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29/09/2022 | FRANCE | N°19/10771

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 29 septembre 2022, 19/10771


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 376













N° RG 19/10771 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BERIK







Société DE LA COMMUNAUTE IMMOBILIERE LES JADES





C/



[R] [A]

[F] [T] (MINEUR)

[H] [Y]

SA GAN ASSURANCES







Copie exécutoire délivrée

le :

à :





SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES



Me Delphin

e GIRARD



SCP EGLIE-RICHTERS - MALAUSSENA





l'ASSOCIATION VALLI PP - PINELLI M





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 14 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01763.



APPEL...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

sa

N° 2022/ 376

N° RG 19/10771 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BERIK

Société DE LA COMMUNAUTE IMMOBILIERE LES JADES

C/

[R] [A]

[F] [T] (MINEUR)

[H] [Y]

SA GAN ASSURANCES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES

Me Delphine GIRARD

SCP EGLIE-RICHTERS - MALAUSSENA

l'ASSOCIATION VALLI PP - PINELLI M

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 14 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01763.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires de la Communauté Immobilière LES JADES sis [Adresse 4], représenté par son Syndic en exercice, la S.A.R.L.U. LA NOUVELLE GESTION IMMOBILIÉRE, immatriculée au R.C.S. de CANNES, elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège social sis, [Adresse 1]

représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean Luc BOUCHARD, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Madame [R] [A]

née le 02 Mars 1983 à TOURS, demeurant chez Monsieur [K], [Adresse 7], prise en la personne de son liquidateur judiciaire, Maître [F] [T], désigné par jugement du Tribunal de Commerce de CANNES du 10 mars 2015, demeurant ès qualités [Adresse 2]

représentée par Me Delphine GIRARD, avocat au barreau de GRASSE

Madame [H] [Y]

née le 28 Juillet 1982 à [Localité 8], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Isabelle MALAUSSENA de la SCP EGLIE-RICHTERS - MALAUSSENA, avocat au barreau de GRASSE

COMPAGNIE GAN ASSURANCES, SA, dont le siège social est [Adresse 5], pris en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Me Pierre-Paul VALLI de l'ASSOCIATION VALLI PP - PINELLI M, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvaine ARFINENGO, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [R] [A] est propriétaire d'un appartement dépendant de l'immeuble Les Jades, situé [Adresse 4], soumis au statut de la copropriété.

Madame [H] [Y] est propriétaire de l'appartement situé au-dessus de celui de Madame [A].

Déplorant des dégâts des eaux survenus dans son appartement en janvier et février 2011, Madame [A] a obtenu, par ordonnance du juge des référés du 11 avril 2012, la désignation de Monsieur [O] en qualité d'expert.

Monsieur [O] a déposé son rapport le 18 juin 2014.

Selon exploits d'huissier délivrés les 13 et 16 mars 2015, Madame [R] [A] a fait assigner Madame [Y], le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jades et la Sarl Nouvelle Gestion Immobilière, devant le tribunal de grande instance de Grasse en vue, à titre principal, d'obtenir la condamnation du syndicat des copropriétaires à l'indemniser de ses préjudices et, à titre subsidiaire, de voir condamner Madame [Y] à les réparer.

Par jugement du 10 mars 2015, le tribunal de commerce de Cannes a prononcé la liquidation judiciaire de Madame [A] et a désigné Maître [T] en qualité de liquidateur judiciaire.

Maître [T], ès-qualités, est volontairement intervenu à l'instance.

Selon exploit d'huissier délivré le 18 mai 2015, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jades a fait assigner la société Gan Assurances en vue d'obtenir sa condamner à le relever et le garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre.

