef de redressement.

L'URSSAF réplique que les salariés intérimaires sont hors champ de la mensualisation et que le montant mensuel du salaire minimum de croissance est corrigé en fonction du rapport entre l'horaire de travail prévu au contrat du salarié (hors heures supplémentaires, mais y compris jours fériés ou périodes de congés intervenant pendant le contrat le cas échéant) et 151.67 heures

Elle expose que le contrôle a fait ressortir une différence entre les montants des réductions générales des cotisations sociales concernant le personnel intérimaire porté sur les bordereaux récapitulatifs de cotisations mensuels et du tableau récapitulatif annuel et ceux issus du logiciel de paye et que si l'employeur a fourni l'exhaustivité du détail du calcul des réductions générales des cotisations sociales par année sous forme de tableau Excel, les inspecteurs ont constaté que le montant issu de ce fichier n'est pas celui porté sur les bordereaux récapitulatifs de cotisations mensuels et du tableau récapitulatif annuel.

Elle ajoute que par suite de l'audit de 2015 analysant l'effectif de la société, le calcul des réductions générales des cotisations sociales aurait dû être celui des entreprises dont l'effectif est inférieur à 20 salariés et non celui appliqué qui concernait un effectif de plus de 20 salariés, qu'il a été demandé à plusieurs reprises à l'employeur de fournir les éléments nécessaires à la vérification, sans que soient fournies d'explications sur les différences constatées ni apporté de tableaux Excel corrigés, faisant obstacle aux vérifications des inspecteurs du recouvrement qui ont validé le montant des réductions générales des cotisations sociales pour les salaires indiqués dans les fichiers fournis et pour la masse salariale indiquée.

Elle relève que sur les tableaux Excel corrigés transmis dans le cadre de la procédure judiciaire, s'agissant de l'année 2014, les différences restent identiques, ce qui justifie le maintien du redressement au titre de cette année à hauteur de 21 501 euros et qu'en ce qui concerne l'année 2015, la différence de montants n'est pas contestée par la cotisante.

Il résulte de l'article L. 241-13-III du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, que le coefficient de réduction est fonction du rapport entre la rémunération annuelle du salarié, telle que définie à l'article L. 242-1 du même code, et le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail, et de l'article D. 241-7 du même code, que pour les salariés en contrat de travail temporaire mis à disposition au cours d'une année auprès de plusieurs entreprises utilisatrices, ce coefficient est déterminé pour chaque mission.

Les erreurs reconnues par l'appelante dans les documents transmis lors du contrôle justifient le redressement opéré par les inspecteurs du recouvrement dans le principe.

Alors qu'elle ne conteste ni les modalités de calcul des réductions dites Fillon détaillées dans la lettre d'observations, ni le caractère erroné des réductions qu'elle a appliquées, force est de constater que la société n'a à aucun moment, que ce soit au cours du contrôle, puis lors des échanges post lettre d'observations, comme dans le cadre de son recours amiable, et enfin dans le cadre de la présente procédure, soumis les éléments rectifiés de ses données salariales de nature à invalider le montant du redressement opéré.

Elle n'étaye pas davantage ses critiques du jugement entrepris en se bornant en réalité à solliciter l'annulation d'un chef de redressement non contestable dans son principe puisqu'il est justifié par les discordances constatées par les inspecteurs du recouvrement qui ont procédé à la réintégration du trop réduit.

De plus, la cotisante reconnaît expressément la différence de 14 986 euros retenue pour l'année 2015.

Les inspecteurs du recouvrement ont relevé que le montant des réductions Fillon concernant le personnel intérimaire issu du fichier Excel présenté:

* pour l'année 2014, est de 140 656 euros alors que celui mentionné sur le tableau récapitulatif annuel est de 162 066 euros, soit une différence de 21 501 euros,

* pour l'année 2015, est de 177 278 euros alors que celui mentionné sur le tableau récapitulatif annuel est de 192 204 euros, soit une différence de 14 986 euros.

Il résulte des constatations des inspecteurs du recouvrement que la vérification effectuée des mentions du tableau Excel est exacte mais que le montant issu de ce fichier n'est pas celui porté sur les bordereaux de cotisations mensuels comme sur le tableau récapitulatif annuel.

Si l'appelante allègue qu'en 2014 la différence serait de 9 527 euros et non de 21 501 euros pour autant elle ne verse aux débats aucun élément comptable certifié pouvant établir que le montant à retenir serait de 152 539 euros et non point 162 066 euros comme mentionné sur le tableau récapitulatif annuel communiqué aux inspecteurs du recouvrement.

Par ailleurs elle ne conteste pas l'erreur concernant le montant de réduction appliqué pour 2015.

Ce chef de redressement justifié doit donc être validé.

* sur le redressement n°10 au titre de la réduction générale des cotisations: entreprise de travail temporaire-heures à prendre en compte (d'un montant de 3 948 euros, année 2015):

L'appelante conteste ce chef de redressement en soutenant que les jours de congés ne concernaient pas que le samedi, lequel est un jour de travail normal pour un intérimaire.

