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16/09/2022 | FRANCE | N°21/06096

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 16 septembre 2022, 21/06096


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/06096 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK3I







[J] [I]



C/



CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Pascal ALIAS



- CPCAM















Décision déférée à la Cour :



Jugeme

nt du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 08 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/00567.





APPELANT



Monsieur [J] [I], demeurant [Adresse 1] - [Localité 2]



comparant en personne, assisté de Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AV...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 16 SEPTEMBRE 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/06096 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK3I

[J] [I]

C/

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Pascal ALIAS

- CPCAM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 08 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/00567.

APPELANT

Monsieur [J] [I], demeurant [Adresse 1] - [Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Géraldine DUPAYS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES B OUCHES-DU-RHONE, demeurant [Adresse 8] - [Localité 3]

représentée par Mme [T] [H] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Septembre 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [J] [I] a bénéficié d'indemnités journalières versées par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône à la suite d'un accident du travail du 21 mai 2014, motivé par la poursuite de l'exercice d'une activité rémunérée et non autorisée pendant son indemnisation de l'accident du travail et de ce qu'il a quitté le territoire français à plusieurs reprises sans accord du médecin conseil en 2014 et en 2015.

La caisse lui a notifié par lettre recommandée avec avis de réception en date du 07 septembre 2016 un indu d'un montant total de 10 414.53 euros au titre des indemnités journalières versées le 30 juin 2014 et du 30 juin au 1er juillet 2015, du 1er décembre 2015 au 1er avril 2016, du 03 mai au 03 juin 2016 et du 07 juin au 1er juillet 2016.

Par suite de retenues effectuées par la caisse le solde de l'indu s'élève à 9 566.77 euros.

M. [J] [I] a saisi le 29 décembre 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale de sa contestation de cet indu.

La commission de recours amiable a rejeté le 04 janvier 2018 la contestation de M. [I].

Par suite du transfert au 1er janvier 2019, résultant de la loi n°2016-1547 en date du 18 novembre 2016, de l'ensemble des contentieux des tribunaux du contentieux de l'incapacité aux pôles sociaux des tribunaux de grande instance, celui de [Localité 9] a été saisi de ce litige.

Par jugement en date du 08 mars 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* condamné M. [I] à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône la somme de 9 565.77 euros au titre de l'indu de versement d'indemnités journalières,

* rejeté la demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône aux dépens.

M. [I] a interjeté régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 8 juin 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, M. [I] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour, statuant à nouveau, de:

* annuler la décision par laquelle la caisse sollicite la répétition de la somme de 10 414.53 euros,

* annuler la décision de la commission de recours amiable du 04 janvier 2018,

* condamner la caisse primaire d'assurance maladie aux dépens.

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 08 juin 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour de condamner M. [I] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

L'article L.323-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à l'indu litigieux, disposait notamment que le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire de:

1° - observer les prescriptions du praticien,

2° - se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical prévus à l'article L. 315-2,

3°- respecter les heures de sorties autorisées par le praticien selon des règles et des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat après avis de la Haute Autorité de santé,

4°- s'abstenir de toute activité non autorisée.

En cas d'inobservation volontaire de ces obligations, le bénéficiaire restitue à la caisse les indemnités versées correspondantes.

Il résulte en outre de l'article L.433-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable antérieurement au 1er janvier 2019, que l'indemnité journalière payée à la victime d'un accident du travail est servie en tout ou partie en cas de reprise d'un travail léger autorisé par le médecin traitant, si cette reprise est reconnue par le médecin-conseil de la caisse primaire comme de nature à favoriser la guérison ou la consolidation de la blessure et que l'article L. 323-3-1 est applicable aux arrêts de travail résultant d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle.

L'autorisation de l'exercice de l'activité, doit être préalable, ce qui implique une décision expresse à cet égard du médecin traitant ou de la caisse. Elle ne peut résulter de la seule mention sur le certificat médical prescrivant l'arrêt de travail de l'autorisation de sorties.

A la différence de la sanction financière, les dispositions de l'article L.323-6 4° du code de la sécurité sociale ne subordonnent par l'indu d'indemnités journalières à l'existence d'une rémunération perçue.

