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16/09/2022 | FRANCE | N°21/08052

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 16 septembre 2022, 21/08052


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022



N°2022/.













Rôle N° RG 21/08052 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRO5







Société [4]





C/



CPAM DES BOUCHES-DU-RHONE



















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Yasmina BELKORCHIA





- CPAM DES BOUCHES-DU-RHONE




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/703.





APPELANTE



LA SOCIETE [4] devenue [3] , demeurant [Adresse 6]



représentée par Me Yasmina BELKORCHIA, avocat au barreau de LYON substitué par ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/08052 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRO5

Société [4]

C/

CPAM DES BOUCHES-DU-RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Yasmina BELKORCHIA

- CPAM DES BOUCHES-DU-RHONE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/703.

APPELANTE

LA SOCIETE [4] devenue [3] , demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Yasmina BELKORCHIA, avocat au barreau de LYON substitué par Me Christophe KOLE, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

CPAM DES BOUCHES-DU-RHONE, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme Audrey DUBOIS, Inspectrice juridique en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [X] [P], employée en qualité d'agent de service par la société [5] (aux droits de laquelle se trouve la société [4] devenue [3]), depuis le 02 mai 2012, a été victime le 16 novembre 2015 d'un accident du travail pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

La caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône a déclaré Mme [X] [P] consolidée à la date du 31 mai 2018 et a fixé à 15% son taux d'incapacité permanente partielle (sans retenir d'incidence professionnelle).

La société [2] exposant faire partie du groupe auquel appartient la société [5] devenue la société [4], a saisi le 21 septembre 2018 le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille de sa contestation de cette décision afférente au taux d'incapacité.

Par jugement en date du 03 mai 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* reçu en la forme le recours de la société [4],

* dit que le taux d'incapacité permanente partielle résultant de l'accident du travail dont a été victime Mme [X] [P] est ramené à 10%,

* infirmé la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône en date du 31 août 2018,

* condamné la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône aux dépens.

La société [4] a relevé régulièrement appel, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 21 avril 2021, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [4] devenue [3] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de:

* dire que le taux d'incapacité permanente partielle de 15% est surévalué,

* ramener ce taux à 6%,

* débouter la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône de toutes ses demandes,

* condamner la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône aux dépens.

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 08 juin 2022, soutenues oralement, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de débouter la société [3] de toutes ses demandes.

MOTIFS

L'incapacité permanente partielle correspond au regard de la législation professionnelle à la subsistance d'une infirmité, consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, diminuant de façon permanente la capacité de travail de la victime.

Il résulte de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale que le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

Ainsi, le taux d'incapacité doit s'apprécier à partir de l'infirmité dont la victime est atteinte et d'un correctif tenant compte de l'incidence concrète de cette infirmité sur son activité, et ce en se plaçant à la date de la consolidation.

L'appelante qui se prévaut de l'argumentaire de son médecin conseil soutient que le taux de 15% est surévalué, en l'absence de blocage du poignet dominant en rectitude ou en extension, sans atteinte de la pronosupination.

La caisse, qui se prévaut du chapitre 1.1.2 du barème indicatif relatif aux atteintes des fonctions articulaires, expose que les séquelles indemnisables à la date de la consolidation sont les suites d'une entorse et fracture du poignet opéré à type de limitation résiduelle prédominant en flexion palmaire et inclinaison radiale avec pronosupination conservée.

Elle soutient que le fait accidentel a occasionné une entorse grave du poignet droit avec ruptures ligamentaires et une fracture de tassement de l'extrémité inférieure du radius, et que si l'assurée peut avoir des lésions radiologiques d'arthrose compte tenu de son âge (55 ans lors de son examen clinique) elles devraient concerner également le poignet controlatéral alors que la raideur concerne uniquement le poignet ayant présenté une fracture et une entorse grave.

Elle soutient que son médecin conseil n'a pas surévalué un taux d'incapacité permanente partielle, la raideur du poignet devant être considérée comme imputable au fait accidentel avec les limitations retrouvées d'1/3 de la flexion dorsale et d'1/2 de la flexion palmaire par rapport au côté opposé et une inclinaison radiale limitée des 2/3 et inclinaison cubitale limitée 1/3.