Elle soutient que la méthode par échantillonnage n'a pas été mise en place lors du contrôle, qu'aucun texte n'interdit à un intérimaire de prendre des congés payés pendant leur mission et que le calcul de la réduction dégressive effectué par l'URSSAF excluant les heures de congés payés pris n'est basé sur aucun texte légal mais sur la seule interprétation que fait l'organisme de ceux-ci et de son affirmation non étayée de l'utilisation d'une méthode fictive.

L'URSSAF lui oppose que dans le cadre des vérifications et de l'examen de certains justificatifs transmis et non de l'ensemble de ceux demandés, les inspecteurs du recouvrement ont constaté l'absence de facturation des journées de congés payés aux clients (qu'il s'agisse d'un samedi ou d'une journée renseignée comme non travaillée), que des demandes de congés transmises ne sont pas datées et qu'aucun justificatif probant ne vient corroborer la prise de congés.

Elle ajoute que la présentation des bulletins de paye n'est pas correcte lorsque les salariés intérimaires prennent des congés payés durant leur mission car celle-ci n'a aucun impact sur le nombre d'heures travaillées qui ne doit pas être modifié et aucun impact sur le montant de la réduction générale des cotisations sociales.

Il est exact qu'indépendamment de la discussion opposant les parties sur la prise de congés payés en cours d'exécution d'un contrat de mission, ceux-ci ne peuvent en tout état de cause avoir une incidence sur le nombre d'heures travaillées et par suite sur le montant de la réduction sur les bas salaires.

Une lettre d'observations étant un élément constitutif des procès-verbaux dressés par les inspecteurs de recouvrement, il s'ensuit, par application des dispositions de l'article L.243-7 du code de la sécurité sociale, que ses mentions font foi jusqu'à preuve contraire.

En l'espèce, les inspecteurs du recouvrement ont constaté qu'à partir de septembre 2015 sur certains bulletins de paie de salariés intérimaires:

* apparaissent des prises de congés, qui correspondent en moyenne à 7 ou 14 heures par mission, ce nombre d'heures étant multiplié par le taux horaire appliqué sur la mission et ajouté au gain brut du salarié,

* ces heures et le salaire en découlant sont portés sur la rubrique de paye 020 'congés pris' et sont ajoutés aux autres rubriques de paie portées sur le bulletin, puis le montant correspondant à ces heures de congés payés pris est annulé par l'intermédiaire de la rubrique 098 'régularisation icep' mais pas le nombre d'heures de congés payés.

Ils ont relevé que cette présentation permet:

- de ne pas modifier le brut soumis à cotisations,

- d'augmenter fictivement le nombre d'heures de la mission,

et que la conséquence de cette présentation et son intérêt financier sont d'augmenter le montant de la réduction Fillon applicable, puisque:

* ce montant est obtenu par application d'un coefficient à la rémunération annuelle brute,

* le calcul de ce coefficient dépend au numérateur du nombre d'heures rémunérées pour calculer le salaire minimum de croissance applicable sur la mission,

* la majoration du nombre d'heures effectuées sur la mission sans modification de la rémunération brute entraîne mathématiquement la majoration du coefficient et donc de la réduction Fillon.

Ils indiquent avoir demandé à l'employeur de justifier la réalité de la prise de ces congés payés par le salarié intérimaire en fournissant à partir de la sélection des missions concernées les justificatifs correspondants, qu'il leur a fourni un échantillon pour l'établissement de [Localité 3] avec comme justificatifs la demande de congés du salarié, le bulletin de salaire et les relevés d'heures.

Ils ont constaté à l'examen des relevés d'heures que la date correspondant au jour de congés pris tombe pour l'essentiel un samedi qui n'était pas une journée travaillée, qu'elle correspond parfois à une absence non justifiée et non facturée du salarié intérimaire durant la semaine de sa mission et ont conclu qu'il ne s'agit pas de véritables congés payés.

Considérant que le procédé avait pour objet de créer des congés fictifs dans le seul but pour l'employeur d'augmenter le montant des réductions Fillon applicables sur certaines missions et au bénéfice de l'entreprise, ils ont assujetti à cotisations la majoration indue de la réduction Fillon.

Les constatations ainsi effectuées par les inspecteurs du recouvrement établissent donc que:

* les heures mentionnées sur les bulletins de paye des intérimaires au titre des congés payés et le salaire en découlant sont portés sur la rubrique de paye 020 'congés pris' et sont ajoutés aux autres rubriques de paie portées sur le bulletin,

* le montant correspondant à ces heures de congés payés pris est ensuite annulé par l'intermédiaire de la rubrique 098 'régularisation icep' mais pas le nombre d'heures de congés payés.

Il est donc exact que ces écritures comptables ont, notamment, pour conséquence d'augmenter fictivement le nombre d'heures de la mission alors que le calcul du coefficient de la réduction dépend au numérateur du nombre d'heures rémunérées pour déterminer le salaire minimum de croissance applicable sur la mission.

Ce chef de redressement, qui n'est pas discuté dans son montant, est donc justifié.