Toutes ces instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement réputé contradictoire en date du 14 mars 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a, notamment :

-condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [A] la somme de 13400 euros au titre du préjudice de jouissance,

-débouté Madame [A] et Maître [T] du surplus de leurs demandes,

-débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de garantie,

-débouté Madame [Y] et la société Nouvelle Gestion Immobilière de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive,

-condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [A] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [A] la somme de 2000 euros à Madame [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Maître [T] ès-qualité, à payer à la société Nouvelle Gestion Immobilière la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [O], distraits au profit de Me Girard Gidel.

Le 3 juillet 2019, le syndicat des copropriétaires Les Jades a relevé appel de cette décision, intimant devant la cour toutes les autres parties, à l'exception du syndic, la société Nouvelle Gestion Immobilière.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 25 février 2020, le syndicat des copropriétaire Les Jades demande à la cour, sur le fondement des articles 14 de la loi du 10 juillet 1965, 1382, 1383 et 1384 alinéa 1er du code civil, de :

-réformer le jugement rendu le 14 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Grasse, sauf en ce qu'il a mis hors de cause le cabinet Nouvelle Gestion Immobilier et condamné Maître [T], ès-qualités, à lui payer une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre principal,

-débouter Maître [F] [T], ès-qualité de liquidateur judiciaire de Madame [R] [A], et Madame [H] [Y] de leurs fins, moyens et conclusions

A titre subsidiaire,

-dire et juger que Madame [Y], responsable de l'origine des désordres, et la société Gan Assurances devront le relever et le garantir ainsi que la société Nouvelle Gestion Immobilière de toutes éventuelles condamnations prononcées à leur encontre,

en conséquence,

-condamner solidairement Maître [T], ès-qualités, et Madame [Y] à lui payer ainsi qu'à la société Nouvelle Gestion Immobilière, la somme de 10000 euros chacun à titre de dommages-intérêts, étant donné sa particulière mauvaise foi et cette action abusive,

-condamner solidairement Maître [T], ès-qualités, et Madame [Y] à lui payer ainsi qu'à la société Nouvelle Gestion Immobilière, la somme de 5000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner tout succombant aux dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Agnès Ermeneux, membre de la SCP Ermeneux-Arnaud-Cauchi ainsi que les sommes auxquelles l'huissier instrumentaire peut avoir droit en vertu des dispositions de l'article 444-32 du code de commerce.

Selon leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 20 décembre 2021, Madame [R] [A] et Maître [F] [T], ès-qualité de mandataire judiciaire, demandent à la cour, sur le fondement des articles 61-1 du décret du 17 mars 1967, 3 et 14 de la loi du 10 juillet 1965, 544 et 13984 alinéa 1 du code civil, 325, 327, 328, 329, 300, 515, 696, 700 et 909 du code de procédure civile, et L641-9 du code de commerce, de :

-débouter le syndicat des copropriétaires Les Jades de l'ensemble de ses demandes, fins, et conclusions,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [A] la somme de 13400 euros au titre du préjudice de jouissance,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [A] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires Les Jades aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [O], chiffrés selon ordonnance de taxe du 5 septembre 2014 à 6227,01 euros, distraits au profit de Me Girard Gidel.

-infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés du surplus de leurs demandes,

-condamner le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation de Madame [A] la somme de 438 euros au titre de son préjudice matériel,

-condamner le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation de Madame [A] la somme de 5000 euros au titre de son préjudice moral,

-infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Me [T], ès-qualités à payer à la société Nouvelle Gestion Immobilière la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner le syndicat des copropriétaires Les Jades aux entiers dépens de première instance et d'appel,

A titre subsidiaire, si la juridiction venait à écarter la responsabilité du syndicat des copropriétaires,

-débouter Madame [H] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

'condamner Madame [H] [Y] à verser au patrimoine de liquidation de [R] [A] la somme de 438 € au titre de son préjudice matériel,

'condamner Madame [H] [Y] à verser au patrimoine de la liquidation de [R] [A] la somme de 13 400 € au titre de son préjudice de jouissance,

'condamner Madame [H] [Y] à verser au patrimoine de la liquidation de Madame [R] [A] la somme de 5000 € au titre de son préjudice moral

