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23/09/2022 | FRANCE | N°21/08036

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 23 septembre 2022, 21/08036


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022



N°2022/













Rôle N° RG 21/08036 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRNS







[K] [W]





C/



CPAM DES BOUCHES DU RHONE











































Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'Aix en Provence



- CPAM des Bouches du Rhône















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 01 Décembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 17/06430.





APPELANT



Monsieur [K] [W], demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Christi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022

N°2022/

Rôle N° RG 21/08036 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRNS

[K] [W]

C/

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'Aix en Provence

- CPAM des Bouches du Rhône

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 01 Décembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 17/06430.

APPELANT

Monsieur [K] [W], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Mme [V] [H] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (ci-après CPAM) a, par un courrier non daté, informé M. [W] que sa pension d'invalidité allait être remplacée par une pension de retraite à compter du 1er janvier 2016 sous certaines conditions.

Par courrier du 2 février 2016, M. [W] s'est étonné de ce qu'il était supposé recevoir une pension d'invalidité, et a sollicité sa mise en paiement.

Par courrier du 4 avril 2016, la caisse primaire d'assurance maladie lui a demandé de lui faire parvenir un certificat médical ainsi qu'une copie de ses justificatifs de ressources pour la période allant du 1er avril 2008 au 31mars 2016 aux fins de régularisation de son dossier et, par courrier du 16 octobre 2017, faisant suite à la réception des documents justificatifs par l'avocat de M. [W], la caisse lui a indiqué que sa pension demeurait suspendue compte tenu de l'activité salariée qui lui permettait de dégager des revenus d'un montant supérieur au montant de référence.

M. [W] a saisi la commission de recours amiable par lettre datée du 27 juillet 2017 aux fins de contester la décision de suspension de sa pension.

Par requête datée du 19 octobre 2017, il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Marseille, d'un recours à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission.

Par jugement du 1er décembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, ayant repris l'instance, a débouté M. [W] de toutes ses demandes et condamné la caisse aux dépens, la procédure ayant été introduite à une époque où elle était gratuite.

Par lettre recommandée expédiée le 8 janvier 2021, M. [W], a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 16 décembre 2020.

L'affaire a été radiée pour défaut de diligence des parties le 12 mai 2021, pour être ré-inscrite à la demande de M. [W], le 20 mai 2021.

A l'audience du 23 juin 2022, M. [W] reprend oralement les conclusions déposées au greffe de la cour le 20 mai 2021. Il demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau, annuler la décision de la CPAM de suspension de la pension d'invalidité du 16 octobre 2017 et la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable,

- condamner la CPAM à lui payer la somme de 71.344,62 euros (montant à parfaire selon la date de l'arrêt à intervenir) à titre de dommages et intérêts correspondant au montant de la pension qui aurait dû être la sienne depuis le 1er septembre 2006,

- condamner la CPAM à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi de l'inaction de la caisse,

- assortir les condamnations des intérêts de droit avec anatocisme,

- condamner la CPAM à lui verser la somme de 2.000 euros pour la procédure de première instance et de 2.000 euros pour la procédure d'appel, sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, M. [W] fait valoir que la caisse a omis de l'informer qu'il avait été admis au bénéfice de l'invalidité de 1ère catégorie et du fait qu'il était bénéficiaire d'une pension à ce titre. Il reproche également à la caisse de ne lui avoir pas transmis les déclarations sur l'honneur à remplir et qu'en n'ayant pas indiqué la durée d'octroi de la pension d'invalidité, elle avait manqué à son obligation d'informations.

Il ajoute que la caisse primaire d'assurance maladie a sollicité des documents justificatifs à la suite de l'intervention de son avocat, alors qu'ils lui avaient déjà été communiqués deux ans plus tôt et qu'elle a ainsi mis deux ans à traiter sa demande en paiement de la pension.

Il ajoute que la caisse ne saurait valablement lui opposer d'avoir eu une activité salariée lui dégageant des revenus supérieurs à celui permettant d'obtenir un pension d'invalidité alors même que s'il avait su qu'il avait droit à une pension d'invalidité, il n'aurait pas travaillé, compte tenu de son état de santé.

Enfin, il considère que la caisse aurait dû l'informer de la suspension du versement de sa pension

et que son inaction lui a causé un préjudice puisqu'il a été contraint de reprendre une double activité professionnelle ayant contribué à la dégradation de son état de santé.

Il en conclut que le défaut d'information de la caisse lui a causé un préjudice qu'elle doit réparer en lui versant des dommages et intérêts à hauteur de la pension d'invalidité qu'il aurait dû percevoir depuis le 1er août 2006, outre une somme de 10.000 euros en réparation d'un 'préjudice distinct'.

