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30/09/2022 | FRANCE | N°20/13206

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-7, 30 septembre 2022, 20/13206


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7



ARRÊT AU FOND

DU 30 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/ 218













Rôle N° RG 20/13206 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGWT5







[H] [I]





C/



S.A.S. LA SAHARIENNE



S.A. ORPEA



















Copie exécutoire délivrée

le : 30 septembre 2022

à :

Me Etienne MARGOT-DUCLOT

SELARL MRB





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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARTIGUES en date du 04 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00716.





APPELANTE



Madame [H] [I], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Etienne MARGOT-DUCLOT, avocat ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7

ARRÊT AU FOND

DU 30 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/ 218

Rôle N° RG 20/13206 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGWT5

[H] [I]

C/

S.A.S. LA SAHARIENNE

S.A. ORPEA

Copie exécutoire délivrée

le : 30 septembre 2022

à :

Me Etienne MARGOT-DUCLOT

SELARL MRB

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARTIGUES en date du 04 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00716.

APPELANTE

Madame [H] [I], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Etienne MARGOT-DUCLOT, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

S.A.S. LA SAHARIENNE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

représentée par Me Gilles BONLARRON de la SELARL MRB, avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE

S.A. ORPEA, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités au siège social sis, assignée à personne morale en intervention forcée le 06 mai 2022 à la demande de l'appelante (la déclaration d'appel et les conclusions d'appelante lui ont été signifiées), demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Gilles BONLARRON de la SELARL MRB, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Françoise BEL, Président de chambre, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Françoise BEL, Président de chambre

Mme Marina ALBERTI, Conseiller

Monsieur Yann CATTIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022, à cette date, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision serait prorogé au 30 septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022,

Signé par Madame Françoise BEL, Président de chambre et , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, prétentions et moyens des parties:

Engagée par contrat à durée indéterminée en date du 18 juillet 2005 en qualité de préparatrice en pharmacie par la société La Saharienne relevant de la Convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but lucratif, classée coefficient 279, FPST au dernier état de la relation contractuelle et un percevant un salaire mensuel de base de 1828,54 euros brut, Mme [H] [I], invoquant une situation de harcèlement moral discriminatoire, a saisi le 3 décembre 2018 le conseil de prud'hommes de Martigues sollicitant l'indemnisation du préjudice subi du chef de harcèlement moral discriminatoire.

Par jugement de départage en date du 4 décembre 2020 le conseil a condamné la société à payer à la salariée la somme de 7500 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, rejetant le caractère discriminatoire du harcèlement.

La salariée a relevé appel par déclaration du 29 décembre 2020 en ce que le conseil a dit n'y avoir lieu de retenir le caractère discriminatoire du harcèlement moral et a réduit à la somme de 7 500,00 euros la demande de dommages-intérêts formulée à hauteur de la somme de 20 000 euros.

La salariée a fait délivrer une assignation en intervention forcée en date du 6 mai 2022 à l'encontre de la société Orpéa.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 2 juin 2022, la salariée demande à la cour de:

La juger recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions;

Ordonner la jonction des procédures inscrites au répertoire du rôle de la cour d'appel d'Aix-en- Provence sous les numéros n°20/13206 et 21/00110;

Confirmer la condamnation de la société La Saharienne à lui verser les sommes de 7 500 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, par jugement rendu le 4 décembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Martigues;

Infirmer ce jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de retenir le caractère discriminatoire du harcèlement;

Et, statuant à nouveau :

Juger que le harcèlement moral des sociétés La Saharienne et Orpéa est en lien avec les mandats représentatif et syndical exercés et constituent une discrimination syndicale ;

En conséquence,

Annuler la décision du 18 février 2021 de la société Orpéa de la suspendre de son poste de préparatrice en pharmacie;

Ordonner aux sociétés La Saharienne et Orpéa de la réintégrer à son poste de préparatrice en pharmacie au sein de la résidence [3] à [Localité 4];

Juger que cette injonction de réintégrer est assortie d'une astreinte de 200 euros par jour de retard;

Condamner les sociétés La Saharienne et Orpéa à lui payer les sommes suivantes:

- 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices moral, psychologique, personnel et professionnel endurés par la salariée;

- 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l'entrave au droit syndical fondée sur l'article L.2141-8 du code du travail;

- 2 747,25 euros de rappel de salaire au titre des heures de délégation impayées et 274,72euros d'indemnité de congés payés afférents;

- 111,14euros de remboursement de frais ;

