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23/09/2022 | FRANCE | N°21/07001

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 23 septembre 2022, 21/07001


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022



N°2022/













Rôle N° RG 21/07001 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHNV6







CARMF





C/



[Y] [X]











































Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- CARMF


<

br>- Me VOULAND, barreau de Marseille

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 26 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/02985.







APPELANTE



CARMF, demeurant [Adresse 2]



représenté par M. [F] [E] en vertu d'un pouvoir spécial





INTIME



Monsieur [Y] [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022

N°2022/

Rôle N° RG 21/07001 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHNV6

CARMF

C/

[Y] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- CARMF

- Me VOULAND, barreau de Marseille

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 26 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/02985.

APPELANTE

CARMF, demeurant [Adresse 2]

représenté par M. [F] [E] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIME

Monsieur [Y] [X], demeurant [Adresse 1]

non comparant, représenté par Me Virginie VOULAND, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS - PROCÉDURE - MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par lettre recommandée datée du 12 février 2019 avec accusé de réception non produit aux débats, la caisse autonome de retraite des médecins de France (ci-après la CARMF) a notifié à M. [Y] [X], médecin généraliste, une contrainte en date du 11 février 2019 d'un montant de 9 582,48 euros, représentant 9 210,75 euros de cotisations et 371,73 euros de majorations) au titre de l'exercice 2018.

Cette contrainte faisait suite à une mise en demeure en date du 10 décembre 2018 notifiée à M. [X] par lettre recommandée avec avis de réception délivrée le 16 décembre 2018.

Par lettre recommandée avec avis de réception envoyée le 5 mars 2019 et reçue par le tribunal le 6 mars 2019, M.[X] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Marseille d'une opposition à l'encontre de cette contrainte.

Par jugement du 26 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille ayant repris l'instance a :

- déclaré recevable en la forme l'opposition formée,

- annulé la contrainte,

- débouté la CARMF de toutes ses demandes,

- ordonné à la CARMF de procéder à la radiation de M. [X] de ses registres,

- condamné la CARMF à exécuter cette obligation sous astreinte provisoire de 100,00 euros par jour de

retard passé le délai d'un mois à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive,

-réservé la liquidation de cette astreinte au pôle social du tribunal judiciaire de Marseille,

- condamné la CARMF à payer à M. [X] la somme de 800,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Par lettre recommandé avec accusé de réception du 6 mai 2021, la CARMF a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 12 avril 2021.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, l'appelante demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement déféré et valider la contrainte relative à l'exercice 2018 pour son entier montant.

Elle fait valoir essentiellement que :

- au visa des articles 13-2 et 13-3 du Règlement n°883/2004, et de l'article 14-8 du Règlement UE n°987/2009, les mentions portées sur le formulaire A1 établi par la CPAM des Bouches-du-Rhône selon lesquelles ce dernier exercerait une activité salariée auprès de la société [3] sont fausses, puisqu'il exerce en réalité sous un contrat de franchise, en qualité d'indépendant, selon planning librement fixé par lui, travaillant sous sa seule responsabilité et de manière autonome, partageant ses honoraires avec [3],

- il exerce simultanément une activité libérale en France et en Suisse, a sa résidence en France, et perçoit 72,8 % de ses revenus en France, de sorte qu'il relève de la législation française, et que le formulaire A1 doit être écarté,

- la caisse n'était soumise à aucune obligation de saisir la commission administrative, dont les décisions n'ont pas de d'effet juridique obligatoire, et dont la saisine n'est que facultative, d'autant que le juge de l'Etat membre peut écarter un formulaire A1 obtenu par fausse déclaration comme en l'espèce.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, M. [X] demande à la cour de :

à titre principal,

- se déclarer non saisie par la déclaration d'appel de la CARMF du 7 mai 2021,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement attaqué,

en tout état de cause,

- condamner la CARMF à lui payer une somme de 3.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il soutient en substance que :

