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23/09/2022 | FRANCE | N°21/06525

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 23 septembre 2022, 21/06525


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022



N°2022/













Rôle N° RG 21/06525 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHL7E







[N] [M]





C/



S.N.C. [4]

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BDR











































Copie exécutoire délivrée >
le :

à :



- Me Marc LECOMTE, avocat au barreau d'Aix en Provence



- Me HAMDI, avocat au barreau d'Aix en Provence



- CPAM des Bouches du Rhône



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 10

Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/00538.

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 23 SEPTEMBRE 2022

N°2022/

Rôle N° RG 21/06525 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHL7E

[N] [M]

C/

S.N.C. [4]

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BDR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Marc LECOMTE, avocat au barreau d'Aix en Provence

- Me HAMDI, avocat au barreau d'Aix en Provence

- CPAM des Bouches du Rhône

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 10

Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/00538.

APPELANT

Monsieur [N] [M], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Marc LECOMTE de la SELARL ERGASIA LOUNIS LECOMTE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

S.N.C. [4], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Ahmed-cherif HAMDI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 2]

représenté par Mme [S] [I] (Inspectrice juridique) en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Septembre 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS - PROCÉDURE - MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [N] [M] a été employé par la société [4], dite [4], à compter du 1er janvier 1989, en qualités successives de conducteur d'engins, chef d'équipe, contremaître puis chef de chantier.

Une surdité de perception bilatérale lui a été diagnostiquée par certificat médical initial en date du 10 novembre 2012 et il a établi une déclaration de maladie professionnelle le 21 janvier 2013.

Après avoir diligenté une enquête administrative, la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône (ci-après désignée CPAM ) lui a notifié, ainsi qu'à la société [4], par un courrier en date du 13 juin 2013, sa décision de prendre en charge sa maladie au titre de la législation professionnelle en application du tableau n°42 des maladies professionnelles.

Par courrier du 9 octobre 2013, la caisse a ensuite notifié à M. [M] l'attribution d'une rente, suite à la fixation de son taux d'incapacité permanente partielle à 12% lequel, par arrêt de la cour nationale d'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail du 5 avril 2018, a été porté à 16%.

M. [M] a saisi la CPAM dans le cadre de la procédure amiable de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et un procès-verbal de non-conciliation a été établi le 12 mars 2014.

Par requête expédiée par lettre recommandée le 7 mars 2016, M. [M] a, par l'intermédiaire de son conseil, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône afin de voir reconnaître que la maladie professionnelle dont il souffre est imputable à la faute inexcusable de son employeur.

En parallèle la société [4] a contesté la décision de la caisse de prendre en charge la pathologie déclarée au titre de la législation professionnelle et, par un arrêt en date du 17 mai 2017, devenu définitif, confirmant un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône du 23 février 2016, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré cette décision de prise en charge inopposable à la société employeur pour défaut de caractérisation de la maladie au regard du tableau n°42 des maladies professionnelles.

Par jugement du 10 aout 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille ayant repris l'instance a:

- dit que l'instance n'était pas périmée,

- dit que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable n'était pas prescrite,

- déclaré recevable le recours introduit par M. [M] à l'encontre de la société [4],

- dit que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel n°2017/766 du 17 mai 2017, rendu entre la société [4] et la CPCAM des Bouches-du-Rhône, n'a pas lieu à l'égard de M. [M],

- débouté M. [M] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [M] aux dépens.

Par déclaration notifiée par RPVA le 30 avril 2021, M. [M] a interjeté appel de cette décision, notifiée le 31 mars 2021, dans des conditions de forme et de délai qui ne font pas discussion.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, il demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'instance non atteinte par la péremption et l'action non-prescrite, et en ce qu'il a dit que l'autorité de la chose jugée attaché à l'arrêt de la cour d'appel rendu le 17 mai 2017 par la 14ème Chambre entre la société [4] et la CPAM des Bouches-du-Rhône n'a pas lieu à son égard, de le réformer pour le surplus, et de :

- dire que la maladie professionnelle dont il souffre est due à un manquement de la Société [4] dans l'inobservation des règles de sécurité caractérisant la faute inexcusable de cette dernière,

- ordonner la majoration de la rente qui lui est servie à son taux maximum,

- commettre tel expert qu'il plaira au Tribunal de désigner avec mission habituelle d'évaluer la nature et la consistance des préjudices soufferts par lui,

- condamner la Société [4] au paiement de la somme de 10.000,00 euros à titre d'indemnité provisionnelle, à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices extrapatrimoniaux,

