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22/09/2022 | FRANCE | N°21/12159

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 22 septembre 2022, 21/12159


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 22 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/261





Rôle N° RG 21/12159 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH6RF







S.A.S. NIKAIADIS





C/



LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT

PROCUREUR GENERAL

Société MONTE D'ALVA - ALIMENTACAO S.A



















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Karine TOLLINCHI



S.A.S. NIKAIADIS >


I.N.P.I.



Société MONTE D'ALVA



Décision déférée à la Cour :



Décision de Monsieur le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 09 Juillet 2021, enregistrée au répertoire général sous le n° NL 21-0031.



DEMANDERES...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 22 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/261

Rôle N° RG 21/12159 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH6RF

S.A.S. NIKAIADIS

C/

LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT

PROCUREUR GENERAL

Société MONTE D'ALVA - ALIMENTACAO S.A

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Karine TOLLINCHI

S.A.S. NIKAIADIS

I.N.P.I.

Société MONTE D'ALVA

Décision déférée à la Cour :

Décision de Monsieur le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle en date du 09 Juillet 2021, enregistrée au répertoire général sous le n° NL 21-0031.

DEMANDERESSE

S.A.S. NIKAIADIS agissant par son Président, Monsieur [V] [D], dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Me Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me François STIFANI, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Letterio SETTINERI, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

DEFENDEURS

Monsieur LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE

dont le siège social est sis [Adresse 1]

non comparant

Monsieur LE PROCUREUR GENERAL

[Adresse 2]

représenté par M. Pierre-Jean GAURY, avocat général

Société MONTE D'ALVA - ALIMENTACAO S.A, dont le siège social est sis [Adresse 5])

régulièrement assignée

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Juin 2022 en audience publique.

Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Ministère Public : M. Pierre-Jean GAURY, avocat général, lequel a été entendu en ses observations orales.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Le 8 juillet 2020, la société NIKAIDIADIS a déposé une demande d'enregistrement numéro 20 4'664 792 auprès de l'Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), de la marque verbale «'St Isidore'», pour désigner les produits suivants':

* classe 29': Viande, poisson, volaille et gibier ; fruits congelés, fruits secs, fruits cuisinés ; légumes conservés, légumes surgelés'; légumes séchés ; légumes cuits'; gelées'; confitures'; compotes ; 'ufs ; lait'; produits laitiers ; huiles à usage alimentaire'; beurre'; charcuterie ; salaisons ; crustacés (non vivants)'; coquillages non vivants'; insecte comestibles non vivants, conserves de viande';conserves de poisson'; fromages'; boissons lactées où le lait prédomine';

* classe 30': Café, thé, cacao'; sucre'; riz ; tapioca ; farine ; préparations faites de céréales'; pain'; pâtisseries ; confiseries ; glaces alimentaires ; miel, sirop d'agave (édulcorant naturel); levure';sel';moutarde'; vinaigre'; sauces (condiments)'; épices,'; glace à rafraîchir'; sandwiches'; pizzas, crêpe (alimentation)'; biscuits'; gâteaux'; biscottes'; sucreries'; chocolat'; boissons à base de cacao'; boissons à base de café'; boissons à base de thé

L'enregistrement de cette marque a été publié au BOPI 2021-02 du 15 janvier 2021.

Le 18 février 2021, la société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO, société de droit portugais, titulaire de la marque européenne «'IZIDORO'», a formé une demande en nullité de la marque « St Isidore'», enregistrée sous la référence NL 21-0031, uniquement pour une partie des produits de la classe 29, à savoir les produits suivants':' « Viande'; volaille'; gibier'; charcuterie'; salaisons'; conserves de viande'».

La société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO a invoqué une atteinte à la marque de l'Union Européenne portant sur le signe verbal «'IZIDORO'», déposée le 8 août 2011 et enregistrée le 20 janvier 2012 sous le n° 01083648, notamment pour les produits suivants :' « Viandes, viande fraîche, congelée, hachée, préparée, à savoir, bacon, viande conservée, charcuterie, boudins, jambon, saucisse en pâte, saucisson'».

Par décision rendue le 9 juillet 2021, le directeur de l'Institut de la Propriété Industrielle a déclaré partiellement nulle la marque «'St Isidore'» n° 20 4'664'792, pour les produits «'Viande'; volaille'; gibier'; charcuterie'; salaisons'; conserves de viande'».