- l'appel interjeté tendant à l'annulation du jugement déféré sans mention des chefs expressément critiqués n'a saisi la cour d'aucune demande, estimant que l'organisme sollicite infirmation partielle dans ses conclusions, et qu'elle n'a procédé à aucune régularisation de son appel dans le délai imparti pour conclure,

- le caractère salarial de l'activité auprès de [3] est reconnu en Suisse de sorte que par application de l'article 13-3 du Règlement CE 883/2004, puisqu'il exerce une activité libérale en France, et salariée en Suisse, il est soumis à la législation de la Suisse en matière de sécurité sociale depuis le 11 aout 2017, le certificat A1 de coordination des régimes de sécurité sociale établi en application du règlement susvisé l'attestant,

- une personne ne peut être soumise à la législation de sécurité sociale que d'un seul Etat,

- l'organisme n'a procédé à aucune opposition à l'encontre du formulaire A1.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la saisine de la cour et l'absence d'effet dévolutif de l'appel :

Par applications combinées des articles L.211-16 du code de l'organisation judiciaire et R.142-11 du code de la sécurité sociale, la procédure d'appel en matière de litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale est sans représentation obligatoire.

Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend par la critique du jugement rendu par la juridiction du premier degré à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

L'article 562 du code de procédure civile, dispose que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Ces dispositions étant insérées dans le sous titre I du titre XVI du code de procédure civile relatif aux dispositions communes aux voies de recours, sont applicables aux appels de litiges relevant de la procédure sans représentation obligatoire.

Il n'est pas contestable qu'elles concourent à une bonne administration de la justice.

Par application de l'article 4 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois, l'objet du litige peut être modifié par les demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Enfin, l'article 933 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret 2019-1333 en date du 11 décembre 2019, dispose que la déclaration d'appel comporte les mentions prescrites par l'article 57. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqué auquel l'appel est limité sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse de l'appelant devant la cour.

A la différence de l'article 910-4 du code de procédure civile, relatif à la procédure avec représentation obligatoire, aucune sanction n'est prévue par les dispositions du code de procédure civile applicables à la procédure en appel sans représentation obligatoire.

Le droit au procès équitable, au sens des dispositions de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, implique d'exclure, en procédure sans représentation obligatoire, une application littérale des dispositions de l'article 562 précité, qui aurait pour effet de priver l'effectivité de l'exercice du droit d'appel.

En l'espèce, il ressort de la déclaration d'appel formalisée par le conseil de l'appelant, que la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France entend interjeter appel de la décision rendue le 26 mars 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille et en demander l'annulation.

En outre, les conclusions déposées au secrétariat du greffe de la chambre 4.8 le 21 juin 2022, comportent un dispositif énonçant ses demandes et par suite les chefs de jugement critiqués.

L'objet du litige est déterminable par le dispositif des conclusions de l'appelante complétant la teneur de sa déclaration d'appel.

Contrairement à ce qui est allégué par l'intimé, l'objet du litige est indivisible pour porter sur la validation de la contrainte relative à l'exercice 2018 pour son entier montant.

Il s'en suit que la cour est saisie par l'effet dévolutif de l'appel du litige portant sur la validité de la contrainte datée du 11 février 2019, notifiée par la CARMF à M. [X] par lettre recommandée datée du 12 février 2019 représentant des cotisations et des majorations d'un montant de 9 582,48 € au titre de l'exercice 2018.

Au fond

L'accord entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999, entré en vigueur le 1er juin 2002 organise la coordination des systèmes de sécurité sociale entre les parties contractantes à cet accord.

Aux termes de l'article 1 de l'annexe II de celui-ci, par suite de la décision n°1/2012 du comité mixte du 31 mars 2012 entrée en vigueur le 1er avril 2012 : 'les parties contractantes conviennent d'appliquer entre elles, dans le domaine de la coordination des systèmes de sécurité sociale, les actes juridiques de l'Union européennes auxquels il est fait référence dans la section A de la présente annexe, tels que modifiés par celle-ci, ou des règles équivalentes a ceux-ci'.