- la condamner au paiement de la somme de 1.500,00 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de Particle 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il fait essentiellement valoir que :

- la décision de prise en charge de la caisse de sa maladie au titre du risque professionnel est définitive à son égard, étant rappelé qu'il s'agit d'une hypoacousie de perception par lésion cochléaire irréversible,

- il n'a donc pas à établir la preuve que cette affection répond à la définition du tableau n°42 des maladies professionnelles,

- il produit cependant le certificat médical initial du 10 novembre 2012, justifie de la durée d'exposition dans un milieu bruyant en qualité de conducteur d'engins de chantier,

- s'agissant de la prétendue régression de la surdité bilatérale dont il se trouve atteint, retenue par la cour dans son arrêt rendu le 17 mai 2017, celle-ci peut résulter du fait de ce que les deux audiogrammes comparés, ont été réalisés par deux professionnels de santé différents, à des dates différentes, les variations marginales ne permettant pas de conclure à une absence d'irréversibilité de la lésion,

- en toute hypothèse une très légère amélioration éventuelle à cinq ans d'intervalle n'en exclurait-t-elle pas moins l'irréversibilité de la lésion,

- s'agissant de la faute inexcusable, son employeur n'a pas pris les dispositions nécessaires pour préserver son état de santé en prévenant ou en limitant les risques d'exposition au bruit, alors qu'il lui appartient de rechercher des solutions tout au long du chemin de propagation du bruit entre l'équipement source du bruit, et la réception c'est-à-dire le salarié, ou de mettre en place des moyens de protection collectifs et individuels propres à limiter l'exposition au bruit, les résultats de cette évaluation des risques devant être transcrits dans le document unique prévu par l'article R.4121-1 du code du travail, qu'il a sollicité en vain, et qui serait archivé selon un membre du CHSCT, alors que ce document doit être mis à jour au moins une fois par an, et que la Cour de cassation considère que l'absence d'évaluation et de prévention des risques professionnels constitue une faute inexcusable, et encore que l'absence de document unique d'évaluation des risques à laquelle doit être assimilée l'absence de mise à jour, constitue également une faute inexcusable.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, la société [4], qui déclarent abandonner toute prétention relative à la péremption de l'instance ou à la prescription de l'action, demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté l'appelant et la caisse de l'ensemble de leurs demandes, de le réformer en ce qu'il a retenu qu'elle ne pouvait opposer l'autorité de la chose jugée relative à l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie concernée au titre du risque professionnel, et de juger que ces décisions sont opposables à la caisse qui devra supporter seule le cas échéant les conséquences financières d'une éventuelle reconnaissance de faute inexcusable, rejeter toutes les demandes contraires, et condamner M. [M], et la caisse si cette dernière devait maintenir son positionnement à son encontre, à lui verser une somme de 1.500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient en substance que :

- l'inopposabilité, jugée définitivement, de la prise en charge par la caisse de la pathologie de son salarié au titre du risque professionnel ne résulte pas d'une difficulté de procédure mais de ce que les conditions de l'examen auditif n'ont pas été respectées, la cour ayant estimé que la caisse ne prouvait pas l'origine professionnelle de la surdité,

- ce premier point ayant été tranché définitivement la caisse ne peut lui opposer dans le présent litige le caractère professionnel de la pathologie pour tenter d'en faire assumer les conséquences financières à l'employeur,

- subsidiairement elle avait fourni à son salarié l'ensemble des équipements conformes à son poste de travail et notamment les dispositifs antibruit, observation faite de l'amélioration en conséquence de la situation auditive de M. [M] entre 2007, première date à laquelle une difficulté a été constatée, et 2012,

- elle produit du reste le document unique d'évaluation des risques dans sa version antérieure à l'accident.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, la caisse demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur et le cas échéant de dire qu'elle majorera à la rente à 16 % et conservera son action récursoire contre la société, tant pour la rente de 12 %, que pour les préjudices qui seront déterminés, de condamner la société [4] à lui rembourser les conséquences financières de la faute inexcusable, et à lui régler une somme de 1.500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle avance en effet que :

- compte tenu de l'indépendance des rapports caisse/employeur et salarié/employeur, il appartient au salarié de démontrer que la maladie contractée est bien celle du tableau n°42, et que sa survenance est due à la faute inexcusable de l'employeur,

