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29/09/2022 | FRANCE | N°19/12341

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 29 septembre 2022, 19/12341


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 379













N° RG 19/12341 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEV23







SARL SARL ABBA GESTION





C/



Société IMMEUBLE NAUTIQUE ILLINI ILLINI



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL LEGIS-CONSEILS



SCP

TOLLINCHI PERRET VIGNERON























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/05073.



APPELANTE



SARL ABBA GESTION, syndic de copropriété, prise en la personne de son gérant en ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 379

N° RG 19/12341 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEV23

SARL SARL ABBA GESTION

C/

Société IMMEUBLE NAUTIQUE ILLINI ILLINI

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL LEGIS-CONSEILS

SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/05073.

APPELANTE

SARL ABBA GESTION, syndic de copropriété, prise en la personne de son gérant en exercice, sise [Adresse 2]

représentée par Me Serge BERTHELOT de la SELARL LEGIS-CONSEILS, avocat au barreau de GRASSE

INTIME

Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE LA NAUTIQUE ILLINI, sis [Adresse 1], représenté par son syndic en exercice la SARL Cabinet Immobilier Catherine Johnson dont le siège social est [Adresse 3], elle-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, y domicilié

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Henri ROBERTY, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvaine ARFINENGO, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

La SARL Abba Gestion a été syndic de la copropriété Le Nautique-Illini située[Adresse 1]) ; la SARL Immorevel lui a succédé en 2013 en cette même qualité. Le 26 avril 2005, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Alpes-Maritimes, ci-après dénommée DDASS, a mis en demeure la copropriété, après visite technique, de réaliser la mise en conformité de sa piscine commune. Le 26 août 2005 l'assemblée générale a voté un budget de 16'000 € pour des travaux d'un coût définitif de 19'693,29 € .

Le 24 octobre 2013 la société Audit Azur, spécialisée en matière de sécurité de piscine, établissait un rapport révélant diverses non-conformités ; le 17 novembre 2014 la copropriété obtenait en référé la désignation de l'expert judiciaire [K] [J] qui a déposé son rapport le 13 novembre 2015. Ce rapport ayant révélé à son tour des défauts d'exécution dans les travaux de réfection réalisés par la SARL Astic Piscine en 2014, la copropriété a obtenu le 2 novembre 2015 la désignation d'un second expert en la personne de M. [X] [V] ; le 20 juin 2016, il a déposé un rapport en l'état d'un accord intervenu entre les parties.

Soutenant, en lecture des conclusions de l'expert [J], que la SARL Abba Gestion agissant en qualité de maître d''uvre n'avait pas repris les non-conformités alors mises en exergue par la DDASS et avait contraint le syndicat à supporter des travaux inutiles, la copropriété nouvellement représentée l'a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Grasse en remboursement de la somme de 19'693,29 € et paiement de celles de 10'000 € à titre de dommages-intérêts et de 8000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Abba Gestion s'est opposée à la demande en soutenant principalement que l'action était prescrite, que les normes de sécurité avaient évolué et que les travaux effectués sous son égide avaient été agréés par l'administration.

Rejetant la prescription, le tribunal judiciaire de Grasse par jugement contradictoire du 4 juillet 2019 a :

'déclaré recevable l'action du syndicat de l'immeuble Le Nautique-Illini ;

'débouté « les demandeurs » de leur action tendant à voir constater que la SARL Abba Gestion s'est comportée comme maître d''uvre d'une mission dont elle doit assumer l'entière responsabilité ;

'dit que la responsabilité de la SARL Abba Gestion est de nature contractuelle ;

'condamné la SARL Abba Gestion à payer « aux demandeurs » les sommes de :

*19'693,29 € en réparation du préjudice subi avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

*2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'débouté « les demandeurs » de leur demande en paiement de dommages-intérêts pour préjudices complémentaires ;

'dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

'condamné la SARL Abba Gestion aux dépens intégrant les frais d'expertise judiciaire et le coût de l'assignation en référé.