L'appelant expose être le gérant de la société [6] (société de transports sanitaires), dans laquelle il était associé au moment des faits à 49%. Il conteste avoir poursuivi une activité professionnelle, avoir accompli des actes de gestion, pendant ses arrêts de travail consécutifs à son accident du travail durant lesquels il a perçu des indemnités journalières, comme le fait d'avoir perçu une rémunération, soutenant que la caisse procède par confusion entre la poursuited'une activité professionnelle et l'existence d'actes de gestion, entre rémunération et perception de dividendes qui sont des revenus d'un capital, et qu'il a un homonyme, gérant de société, domicilié sur [Localité 10].

L'intimée réplique que toute activité doit être expressément et préalablement autorisée, peu important que l'activité ait été rémunérée ou non.

Elle soutient que le contrôle a posteriori de la situation de l'appelant a révélé qu'il a continué d'exercer son activité de manière non autorisée, qu'il a perçu des dividendes manuels de 2 000 euros, qu'il a bénéficié d'importantes entrées d'argent et qu'enfin il avait quitté la circonscription au cours des mois de juin, août et octobre 2014 sans autorisation.

En l'espèce, il est établi et non contesté d'une part que la caisse a versé des indemnités journalières à M. [I], notamment sur la période du 30 juin 2014 au 1er juillet 2016, concernée par l'indu, et d'autre part que cet assuré n'a jamais sollicité, ni obtenu:

* une autorisation médicale pour l'exercice d'une activité quelconque,

* se rendre à l'étranger (ce qui fait obstacle à tout contrôle que la caisse pourrait effectuer).

Ainsi indépendamment de la discussion opposant les parties sur la nature de l'activité exercée (acte de gestion ou non de l'entreprise), sur l'existence d'une rémunération (cette condition étant requise pour l'application d'une sanction financière qui n'a pas été prononcée en l'espèce), le seul fait de se livrer à une activité non autorisée ou de se placer dans une situation faisant obstacle au contrôle de la caisse justifie le caractère indu des indemnités journalières perçues durant ces périodes.

De plus, la cour constate qu'il résulte de ses procès-verbaux d'audition de l'appelant, en date des 25 février 2016 et 25 mars 2016, qu'il a imputé à des 'erreurs de logiciel' la mention de son nom sur des transports sanitaires d'assurés sociaux facturés à la caisse en 2015 alors qu'il était en arrêt de travail (pour son accident du travail du 21 mai 2014) et que sur toute la période qui a suivi cet accident du travail et à tout le moins jusqu'à son audition du 25 février 2016, il a reconnu ne pas avoir 'encore' délégué ses fonctions de gérant.

Il résulte en outre du procès-verbal en date du 20 avril 2016, d'audition de M. [L], son autre associé (détenteur comme lui de 49% des parts de la société), placé également en arrêt de travail du 30 mars 2015 au 26 juin 2015, du 05 août 2015 au 1er septembre 2015 et du 24 septembre au 25 octobre 2015) que 'durant tout le mois de décembre 2015 M. [I] s'est occupé de la régulation et continue de le faire depuis janvier 2016 le mercredi et un samedi sur deux', un chauffeur ayant pris le relais depuis un mois.

S'il résulte de l'attestation de M. [D], qui n'est pas établie dans les formes légales, que ce salarié de la société [6], a remplacé M. [L] pour la régulation de décembre 2015 à mars 2016, pour autant ses bulletins de paye, dont se prévaut l'appelant pour soutenir qu'il lui a été versé 'une majoration pour tâches complémentaires et une prime' ne l'établissent pas, seuls les bulletins de paye de janvier, février et mars 2016 étant versés aux débats ce qui ne permet aucune comparaison avec ses revenus antérieurs et ne couvre pas le mois de décembre 2015.

Il est établi que l'appelant était présent aux assemblées générales des 30 juin 2014, 30 juin 2015 et 30 juin 2016, en a signé les procès-verbaux, sans avoir sollicité préalablement l'autorisation de la caisse de se livrer à cette activité.