En outre, les règlements communautaires n°883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale et n°987/2009 fixant les modalités d'application du règlement n°883/2004 sont au nombre des actes juridiques de 1'Union européenne visés a la section A de l'annexe II de l'accord précité du 21 juin 1999. Il

prévoit en son article 13 les règles de détermination de la législation applicable en cas de pluriactivité dans deux ou plusieurs Etats membres ; la détermination de la législation applicable varie selon la nature de l'activité exercée : salariée, non salariée ou les deux.

En l'espèce, M. [X] revendique exercer une activité libérale en France et sa qualité de médecin salarié auprès d'un employeur suisse. A ce titre, M. [X] se prévaut d'un contrat de travail le liant à SOS Médecin depuis le 11 aout 2017.

Ledit contrat prévoit :

* en son article 1, que : « SOS Médecins offre au Médecin la faculté d'exercer son activité médicale, en qualité d'indépendant, dans le cadre de son organisation »,

* en son article 4 que : « les relations entre [3] et le Médecin sont régies par les règles du mandat, au sens des articles 394 et suivants du Code des Obligations, sous la forme d'une activité médicale sous franchise, le Médecin agissant dans le cadre de ses soins aux patients, sous sa seule responsabilité, de manière autonome, mais sous l'enseigne de [3] »,

* en son article 5, que : « SOS Médecins, en tant qu'elle reçoit des mandats de soins médicaux de sa clientèle, fait appel au Médecin, selon les modalités et la disponibilité convenue avec celui-ci, par substitution de mandat, au sens de l'article 399 alinéa 2 du Code des Obligations »,

* en son article 6 que : « le médecin déclare que nonobstant son indépendance et son autonomie dans l'exercice de son activité médicale en franchise de SOS Médecins, il accepte de se soumettre à diverses obligations résultant notamment du règlement ou de la direction médicale ou administrative de [3], [...] qui ne restreignent pas l'autonomie et l'indépendance du Médecin»,

* enfin, en son article 7 que

« le médecin prend note qu'en raison des règles juridiques différentes qui gouvernent les relations de droit privé et les obligations en matière d'assurances sociales AVS-AI, etc, ses relations avec [3] sont en l'état considérées, sur le plan desdites assurances sociales, comme « dépendantes », ce qui implique l'obligation pour [3] de prélever les cotisations AVS-AI, etc et de les verser elle-même à sa caisse de compensation, comme pour un employé » et que « ces modalités ne modifient en rien la qualification de franchise, tel que décrit ci-dessus ».

Il résulte de ces mentions que si la structure [4] SA doit agir à l'égard de M. [X] vis-à-vis de ses obligations avec les administrations locales comme si ce dernier était son employé, ledit contrat est de type 'franchise' et ne saurait s'analyser comme un contrat de travail et que l'activité régie au travers de celui-ci ne saurait dès lors s'analyser comme une activité salariée.

M. [X] se prévaut également de décomptes où sont indiqués notamment le montant de ses cotisations AVS, régime de retraite obligatoire suisse, d'un certificat de salaire ou rente et de son attestation quittance pour l'année 2018, laquelle indique à la rubrique 'type de contribuable' la mention 'salariés'.

Il y a lieu d'observer que ces documents sont les seuls

sur lesquels la mention salarié apparaît et d'autre part, cette mention fait référence à une classification fiscale interne propre au canton de Genève dont on ignore la définition retenue et sans que cela affecte la réalité de la relation contractuelle entre les parties,

ce qui ne suffit pas à établir la réalité de la qualité de salarié à l'égard de [4] SA.