- le cas échéant, elle majorera la rente de 16 % de la victime et en recouvrera le montant à l'encontre de l'employeur dans la limite du taux de 12 %, seul opposable à l'employeur,

- l'action en reconnaissance de la faute inexcusable étant indépendante de l'action en inopposabilité vis-à-vis de l'employeur, la décision déclarant inopposable à l'employeur la prise en charge d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est sans incidence sur l'action reconnaissance de la faute inexcusable, dont la démonstration permet à la caisse d'exercice de son action récursoire au titre des préjudices dont elle fait l'avance de l'indemnisation.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Aux termes du certificat médical initial du 10 novembre 2012, M. [M] a déclaré une maladie professionnelle au titre du tableau 42 consistant en une 'surdité de perception bilatérale prédominant sur les aiguës avec une perte de 50 à 70 dB sur la fréquence de 4000 Hz selon audiogramme réalisé le 26 novembre 2012" , la demande de reconnaissance de maladie professionnelle en date du 21 janvier 2013 précisant que la date de la première constatation médicale était fixée au 6 février 2007.

Si l'arrêt rendu le 17 mai 2017 a confirmé le jugement rendu le 23 février 2016 par lequel le tribunal des affaires de sécurité sociale a déclaré inopposable à la société [4] à la décision de la caisse de prendre en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par M. [M], cette décision n'a acquis l'autorité de la chose jugée qu'entre les parties entre lesquelles elle a été rendue, et M. [M] conserve la possibilité de rechercher la faute inexcusable de son employeur en apportant la preuve du caractère professionnel de la pathologie qu'il a déclarée et dont il bénéficie de la prise en charge à titre professionnel. Cette preuve n'est pas rapportée par la production de la seule décision de prise en charge qui lui bénéficie, dès lors que cette dernière est inopposable à l'employeur.

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident ou la maladie est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.

Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

La charge de la preuve de la faute inexcusable incombe au salarié qui l'invoque.

Il est admis que la société employeur peut toujours contester le caractère professionnel de la pathologie déclarée par le salarié lorsqu'il est en position de défense à une action en reconnaissance de sa faute inexcusable.

Il convient donc de vérifier si M. [M] prouve le caractère professionnel de la pathologie dont il impute l'origine à la faute inexcusable de son employeur et s'il établit si ce dernier avait conscience du danger auquel se trouvait exposé son salarié et s'il a pris ou non les mesures nécessaires pour éviter la réalisation du risque.

1. Sur le caractère professionnel de la pathologie

Aux termes de l'article L.461-1 du Code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur à la date de la déclaration de la maladie professionnelle en novembre 2012 :

' Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.'

Il convient donc de vérifier que M. [M] remplissait les conditions médicales et administratives du tableau n°42 pour bénéficier de la présomption du caractère professionnel de sa pathologie.

Ce tableau, dans sa version en vigueur depuis le 28 septembre 2003 et donc applicable au litige, vise l'hypoacousie de perception par lésion cochléaire irréversible, accompagnée ou non d'acouphènes, avec ces précisions que :

* cette hypoacousie est caractérisée par un déficit audiométrique bilatéral, le plus souvent symétrique et affectant préférentiellement les fréquences élevées,

* le diagnostic de cette hypoacousie est établi : par une audiométrie tonale liminaire et une audiométrie vocale qui doivent être concordantes ; - en cas de non-concordance : par une impédancemétrie et recherche du réflexe stapédien ou, à défaut, par l'étude du suivi audiométrique professionnel,

* ces examens doivent être réalisés en cabine insonorisée, avec un audiomètre calibré,

* cette audiométrie diagnostique est réalisée après une cessation d'exposition au bruit lésionnel d'au moins 3 jours et doit faire apparaître sur la meilleure oreille un déficit d'au moins 35 dB. Ce déficit est la moyenne des déficits mesurés sur les fréquences 500, 1000, 2000 et 4000 Hertz,

* aucune aggravation de cette surdité professionnelle ne peut être prise en compte, sauf en cas de nouvelle exposition au bruit lésionnel.

Le délai de prise en charge est de un an, sous réserve d'une durée d'exposition d'un an, réduite à 30 jours en ce qui concerne la mise au point des propulseurs, réacteurs et moteurs thermiques.