Cette dernière a régulièrement relevé appel de cette décision le 26 juillet 2019 et demande à la cour selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 30 avril 2021 de:

vu l'article 2224 du code civil,

vu les articles 1792 et suivants du code civil,

vu les articles 1231-1 et 1992 du Code civil,

'à titre principal, infirmer le jugement déféré en ce qu'il déclare l'action recevable ;

'dire l'action prescrite et débouter le syndicat de l'ensemble de ses demandes ;

'à titre subsidiaire, confirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute les demandeurs de leur action tendant à voir constater que la SARL Abba Gestion s'est comportée comme maître d''uvre ;

'infirmer le jugement dans le surplus de ses dispositions et statuant à nouveau ;

'débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes ;

'en tout état de cause, le condamner au paiement d'une indemnité de 4500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner le même aux dépens.

Au soutien de son appel, la SARL Abba Gestion fait valoir principalement que l'avis technique de la société Audit Azur a été rendu sur la base de la norme AFNOR NF P 90-306 entrée en vigueur en octobre 2007 et que les travaux effectués en 2005 ne pouvaient être réalisés en conformité avec une norme inexistante à cette date, que le syndicat tente d'obtenir le remboursement de travaux légitimes préconisés par la DDASS et qu'ainsi sa demande est prescrite en lecture de l'article 2224 du Code civil.

Au fond, la SARL appelante plaide qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 1792 de ce code régissant la responsabilité des constructeurs, que la responsabilité du syndic relève du mandat, que la DDASS a autorisé la remise en service de la piscine après exécution des travaux litigieux, que le syndic n'a commis ainsi aucune faute, que le syndicat n'invoque ni incident ni accident, qu'il ressort du rapport d'expertise de M. [V] que le syndicat a transigé avec l'entreprise Astic Piscine et ne peut être doublement indemnisé.

Selon dernières conclusions en réplique signifiées par voie électronique le 3 janvier 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Nautique-Illini demande à la cour de :

vu les articles 2224 et 1792 et suivants du code civil,

vu les articles 18 et suivants de la loi du 10 juillet 1965

vu le rapport d'expertise judiciaire de M. [J],

'dire que la SARL Abba Gestion s'est comportée en maître d''uvre et recevoir à ce titre le syndicat en son appel incident ;

'confirmer le jugement déféré en ce qu'il condamne la SARL Abba Gestion au paiement de la somme de 19'693,20 € ;

'l'infirmer pour le surplus et condamner la SARL Abba Gestion à payer la somme de 10'000€ à titre de dommages-intérêts ;

'condamner la même à payer la somme de 8000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner la SARL Abba Gestion aux dépens de première instance et d'appel intégrant le coût de l'assignation en référé et les frais de l'expert [J].

Le syndicat soutient principalement que ce n'est qu'au dépôt du rapport de la société Audit Azur en date du 24 octobre 2013 qu'il a eu connaissance de la non-conformité des travaux réalisés en 2005, qu'il a saisi le juge des référés et assigné au fond le 5 octobre 2016, soit dans le délai de cinq ans prévu à l'article 2224 du code civil de telle sorte que son action est recevable.

Il ajoute au fond qu'il ressort du rapport de l'expert [J] que les normes de sécurité prévues par la loi du 1er janvier 2004 n'ont pas été respectées, que les dispositifs de sécurité devaient obligatoirement être installés au 1er mai 2004, que la SARL Abba Gestion professionnelle de l'immobilier collectif ne pouvait ignorer, qu'elle s'est dispensée de recourir à une entreprise spécialisée et a fait effectuer les travaux par un employé de la copropriété sans compétence particulière après avoir elle-même acquis en grande surface le matériel qu'elle jugeait nécessaire, que dans son courrier du 13 juin 2005 la DDASS émet de nombreuses réserves sur l'accès à la piscine, que la norme AFNOR P 90-306 ne fait que remplacer la norme expérimentale XP P 90-306 de juillet 2002, que le constat d' huissier du 25 mars 2014 atteste que le matériel installé en 2005/2006 n'est pas conforme à la sécurité enfant, qu'aucune distinction n'est opérée par la loi du 3 janvier 2003 et ses décrets d'application selon la date de construction des piscines, que le syndicat a été ainsi contraint de faire réaliser des travaux conformes et de limiter l'usage de la piscine durant leur exécution et que l'accord intervenu avec la société Astic Piscine qui les a réalisés ne dispense pas l'appelante de rembourser une facture inutile.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 7 juin 2022.