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamner les sociétés La Saharienne et Orpéa aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 19 mai 2022, la société La Saharienne et la société Orpéa demandent à la cour de:

Déclarer la société La Saharienne recevable en ses appels principal et incident;

Dire et juger nouvelles et irrecevables les demandes suivantes de la salariée:

- ordonner la réintégration de la salariée à son poste de préparatrice en pharmacie au sein de la résidence [3] à [Localité 4];

- juger que cet ordre de réintégrer la salariée est assorti d'une astreinte de 200,00 euros par jour de retard;

- condamner la Société La Saharienne à payer à la salariée les sommes de 15.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l'entrave au droitsyndical fondée sur l'article L.2141-8 du code du travail;

Infirmer le jugement dont appel et, le réformant, débouter la salariée de ses demandes.

Condamner la salariée aux entiers dépens.

A l'audience, la cour a sollicité des parties une note en délibéré portant sur la recevabilité des demandes formées à l'encontre des employeurs successifs à la suite du transfert du contrat de travail de la salariée à compter de la mise en location gérance, la recevabilité des dernières prétentions de l'appelante sur le fondement de l'article 910-1 du code de procédure civile, impartissant aux parties un certain délai pour répondre.

Pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties la cour renvoie à leurs écritures précitées.

Motifs

Sur la demande de réouverture des débats:

La présente instance relevant des dispositions applicables à la procédure avec représentation obligatoire, clôturée par ordonnance du 3 juin 2022 , et la cour exerçant ses fonctions lors de la présentation de son rapport en invitant les parties à présenter leurs observations sur certains points qu'elle définit expressément , la demande de réouverture des débats 'sur les faits postérieurs au mois de juillet 2018" est rejetée.

Sur la recevabilité des prétentions de l'appelante:

Par note en délibéré déposée le 14 juin 2022, l'appelante soutient la recevabilité de la demande de confirmation de la condamnation à payer la somme de 7500 euros formée dans les dernières conclusions ainsi que la demande de condamnation à payer une somme de 20 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de la discrimination, rejetée par le conseil, dont il est relevé appel. Elle ajoute que la demande de confirmation ne peut s'analyser comme une prétention nouvelle au sens de l'article 555 du code de procédure civile.

Elle soutient également la recevabilité de l'assignation en intervention forcée dirigée à l'encontre de la société Orpéa, laquelle n'était ni partie ni représentée à l'instance, partie intéressée dont la présence paraît nécessaire à la solution du litige, et contre laquelle elle est en droit d'agit à titre principal, compte tenu d'une unité de direction existant depuis 2011, versant à cette fin un accord UES Orpéa de 2015.

Elle énonce en dernier lieu au visa de l'article 564 du code de procédure civile, que les actes discriminatoires, qu'elle impute à la société Orpéa son employeur, se poursuivent à raison des activités syndicales et font naître la question de la responsabilité de cette société devant la cour.

Enfin elle sollicite la réouverture des débats pour les faits postérieurs au mois de juillet 2018.

Par note en délibéré déposée le 7 juillet 2022, les sociétés La Saharienne et Orpéa concluent à l'irrecevabilité de l'appel en intervention forcée formé à l'encontre de la société Orpéa au visa des dispositions de l'article 555 du code de procédure civile , en ce que seule la société La Saharienne en sa qualité d'employeur pour les faits antérieurs au transfert contrat de travail à effet au 2 juillet 2018 pourrait être tenue pour responsable, d'une part, à l'irrecevabilité des demandes nouvelles formées en cause d'appel ayant trait au harcélement moral invoqué dont elle aurait été la victime tant qu'elles sont dirigéescontre la société La Saharienne au regard de l'objet de son appel, de ses conclusions d'appel en date du 26 mars 2021, formant de nouvelles demandes par conclusions du 24 mai 2022, la société La Saharienne ayant conclu à l'irrecevabilité de telles demandes au ragrd des règles de l'article 910-4 du code de procédure civile, énonçant que la cour n'est saisie que des demandes dans Ie cadre de la dévolution opérée par la déclaration d'appel, que des chefs du jugement ayant trait au quantum des dommages et intéréts pour harcélement moral discriminatoire et pour les motifs supra, seulement en ce qu'elles sont dirigées contre La Saharienne.

Elle ajoute sur la recevabilité des demandes au regard de l'appel de La Saharienne, que la salariée, appelante à titre principal sur le harcèlement moral ne peut former appel incident sur la discrimination éventuelle par la société Orpéa, et n'a pas en tout état de cause formé un tel appel dans le délai de trois prévu à peine d'irrecevabilité relevée d'office, conformément à l'article 909.