'condamner Madame [H] [Y] à verser au patrimoine de la liquidation de Madame [R] [A] la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code des procédures civiles au titre des frais de première instance,

'condamner Madame [H] [Y] aux dépens de première instance incluant les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [O] chiffrés selon ordonnance de taxe du 5 septembre 2014 à 6227,01 euros, distraits au profit de Maître Delphine Girard Gidel, en application de l'article 699 du code de procédure civile,

'condamner le syndicat des copropriétaires Les Jades à verser au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [R] [A] la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant la procédure d'appel,

'condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jades aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 26 novembre 2019, Madame [H] [Y] demande à la cour, sur le fondement des articles 3 et 14 de la loi du 10 juillet 1965, de :

-confirmer la condamnation du syndicat des copropriétaires Les Jades à réparer le préjudice de Madame [A] en versant au patrimoine de sa liquidation la somme de 13400 euros au titre de son préjudice de jouissance,

-débouter Madame [A], Me [T] ès-qualités, et le syndicat des copropriétaires du surplus de leurs demandes,

'dire et juger le syndicat des copropriétaires bien fondés en sa demande de garantie à l'encontre de la compagnie GAN assurances et condamner son assureur à relever et le garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre,

'condamner le syndicat des copropriétaires les Jacques à lui payer une indemnité de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en première instance et en appel,

'condamner tout succombant aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Isabelle Malausséna, membre de la SCP Eglie-Richters-Malausséna, avocat au barreau de Grasse, sous sa due affirmation, ainsi que les sommes auxquelles l'huissier instrumentaire peut avoir droit en vertu des dispositions de l'article 444'32 du code de commerce.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 18 décembre 2019, la compagnie GAN assurances demande à la cour, sur le fondement de la loi du 10 juillet 1965, de l'article 1242 du Code civil et des articles L641-9 et suivants du code de commerce, de :

'statuer ce que de droit quant à la recevabilité en la forme de l'appel formé par le syndicat des copropriétaires Les Jades,

au fond,

'confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes à son encontre,

à titre subsidiaire,

'réformer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité du syndicat des copropriétaires au titre de l'implication des parties communes,

'dire et juger que l'origine des désordres affectant l'ancien appartement de Madame [R] [A] réside en les seules parties privatives [Y] et [A],

'renvoyer Madame [R] à justifier de la poursuite de la procédure de la liquidation au jour de son appel incident, le 6 décembre 2019, date de notification de ces conclusions d'intimée et d'appelante incidente,

en tout état de cause,

'dire et juger Madame [R] irrecevable ou à tout le moins infondée en ses demandes au titre d'un préjudice matériel, de jouissance, locatif et moral,

'débouter Madame [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

'à tout le moins, limiter le préjudice de jouissance à la somme maximale de 3600 euros,

'condamner Madame [H] [Y] à relever et garantir le syndicat des copropriétaires et par la suite la compagnie GAN assurances de toutes éventuelles condamnations, en principal, accessoire, frais et dépens qui pourraient être prononcées à leur encontre,

'condamner tout succombant à lui verser la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, de première instance comprenant les frais d'expertise [O] et d'appel, ces derniers distraits au bénéfice de Maître Pierre'Paul Valli, avocat.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions évoquées ci-dessus, auxquelles il est expressément renvoyé, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture rendue le 5 juin 2022

Motifs de la décision :

1- Dans le dispositif de leurs dernières conclusions, qui seul lie la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires Les Jades, Madame [A], et Maître [F] [T] formulent diverses demandes sous la forme « juger que », « dire et juger que » qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens auxquels il sera répondu dans le corps de l'arrêt, et non dans le dispositif.

2-Le 3 juillet 2019, le syndicat des copropriétaires Les Jades a relevé appel du jugement rendu le 14 mars 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Grasse intimant devant la cour toutes les autres parties, à l'exception du syndic, la société Nouvelle Gestion Immobilière, alors pourtant qu'il formule des prétentions au nom de cette société dans le dispositif de ses dernières conclusions, lesquelles ne pourront évidemment pas prospérer.

