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29/09/2022 | FRANCE | N°19/12846

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 29 septembre 2022, 19/12846


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 380













N° RG 19/12846 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEXJZ







[O] [A] épouse [V]

[K] [V]





C/



[H] [M] [G] [B]

[E] [J] [S] [R] épouse [B]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP HENTZIEN - BOCQ

UET-HENTZIEN



Me Gervais GOBILLOT

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 17 Juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04675.



APPELANTS



Madame [O] [A] épouse [V]

demeurant [Adresse 1]



représentée par Me S...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 380

N° RG 19/12846 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEXJZ

[O] [A] épouse [V]

[K] [V]

C/

[H] [M] [G] [B]

[E] [J] [S] [R] épouse [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP HENTZIEN - BOCQUET-HENTZIEN

Me Gervais GOBILLOT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 17 Juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04675.

APPELANTS

Madame [O] [A] épouse [V]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sophie BOCQUET-HENTZIEN de la SCP HENTZIEN - BOCQUET-HENTZIEN, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [K] [V]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sophie BOCQUET-HENTZIEN de la SCP HENTZIEN - BOCQUET-HENTZIEN, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [H] [M] [G] [B]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Gervais GOBILLOT, avocat au barreau de GRASSE

Madame [E] [J] [S] [R] épouse [B]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Gervais GOBILLOT, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvaine ARFINENGO, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Les époux [V]/[A] et les époux [B]/[R] sont propriétaires de parcelles bâties contiguës situées [Adresse 2] ; en 2008, ces derniers ont obtenu l'autorisation d'agrandir leur villa située en contrebas de celle des époux [V]/[A].

Invoquant une perte de vue et d'ensoleillement du fait de cette extension et de la présence d'arbres de grande hauteur en limite de leur propriété, les époux [V]/[A] ont fait assigner les époux [B]/[R] en exécution de travaux sous astreinte et paiement de dommages-intérêts devant le tribunal judiciaire de Grasse sur le fondement des troubles anormaux de voisinage.

Considérant que l'action était prescrite et infondée, cette juridiction par jugement contradictoire du 17 juin 2019 a :

'débouté les époux [V]/[A] de leurs demandes ;

'débouté les époux [B]/[R] de leur demande en paiement de dommages-intérêts ;

'condamné in solidum les époux [V]/[A] à payer aux époux [B]/[R] la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamné in solidum les mêmes aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

Les époux [V]/[A] ont régulièrement relevé appel de cette décision le 5 août 2019 et demandent à la cour selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 1er juin 2022 de:

'réformer la décision déférée et statuant à nouveau ;

'déclarer l'action recevable ;

'condamner solidairement et au besoin in solidum les époux [B]/[R] à :

*procéder à l'occultation dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement et sous astreinte de 300 € par jour de retard passé ce délai, de la fenêtre et de la porte-fenêtre de l'extension de leur habitation,

*procéder à la démolition dans les mêmes délai et astreinte de l'abri voiture/garage et de la tonnelle sous canisses,

*procéder à l'abattage sous les mêmes délai et astreinte de toutes les végétations implantées sur leurs fonds et derrière la tonnelle telles que constatées par huissier les 5 novembre 2015 et 16 mars 2020 soit la plante devant le balcon du séjour des époux [V]/[A], l'olivier, la haie de pittosporums, l'arbre situé derrière la tonnelle et les trois arbres dans le coin gauche de la vue sur l'ouest en arrière-plan de la tonnelle,

*procéder à l'élagage dans les mêmes délai et astreinte de tous les arbres de grande hauteur constatés par huissier ;

'dire que l'élagage devra être effectué de telle façon à ce que soit restituée aux époux [V]/[A] la vue dont ils disposaient antérieurement sur la mer, les montagnes lointaines, les collines environnantes, le village et les couchers de soleil ;

'dire que les époux [V]/[A] seront au besoin autorisés à faire constater par voie d' huissier la conformité des abattages, arrachages et élagages ;

'rappeler aux époux [B]/[R] leur obligation légale d'intervenir annuellement et chaque fois que nécessaire sur leurs plantations afin d'en limiter la hauteur ;

'condamner solidairement et au besoin in solidum les époux [B]/[R] à payer aux époux [V]/[A] les sommes de :

*50'000 € à titre de dommages-intérêts pour perte de vue et d'ensoleillement,

*50'000 € pour privation de jouissance,

*55'000 € au titre de la moins-value de leur habitation,

*10'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'débouter les époux [B]/[R] de leurs demandes

' les condamner solidairement et au besoin in solidum aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

Au soutien de leur appel, les époux [V]/[A] font valoir principalement que les intimés ont édifié des murs dépassant la hauteur maximale prévue au plan d'occupation des sols, que l'abri voiture a été édifié sans autorisation, qu'une tonnelle d'une longueur de 20 mètres a été aménagée en limite de propriété, que le procès-verbal de constat du 5 novembre 2015 est particulièrement édifiant sur l'ampleur de ces ouvrages, que la prescription quinquennale ne court qu'à compter de la naissance du trouble et non pas de l'implantation de la végétation, qu'ils subissent un enfermement constructif et végétatif et que les pièces produites par les époux [B]/[R] relatives à l'entretien de leurs végétaux sont toutes postérieures à l'assignation du 1er septembre 2016.