La CPAM reprend oralement les conclusions déposées le jour même et visées par le greffe. Elle demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes et de le condamner aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la caisse rappelle le principe selon lequel l'obligation générale d'information dont les organismes de sécurité sociale sont débiteurs envers leurs assurés, leur impose seulement de répondre aux demandes qui leur sont soumises. Elle fait valoir qu'elle a informé M. [W] de ce qu'il ne pourait plus recevoir d'indemnités journalières pour longue maladie à compter du mois d'août 2006 mais qu'il pouvait bénéficier d'une pension d'invalidité. Elle produit plusieurs courriers de l'assuré pour démontrer qu'il a perçu la pension d'invalidité jusqu'en 2008 et que le défaut de communication de justificatifs de ses revenus a entraîné la suspension du versement de la pension à compter de juillet 2008. Elle explique qu'elle a informé M. [W] de ce qu'il pouvait bénéficier d'une retraite en remplacement de la pension d'invalidité et qu'elle a pris la décision contestée de maintien de la suspension du versement de la pension d'invalidité compte tenu de son activité salariée dès qu'elle a reçu les justificatifs suite à sa demande de mise en paiement de la pension, en octobre 2017, de sorte qu'elle l'a toujours parfaitement informé de ses droits.

Elle considère que la décision de l'assuré de reprendre une double activité professionnelle est indépendante du versement de la pension d'invalidité, d'autant qu'elle engendre des revenus bien plus importants que ceux que rapporte la pension d'invalidité.

Enfin, elle conteste l'évaluation des dommages et intérêts réclamés par M. [W] qui fait fi de sa propre turpitude, de la prescription biennale de son action et de sa mise à la retraite à compter du 1er juin 2016.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

 

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'annulation de la décision de suspension du versement de la pension d'invalidité

Aux termes de l'article L.341-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 1er janvier 1993 au 25 décembre 2016 : 'Pour recevoir une pension d'invalidité, l'assuré social doit justifier à la fois d'une durée minimale d'immatriculation et, au cours d'une période de référence, soit d'un montant minimum de cotisations fixé par référence au salaire minimum de croissance, soit d'un nombre minimum d'heures de travail salarié ou assimilé.'

En vertu des articles R.341-4 et suivants du même code, la pension d'invalidité est calculée sur la base d'un salaire annuel moyen correspondant aux cotisations versées au cours des dix années civiles d'assurance dont la prise en considération est la plus avantageuse pour l'assuré, selon un pourcentage différent en fonction de la catégorie d'invalidité de l'assuré.

L'article R.341-17 précise à compter du décret n° 85-1353 du 17 décembre 1985, que 'la pension doit être suspendue, en tout ou partie, par la caisse primaire d'assurance maladie lorsqu'il est constaté que le montant cumulé de la pension d'invalidité, calculée conformément aux dispositions de la section 3 du présent chapitre, et des salaires ou gains de l'intéressé excède, pendant deux trimestres consécutifs, le salaire trimestriel moyen de la dernière année civile précédant l'arrêt de travail suivi d'invalidité. (...)'.

En l'espèce, il ressort du courrier adressé par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône à M. [W] le 11 août 2006, qu'elle a notifié à l'assuré l'attribution d'une pension d'invalidité de catégorie 1, pour un montant annuel de 4.917,96 euros, à compter du 29 août 2006.

Le courrier adressé par M. [W] à la caisse le 14 novembre 2006 pour obtenir une exonération de la contribution sociale généralisée, aux fins que sa pension d'invalidité ne soit pas amputée de 30 euros par mois, démontre que, contrairement à ce qui est allégué par l'appelant, non seulement il a été informé de ce qu'il bénéficiait d'une pension d'invalidité, mais encore qu'il l'a effectivement perçue à compter du 29 août 2006.

En outre, il ressort des formulaires de déclarations de revenus signés par M. [W] les 14 novembre 2006, 10 février 2007, 16 avril 2008, produits par la caisse et portant la mention 'sans réponse de votre part, les règlements seront suspendus', des courriers de la caisse à l'assuré les 27 novembre 2006 et 25 février 2008 pour lui demander de compléter sa déclaration par la copie de ses bulletins de salaires avec la précision que 'tout retard aurait une répercussion sur le délai de règlement de (sa) pension', ainsi que des courriers en réponse de M. [W] avec les documents justificatifs réclamés, qu'il était bien informé par la caisse que sans déclaration de revenus et les documents en justifiant, le versement de la pension serait suspendu.