3-L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au litige, dispose que le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

Il sera tout d'abord relevé qu'il n'est justifié d'aucune cause d'irrecevabilité des demandes de Madame [A].

Cela étant, le règlement de copropriété de la résidence Les Jades définit les parties communes générales comme celles qui sont affectées à l'usage à l'utilité de tous les copropriétaires.

Il précise qu'elles comprennent notamment :

«Les canalisations et gaines et réseaux de toute nature d'utilité commune et, notamment, les tuyaux de tout à l'égout, les drains et les branchements d'égouts, les prises d'eau, les canalisations principales d'eau, de gaz, d'électricité avec tous leurs accessoires y compris, éventuellement, le poste transformateur d'électricité, les installations de chauffage collectif si celui-ci existe et de l'eau chaude, appareils et installations divers, le tout jusqu'à et non compris les branchements particuliers à chacun des bâtiments. »

Le règlement de copropriété définit également les parties communes spéciales à chaque bâtiment, ainsi qu'il suit :

«Constituent des parties communes spéciales aux copropriétaires des lots composant chacun des bâtiments ci-dessus désignés, celles qui sont affectées à l'usage ou à utilité de l'ensemble des copropriétaires ou à plusieurs d'entre eux.

Elles comprennent notamment, pour chaque bâtiment, mais seulement si les choses énumérées s'y trouvent et sans que cette énonciation soit limitative :

['] les canalisations, gaines, conduites, prises d'air et réseaux de toute nature avec leurs accessoires y compris les parties y afférentes qui traversent les locaux privatifs et encore qu'elles puissent ne desservir qu'un seul local privatif (à l'exclusion des seuls branchements et raccordements particuliers à un seul et même local privatif et sis à l'intérieur de celui-ci )».

Le règlement de copropriété définit ensuite les parties privatives comme celles constituées par des locaux qui, aux termes de l'état descriptif de division, sont compris dans la composition d'un lot et, comme tels, sont affectés à son usage exclusif.

Elles comprennent, notamment :

'les canalisations sises à l'intérieur d'un local privé et affectées à son usage exclusif, les appareillages, robinetteries et accessoires qui en dépendent, les branchements et raccordements particuliers à un seul et même local privatif ;

'les installations sanitaires des salles de bains, salle cabinet de toilette, water-closet etc.', les installations des cuisines (éviers, séchoirs à linge, réfrigérateurs, etc.'),

'les installations de chauffage et eau chaude se trouvant à l'intérieur de chaque local privé et destinées à son usage exclusif.

Il ressort du rapport d'expertise judiciaire établi par Monsieur [O] que l'appartement de Madame [A] a fait l'objet :

-d'infiltrations dans la salle de bains, qui, aux termes des recherches de fuite entreprises par la société KA Concept, ont pu être localisées au niveau de la clarinette. L'expert précise que cette fuite n'est pas liée aux dommages dans la salle de séjour, ce que les parties ne contestent pas.

Il ne peut être discuté que les infiltrations qui ont provoqué des dommages dans la salle de bains de Madame [A] proviennent d'une partie privative, la clarinette, qui, aux termes du règlement de copropriété, constitue un branchement ou un raccordement particulier à un seul et même local privatif, l'appartement de Madame [A].

-d'infiltrations ayant affecté le séjour de l'appartement, qui ont généré des dégradations au plafond et des taches au sol.

