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16/09/2022 | FRANCE | N°21/06396

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 16 septembre 2022, 21/06396


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/06396 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHLWH







Société [4]





C/



CPAM DES BOUCHES DU RHONE





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Gabriel RIGAL



- CPAM



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Po

le social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 15 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/1356.





APPELANTE



Société [4], demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Gabriel RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON substituée par Me Clément BERAUD, avoc...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/06396 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHLWH

Société [4]

C/

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Gabriel RIGAL

- CPAM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 15 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/1356.

APPELANTE

Société [4], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Gabriel RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON substituée par Me Clément BERAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [W] [V] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [L] [F], employé en qualité d'aide coffreur depuis le 05 septembre 2002 par la société [4], a déclaré le 08 avril 2017 être atteint d'une rupture dégénérative de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite en sollicitant la prise en charge à titre de maladie professionnelle et en joignant un certificat médical en date du 05 février 2017.

La caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône a décidé le 26 juin 2017 de prendre en charge la maladie 'rupture de la coiffe des rotateurs épaule droite' (au titre du tableau 57A des maladies professionnelles).

Elle a ensuite déclaré M. [L] [F] consolidé à la date du 22 septembre 2018, puis a fixé à 17% dont 2% au titre de l'incidence professionnelle son taux d'incapacité permanente partielle.

Après rejet le 16 janvier 2018 par la commission de recours amiable de sa contestation, la société [4] a saisi le 16 mars 2018 le tribunal des affaires de sécurité sociale.

Par suite du transfert au 1er janvier 2019, résultant de la loi n°2016-1547 en date du 18 novembre 2016, de l'ensemble des contentieux des tribunaux du contentieux de l'incapacité aux pôles sociaux des tribunaux de grande instance, celui de Marseille a été saisi de ce litige.

Par jugement en date du 15 mars 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* déclaré le recours recevable,

* débouté la société [4] de ses prétentions,

* déclaré opposable à la société [4] la prise en charge au titre du tableau 57A des maladies professionnelles l'affection présentée par M. [L] [F],

* confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône du 16 janvier 2018,

* condamné la société [4] aux dépens.

La société [4] a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Par conclusions réceptionnées par le greffe le 21 juillet 2021, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [4] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de:

* lui déclarer inopposable la maladie du 1er février 2017 déclarée par M. [L] [F] ainsi que toutes les conséquences financières y afférentes,

* débouter la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône de toutes ses demandes,

* condamner la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône aux dépens.

Par conclusions visées par le greffier le 08 juin 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de débouter la société [4] de ses demandes.

MOTIFS

Il résulte des dispositions de l'article L.461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale que toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau, est présumée d'origine professionnelle.

A partir de la date à laquelle le travailleur a cessé d'être exposé à l'action des agents nocifs inscrits aux tableaux, l'article L.461-2 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge par l'organisme social au titre de la maladie professionnelle, pour les maladies correspondant aux travaux énumérés, à la première constatation médicale pendant le délai fixé à chaque tableau.

La première constatation médicale de la maladie concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de la maladie, même si son identification n'intervient que postérieurement au délai de prise en charge et l'article D.461-1-1 du code de la sécurité sociale, applicable au présent litige, dispose que pour l'application du dernier alinéa de l'article L.461-2, la date de la première constatation médicale est la date à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic soit établi. Elle est fixée par le médecin conseil.

Le délai de prise en charge, qui a pour point de départ la date de la fin d'exposition au risque est celui au cours duquel doit intervenir la première constatation médicale, laquelle peut être antérieure à la fin de l'exposition au risque.

La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'étend pendant toute la durée de l'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime.

L'appelante soutient que les conditions du tableau 57A ne sont pas remplies pour la caractérisation médicale de la maladie en ce qu'il exige la réalisation d'une IRM ou en cas de contre-indication à cet examen un arthroscanner, ce qui implique que l'IRM le soit médicalement, alors qu'en l'espèce aucune contre-indication médicale n'est alléguée, ni établie.

Elle soutient en outre que l'instruction menée par la caisse est insuffisante, le salarié n'accomplissant jamais des mouvements sollicitant le décollement du bras par rapport au corps à 60°, l'utilisation d'une perceuse ou d'une ponceuse étant rare et exceptionnelle. Elle relève des contradictions dans les questionnaires employeur/salarié.

La caisse lui oppose que la maladie mentionnée sur le certificat médical initial est désignée au tableau 57A et que son médecin-conseil a retenu sa prise en charge à la lecture d'une arthroscanner en date du 05 janvier 2015 de l'épaule droite tel que mentionné sur le colloque médico-administratif du 21 septembre 2017 ainsi que sur le compte rendu opératoire du 17 février 2017.