* sur le redressement n°11 au titre des frais professionnels non justifiés: M. [O] [E], d'un montant total de 16 878 euros (années 2013, 2014 et 2015).

Il résulte de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale que sont assujetties à cotisations l'ensemble des sommes versées en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entreprise d'un tiers à titre de pourboire.

L'arrêté du 20 décembre 2002 définit les conditions dans lesquelles s'effectue l'indemnisation des les frais professionnels qui impliquent que lors d'un contrôle, l'employeur présente les justificatifs et du respect des conditions d'exonération des remboursements posées par cet arrêté.

L'appelante conteste ce chef de redressement en soutenant que l'URSSAF a repris des éléments d'un précédent contrôle annulé pour vice de procédure et souligne avoir transmis la carte grise qui ne lui avait pas été demandée à la lecture de la lettre d'observations .

Tout en reconnaissant que les remboursements de frais kilométriques auraient dû apparaître sur le bulletin de salaire sous forme d'indemnités kilométriques et non pas de repas et déplacements, elle allègue une erreur de saisie lors de l'établissement des bulletins de paye et indique avoir transmis à l'URSSAF le détail des kilomètres parcourus par le salarié.

Elle souligne que le total des frais de repas et de déplacement apparaissant sur les bulletins de paie est identique au montant des indemnités kilométriques facturées au client et soutient que les bases retenues pour le redressement ne correspondent pas aux montants des indemnités figurant sur ses DADS, à savoir 6 153 euros pour l'année 2013, 20 330 euros pour 2014 et 8 388 euros pour 2015.

L'URSSAF lui oppose que les conditions d'exonération des remboursements des frais professionnels sont posées par l'arrêté du 20 décembre 2002 et que lorsque les sommes allouées ne répondent pas à ces conditions, elles sont soumises à cotisations.

Tout en reconnaissant que depuis le contrôle la société a fourni aux inspecteurs les cartes grises des véhicules qui auraient été utilisés par M. [O], elle soutient que le détail des kilomètres effectués ne lui a pas été transmis et relève que dans un courrier en date du 07 février 2017, l'ancien salarié a fait état d'un véhicule de fonction mis à sa disposition par l'entreprise utilisatrice.

Elle ajoute, s'agissant des différences de montants invoquées par l'appelante, que les inspecteurs ont pris comme base de redressement ceux issus des tableaux Excel qu'elle leur a fournis.

Les inspecteurs du recouvrement ont constaté le versement à M. [O], salarié intérimaire mis à disposition d'un client de la société en qualité de chargé de mission, d'indemnités non soumises à cotisations, que sur ses feuilles de pointage figurent des indemnités kilométriques sans mention des destinations précises des déplacements effectués, ne permettant pas de vérifier leur réalité et que la carte grise du véhicule attestant de la puissance fiscale ne leur a pas été présentée.

Ils ont constaté sur les bulletins de paye de cet intérimaire que les sommes correspondant aux indemnités kilométriques étaient remplacées par des indemnités de grands déplacements, des repas pour le midi ou des petits déplacements et ont réintégré les frais professionnels supposés en brut reconstitué dans l'assiette des cotisations.

Il résulte donc de ces constatations des inspecteurs du recouvrement d'une part des incohérences entre les mentions figurants sur les bulletins de paye du salarié intérimaire concerné et les feuilles de pointage et d'autre part que les conditions d'exonération des sommes ainsi versées au titre de frais professionnels par la société ne respectent pas celles posées par l'arrêté du 20 décembre 2002 ce qui justifie le redressement dans son principe.

Si l'appelante conteste les montants des sommes retenues pour servir de base au calcul du redressement, la cour constate qu'en réalité sa contestation est liée à la circonstance que les sommes versées en franchise de cotisation ont été réintégrées en brut dans l'assiette, sans qu'elle le conteste spécifiquement.

Il s'ensuit que ce chef de redressement est également justifié dans son montant.

Le redressement notifié pour l'établissement de [Localité 3] étant justifié pour son entier montant, la société doit être déboutée de sa demande d'annulation de la mise en demeure.

L'URSSAF ne peut demander à la fois à la cour de juger que la contrainte frappée d'opposition reprenne son entier effet et solliciter également la condamnation de la société au paiement.

Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a validé en réalité le redressement notifié.

La société [2], doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 64 605 euros (soit 57 313 euros en cotisations et 7 292 euros en majorations).

Succombant en ses prétentions elle doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter l'application à son bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait par contre inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur les frais exposés pour sa défense ce qui justifie de lui allouer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a validé le redressement notifié,

- Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs réformés et y ajoutant,

- Condamne la société [6], représentée par son liquidateur amiable, la société [2], à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 64 605 euros (soit 57 313 euros en cotisations et 7 292 euros en majorations),

- Déboute la société [6], représentée par son liquidateur amiable, la société [2] de l'intégralité de ses demandes,

- Condamne la société [6], représentée par son liquidateur amiable, la société [2], à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société [6], représentée par son liquidateur amiable, la société [2] aux dépens, comprenant le coût des frais de signification de la contrainte.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/09647
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;21.09647 ?
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