Selon les conclusions du rapport d'expertise judiciaire établi par Monsieur [O] :

« L'augmentation constante et l'aggravation des désordres dans l'appartement de Madame [A] oriente l'origine du sinistre sur les évacuations en tube acier noyé dans la dalle. Il peut s'agir soit d'une soudure défaillante, soit d'un mauvais emboîtement, soit d'un percement de tuyaux. Ces évacuations situées en parties communes doivent être remplacées d'urgence par la copropriété avant que les structures porteuses ne soient atteintes. Ces travaux sont couverts par l'assurance de la copropriété au titre de l'annexe 3 clause 220. »

Ainsi que le soutient justement Madame [Y], il ne peut être affirmé que l'origine des dégradations en cause provienne du WC équipant son appartement dès lors d'une part, que la fuite détectée le 28 juillet 2011 a été rapidement réparée, et que les infiltrations subies par Madame [A] ont largement persisté au-delà de cette date, d'autre part, que l'expert judiciaire lui-même écarte cette hypothèse, comme lui paraissant trop éloignée.

La cour relève que le rapport d'expertise amiable Mercure Iard dont se prévaut la compagnie d'assurances Gan -sa pièce n°1-, qui conclut à une fuite sur le WC de l'appartement de Madame [Y], ne peut, au regard de ce qui a été retenu ci-dessus, être retenu comme pertinent.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté la responsabilité de Madame [Y].

Il reste à examiner les évacuations en tube acier noyé dans la dalle, dont l'expert affirme qu'elles sont à l'origine des désordres, dont les conclusions en ce sens ne sont pas utilement contredites.

Contrairement à ce qui est soutenu par le syndicat des copropriétaires, le tribunal a justement interprété les dispositions précitées du règlement de copropriété en retenant que :

-les canalisations, qui traversent un local privatif constituent des parties communes, même si elle ne desservent qu'un seul local privatif,

-les canalisations situées à l'intérieur d'un local privatif et affectées à son usage exclusif sont privatives.

Au surplus, le règlement de copropriété définit également les planchers, à l'exclusion des revêtements de sols, comme des parties communes.

Il se déduit de ces éléments que «  les évacuations en tube acier noyé dans la dalle », à l'origine du sinistre subi par Madame [A], ne peuvent être considérées comme une canalisation située à l'intérieur d'un local privatif, mais comme une canalisation traversant les locaux privatifs, donc comme une partie commune, encastrée dans une dalle, elle-même partie commune.

D'ailleurs, à supposer même, ainsi que le soutient le syndicat des copropriétaires, qu'une contradiction existe dans les dispositions du règlement de copropriété -page 26 de ses dernières conclusions-, ce qu'en toute hypothèse, il ne démontre pas, il conviendrait alors de faire application des dispositions supplétives de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 qui conduisent à considérer comme communs les parties de canalisations traversant les locaux privatifs ainsi que tout élément incorporé dans les parties communes, confirmant ainsi la nature commune des « évacuations en tube acier noyé dans la dalle » .

Enfin, le syndicat des copropriétaires appelant soutient que les canalisations d'évacuation des eaux de la résidence ne passeraient pas dans la dalle béton, partie commune, mais dans la chape de ragréage qui serait, selon lui une partie privative, comme recevant « le revêtement d'un appartement » et permettant « l'encoffrement des diverses canalisations d'eau et le passage des fourreaux électriques ».

Or, outre le fait que l'affirmation du syndicat des copropriétaires n'est étayée par aucune pièce, elle vient en contradiction avec le rapport d'expertise judiciaire qui évoque bien le passage des évacuations dans une dalle.

Dès lors, tant sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, que sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du code civil, également invoqué par le syndicat des copropriétaires, en sa qualité de gardien de la canalisation en cause, celui-ci doit être déclaré responsable des désordres ayant affecté la salle de séjour de l'appartement de Madame [A] et des préjudices en lien causal direct avec ces désordres.

Le tribunal a réparé le préjudice de jouissance subi par Madame [A] par l'allocation de la somme de 13400 euros, au paiement de laquelle il a condamné le syndicat des copropriétaires, en retenant la valeur locative de l'appartement et la période d'inoccupation.