Elle précise accepter le taux ramené à 10% correspondant à la fourchette moyenne face à l'absence de blocage et soutient que l'appelante n'apporte aucun élément médical nouveau.

En l'espèce, le rapport du médecin conseil de la caisse évaluant le taux d'incapacité permanente partielle travail à 10% n'est pas versé aux débats en cause d'appel.

Le certificat médical initial en date du 16 novembre 2015, daté du jour de l'accident du travail, établi par un médecin urgentiste, mentionne: 'entorse du poignet droit. Pas de fracture'.

Il résulte des conclusions de la caisse que son médecin conseil a évalué le taux d'invalidité lié aux séquelles au regard du chapitre 1.1.2 pour l'évaluation du guide barème des accidents du travail.

Ce chapitre indique que les atteintes des fonctions articulaires sont caractérisées par le blocage et la limitation des mouvements des articulations du membre supérieur quelle qu'en soit la cause, et donne une fourchette de 10 à 15% pour la limitation légère de tous les mouvements du membre dominant.

Dans son argumentaire le médecin conseil de l'employeur met l'accent sur l'absence de fracture objectivée comme d'algodystrophie. Il relève que le taux de 15% ne peut être justifié au regard du barème indicatif puisqu'il le prévoit pour un blocage du poignet dominant avec rectitude ou en extension, sans atteinte de la pronosupination alors que l'examen montre une flexion dorsale ou extension limitée au tiers, donc possible de 15 à 25°, une flexion palmaire limitée de moins de la moitié, puisque possible jusqu'à 45°, une inclinaison radiale limitée aux 2/3 donc possible jusqu'à 10° avec une pronosupination conservée, les amplitudes témoignant d'une bonne mobilité résiduelle et non d'un blocage justifiant de ramener à 6%.

Le médecin-consultant désigné par les premiers juges retient au titre des lésions de l'accident du travail une fracture corticale du poignet droit avec lésion ligamentaire opérée sur terrain arthrosique, et précise que la suspicion d'algodystrophie n'a pas été confirmée aux examens, et au titre des séquelles un enraidissement et non un blocage des mouvements du poignet sans atteinte de la pronosupination.

Il propose un taux de 8% compte tenu des 'limitations retrouvées et l'intrication d'une pathologique arthrosique'.

Si le certificat médical initial comme le certificat de prolongation en date du 18 décembre 2015, ne mentionnent pas de fracture ni d'algodystrophie, par contre à compter du certificat de prolongation en date du 04 janvier 2016, la cour constate qu' il est fait état au titre de l'accident du travail du 16 novembre 2015, d'une fracture tassement de l'extrémité inférieure (radius main droite) avec algodystrophie. Ces lésions sont reprises sur les certificats de prolongations des 05/02/2016, 29/02/2016, 15/03/2016, 30/03/2016, et la caisse justifie avoir pris en charge le 12 mai 2016, sur avis de son médecin conseil ces nouvelles lésions.

Par ailleurs, le certificat de prolongation en date du 20 juillet 2017 mentionne une ablation du pisiforme droit et la caisse justifie avoir pris en charge le 14 août 2017, sur avis de son médecin conseil, cette nouvelle lésion.

Le barème indicatif d'invalidité des accidents du travail définit la consolidation comme correspondant au 'moment où, à la suite de l'état transitoire que constitue la période des soins, la lésion se fixe et prend un caractère permanent sinon définitif, tel qu'un traitement n'est plus en principe nécessaire, si ce n'est pour éviter une aggravation, et qu'il est possible d'apprécier un certain degré d'incapacité permanente consécutive à l'accident, sous réserve de rechutes et de révisions possibles'.