Enfin, il verse aux débats

la décision définitive de cotisations personnelle pour l'année 2016 émanant de la caisse interprofessionnelle AVS de la fédération des entreprises romandes (FER-CIAM) dans laquelle il est précisé qu'il s'agit de « cotisations personnelles AVS/AI/APG dues en qualité de personne assurée exerçant une activité indépendante ».

Il s'en suit que l'ensemble des documents produits par M. [X] qualifient son activité d'indépendante.

C'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont retenu qu'au regard de la législation française, l'activité de M. [X] pour le compte de [3] est une activité indépendante et non une activité salariée.

En application du règlement CE n°883/2004, l'article 13 (3), §2, 'La personne qui exerce normalement une activité non salariée dans deux ou plusieurs États membres est soumise :

a) à la législation de l'État membre de résidence, si elle exerce une partie substantielle de son activité dans cet État membre,

ou

b) à la législation de l'État membre dans lequel se situe le centre d'intérêt de ses activités, si la personne ne réside pas dans l'un des États membres où elle exerce une partie substantielle de son activité'.

En outre, en application du règlement CE n° 978/2009, relatif à la procédure pour l'application de l'article 13 du règlement de base :

'1. La personne qui exerce des activités dans deux États membres ou plus en informe l'institution désignée par l'autorité compétente de l'État membre de résidence.

2. L'institution désignée du lieu de résidence détermine dans les meilleurs délais la législation applicable à la personne concernée, compte tenu de l'article 13 du règlement de base et de l'article 14 du règlement d'application. Cette détermination initiale est provisoire. L'institution informe de cette détermination provisoire les institutions désignées de chaque État membre où une activité est exercée.

3. La détermination provisoire de la législation applicable visée au paragraphe 2 devient définitive dans les deux mois suivant sa notification à l'institution désignée par les autorités compétentes des États membres concernés, conformément au paragraphe 2, sauf si la législation a déjà fait l'objet d'une détermination définitive en application du paragraphe 4, ou si au moins une des institutions concernées informe l'institution désignée par l'autorité compétente de l'État membre de résidence, à l'expiration de cette période de deux mois, qu'elle ne peut encore accepter la détermination ou qu'elle a un avis différent à cet égard.

4. Lorsqu'une incertitude quant à la détermination de la législation applicable nécessite des contacts entre les institutions ou autorités de deux États membres ou plus, la législation applicable à la personne concernée est déterminée d'un commun accord, à la demande d'une ou plusieurs des institutions désignées par les autorités compétentes des États membres concernés ou des autorités compétentes elles-mêmes, compte tenu de l'article 13 du règlement de base et des dispositions pertinentes de l'article 14 du règlement d'application'.

Il est produit aux débats le formulaire Al de coordination des systèmes de sécurité sociale qui détermine la législation de sécurité sociale lui étant applicable, émis en application des réglements CE 883/2004 du 29 avril 2004 et CE 987/2009 du 16 septembre 2009, le 7 février 2018 par la CPAM des Bouches du Rhône et le 4 avril 2018 par la Caisse Interprofessionnelle AVS de la Fédération des entreprises romandes en Suisse. Ce formulaire indique que la législation de sécurité sociale qui lui est applicable est la législation suisse au motif qu'il exerce en Suisse une activité salariée et ce, depuis le 11 août 2017.

La portée de ce certificat a été jugée en dernier lieu par la Cour de justice de l'Union européenne par un arrêt n° C 527/16 Alpenrind du 6 septembre 2018 lequel a dit qu'un certificat A1, délivré par l'institution compétente d'un Etat membre lie non seulement les institutions de l'Etat membre dans lequel l'activité est exercée mais également les juridictions de cet Etat membre.