Il n'est pas discuté par M. [W] qu'il n'a pas déclaré ses revenus, ni n'en a justifié à compter de l'été 2008 puisqu'il ressort du courrier de la caisse en date du 11 mars 2016, que la pension d'invalidité n'est plus payée depuis le 1er juillet 2008 suite à la non réception des déclarations sur l'honneur, sans que l'appelant n'allégue, ni ne justifie le contraire avant la communication par l'intermédiaire de Maître Siharath, son avocat, par courrier du 5 octobre 2017, de tous les justificatifs de ses ressources de 2008 à 2016, outre un certificat médical justifiant de son état de santé.

Il s'en suit que la caisse était bien-fondée à suspendre dès le 1er juillet 2008, le versement de la pension d'invalidité à défaut de documents permettant de vérifier que le montant cumulé de la pension d'invalidité,et des salaires ou gains de l'intéressé n'excédait pas le salaire de référence, sans que M. [W] puisse valablement prétendre n'avoir pas connaissance des conséquences du défaut de justification de ses ressources sur le règlement de sa pension.

De même, il n'est pas discuté par M. [W] que l'analyse de ses ressources par la caisse en octobre 2017, selon laquelle le cumul de sa pension d'invalidité (460,77 euros) et des salaires perçus ( supérieurs à 1.173,46 euros brut/mois) dépasse le salaire de comparaison correspondant au salaire trimestriel moyen de l'année civile précédant l'arrêt de travail suivi d'invalidité (1.634,23 euros brut/mois), est erronée.

Il s'en suit que la caisse a fait une exacte application des textes en maintenant la suspension du versement de la pension d'invalidité de M. [W] par décision du 16 octobre 2017.

En conséquence, ni la décision de la caisse primaire d'assurance maladie, ni la décision de la commission de recours amiable qui l'a confirmée, n'encourent la nullité.

Le jugement qui a rejeté la demande d'annulation de la décision de la caisse de suspendre la pension d'invalidité sera confirmé.

Sur les demandes en dommages et intérêts

En vertu de l'article 1240 du code civil, il appartient à M. [W], qui réclame l'allocation de dommages et intérêts, de rapporter la preuve d'une faute de la caisse primaire d'assurance maladie à l'origine de son préjudice.

Or, il a été vu plus haut qu'il ressort des pièces produites aux débats, que la caisse l'a informé de ce qu'il bénéficiait d'une pension d'invalidité à compter du 29 août 2006 et qu'il a effectivement perçu cette pension jusqu'au 1er juillet 2008, qu'il était également informé des conséquences d'une absence de justification de ses ressources sur le versement de cette pension.

Ainsi, M. [W] n'est pas bien-fondé à faire valoir que s'il avait su qu'il pouvait bénéficier d'une pension d'invalidité, il n'aurait pas repris une double activité professionnelle qui a contribué à dégrader son état de santé et qui lui a dégagé des revenus trop élevés pour lui permettre de continuer à bénéficier d'une pension d'invalidité.

En outre, il n'est pas discuté que la caisse a informé M. [W] du remplacement de sa pension d'invalidité par une pension de vieillesse s'il n'exerçait pas d'activité professionnelle en 2016. Il ressort du courrier en date du 4 avril 2016, que la caisse a répondu à la demande de mise en paiement de sa pension d'invalidité présentée par M. [W] le 2 février 2016, en lui réclamant un certificat médical justifiant de son état de santé et des justificatifs de ses ressources pour la période du 1er avril 2008 au 31 mars 2016. Il résulte encore du courrier de la caisse en date du 16 août 2017, qu'elle a réitéré sa demande de documents justificatifs auprès de M. [W] en réponse à la saisine de la commission de recours amiable par son avocat pour obtenir la mise en paiement de la pension d'invalidité le 27 juillet 2017. Enfin, faisant suite à la communication des documents par courrier de l'avocat de l'assuré le 5 octobre 2017, la caisse a, dès le 16 octobre 2017, informé l'assuré que le montant des revenus perçus lui interdisait de percevoir la pension d'invalidité.

Il s'en suit que la caisse a répondu à chacune des demandes de M. [W] et l'a informé de tous ses droits dans un délai raisonnable.

M. [W] échoue à rapporter la preuve d'une faute de la caisse dans l'exécution de son obligation générale d'information et le jugement qui l'a débouté de ses demandes en dommages et intérêts sera confirmé.

Sur les frais et dépens

M. [W] succombant à l'instance, sera condamné au paiement des dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, M. [W], condamné aux dépens, sera débouté de sa demande en frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

 

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Marseille, en toutes ses dispositions,

Déboute M. [W] de l'ensemble de ses prétentions,

Condamne M. [W] aux éventuels dépens de l'appel.

 

 Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/08036
Date de la décision : 23/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-23;21.08036 ?
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