La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2022 | FRANCE | N°19/01037

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 22 septembre 2022, 19/01037


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 22 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/265













N° RG 19/01037 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUVB







[M] [I]

SAS DWAS





C/



SARL JALIS





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Pascal ALIAS



Me Romain CHERFILS













Déci

sion déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 10 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F00434.





APPELANTS



Maître [M] [I], Mandataire Judiciaire, demeurant [Adresse 3], agissant en qualité de liquidateur de la SAS DWAS, par jugement prononcé le 12 avril 2017...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 22 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/265

N° RG 19/01037 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUVB

[M] [I]

SAS DWAS

C/

SARL JALIS

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Pascal ALIAS

Me Romain CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 10 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F00434.

APPELANTS

Maître [M] [I], Mandataire Judiciaire, demeurant [Adresse 3], agissant en qualité de liquidateur de la SAS DWAS, par jugement prononcé le 12 avril 2017

représenté par Me Pascal ALIAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Edouard BERTRAND, avocat au barreau de LYON

SAS DWAS, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représenté par Me Pascal ALIAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Edouard BERTRAND, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

SARL JALIS, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Annie ALAGY, avocat au barreau de LYON substitué par Me Sarah NASRI, avocat au barreau de LYON, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L'AFFAIRE

La société JALIS a pour objet la commercialisation de sites internet. Elle a signé le 28 mai 2015 un contrat intitulé contrat de concessionnaire avec la société DWAS pour une période de 5 années.

Aux termes de ce contrat, la mission de la société DWAS était de promouvoir, commercialiser et assurer la prise de commandes de licences d'exploitation et de sites internet fournis par la société JALIS sur un territoire géographique défini, en l'occurrence plusieurs communes situées dans le département 42. Le contrat intitulé « contrat concessionnaire JALIS », prévoyait une rémunération égale à 30 % du chiffre d'affaires HT total valorisé par prise de commande déclenchant une facturation et encaissement de chiffres d'affaires pour JALIS et /ou ses sociétés affiliées.

Fin 2015, un litige a surgi entre les parties relativement au calcul des commissions.

La société DWAS, par courrier recommandé avec avis de réception du 12 février 2016, a rappelé à la société JALIS, d'une part, les termes de leur contrat quant à la méthode de calcul de ses commissions et, d'autre part, le montant de ses factures demeurées impayées, lesquels s'élevaient à la somme de 7 130 euros T.T.C.

Après plusieurs réunions infructueuses, la société DWAS a procédé à la résiliation du contrat par lettre recommandée du 22 avril 2016, accompagnée de factures d'un montant total de 31 380,92 € T.T.C.

En l'absence de règlement, le 17 février 2017, la société DWAS a fait assigner la société JALIS devant le tribunal de Commerce de Marseille pour obtenir des rappels de commissions, la requalification du contrat de concession en contrat d'agent commercial, ainsi que le versement d'une indemnité de rupture.

Par jugement du 12 avril 2017 du tribunal de commerce de Lyon, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte envers la société DWAS, Maître [M] [I] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire et est intervenu en cette qualité devant le tribunal.

Par jugement du 10 octobre 2018, le tribunal de Commerce de Marseille a :

-Dit que le contrat qui liait les sociétés JALIS et DWAS doit être requalifié en contrat d'agent commercial,

-Débouté Maître [I] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société DWAS de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice au titre de la rupture du contrat d'agent commercial ;

-Débouté la société JALIS de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture du contrat de concession,

-Ordonné une expertise sur les demandes en paiement de commissions et a désigné Mme [P] [F], en qualité d'expert. Le rapport d'expertise a été déposé le 18 juin 2019.

La société DWAS et Maître [M] [I] ès qualité ont relevé appel de cette décision par déclaration du 17 janvier 2019.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction le 4 avril 2022 et a fixé l'affaire à l'audience du 2 mai 2022. L'affaire a fait l'objet d'un renvoi au 16 juin 2022.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 1er octobre 2019, Maître [M] [I] ès qualité a sollicité :