Elle soutient qu'aucune IRM ne pouvait être réalisée postérieurement à l'opération pour déterminer la désignation de la maladie et qu'elle s'est ainsi trouvée dans l'impossibilité matérielle d'obtenir ce document pour n'avoir été saisie de la déclaration de maladie professionnelle que le 05 avril 2017 et n'avoir été en possession du certificat médical initial que le 06 juin 2017. Elle ajoute que le compte rendu opératoire étant un document couvert par le secret médical, son médecin-conseil en a eu communication et a ainsi été en possession d'éléments médicaux suffisants pour rendre un avis favorable.

Concernant l'exposition au risque, elle relève que le salarié était affecté au nettoyage du chantier, à l'entretien des dispositifs de sécurité et a affirmé travailler avec le bras droit décollé par rapport au corps au-delà de 60° sur une durée journalière cumulée de 2 à 3.5 heures et a ainsi effectué des travaux l'exposant au risque entrant dans le cadre du tableau n°57.

Enfin, elle précise que le médecin-conseil a retenu la date du 05 janvier 2017 comme étant celle de la première constatation médicale de la maladie et que le salarié a, selon les déclarations de son employeur, travaillé jusqu'au 31 janvier 2017 inclus, qu'ainsi la condition relative au délai de prise en charge est également remplie.

En l'espèce, il résulte du colloque médico-administratif, que la maladie prise en charge est une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite, et que la première constatation médicale est celle du 05 janvier 2017, correspondant à la date d'un arthroscanner réalisé à l'hôpital [2], le médecin-conseil ayant précisé avoir examiné, le compte-rendu opératoire du 17 février 2017 du Dr [U].

La maladie professionnelle 'rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule' inscrite au tableau n° 57 A doit effectivement avoir été objectivée par IRM, ou un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM.

Le délai de prise en charge est fixé à un an, sous réserve d'une exposition d'un an, et ce tableau liste limitativement les travaux susceptibles de la provoquer comme "comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction:

- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé,

ou

- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé."

Il est exact qu'à la date du certificat médical initial, soit au 1er mars 2017, le compte-rendu opératoire, dont le médecin-conseil a eu communication, pour l'avoir acté sur le colloque, qui est du 17 février 2017, établit d'une part que le salarié a déjà été opéré et d'autre part que l'examen complémentaire visé par le tableau ne peut plus être réalisé.

Il est ainsi démontré l'existence d'une impossibilité matérielle pour la caisse, de faire réaliser dans le cadre de l'instruction de la maladie déclarée, une IRM.

Cette situation caractérise un fait indépendant de sa volonté, contre-indiquant médicalement la réalisation de l'IRM qui s'avère impossible, et justifiant que la maladie puisse être objectivée par un arthroscanner complété par le compte-rendu opératoire.

La condition tenant à la durée d'exposition est également remplie à la fois parce que le bulletin de paye du salarié du mois de janvier 2017 établit la reconnaissance par son employeur qu'il a travaillé sur le mois et parce que le salarié a justifié par son bulletin de paye d'octobre 2002, occuper, pour cet employeur, sur un poste d'ouvrier d'exécution 'aide coffreur'.

Les questionnaires salarié et employeur sont concordants sur:

* une date d'embauche au 05 septembre 2002,

* la nature du poste occupé depuis cette date jusqu'au 31 janvier 2017.

Dans son questionnaire l'employeur a indiqué que le salarié n'a pas effectué de mouvements avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé, tout en indiquant cependant qu'il était en charge du nettoyage du chantier, de l'entretien des dispositifs de sécurité, préposé à la benne à béton à l'aide au traçage, sans quantifier chacune de ces tâches quotidiennement.

Il a également fait mention que le salarié travaillait avec la 'benne à béton, potelets ou planche de garde-corps, rarement perfo (pour enficher les potelets dans le béton (si oubli des réservations au coulage), petite perceuse sans fil pour visser les supports de garde corps en tableau'.

Le temps et la fréquence de l'utilisation quotidienne de ces outils n'est pas davantage précisé alors que leur manipulation induit nécessairement des mouvements avec décollement du corps d'un angle supérieur à 60°.

Dès lors, il ne peut être considéré que la caisse aurait insuffisamment instruit la demande de reconnaissance de maladie professionnelle alors que dans son questionnaire le salarié a été plus précis, en faisant état de l'utilisation d'un marteau piqueur, d'une ponceuse, d'une perceuse et d'une disqueuse, en quantifiant, en durée journalière d'activité entre 2 à 3.5 heures les mouvements de l'épaule à plus de 60° et en durée journalière cumulée à plus d'une heure ceux avec les bras au-dessus des épaules.

L'employeur ne contredit pas ces éléments, qui ont conduit les premiers juges à lui déclarer opposable la prise en charge au titre du tableau 57A des maladies professionnelles l'affection présentée par M. [L] [F], et à confirmer la décision de la commission de recours amiable de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône du 16 janvier 2018.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions et l'appelante qui succombe en ses prétentions doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, y ajoutant,

- Condamne la société [4] aux dépens.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/06396
Date de la décision : 16/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-16;21.06396 ?
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