La société NIKAIADIS a formé un recours à l'encontre de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 9 août 2021,

Elle a adressé par acte du 3 décembre 2021 selon les modalités du règlement (CE) n°1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaire en matière civile et commerciale, une demande de notification aux autorités compétentes de l'assignation devant la cour d'appel d'Aix en Provence à la société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO. La réception par l'entité étrangère est justifié par l'acte du 13 janvier 2022, de même que le retour des lettres recommandées avec accusé de réception revenues signées.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 9 novembre 2021 par la société NIKAIADIS contenant l'exposé de ses moyens, et par lequel la société demande à la cour de':

- Juger la société NIKAIADIS recevable en son recours et le déclarer fondé,

Statuant à nouveau,

- Réformer ou annuler la décision du directeur général de l'INPI du 9 juillet 2021,

- Juger que les marques «'St Isidore'» et «'IZIDORO'» ainsi que les produits commercialisés par les deux sociétés ne sont pas identiques ni similaires,

- Juger qu'il n'existe pas de risque de confusion ou d'association entre les marques «'St ISIDORE'» et «'IZIDORO'»';

Et par conséquent,

- Juger que la marque verbale «'St Isidore'» doit être enregistrée au Registre National des marques pour les classes 29 et 30,

- Débouter la société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner la société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO à verser à la société NIKAIADIS la somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

La société NIKAIDIADIS fait valoir'qu'il existe de multiples différences entre les deux marques qui excluent tout risque de confusion, que la marque déposée par elle ne porte pas atteinte aux droits antérieurs de la société NIKAIDIADIS car les produits qu'elles désignent ne sont pas identiques à ceux couverts par la marque «' IZIDORO'», que compte tenu des divergences graphiques linguistiques, phonétiques et intellectuelles, ainsi que du public et du territoire pertinent, il ne peut raisonnablement exister, dans l'esprit des consommateurs un risque de confusion.

Elle souligne qu'elle souhaite protéger sa marque pour les classes 29 et 30 comprenant la quasi-totalité des produits alimentaires commercialisés au sein de son hypermarché à l'enseigne E. LECLERC, sous la marque «'ST ISIDORE'», dans un espace dédié, des produits «'faits maison'», proches de L'épicerie fine, et qui ne sont pas de consommation courante et pour lesquels le consommateur porte une attente particulière, tandis que la société NIKAIDIADIS détient une marque déposée pour la commercialisation en libre-service de produits industriels, à base de viande et de dérivés énumérés, qui sont principalement sous conserves ou sous vide et de gamme totalement différente.

Elle fait état de différences graphiques et visuelles, également de langues, avec des différences phonétiques et des différences intellectuelles et sémantiques, la marque «'St Isidore'» rappelant un patrimoine culturel, en faisant référence à la figure de Saint Isidore personnage chrétien du 7e siècle, et également un quartier de la ville de [Localité 3] où se trouve le lieu de vente des produits du déposant.

Elle fait observer que la marque IZIDORO n'a jamais été exploitée en France et qu'elle est inconnue du public français.

Elle fait valoir qu'en l'espèce le public pertinent à prendre en considération correspond aux consommateurs de produits d'épicerie fine qui constituent une clientèle particulièrement attentive, qui ne fera pas de confusion.

Par observations écrites déposées au greffe pour l'audience du 7 mars 2022, monsieur le directeur national de l'INPI fait valoir un risque de confusion entre les deux marques pour les produits en cause.

Sur la comparaison des produits, il soutient que la requérante ne peut valablement tirer argument du fait que des produits qu'elle souhaite commercialiser sous la marque St ISIDORE seront des produits faits maison qui seront exclusivement vendus au sein d'un hypermarché E. LECLERC dans un espace dédié, proche de l'épicerie fine alors que la marque antérieure IZIDORO auraient été déposés pour la commercialisation en libre-service de produits industriels, dans la mesure où la similitude entre les produits s'apprécie exclusivement au regard des libellés tels qu'ils figurent au dépôt, les conditions dans lesquelles les marques sont exploitées par leur titulaire n'entrant pas en ligne de compte dans l'appréciation de la similitude des produits et services.

Sur la comparaison des signes, il affirme que la décision n'est pas davantage critiquable en ce qu'elle a constaté que les signes présentent des similitudes visuelles phonétiques et conceptuelles générant d'importantes ressemblances d'ensemble renforcées par la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants.

S'agissant de l'appréciation globale du risque de confusion, ils considèrent qu'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public pertinent, compte tenu de l'identité et de la grande proximité des produits en cause, des ressemblances d'ensemble entre les signes, de la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants, et du caractère intrinsèquement distinctif de la marque antérieure.