Cette évaluation est critiquée par le syndicat des copropriétaires, ainsi que par la compagnie d'assurances Gan, le syndicat faisant essentiellement valoir que la date à laquelle Madame [A] a réintégré son appartement est incertaine, celle-ci ayant affirmé, en première instance, l'avoir réintégré en 2014

La cour retiendra :

-que le seul préjudice de jouissance qui peut être mis à la charge du syndicat des copropriétaires est celui engendré par les désordres affectant le salon de l'appartement, et non la salle de bains.

-que Madame [A] a indiqué dans l'assignation introductive d'instance qu'elle a fait signifier le 13 mars 2015 au syndicat des copropriétaires qu'elle avait réintégré son appartement courant janvier 2014, joignant une attestation de Madame [B] en ce sens,

-que ladite attestation -pièce 15 de Madame [A], datée du 22 janvier 2014, fait état de ce que Madame [B] a hébergé Madame [A], de mai 2011, à ce jour, soit à la date de l'attestation,

-que si Monsieur [Z], locataire de Madame [A], a indiqué, selon un courrier non daté, qu'il avait occupé l'appartement « quelque temps » sans autre précision, et qu'il avait le dû quitter pour des raisons d'insalubrité, il a néanmoins accepté de souscrire un contrat de location le 5 septembre 2012, alors même que les infiltrations affectaient déjà l'appartement,

-que cet appartement n'a pas été considéré comme insalubre par l'expert judiciaire,

-que dès lors, l'affirmation de Madame [A] selon laquelle, de mai 2011 à mars 2017, soit pendant 6 années, elle n'aurait pas pu réintégrer son appartement, contradictoire avec le contenu de son assignation introductive d'instance, n'est pas démontrée,

-qu'enfin, il ressort suffisamment du rapport d'expertise que les désordres affectant l'appartement, imputés selon la motivation retenue ci-dessus, au syndicat des copropriétaires sont localisés dans la salle de séjour, sans qu'il puisse en être déduit que le logement était inhabitable,

-que cependant, en retenant comme base de l'indemnisation, le quart de la valeur locative par mois, le tribunal a apprécié, à sa juste proportion, la privation partielle de jouissance de l'appartement, peu importe qu'il ait été habitable, le préjudice étant constitué.

Dès lors, au regard de la valeur locative de l'appartement de 800 euros par mois, telle que retenue par le tribunal, il y a lieu d'indemniser Madame [A] du préjudice de jouissance qu'elle a subi, consécutif aux désordres ayant seulement affecté le séjour de son appartement, en tenant compte d'une période d'inoccupation totale de mai 2011 à janvier 2014, et de la persistance des désordres au-delà de cette période jusqu'à la vente de l'appartement sur adjudication en 2017, le tout à raison d'un quart de la valeur locative par mois, la cour ne pouvant que confirmer l'indemnisation du préjudice de jouissance à hauteur de 13400 euros, à titre de réparation intégrale.

Par ailleurs, c'est également à juste titre que le tribunal a débouté Madame [A] de sa demande d'indemnisation de son préjudice matériel à hauteur de 438 euros pour la perte d'un canapé, car bien que celle-ci produise la facture de ce meuble, elle ne rapporte pas la preuve qu'il aurait été endommagé par les infiltrations en cause.

Madame [A] sollicite enfin l'indemnisation de son préjudice moral à hauteur de 5000 euros.

Elle ne se prévaut pas de ses problèmes de santé mais expose qu'ayant traversé de lourdes difficultés financières qui l'ont conduite à une liquidation judiciaire, ainsi qu'à la constitution d'un dossier de surendettement, dont l'issue n'est cependant pas documentée, elle n'a pas pu louer son appartement compte tenu de l'état de celui-ci.

Cependant, il ressort de la procédure de première instance que Madame [A] a toujours été domiciliée dans son appartement, résidence Les Jades, et qu'hormis le contrat de bail qu'elle a consenti à Monsieur [Z], elle ne rapporte pas la preuve qu'elle destinait entièrement cet appartement à la location.