Selon dernières conclusions en réplique signifiées par voie électronique le 3 juin 2022, les époux [B]/[R] demandent à la cour de :

vu les articles 2224 et 544 du code civil,

'confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et y ajoutant ;

'condamner in solidum les époux [V]/[A] à payer aux époux [B]/[R] la somme de 20'000 € pour procédure abusive ;

'condamner in solidum les mêmes à payer la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner in solidum les époux [V]/[A] aux dépens avec bénéfice de recourement direct.

Les époux [B]/[R] soutiennent principalement que les constructions ont été édifiées plus de cinq ans avant l'assignation introductive d'instance, que pour contourner la prescription quinquennale en matière de trouble anormal de voisinage les appelants se sont d'abord prévalus de la prescription trentenaire, que les parties sont propriétaires de deux maisons jumelées situées en zone boisée et dont celle des époux [V]/[A] est en surplomb, que ceux-ci ne peuvent prétendre avoir une vue plongeante sur leur jardin, que les procès-verbaux de constat se contredisent dans le positionnement de la terrasse et de la tonnelle, que les clichés photographiques pris en hiver ne sont pas pertinents, que l'extension se situe en dessous des fenêtres de l'habitation des appelants, que le constat établi à l'initiative des époux [B]/[R] le 26 août 2021 par l'huissier [C] montre la présence sur la propriété [V]/[A] d'arbres menaçant de s'effondrer, que le rapport d'expertise amiable de M. [W] qui répond aux attentes des appelants n'établit aucune moins-value de leur propriété et qu'en définitive l'action relève de l'intention de nuire.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 7 juin 2022.

MOTIFS de la DECISION

Il est admis désormais par les appelants que la prescription en matière de trouble anormal de voisinage est de cinq ans ; courant à compter de la matérialisation du trouble, c'est à tort qu'ils prétendent que ce n'est qu'au jour de la délivrance du certificat de conformité soit le 30 mai 2012 qu'ils auraient eu connaissance du trouble par la pérennité de l'ouvrage. La cour relève par ailleurs que le recours gracieux intenté par les époux [V]/[A] à l'encontre du permis de construire délivré le 24 avril 2008 par la commune de Mouans-Sartoux a été rejeté, que la construction de l'abri voiture a fait l'objet d'un certificat de conformité le 16 novembre 2004 et que la tonnelle a été édifiée en vertu de déclarations de travaux des 29 juin 2010 et 9 septembre 2011.

C'est donc à bon droit que le tribunal a déclaré prescrites les demandes relatives à ces constructions et/ou ouvrages en l'état d'une assignation au 1er septembre 2016, la réitération postérieure de procès-verbaux d'huissiers constatant ces faits anciens étant inefficace.

S'agissant de l'évolution de la végétation, ces procès-verbaux ne mettent en évidence aucune évolution anormale pouvant être à l'origine d'un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage ; il est aussi constant que nul ne peut prétendre à la pérennité de son environnement visuel, que nul ne dispose d'un droit acquis à une vue permanente et totalement dégagée et que l'anormalité s'apprécie en fonction des circonstances locales, de la destination normale et habituelle du fonds troublé, de la perception ou de la tolérance des personnes qui s'en plaignent, doit revêtir une gravité certaine et être établie par celui qui s'en prévaut. Le dommage s'entend pour les personnes de toutes dégradations des conditions de vie et pour les biens de tous désordres affectant le fonds voisin. S'agissant d'un régime de responsabilité autonome, fondé sur un fait objectif à l'exclusion de toute faute ou négligence, les dispositions des articles 1382 à1384 anciens du code civil, aujourd'hui 1240 à 1242 lui sont inapplicables.

En l'espèce, les habitations des parties sont situées dans un milieu boisé, les époux [B]/[R] ont fait procéder à la taille et l'élagage des arbres de leur propriété avec une fréquence et/ou une régularité peut être plus assidue après l'introduction de l'instance comme l'indiquent les époux [V]/[A] mais non moins rélle, qu'un pin et un tilleul litigieux ont été abattus (cf procès-verbaux de constat 6 avril 2017 et 19 avril 2018 et factures Alternative Garden ) ; enfin il ressort d'un dernier constat du 26 août 2021 qu'un arbre ancien de la propriété des appelants s'est effondré sur celles des intimés et que d'autres menacent de le faire.

La preuve d'un trouble anormal n'est donc pas rapportée.

De même, aucune pièce au dossier des époux [B]/[R] n'établit le préjudice moral qu'ils allèguent et aucun élément n'indique pas plus que la procédure aurait été introduite dans l'intention de nuire, cette intention ne pouvant se déduire de la seule carence des appelants à la médiation initiée en vain par les intimés ; en conséquence, le jugement mérite confirmation de l'ensemble de ses dispositions.

***

Dans un souci d'apaisement d'un litige ancien de voisinage, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais non taxables.

En revanche, les époux [V]/[A] qui succombent dans leur recours doivent être condamnés aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne les époux [V]/[A] aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du même code.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/12846
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;19.12846 ?
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