Sur l'usage de la marque antérieure sur le territoire français, il fait valoir que la marque antérieure est une marque de l'Union européenne, titre unitaire qui confère à son titulaire une protection sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, indépendamment des frontières des États membres et donc y compris sur le territoire français'; le risque de confusion permettant de conclure à l'imitation ne s'entendant pas d'une confusion réelle par un consommateur existant, mais d'un risque de confusion par un consommateur moyen, standard fictif de référence ; en conséquence il importe peu que le public soit réellement où virtuellement confronté aux deux marques dans la vie courante.

La société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO n'a pas constitué avocat, ni conclu.

A l'audience, le ministère public entendu en ses observations orales, a conclu à la confirmation de la décision déférée.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L.714- 3 du code de la propriété intellectuelle, l'enregistrement d'une marque est déclaré nul par décision de justice ou par décision du directeur général de l'Institut national de la propriété intellectuelle, en application de l'article L 411- 4, si la marque ne répond pas aux conditions énoncées aux articles L.711- 2, L.711- 3, L.715- 4 et L. 715- 9.

Aux termes de l'article L.711- 3 du même code, ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d'être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France, notamment :

(')

b) lorsqu'elle est identique ou similaire à la marque antérieure et que les produits ou les services qu'elle désigne sont identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée, s'il existe dans l'esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d'association avec la marque antérieure.

Aux termes de l'article 8,'§1er, b, du règlement sur la marque de l'Union européenne 2017': 1001':

«'Sur opposition du titulaire d'une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l'enregistrement':

('')

b) Lorsqu'en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l'esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée'; le risque de confusion comprend le risque d'association avec la marque antérieure.

Le risque de confusion entre deux signes doit s'apprécier globalement, en considération de l'impression d'ensemble produite par les marques en présence, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants, compte tenu, notamment, du degré de similitude entre les produits - celle-ci s'appréciant exclusivement au regard des libellés tels qu'ils figurent aux dépôts-, du degré de similitude visuelle, phonétique, et conceptuelle entre les signes.

Au cas présent, les produits désignés dans le dépôt de la marque antérieure IZIDORO, à savoir «'viandes, viande fraiche, congelée, hachée, préparée, à savoir , bacon, viande conservée, charcuterie, boudins jambon, saucisse en pâte, saucissons'» sont identiques ou très fortement similaires à ceux désignés dans le dépôt de la marque contestée ST ISIDORE, à savoir «' viande, volaille, gibier, charcuterie, salaisons, conserves de viande'» , les conditions dans lesquelles la société NIKAIDIS entend exploiter ces produits étant indifférentes.

Visuellement les signes St ISIDORE et IZIDORO diffèrent par leur structure, deux termes au lieu d'un seul, et par leur terme d'attaque, le terme «'St «'contribuant au caractère distinctif de la marque'; la calligraphie est nettement distincte, la première comporte des caractères fins et en minuscules, sauf pour les deux premières lettres en majuscules, la seconde en gras et majuscules, avec le premier O souligné.

Phonétiquement la différence sonore est notable tant en ce qui concerne leur sonorité d'attaque, «'st'» pour la première, le Z au lieu du S pour produire la consonance «'IZI'» pour la seconde, qu'en ce qui concerne leur sonorité finale, respectivement «'e'», et «'o'» appuyé,

les langues utilisés pour les deux marques étant différentes, le français et le portugais.

Conceptuellement la première fait référence pour le consommateur français d'attention moyenne à la figure de Saint Isidore, personnage chrétien, le terme IZIDORO ne renvoyant ni au personnage religieux, ni même au prénom de par sa terminaison en «'o'». Il n'y a donc pas similitude sur le plan conceptuel entre ces deux signes.

Ainsi, il résulte de l'analyse globale qu'en dépit de l'identité ou de la similarité des produits couverts par les marques opposées, le consommateur moyen ne pourra se méprendre sur l'origine des produits en cause. En l'absence de risque de confusion entre les deux signes distinctifs, il y a lieu de faire droit au recours formé par la société NIKAIADIS à l'encontre de la décision du Directeur de de l'Institut National de la Propriété Industrielle et d'annuler celle-ci.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR':

DECLARE recevable le recours formé par la société NIKAIADIS à l'encontre de la décision du Directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle NL 21-0031 / MAM en date du 9 juillet 2021,

Y FAISANT DROIT,

ANNULE la décision rendue le 9 juillet 2021 par le directeur général de l'institut national de la propriété industrielle,

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que le présent arrêt sera notifié par le greffe aux parties et au directeur général de l'Institut National de la Propriété Industrielle, dans les formes prévues par l'article R411-42 du code de la propriété intellectuelle

MET les dépens à la charge de la société MONTE D'ALVA-ALIMENTACAO.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 21/12159
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;21.12159 ?
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