- sur l'intervention forcée en cause d'appel et la recevabilité des demandes formées à l'encontre de la société Orpéa pour les faits antérieurs au 1er juillet 2018:

Selon l'article 331 du code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d'agir contre lui à titre principal.

Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement.

Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense.

L'assignation en intervention forcée délivrée à la société Orpéa est déclarée recevable.

L'assignation en intervention forcé a été délivrée par acte en date du 6 mai 2022 à la société Orpéa pour des faits de suspension du contrat de travail le 18 février 2021postérieurs au jugement appelé. L'appelante sollicite toutefois la condamnation des deux sociétés à la réintégrer sur son poste de préparatrice en pharmacie et à lui payer des dommages et intérêts et frais divers.

L'accord UES conclu en 2015 dont elle se prévaut au soutien d'une unité de direction a été mis en place aux fins d'organisation de la représentation du personnel. Cet accord n'est pas susceptible de faire échec aux dispositions du droit des sociétés sur la personnalité morale, ni au droit spécial du travail sur le transfert des contrats de travail.

Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

La société La Saharienne, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 432 063 931, filiale de la société Orpéa immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 401 251 566, ayant donné en location gérance le fonds de commerce de l'établissement secondaire situé à [Localité 4] à la société Orpéa à effet au 1er juillet 2018, le contrat de travail de la salariée a été transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail à cette même date, de sorte que la salariée est irrecevable à conclure à la condamnation de la société La Saharienne pour des faits survenus à compter de cette date, la société ayant perdu la qualité d'employeur.

Elle est de même irrecevable à élever des prétentions à l'encontre de la société Orpéa pour des faits antérieurs au 1er juillet 2018 en qualité d'employeur, cette société n'ayant pas cette qualité.

- sur l'objet du litige:

Selon l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article «802», demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Selon l'article 910-1, les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 sont celles, adressées à la cour, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes et qui déterminent l'objet du litige.

L'appelante a remis des conclusions au greffe le 26 mars 2021 aux termes desquelles elle sollicite l'infirmation du jugement du chef du montant des dommages et intérêts alloués ( 7500 euros ) et la condamnation de la société La Saharienne à lui verser des dommages et intérêts d'un montant de 20.000 euros en réparation des préjudices moral, psychologique et personnel.

Or dans ses dernières écritures déposées le 2 juin 2022 , l'appelante sollicite la confirmation de la condamnation prononcée contre la société La Saharienne (7500 euros), demande la condamnation de la société La Saharienne et de la société Orpéa à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices moral, psychologique, personnel et professionnel endurés par la salariée, la somme de 15.000 euros dommages et intérêts en réparation de l'entrave au droit syndical fondée sur l'article L.2141-8 du code du travail, la somme de 2 747,25 euros à titre de rappels de salaire et de 274,72 euros correspondant aux congés payés afférents, payement de frais, l'annulation de la décision du 18 février 2021 de la suspendre de son poste de préparatrice en pharmacie et la réintégration sous astreinte dans le poste.

Ces prétentions, à l'exception de la demande de condamnation de la société La Saharienne à lui verser des dommages et intérêts d'un montant de 20.000 euros en réparation des préjudices moral, psychologique et personnel, qui n'ont pas été formulées dans les premières conclusions d'appelant du 26 mars 2021 visées à l'article 910-1 , postérieures à l'événement litigieux du 18 janvier 2021, étant rappelé que cette société n'est plus l'employeur de la salariée depuis le 1er juillet 2018, sont irrecevables.

Ces prétentions ne sont pas destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Formulées à l'encontre de la société Orpéa, employeur de la salariée depuis le 1er juillet 2018, société qui n'avait pas été appelée à l'instance devant le premier juge méconnaissant ainsi le principe du premier degré de juridiction, les demandes sont irrecevables.

Formulées à l'encontre de la société La Saharienne par conclusions du 19 mai 2022 , mais hors le délai de l'article 909, elles sont d'office irrecevables.