Le tableau fixe également la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies comme suit :

Exposition aux bruits lésionnels provoqués par : 1. Les travaux sur métaux par percussion, abrasion ou projection tels que : - le décolletage, l'emboutissage, l'estampage, le broyage, le fraisage, le martelage, le burinage, le rivetage, le laminage, l'étirage, le tréfilage, le découpage, le sciage, le cisaillage, le tronçonnage ; - l'ébarbage, le grenaillage manuel, le sablage manuel, le meulage, le polissage, le gougeage et le découpage par procédé arc-air, la métallisation. 2. Le câblage, le toronnage, le bobinage de fils d'acier. 3. L'utilisation de marteaux et perforateurs pneumatiques. 4. La manutention mécanisée de récipients métalliques. 5. Les travaux de verrerie à proximité des fours, machines de fabrication, broyeurs et concasseurs ; l'embouteillage. 6. Le tissage sur métiers ou machines à tisser, les travaux sur peigneuses, machines à filer incluant le passage sur bancs à broches, retordeuses, moulineuses, bobineuses de fibres textiles. 7. La mise au point, les essais et l'utilisation des propulseurs, réacteurs, moteurs thermiques, groupes électrogènes, groupes hydrauliques, installations de compression ou de détente fonctionnant à des pressions différentes de la pression atmosphérique, ainsi que des moteurs électriques de puissance comprise entre 11 kW et 55 kW s'ils fonctionnent à plus de 2 360 tours par minute, de ceux dont la puissance est comprise entre 55 kW et 220 kW s'ils fonctionnent à plus de 1 320 tours par minute et de ceux dont la puissance dépasse 220 kW. 8. L'emploi ou la destruction de munitions ou d'explosifs. 9. L'utilisation de pistolets de scellement. 10. Le broyage, le concassage, le criblage, le sablage manuel, le sciage, l'usinage de pierres et de produits minéraux. 11. Les procédés industriels de séchage de matières organiques par ventilation. 12. L'abattage, le tronçonnage, l'ébranchage mécanique des arbres. 13. L'emploi des machines à bois en atelier : scies circulaires de tous types, scies à ruban, dégauchisseuses, raboteuses, toupies, machines à fraiser, tenonneuses, mortaiseuses, moulurières, plaqueuses de chants intégrant des fonctions d'usinage, défonceuses, ponceuses, clouteuses. 14. L'utilisation d'engins de chantier : bouteurs, décapeurs, chargeuses, moutons, pelles mécaniques, chariots de manutention tous terrains. 15. Le broyage, l'injection, l'usinage des matières plastiques et du caoutchouc. 16. Le travail sur les rotatives dans l'industrie graphique. 17. La fabrication et le conditionnement mécanisé du papier et du carton. 18. L'emploi du matériel vibrant pour l'élaboration de produits en béton et de produits réfractaires. 19. Les travaux de mesurage des niveaux sonores et d'essais ou de réparation des dispositifs d'émission sonore. 20. Les travaux de moulage sur machines à secousses et décochage sur grilles vibrantes. 21. La fusion en four industriel par arcs électriques. 22. Les travaux sur ou à proximité des aéronefs dont les moteurs sont en fonctionnement dans l'enceinte d'aérodromes et d'aéroports. 23. L'exposition à la composante audible dans les travaux de découpe, de soudage et d'usinage par ultrasons des matières plastiques. 24. Les travaux suivants dans l'industrie agroalimentaire : - l'abattage et l'éviscération des volailles, des porcs et des bovins ; - le plumage de volailles ; - l'emboîtage de conserves alimentaires ; - le malaxage, la coupe, le sciage, le broyage, la compression des produits alimentaires. 25. Moulage par presse à injection de pièces en alliages métalliques.

M. [M] doit donc en premier lieu démontrer qu'il est atteint d'une hypoacousie de perception par lésion cochléaire irréversible caractérisée par un déficit audiométrique bilatéral, le plus souvent symétrique et affectant préférentiellement les fréquences élevées, et diagnostiquée par une audiométrie tonale liminaire et une audiométrie vocale qui doivent être concordantes, ou, en cas de non-concordance, par une impédancemétrie et recherche du réflexe stapédien ou, à défaut, par l'étude du suivi audiométrique professionnel, tous examens réalisés en cabine insonorisée, avec un audiomètre calibré, réalisés après une cessation d'exposition au bruit lésionnel d'au moins 3 jours et devant faire apparaître sur la meilleure oreille un déficit d'au moins 35 dB. Ce déficit est la moyenne des déficits mesurés sur les fréquences 500, 1000, 2000 et 4000 Hertz.

Il produit à cet égard un compte rendu d'exploration vestibulaire et oculomotrice du 26 juin 2007, et l'audiogramme réalisé par le docteur [B] [L] le 26 novembre 2012.