- la confirmation du jugement en ce qu'il avait jugé que les frais de leasing ne devaient pas être déduits de l'assiette servant au calcul des commissions de la société DWAS pour les dossiers financés par des organismes financiers, et sollicité la condamnation de cette société JALIS à payer la somme de 31.380,92 euros , outre les intérêts légaux égaux à 3 fois le taux d'intérêt légal depuis le 12 avril 2016, date de la première mise en demeure pour les factures antérieures à cette date, et depuis le 22 avril 2016, date de la dernière mise en demeure pour les factures émises à compter du 12 avril 2016, et la somme de 40 euros par facture demeurée impayée, soit 560 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement prévue par l'article L.441-6 I. alinéa 12 du code de commerce et l'article D.441-5 du même code,

- la confirmation du jugement en ce qu'il avait jugé que le contrat liant les parties était un contrat d'agent commercial,

- infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande d'indemnisation de la société DWAS et condamner la société JALIS à lui payer une indemnité compensatrice de 180.854 euros au titre du préjudice subi du fait de la rupture, correspondant à deux années de commissions,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société JALIS de l'ensemble de ses demandes,

-condamner la société JALIS au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

Par dernières écritures notifiées par RPVA le 23 mars 2022, la société JALIS demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a

. débouté la société DWAS de sa demande d'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial,

. écarté des débats la pièce 30 produite par la société DWAS,

.confirmé la règle du partage de commission dans l'hypothèse de dossiers signés hors zone,

- Réformer le jugement en ce qu'il a :

. dit que pour les contrats financés par un organisme externe, la commission serait calculée sur la base de 30 % du chiffre d'affaires total valorisé par prise de commande et encaissé par la société JALIS en réintégrant dans l'assiette de calcul des commissions les frais financiers que la société JALIS avait déduit,

. débouté la société JALIS de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture du contrat de concession,

En tout état de cause,

. débouter la société DWAS de ses demandes de rappel de commissions,

. débouter la société DWAS de sa demande d'indemnité de rupture, la rupture lui étant imputable,

. subsidiairement, la limiter à la somme de 17.320,03 euros,

A titre infiniment subsidiaire,

. débouter la société DWS de ses demandes indemnitaires, faut pour elle de faire la démonstration de la réalité de son préjudice,

A titre reconventionnel,

. condamner la société DWAS à lui régler la somme de 100.000 euros pour rupture abusive du contrat de concession du 1er mars 2015,

. la condamner à lui verser la somme de 20.000 euros pour procédure abusive,

. la condamner à lui verser la somme de 6.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

Il sera relevé que dans le corps de ses conclusions, la société JALIS, au regard de l'arrêt rendu par la cour de céans le 26 novembre 2020 dans une espèce similaire opposant la société JALIS à la société BUSINESS TEAM DISTRIBUTION, s'en rapporte à la cour en ce que le tribunal de commerce de Marseille a :

- requalifié le contrat en contrat d'agence,

- dit que s'agissant des commissions sur les contrats financés par un organisme externe, les frais financiers déduits par la société JALIS doivent être réintégrés dans l'assiette de calcul,

- débouté la société JALIS de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture abusive du contrat.

et s'en rapporte aux conclusions d'expertise sur le solde des commissions restant dues soit 17.320,03 euros.

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le montant des commissions dues par la société JALIS à la société DWAS

Le contrat conclu entre les parties le 28 mai 2015 stipule en son article 8 et « Annexe REMUNERATION » une rémunération égale à 30 % du chiffre d'affaires HT valorisé par prise de commande, la valorisation étant calculée selon la formule : montant du loyer hors taxe x nombre de mois de la durée contractuelle + montants hors taxe de la facturation des frais technique et d'installation + autre montant de facturation hors taxe = chiffre d'affaires hors taxe.

L'annexe précise en son article 4 que « en cas d'accord écrit entre les parties par affaire, la rémunération appliquée pour la prise de commande d'un prospect sur le territoire de la force de vente directe de JALIS par le Concessionnaire, et la prise de commande d'un prospect sur le territoire de la force de vente directe de JALIS par le Concessionnaire, sera égale à 50 % pour chacune des parties selon les modalités décrites à l'article 2 de la présente annexe. »

En l'absence de toute stipulation contractuelle, il n'existe aucun élément permettant d'affirmer qu'il y a eu accord de volonté entre les cocontractants pour déduire les frais de leaser de l'assiette de calcul en matière de commissions concernant les contrats financés par un tiers.

Les premiers juges qui n'étaient pas en mesure, au vu des pièces présentées, d'établir le calcul des rémunérations, ont fait une application exacte de ces principes en ordonnant une expertise sur les bases de calcul fixées dans le dispositif du jugement.

