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15/09/2022 | FRANCE | N°18/07112

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 15 septembre 2022, 18/07112


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 15 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/

CM/FP-D











Rôle N° RG 18/07112 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCK3X







Société SAM STELLA - RESTAURANT TIP TOP





C/



[X] [J]

























Copie exécutoire délivrée

le :

15 SEPTEMBRE 2022

à :

Me Romain CHERFILS, avocat au barreau

D'AIX-EN-

PROVENCE





Me Valérie FOATA, avocat au barreau de NICE























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 13 Avril 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00112.





APPELANTE


...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/

CM/FP-D

Rôle N° RG 18/07112 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCK3X

Société SAM STELLA - RESTAURANT TIP TOP

C/

[X] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

15 SEPTEMBRE 2022

à :

Me Romain CHERFILS, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Me Valérie FOATA, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 13 Avril 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00112.

APPELANTE

Société SAM STELLA - RESTAURANT TIP TOP prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et par Me David PERCHE, avocat au barreau de NICE,

INTIME

Monsieur [X] [J], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Valérie FOATA, avocat au barreau de NICE substitué par Me Jean-nicolas CLEMENT-WATTEBLED, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2022

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [J] (le salarié) de nationalité française et domicilié à [Localité 4] (06) a été engagé par société Sam Stella-restaurant Tip Top (la société), de droit monégasque, située à [Localité 3], selon contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 10 février 2011, avec une autorisation d'embauchage en qualité de serveur jour/nuit à durée indéterminée.

Sa rémunération mensuelle brute était de 2.589,99 euros pour 186,33 heures de travail et la convention collective monégasque est celle des Hôtels, cafés restaurants.

Par courrier du 2 septembre 2016, M. [J] a été licencié pour faute grave au motif d'une altercation et atteinte physique avec son responsable de salle à l'intérieur de l'établissement où il y a eu intervention des pompiers.

Le 3 février 2017, M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Nice en contestation de son licenciement et aux fins de voir la société Sam Stella-restaurant Tip Top condamnée à lui verser un rappel de salaire à titre de majoration des heures de nuit et l'indemnité de congés payés afférente, des dommages et intérêts pour licenciement non valable, une indemnité compensatrice de délai-congé et l'indemnité de congés payés afférente, une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre à lui remettre l'attestation Pôle emploi rectifiée sur le motif de la rupture sous astreinte, avec exécution provisoire et paiement des dépens.

La société Sam Stella-restaurant Tip Top a soulevé in limine litis l'incompétence du conseil de prud'hommes de Nice au profit du tribunal du travail de la Principauté de Monaco, et s'est opposée aux demandes du salarié sollicitant à titre reconventionnel la condamnation de ce dernier à lui verser une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 13 avril 2018, le conseil de prud'hommes de Nice s'est déclaré compétent pour juger le litige selon la loi monégasque et a :

reçu M. [J] dans ses demandes,

dit qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

déclaré le licenciement comme motivé par une faute grave,

constaté que les heures de nuit réalisées n'ont pas été majorées la société Sam Stella-restaurant Tip Top à payer à M. [J] les sommes suivantes :

115.292,16 euros au titre des heures de nuit effectuées du 3 février 2012 au 31 août 2016,

11.529,21 euros au titre des congés payés afférents aux heures de nuit,

ordonné à la société Sam Stella-restaurant Tip Top de remettre à M. [J] une attestation Pôle Emploi rectifiée selon la présente décision,

débouté M. [J] du surplus de ses demandes,

débouté la défenderesse de sa demande reconventionnelle formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, hormis ce que de droit,

fixe les dépens à la charge de la partie défenderesse, y compris les éventuels frais d'exécution.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 24 avril 2018, la société Sam Stella-restaurant Tip Top a interjeté appel dans les formes et délais prescrits, du jugement précité aux fins de réformation de celui-ci en ce qu'il s'est déclaré compétent pour juger le litige selon la loi monégasque, en ce qu'il a reçu M. [J] dans ses demandes, constaté que les heures de nuit réalisées n'ont pas été majorées, condamné la société Sam Stella-restaurant Tip Top à payer à M. [J] les sommes de 115.292,16 euros au titre des heures de nuit effectuées du 3 février 2012 au 31 août 2016, et 11.529,21 euros au titre des congés payés afférents aux heures de nuit, en ce qu'il lui a ordonné de remettre à M. [J] une attestation Pôle Emploi rectifiée selon la présente décision et en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 28 avril 2022, la société Sam Stella-restaurant Tip Top demande à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que le conseil de prud'hommes de Nice est compétent, et statuant à nouveau, de :