Néanmoins, Monsieur [Z] indique avoir été contraint de quitter cet appartement en raison des infiltrations.

Par ailleurs, il est indéniable que les désordres subis par son appartement des années durant sont à l'origine de désagréments et de tracas, directement à l'origine d'un préjudice moral qui sera entièrement réparé par l'allocation de la somme de 600 euros, que le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer, « au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [R] [A] », conformément à la demande qui en est faite à la cour.

4-Le syndicat des copropriétaires sollicite d'être relevé et garanti des condamnations prononcées à son encontre par son assureur, la compagnie Gan Assurances.

Le premier juge l'a débouté de cette demande au motif, d'une part qu'il ne justifiait pas de la signification de ses conclusions à la compagnie d'assurances non comparante, d'autre part que le contrat d'assurances invoqué n'était pas produit aux débats.

En cause d'appel, la société Gan Assurances a constitué avocat et conclu, tandis que le contrat d'assurances en cause est produit aux débats.

La cour relève que la société Gan Assurances invoque des moyens auxquels il a été répondu au point 3 de cet arrêt, tenant à l'absence de responsabilité du syndicat des copropriétaires, à la responsabilité de Madame [Y] et à l'évaluation du préjudice de jouissance de madame [A].

Il n'est pas contestable que la Compagnie Gan Assurances est l'assureur du syndicat des copropriétaires et qu'aux termes de ses conclusions, elle ne dénie pas sa garantie, le syndicat appelant faisant justement valoir sur ce point que par un courrier écrit le 16 mai 2011, versé aux débats, l'assureur avait déjà accepté la prise en charge du sinistre.

Ainsi que le soutient justement le syndicat des copropriétaires, il ressort du contrat d'assurances produit aux débats, ainsi que de l'avenant, que la garantie de l'assurance porte sur les dommages constatés dans les parties communes ainsi que les dégâts des eaux causés aux parties privatives.

Dès lors, la compagnie Gan Assurances sera condamnée à relever et garantir le syndicat des copropriétaires Les Jades de toutes les condamnations prononcées à son encontre, par voie d'infirmation du jugement entrepris.

5-L'action en justice représente l'exercice d'un droit. Au cas particulier, le syndicat des copropriétaires appelant, qui succombe en son appel, est mal fondé à solliciter la condamnation de Madame [A] et de Maître [T], ès-qualités, à lui payer des dommages-intérêts, pour action abusive et mauvaise foi.

Le jugement sera également confirmé de ce chef .

6-Vu les articles 696 à 699 et 700 du code de procédure civile,

Les dispositions du jugement seront confirmées de ces chefs.

Par ces motifs,

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 14 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Grasse sauf en ce qu'il a:

-débouté Madame [R] [A] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice moral,

-débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande tendant à être relevé et garanti par la société Gan Assurances.

Statuant à nouveau des seuls chefs réformés,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4], représenté par son syndic, la société Nouvelle Gestion Immobilière, située [Adresse 6], à payer au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [R] [A] la somme de 600 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

Condamne la société Compagnie Gan Assurances à relever et à garantir le syndicat des copropriétaire de la résidence Les Jades de toutes les condamnations prononcées à son encontre.

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4], représenté par son syndic, la société Nouvelle Gestion Immobilière, située [Adresse 6] à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel :

-au patrimoine de la liquidation judiciaire de Madame [R] [A], la somme de 2000 euros,

-à Madame [H] [Y], la somme de 2000 euros.

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 4], représenté par son syndic, la société Nouvelle Gestion Immobilière, située [Adresse 6], aux entiers dépens d'appel, distraits au profit de Maître Isabelle Malausséna, membre de la SCP Eglie-Richters-Malausséna, avocat au barreau de Grasse, sous sa due affirmation, ainsi que les sommes auxquelles l'huissier instrumentaire peut avoir droit en vertu des dispositions de l'article 444'32 du code de commerce.

Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/10771
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;19.10771 ?
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