-sur les demandes nouvelles en cause d'appel:

Selon les articles 564, 565 et 566, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

L'appelante forme une demande en dommages et intérêts d'un montant de 15.000 euros à l'encontre de la société La Saharienne et de la société Orpéa fondée sur des faits d'entrave à son activité syndicale après sa désignation en qualité de déléguée syndicale Cgt. Or les faits en cause ne constituent pas des faits nouveaux présentant le caractère de la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige, dès lors qu'ils étaient connus des parties au cours de l'instance suivie devant le premier juge, en ce que la désignation s'était produite au mois de mars 2019, soit avant le prononcé du jugement, à l'exception du fait du 18 janvier 2021 cependant non-évoqué dans les premières conclusions, et ne sont pas l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions formées à l'encontre de la société La Saharienne, laquelle n'était plus l'employeur de la salariée à la date de l'événement, ni à l'encontre de la société Orpéa, employeur de la salariée depuis le 1er juillet 2018 laquelle n'ayant pas été appelée en la cause devant le premier juge, il ne pouvait s'agir à son encontre d'une demande étant l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises en première instance.

Les faits du 18 janvier 2021 ne pouvant être articulés qu'à l'encontre de la société Orpéa, doivent être soumis au conseil de prud'hommes.

Il s'ensuit que l'appelante est irrecevable en ses prétentions élevées à l'encontre de la société Orpéa.

Sur le harcèlement discriminatoire:

- le harcèlement:

Selon l'article L. 1152-1 du code du travail , aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le (...) salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le premier juge a relevé que la salariée présentait des éléments de faits, répétés, faisant état de la part du personnel encadrant, de la volonté de la faire démissionner de son poste de préparatrice, et de pressions exercées sur celle-ci à cette fin, attestées par d'autres salariés, la suppression du poste envisagée étant mentionnée au compte rendu du CHSCT en date des 26 et 27 avril 2017.

Il a ainsi été décrit qu'il a été conseillé fortement à la salariée de démissionner, ce depuis cinq années, que la salariée a été vue sortir en pleurant d'un entretien avec la directrice et qu'elle serait obligée de démissionner.

La matérialité des faits et leur caractère répété sont établis.

La conseil a retenu également, par les attestations versées, le certificat médical en date du 3 octobre 2017 mentionnant un état anxio-dépressif et une dégradation de l'état psychologique, que les agissements précités ont eu pour conséquence une dégradation des conditions de travail de la salariée susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il est donc produit par la salarié des faits, lesquels pris dans leur ensemble, laissent supposer une situation de harcèlement moral.

Pour s'en défendre l'employeur fait état de l'obligation qui lui est faite d'une mise en conformité avec les dispositions de l'article L. 4241-1 du code de la santé publique aux termes desquelles 'Les préparateurs en pharmacie sont seuls autorisés à seconder le titulaire de l'officine et les pharmaciens qui l'assistent dans la préparation et la délivrance au public des médicaments destinés à la médecine humaine et à la médecine vétérinaire', ce qui conduit l'employeur selon lui, pour respecter les préconisations de l'ARS, à la suppression des postes de préparateur en EHPAD non doté d'une

Pharmacie à Usage Interne, ce qui est le cas de l'établissement dans lequel exerce la salariée.

Or la disposition légale n'est pas nouvelle, existant antérieurement au recrutement de la salariée et l'allégation d'une telle obligation pour se mettre en conformité ne peut dès lors constituer un fait objectif, justifiant les pressions opérées sur la salariée pour obtenir sa démission, et en conséquence étranger à tout harcèlement.

C'est donc à bon droit que le conseil a accueilli la prétention de la salariée au harcèlement moral subi en son principe.

- la discrimination syndicale:

L'appelante arguant de faits postérieurs à sa désignation en qualité de déléguée syndicale Cgt, au mois de mars 2019, la demande est irrecevable, comme précisé ci-avant.

Il est dès lors alloué à l'appelante, en réparation du préjudice subi pour des faits de harcèlement moral caractérisés sur une période de temps entre 2016 et le 2 juillet 2018, à la somme de 3000 euros.

Par ces motifs

La cour,

Rejette la demande de réouverture des débats;

Déclare recevable l'assignation en intervention forcée de la société Orpéa;

Déclare irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société Orpéa;

Déclare irrecevables les demandes en condamnation de la société La Saharienne au payement de la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts en réparation de l'entrave au droit syndical , au payement de rappels de salaire d'heures de délégation, de payement de frais, en annulation de la décision du18 février 2021 de suspension du poste de préparatrice en pharmacie, de la réintégration sous astreinte,

Infirme le jugement dont appel du chef du montant des dommages et intérêts alloués au titre de la réparation du préjudice moral subi pour des faits de harcèlement moral,

Statuant à nouveau ,

Condamne la société La Saharienne à payer à Mme [I] la somme de 3000 euros;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes;

Condamne Mme [H] [I] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-7
Numéro d'arrêt : 20/13206
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;20.13206 ?
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