Sur la requalification du contrat

Le contrat signé entre les parties le 28 mai 2015 est intitulé ' contrat concessionnaire '; cette appellation ne fait pas obstacle à une requalification de la convention dès lors que les stipulations y étant contenues lui donnent en réalité la nature de contrat d'agent commercial au sens des articles L 134-1 et suivant du code de commerce ; il importe peu de déterminer qui est le rédacteur de cet intitulé, ni de déterminer si au moment de la conclusion du contrat les parties avaient ou non conscience du caractère inexact de son intitulé.

La lecture du contrat daté du 28 mai 2015 permet de constater que la société DWAS avait pour mission de promouvoir, commercialiser et de prendre des commandes auprès des prospects et des clients de la société JALIS ; il ne peut être soutenu que cette société DWAS achetait des produits ou des services proposés par la société JALIS, puis les revendait à sa propre clientèle, et qu'elle agissait ainsi en conséquence en qualité de cessionnaire. L'annexe REMUNERATION, qui précise en son article 2 « dans le cas de prise de commande avec une facturation inférieure au PMA (Prix Minimum Autorisé) en vigueur sous l'outil salesForce, et sous réserve de la validation de ladite commande par JALIS, le prime de commissionnement sera égale à 15 % du chiffres affaires HT total valorisé pour ladite commande », démontre que dans son activité à titre permanent de promotion et de commercialisation, la société DWAS disposait d'une indépendance, notamment concernant la fixation des tarifs, à l'égard de la société JALIS ; c'est donc de manière fondée que la société DWAS demande la requalification du contrat en contrat d'agent commercial. Le jugement ayant fait droit à cette demande de requalification sera en conséquence confirmé.

Sur le paiement d'une indemnité de rupture

L'article L 134-12 du Code de commerce dispose qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi ; toutefois, l'article L 134-13 suivant précise que cette réparation n'est pas due lorsque la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent, à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant.

En l'espèce, il n'est ni contesté, ni contestable, que c'est la société DWAS qui, par lettre recommandée en date du 22 avril 2016, a résilié le contrat par elle signé le 28 mai 2015 ; il ressort de cette lettre de résiliation que celle- ci était motivée par le non -paiement de rémunérations à hauteur de la somme de 31.380,92 € ; ainsi qu'il a été rappelé plus haut, les parties ont modifié en cours d'exécution les modalités de rémunération, et ont divergé ensuite sur les conséquences de ces modifications ; les juges du tribunal de commerce ont été contraints d'ordonner de ce fait une expertise afin de déterminer le montant exact de sommes dues par la société JALIS ; il convient d'en déduire que le refus par cette même société de régler l'intégralité des commissions réclamées par son cocontractant résulte de la confusion crée par les deux parties sur les modes de calcul, et non d'une volonté de se soustraire à ses engagements ; le non-paiement de l'intégralité des rémunérations réclamées par l'agent commercial ne peut dès lors être considéré comme une circonstance de la rupture du contrat imputable au mandant ; il convient dès lors de constater que la société DWAS est à l'origine de la résiliation du contrat d'agent commercial, et ne justifie pas de circonstances imputables au mandant ; cette société sera en conséquence déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice.

Sur la demande reconventionnelle de la société JALIS en dommages et intérêts

La société JALIS n'apporte aucun élément concret permettant de constater que la résiliation du contrat d'agent commercial a occasionné une désorganisation de son réseau de distribution ; les échanges de courriels et de lettres démontrent au demeurant que les relations avec la société DWAS n'ont cessé de se dégrader, et qu'en conséquence la société JALIS n'a pu être surprise par la résiliation, et a été en mesure de préparer des nouvelles modalités de distribution de ses services ; la décision l'ayant déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages intérêts sera en conséquence confirmée.

Sur les demandes accessoires

Maître [I] ès qualité succombant en son appel, devra verser une somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

- CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de MARSEILLE en date du 10 octobre 2018 dans l'intégralité de ses dispositions,

Ajoutant à la décision déférée,

- DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

- CONDAMNE maître [I] ès qualité de mandataire judiciaire de la société DWAS à verser à la société JALIS la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- MET les dépens à la charge de maître [I] ès qualité, dont distraction au profit des avocats à la cause.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/01037
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;19.01037 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award