Il résulte de l'attestation de l'expert comptable de la société [6] que M. [I]:

* a fait un apport en 2010 en compte courant associé d'un fonds de commerce évalué à 195 000 euros et un 'autre apport' de 12 131 euros cette même année, qu'il a récupéré en 2010 la somme de 156 781 euros, en 2011, celle de 349 euros, en 2012, celle de 1 639 euros, en 2013 celle de 3 003 euros, en 2014 celle de 17 000 euros, en 2015 celle de 33 000 euros et en 2016 celle de 3475 euros, le solde au 31 décembre 2016 de son compte courant associé n'étant plus de que 8 558 euros,

* a perçu:

- à titre de dividendes, les sommes suivantes: 24 000 euros en 2014, 25 000 euros en 2015 et 16 000 euros en 2016,

- à titre de salaires en 2014 la somme de 10 007 euros.

La cour constate que l'attestation de salaire en date du 23 mai 2014, destinée à permettre à la caisse de calculer les indemnités journalières versées consécutivement à l'accident du travail du 21 mai 2014, mentionne un salaire de base et accessoire de 2 319.47 euros sur la période du 01/04/2014 au 30/04/2014 et que l'attestation de l'expert comptable fait ressortir une certaine constance dans le montant cumulé des sommes perçues par M. [I] en 2014 (51 007 euros) et en 2015 (58 000 euros) alors qu'il a été en arrêt de travail pendant sept mois sur douze en 2014, durant toute l'année 2015, étant précisé qu'en 2016, année au cours de laquelle a été diligenté le contrôle, le montant cumulé n'a été que de 19 475 euros.

Le prêt d'argent allégué par M. [I] pour plus de 50 000 euros à sa société n'est nullement établi par cette attestation comptable dont la cour vient de reprendre la teneur.

L'appelant ne contredit plus utilement les renseignements transmis par la société [5] à la caisse établissant des vols aller/retour au nom de M. [J] [I] ([Localité 10] [7]/ Tel Aviv les 27 juin 2014 et 09 juillet 2014 et Marseille/Tel Aviv les 30 août 2014 et 12 octobre 2014), par l'extrait du registre national du commerce et des sociétés établissant que M. [J] [I], né en mai 1972 est gérant d'une société [11] au [Adresse 4] à [Localité 10].

La circonstance que l'Etat d'Israël ne soumette pas l'entrée et le séjour de moins de trois mois des ressortissants français est inopérante à établir l'absence alléguée par l'appelant de tampon d'entrée et de sortie du territoire de cet Etat, pour justifier qu'il ne verse pas ce document comme le lui a demandé la caisse, alors que la copie de son passeport sur la période concernée par les deux vols à destination de la même ville israélienne est seule de nature à établir qu'il n'aurait pas pris les vols listés et été absent du territoire durant ces périodes.

Il s'ensuit d'une part que l'indu notifié est justifié non seulement par l'absence d'autorisation préalable d'exercice de l'activité de gérant que M. [I] a poursuivie pendant la période de l'indu et par les déplacements hors de la circonscription de la caisse (faisant obstacle à tout contrôle de sa part).

Ces faits caractérisent une inobservation volontaire de ses obligations, contrepartie du versement d'indemnités journalières, de solliciter l'autorisation préalable avant d'exercer ou poursuivre une activité quelconque et de se soumettre aux contrôles de la caisse.

L'indu d'indemnités journalières est donc justifié ainsi que retenu par les premiers juges, ce qui justifie la confirmation du jugement entrepris hormis en ce qu'il a condamné la caisse primaire d'assurance maladie aux dépens, la cour rappelant que l'article 696 du code de procédure civile pose le principe que la partie perdante (ce qui n'était pas le cas de la caisse primaire d'assurance maladie en première instance) est condamnée aux dépens.

M. [I] succombant en ses prétentions également en cause d'appel doit être condamné aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône les frais qu'elle a été contrainte d'exposer pour sa défense en cause d'appel, ce qui justifie de lui allouer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement entrepris hormis en ce qu'il a condamné la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône aux dépens,

- Le réforme de ce chef,

Statuant à nouveau du chef réformé et y ajoutant,

- Déboute M. [J] [I] de ses demandes,

- Condamne M. [J] [I] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. [J] [I] aux dépens.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/06096
Date de la décision : 16/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-16;21.06096 ?
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