MOTIFS de la DECISION

Sur la procédure :

Le dispositif des écritures de la SARL Abba Gestion intègre de multiples « constater » et « dire et juger ».

En lecture de l'article 954 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, que les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et que la cour ne statue que sur celles qui y sont énoncées.

Les demandes de « constater » ou « dire et juger » ne constituent pas de telles prétentions mais des rappels de moyens qui ne saisissent pas la cour.

S'agissant de la prescription de l'action du syndicat, l'expert [J] n'ayant relevé aucune malfaçon compromettant la solidité de la piscine ou la rendant impropre à sa destination, le tribunal a justement considéré que les dispositions des articles 1792 et suivants du code civil n'avaient pas vocation à s'appliquer au litige ; de même il est acquis que ce n'est qu'au dépôt du rapport de la société Audit Azur le 24 octobre 2013 que la copropriété a eu connaissance des non-conformités qu'elle estimait avoir utilement fait reprendre en 2005 et qu'en conséquence son assignation délivrée trois ans plus tard au 5 octobre 2016 n'est pas prescrite.

Au fond :

La SARL Abba Gestion soutient à bon droit que le syndic a la qualité de mandataire du syndicat; le terme de mandat est d'ailleurs expressément visé à l'article 18 II alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965 organisant la copropriété des immeubles bâtis. L'article 1991 du code civil édicte que « le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution » ; l'article 1992 du même code précise : « le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. Néanmoins la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire ».

Il s'évince de ces dispositions que le mandataire est tenu à une obligation de moyens supposant une exécution loyale, prudente et diligente du mandat conféré et que son exécution défectueuse doit être établie par le mandant conformément aux règles régissant la responsabilité contractuelle de droit commun ; cependant la faute est présumée en cas d'inexécution du mandat conféré.

En l'espèce, la non-conformité des travaux n'est pas discutable en lecture des conclusions de l'expert [K] [J] et n'est d'ailleurs pas discutée, la SARL appelante faisant valoir pour l'essentiel qu'elle ne pouvait mettre en application une norme de sécurité publiée postérieurement aux travaux litigieux. Cet argumentaire a très justement été rejeté par le tribunal dès lors qu'antérieurement à la norme AFNOR P 90-306 relative à la sécurité des piscines mise à jour en octobre 2007, existaient antérieurement quatre normes similaires issues de la loi du 3 janvier 2003 applicables au plus tard au 1er mai 2004, sans distinction de la date de construction de la piscine et que le courrier de la DDASS du 13 juin 2005, dont l'appelante fait grand cas, ne constitue en rien une attestation de conformité des travaux litigieux ; en effet il mentionne expressément que ces travaux ne sont pas achevés, que notamment la haie de cyprès n'a pas été arrachée et que la piscine peut être remise en service « sous réserve de l'achèvement » des travaux préconisés.

Professionnelle de l'immobilier collectif, exerçant son activité qui plus est dans une région où nombre de copropriétés disposent d'une piscine, la SARL Abba Gestion ne pouvait ignorer la législation applicable en matière de sécurité des bassins ; le syndicat ajoute avec quelque pertinence qu'elle s'est dispensée de recourir à une entreprise spécialisée en cette matière, a eu recours à un tâcheron sans compétence en ce domaine qui a mis en 'uvre un matériel acquis dans une grande surface dans des conditions critiquables, le tout avec un dépassement de 3693,29 € du budget voté initialement.

Le jugement mérite dès lors confirmation en ce qu'il retient la faute contractuelle de la SARL Abba Gestion.

Le tribunal a aussi très justement considéré que le préjudice direct qui en est issu consiste dans le financement par la copropriété de travaux inutiles ; le remboursement de leur coût est également confirmé.

La copropriété ne justifiant pas de préjudices annexes ne peut prétendre à l'allocation de dommages-intérêts complémentaires, ce qui conduit à la confirmation du jugement dans l'ensemble de ses dispositions, étant précisé que le terme « demandeurs » désigne en réalité le syndicat des copropriétaires.

***

Aucune circonstance économique ou d'équité ne contrevient à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Abba Gestion qui succombe est condamnée aux dépens en application de l'article 696 du même code.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne la SARL Abba Gestion à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Nautique-Illini la somme de 4000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la même aux dépens d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/12341
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;19.12341 ?
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