Il produit également l'arrêt rendu le 17 mai 2017 par la présente cour, laquelle a été mise en mesure d'analyser les deux audiogrammes réalisés sur la personne de M. [M] en premier lieu le 6 février 2007 ce qui correspond à la date de première constatation médicale de sa maladie, en second lieu le 26 novembre 2012, qui correspond à l'audiogramme qu'il produit au cours de la présente instance.

Il en résulte que l'audiogramme réalisé le 6 février 2007 avait conclu à une importante surdité de perception d'allure soustractive professionnelle, à confirmer, avec les résultats suivants :

- oreille droite : 30 dB sur la fréquence 500 Hz, 35 dB sur la fréquence 1000 Hz, 45 dB sur la fréquence de 1000 Hz, 55 dB sur la fréquence 4000 Hertz, Total 165 dB, soit un déficit moyen de 41,25 dB,

- oreille gauche : 30 dB sur la fréquence 500 Hz, 40 dB sur la fréquence 1000 Hz, 60 dB sur la fréquence 2000 Hz, 65 dB sur la fréquence 4000 Hz, total 195 dB, soit un déficit moyen de 48,75 dB.

L'audiogramme réalisé le 26 novembre 2012 avait présenté les résultats suivants :

- oreille droite : 25 dB sur la fréquence 500 Hz, 30 dB sur la fréquence 1000 Hz, 40 dB sur la fréquence 2000 Hz, 60 dB sur la fréquence 4000 Hz, total 155 dB, soit un déficit moyen de 38,75 dB,

- oreille gauche : 30 dB sur la fréquence 500 Hz, 35 dB sur la fréquence 1000 Hz, 50 dB sur la fréquence 2000 Hz, 65 dB sur la fréquence 4000 Hz, total 180 dB, soit un déficit moyen de 45 dB.

Concernant ce second audiogramme, le médecin qu'il a pratiqué atteste dans un écrit du 11 mai 2021 qu'il a été réalisé dans une cabine insonorisée, avec un audiomètre étalonné et qu'il existe une perte de 35 dB sur la meilleure oreille c'est-à-dire l'oreille droite.

Par ailleurs, M. [M], en arrêt de travail depuis le 14 mai 2012, n'était plus exposé depuis au moins trois jours au bruit lésionnel invoqué.

Par contre, il ne produit pas l'audiogramme réalisé en février 2007 et ne justifie pas des conditions dans lesquelles cet audiogramme a été réalisé, or la cour ne peut que constater qu'il existe une différence significative dans les résultats entre ces deux audiomètres qui doivent avoir été réalisés dans des conditions très strictes, différence en faveur d'une amélioration de l'état auditif du patient sur les deux oreilles entre 2007 et 2012 ce qui pose un doute sur le caractère irréversible de la lésion, ainsi que l'a relevé la cour dans son arrêt du 17 mai 2017.

Par ailleurs, le certificat médical initial désigne une surdité de perception bilatérale, qui constitue une atteinte pouvant se situer soit au niveau de la cochlée soit au niveau des voies nerveuses. Les atteintes de la cochlée elle-même peuvent être de différentes origines.

M. [M] ne produit pas d'autres éléments de nature médicale permettant d'établir de façon certaine que la pathologie dont il souffre est celle désignée dans le tableau 42 ci-dessus rappelé.

Il s'ensuit qu'il ne rapporte pas la preuve suffisante de ce que sa pathologie relève du tableau précité.

2. Sur la faute inexcusable de l'employeur

Dès lors qu'il n'est pas démontré que l'affection dont souffre M. [M] soit d'origine professionnelle, il ne saurait y avoir reconnaissance d'une faute inexcusable imputable à l'employeur.

Il en résulte que le jugement déféré qui a constaté que M. [M] ne versait aux débats aucun élément de nature à démontrer que son hypoacousie de perception est due à une lésion cochléaire et qu'elle est irréversible, et qui a estimé qu'en l'état de ces éléments les conditions du tableau n°42 n'étaient pas remplies et débouté ce dernier de toutes ses demandes doit être confirmé.

Il apparaît équitable de laisser à chaque partie la charge des frais qu'elle a dû exposer au cours de la présente procédure.

M. [M] qui échoue dans son appel supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

- Confirme le jugement du 10 mars 2021 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- Rejette les demandes présentées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Met les dépens à la charge de M. [N] [M].

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/06525
Date de la décision : 23/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-23;21.06525 ?
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