dire que le conseil de prud'hommes de Nice est incompétent pour statuer sur le présent litige,

dire que le tribunal de la Principauté de Monaco est compétent pour juger du litige,

en conséquence,

renvoyer M. [J] à se pourvoir devant le Tribunal du travail de Monaco,

subsidiairement sur le fond,

réformer le jugement en ce qu'il a dit que les heures de nuit de M. [J] devaient être majorées,

débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

à titre subsidiaire,

si la réformation n'était pas prononcée, diminuer le montant de 115.292,16 euros à due concurrence du fait d'un mode de calcul erroné et d'une période concernée devant être divisée par deux,

en tout état de cause,

condamner M. [J] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [J] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Cherfils, membre de la Selarl Lexavoué Aix en Provence, avocats associés aux offres de droit.

Par ordonnance du 3 février 2022, le magistrat de la mise en état a :

déclaré irrecevables les conclusions notifiées par M. [J] les 21 novembre 2018 ainsi que les conclusions notifiées par cette même partie les 18 mai 2020 et 26 mai 2020,

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné M. [J] aux dépens de la procédure d'incident.

La clôture des débats a été ordonnée le 9 mai 2022 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 23 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exception d'incompétence

La société reproche au conseil de prud'hommes de Nice de s'être déclaré compétent, sans même motiver sa décision et au mépris des dispositions du règlement (UE) n°1215/2012, du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, qui s'applique à l'employeur domicilié à Monaco.

Le règlement (UE) n°1215/2012, du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, entré en vigueur le 10 janvier 2015 est applicable au litige introduit postérieuremet à cette date. Ce règlement dont l'article 21, relatif aux conflits de compétence en matière de contrats individuels de travail, s'applique, en vertu de son paragraphe 2, aux employeurs qui ne sont pas domiciliés sur le territoire d'un État membre de l'Union.

Lorsque l'employeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un Etat membre, l'article 21 de ce règlement dispose qu'il peut être attrait devant les juridictions d'un Etat membre conformément au paragraphe 1, point b), à savoir, dans un autre Etat membre,

i) devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail ; ou

ii) lorsque le travailleur n'accomplit pas ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur.

Le lieu de travail habituel est l'endroit où le travailleur accomplit la majeure partie de son temps de travail pour le compte de son employeur en tenant compte de l'intégralité de la période d'activité du travailleur. En cas de périodes stables de travail dans des lieux successifs différents, le dernier lieu d'activité devrait être retenu dès lors que selon la volonté claire des parties, il a été décidé que le travailleur y exercerait de façon stable et durable ses activités.

En l'occurrence, le lieu de travail habituel du salarié était exclusivement situé à Monaco, au sein du restaurant le Tip Top, en sorte que les juridictions françaises et le conseil de prud'hommes de Nice ne sont pas compétents pour connaître de ce litige et que la juridiction du travail de monaco est compétente.

Le jugement entrepris qui a déclaré le conseil de prud'hommes de Nice compétent et qui a statué au fond sera infirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

M. [J] succombant sera condamné aux entiers dépens de l'appel et de première instance, sans qu'il y ait lieu à distraction au profit de la selarl lexavoué, ne s'agissant pas d'une procédure avec ministère d'avocat obligatoire.

L'équité commande de faire bénéficier la société Sam Stella-restaurant Tip Top des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner M. [J] à lui verser une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;

Infirme le jugement entrepris dans la limite de la dévolution,

Statuant à nouveau,

Déclare le conseil de prud'hommes de Nice incompétent pour statuer sur le litige au profit de la juridiction du travail de Monaco ;

Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;

Condamne M. [J] à verser à la société Sam Stella-restaurant Tip Top une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [J] aux entiers dépens de première instance et d'appel, sans qu'il y ait lieu à distraction.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/07112
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;18.07112 ?
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