En présence d'un état antérieur, ce barème précise la nécessité de distinguer trois situations, les séquelles rattachables à l'accident du travail, étant en principe seules indemnisables, en distinguant selon que:

* l'état pathologique antérieur muet a été révélé à l'occasion de l'accident de travail ou de la maladie professionnelle, sans aggraver les séquelles, et dans ce cas il n'y a pas lieu d'en tenir compte,

* l'état pathologique antérieur muet révélé à l'occasion de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle l'a aggravé, et dans ce cas, il doit y avoir indemnisation de l'aggravation résultant du traumatisme,

* l'état pathologique antérieur était connu avant l'accident ou la maladie professionnelle et se trouve aggravé par celui-ci, dans ce cas cet état connu doit être évalué et l'aggravation indemnisable résultant de l'accident doit prendre en considération les séquelles présentées.

Le taux retenu par le médecin-conseil de la caisse se situe dans la partie haute de la fourchette du barème indicatif pour les limitations légères de tous les mouvements du membre dominant, et celui proposé par le médecin-consultant est inférieur au taux bas de cette fourchette.

Les éléments manifestement repris de l'examen réalisé par le médecin-conseil de la caisse dans le rapport du médecin-consultant font ressortir une flexion dorsale limitée au tiers par rapport à la normale à gauche, une flexion palmaire (80°) à 45° par rapport à 90° à gauche, soit effectivement de moitié, et que l'inclinaison radiale est limitée aux 2/3 et l'inclinaison cubitale est limitée au tiers.

Il résulte de la scintigraphie du 20 avril 2017 citée par le médecin consultant qu'il n'y a pas d'algodystrophie.

La pathologie arthrosique prise en considération par le médecin-consultant pour proposer un taux inférieur à celui de la fourchette basse du barème résulte uniquement, suivant ses annotations, d'un compte rendu daté du 20 juillet 2017 relatif à une opération 'd'une arthrose sévère du poignet droit'.

Si cette opération est postérieure à l'accident du travail du 16 novembre 2015, pour autant le médecin-consultant qui considère qu'il y a eu alors une opération 'd'une arthrose sévère du poignet droit' n'explicite pas sa position alors que le certificat médical fait état d'une ablation du pisiforme droit et que le médecin-conseil a rattaché cette lésion à l'accident du travail.

Ces conclusions non argumentées du médecin-consultant ne peuvent justifier qu'il retienne un état antérieur (arthrose), tout au plus muet avant l'accident du travail, alors qu'aucun des éléments repris du rapport du médecin-conseil de la causse n'en fait mention, ni les conséquences qu'il en tire sans aucune argumentation, pour considérer que le taux doit être fixé en dessous de la fourchette basse du barème.

L'enraidissement incontestable des mouvements du poignet conduit la cour à retenir une limitation légère de tous les mouvements au regard des éléments pris en considération par le guide barème, et à ramener à 10% le taux d'incapacité permanente partielle comme retenu par les premiers juges,

Par contre, compte tenu de la rédaction du dispositif du jugement entrepris, la cour rappelle que le présent litige a pour objet de fixer le taux opposable dans les rapports caisse/employeur et non point de façon générale, c'est à dire également à l'égard de la victime, ce taux.

Il s'ensuit qu'en infirmant la décision de la caisse fixant le taux d'incapacité résultant de l'accident du travail les premiers juges ont statué ultra petita, le taux notifié par la caisse de 15% à Mme [X] [P], victime de l'accident du travail du 16 novembre 2015, étant définitivement acquis à cette dernière.

Par réformation du jugement entrepris, la cour fixe à 10% le taux d'incapacité permanente partielle résultant de l'accident du travail du 16 novembre 2015 survenu à Mme [X] [P], opposable à la société [4] devenue [3].

L'appelante doit donc être déboutée de ses demandes, et succombant en cause d'appel doit être condamnée aux dépens, hormis les frais de la consultation médicale ordonnée en première instance qui demeurent à la charge de la caisse nationale de l'assurance maladie.

PAR CES MOTIFS,

- Réforme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Fixe à 10% le taux d'incapacité permanente partielle opposable à la société [4] devenue [3] résultant de l'accident du travail du 16 novembre 2015 survenu à Mme [X] [P],

- Déboute la société [4] devenue [3] de ses demandes,

- Condamne la société [4] devenue [3] aux dépens, hormis les frais de la consultation ordonnée en première instance demeurant à la charge de la caisse nationale de l'assurance maladie.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/08052
Date de la décision : 16/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-16;21.08052 ?
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