Ledit certificat crée une présomption de régularité de l'affiliation de sorte qu'il incombe à l'institution compétente de l'État membre l'ayant établi de reconsidérer le bien fondé de sa délivrance, et le cas échéant de le retirer lorsque l'institution compétente de l'État membre dans lequel la personne concernée exerce également une activité émet des doutes quant à l'exactitude des faits à la base dudit certificat et dans l'hypothèse où les institutions ne parviendraient pas à se mettre d'accord, notamment sur l'appréciation des faits propres à une situation spécifique, elles doivent en appeler à la commission administrative instituée par le règlement.

Il convient de rappeler, d'une part, que l'article 5 du règlement communautaire n° 987/2009, notamment dans ses paragraphes 2 à 4, prévoit une procédure aux fins de résolution des litiges survenant entre l'institution compétente d'un Etat membre et l'institution compétente d'un autre Etat membre au sujet de documents ou de pièces justificatives visés à l'article 5.

Il y a lieu de relever d'autre part, qu'en cas d'impossibilité de résolution de ce litige par la commission administrative, il appartient à l'Etat membre, le cas échéant et sans préjudice des éventuelles voies de recours de nature juridictionnelle dans l'Etat membre dont relève l'institution émettrice, d'engager une procédure en manquement conformément à l'article 259 TFUE.

Aussi, il incombe à l'organisme social qui entend remettre en cause la validité d'un certificat A1 de recourir à la procédure spécifique instituée au niveau communautaire (procédure de dialogue entre les Etats) afin d'en obtenir le retrait (demande motivée de réexamen, saisine de la commission administrative pour la coordination des systèmes de sécurité sociale).

Cette règle connaît une exception, créée par la Cour de justice de l'Union européenne - qui à la suite de la question préjudicielle, posée par la Cour de cassation belge - a, par arrêt du 6 février 2018, applicable tant aux travailleurs détachés qu'aux autres, sur le fondement du principe général du droit de l'Union, jugé que le juge de l'Etat membre d'accueil doit écarter l'application d'un certificat E 101 - ancien certificat A1 - lorsque celui-ci a été obtenu de manière frauduleuse ; l'existence d'une telle fraude devant reposer sur un faisceau d'indices probants, établissant la réunion :

- d'un élément objectif, à savoir, le fait que les conditions d'application de la législation mentionnée sur le certificat E 101/A 1 ne sont pas objectivement remplies,

- d'un élément subjectif, à savoir, l'intention des intéressés de contourner ou d'éluder les conditions de délivrance dudit certificat en vue d'obtenir l'avantage qui y est attaché consistant en une présentation erronée de la situation réelle du travailleur ou en une omission volontaire, telle que la non-divulgation d'une information pertinente.

Si l'organisme de sécurité sociale doutait de l'applicabilité de la législation suisse, notamment par l'activité substantielle de M. [X] en France, elle revendique d'une part l'absence de toute obligation formelle de saisir

la commission administrative, et d'autre part, la compétence du juge de l'État membre pour écarter un formulaire Al obtenu par fausse déclaration.

Il y a lieu de préciser que la structure [4] SA laquelle offre des prestations de régulations et de soins d'urgence pour la ville de Genève, propose également des prestations à l'étranger dans le cadre de l'assistance internationale pour laquelle peut faire appel à des médecins permettant d'intervenir dans le cadre de rapatriement et de soins locaux.

Il s'ensuit que si l'activité du docteur [X] afférente au contrat qui le lie à la structure [4] SA est substantielle, il n'est pas démontré par la caisse une fraude commise par M. [X], de nature à exclure l'application de la législation suisse de sécurité sociale à sa situation.

Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement déféré et de débouter la CARMF de sa demande tendant au rejet de la législation suisse au bénéfice de la législation française.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

L'équité conduit à allouer à l'intimé une somme de 2.000,00 e au titre des frais irrépétibles qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits en appel.

La caisse autonome de retraite des médecins de France supportera les dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

- Condamne la caisse autonome de retraite des médecins de France à payer à M. [X] une somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamne la la caisse autonome de retraite des médecins de France aux dépens.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/07001
Date de la décision : 23/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-23;21.07001 ?
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