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22/07/2022 | FRANCE | N°21/09066

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 22 juillet 2022, 21/09066


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/09066 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHU22





URSSAF PACA



C/



SAS [2]





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- URSSAF PACA



- Me Roselyne SIMON-THIBAUD









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 03 Déce

mbre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 15/1160.





APPELANTE



URSSAF PACA, demeurant [Adresse 7]



représenté par Mme [I] [H] en vertu d'un pouvoir spécial





INTIMEE



SAS [2] prise en la personne de son représentant légal en exer...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/09066 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHU22

URSSAF PACA

C/

SAS [2]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- URSSAF PACA

- Me Roselyne SIMON-THIBAUD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 03 Décembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 15/1160.

APPELANTE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 7]

représenté par Mme [I] [H] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

SAS [2] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Maïlys LE ROUX, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Mai 2022 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

A l'issue d'un contrôle portant sur l'application des législations de sécurité sociale et d'allocations familiales, d'assurance chômage et garantie des salaires au sein de la société [2], l'URSSAF des Bouches du Rhône lui a notifié une lettre d'observations en date du 03 octobre 2013 comportant neuf chefs de redressement et une observation pour l'avenir, avec rappel de cotisations et contributions pour un montant total de 66 617 euros, au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Après échanges d'observations, l'URSSAF lui a ensuite notifié une mise en demeure en date du 19 décembre 2013 d'un montant total de 74 698 euros, dont 66 617 euros au titre des cotisations et 8 081 euros de majorations de retard.

Après rejet par la commission de recours amiable le 28 novembre 2014 de ses contestations portant sur la mise en demeure et les chefs de redressement 1, 4, 5 et 9 la société [2] a saisi le 12 février 2015 le tribunal des affaires de sécurité sociale.

Par jugement en date du 03 décembre 2020, le tribunal de grande instance de Marseille, pôle social, a:

* 'accueilli la société [2] en ses demandes et prétentions s'agissant des chefs de redressement figurant aux points 4, 5 et 9 de la lettre d'observations du 3 octobre 2013, tenant aux trois transactions lors de la rupture de contrats de travail, aux primes d'adhésion à divers clubs et à l'erreur de totalisation en matière d'assurance chômage et d'AGS dans le cadre de sa contestation de la décision adoptée le 28 novembre 2014 et notifiée le 26 décembre 2014 à l'issue d'une procédure de contrôle diligentée par l'Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales dite l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur et portant pour la période écoulée du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, ayant donné lieu à lettre d'observations du 3 octobre 2013 et s'étant traduite par une mise en demeure adressée le 19 décembre 2013 à hauteur de 74 698 euros dont 66 617 euros à titre de cotisations et 8 081 euros en majorations de retard',

* débouté la société [2] de ses demandes portant sur le chef de redressement portant le numéro 1 sur la lettre d'observations du 3 octobre 2013 et tenant aux frais

professionnels de repas non justifiés,

* renvoyé sur la demande reconventionnelle en paiement de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur les parties en phase amiable afin de déterminer le montant des sommes à recouvrer,

* débouté les parties de l'ensemble de leurs autres prétentions,

* mis les dépens éventuels de l'instance à la charge de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur,

* dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur a relevé régulièrement appel, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées, cet appel partiel ne portant pas sur le chef de jugement ayant débouté la société de sa contestation du chef de redressement n°1.

Par ordonnance du conseiller chargé d'instruire en date du 12 mai 2021, la radiation de l'affaire a été prononcée. Sur demande de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur en date du 16 juin 2021, à laquelle étaient jointes ses conclusions, l'affaire a été réenrôlée.

En l'état de ses conclusions récapitulatives visées par le greffier le 18 mai 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a confirmé le chef de redressement n°1 de la lettre d'observations du 03 octobre 2013 et à son infirmation en ses autres dispositions.

Elle demande à la cour de:

* confirmer le redressement,

* 'déclarer' qu'elle dispose d'une créance d'un montant total de 74 698 euros, soit 66 617 euros de cotisations et 8 081 euros de majorations de retard à l'égard de la société [2],

* condamner la société [2] au paiement de la mise en demeure du 19 décembre 2013,

* condamner la société [2] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamner la société [2] aux dépens.

En l'état de ses conclusions n°3 visées par le greffier le 18 mai 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [2], sollicite:

* la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a annulé les chefs de redressement n°4, 5 et 9,

* et formant appel incident, son infirmation en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation du chef de redressement n°1.

Elle demande à la cour de:

* annuler le chef de redressement n°1 de la lettre d'observations,

* condamner l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS

Par application des dispositions de l'article L.242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à cotisations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entreprise d'un tiers à titre de pourboire.

* s'agissant du chef de redressement n°1: frais professionnels non justifiés-indemnité de repas versée hors situation de déplacement (années 2010, 2011 et 2012, montant total 1 460 euros) :

L'article L.131-4 du code de la sécurité sociale, applicable sur la période du contrôle et abrogé à compter du 1er septembre 2018, permettait l'exonération, sous conditions, de la part contributive de l'employeur dans les titres-restaurant.

La prise en charge des repas par l'employeur s'analyse en un avantage en nature assujetti à cotisations au sens des dispositions précitées de l'article L.242-1 sauf si elles constituent des frais professionnels.

L'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2002 dispose que les frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Il résulte de l'article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 que l'indemnisation des frais professionnels s'effectue:

- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé. Dans ce cas, l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents,

- soit sur la base d'allocations forfaitaires. Dans ce cas, l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans certaines limites, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet, cette condition étant réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants déterminés par ce même arrêté.

L'article 3 de cet arrêté stipule que les indemnités de repas liées à des circonstances de fait entraînant des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas une somme forfaitaire dont le montant varie selon que le salarié est contraint de prendre une restauration sur son lieu effectif de travail, en raison de conditions particulières d'organisation ou d'horaires de travail, ou est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail.

La société [2] expose avoir été pendant plus de vingt ans l'associé égalitaire de la société [5] dans toutes les sociétés exploitant ces restaurants à [Localité 3] et ses environs.

Elle conteste ce chef de redressement portant sur l'assujettissement du coût de repas de certains de ses salariés dans un restaurant [4] exploité par une de ses ex-filiales, basée à proximité de son siège social, au motif qu'étant chargés de diligenter des contrôles sur les conditions d'accueil du public, sur des plages horaires de grande affluence, ses salariés y procédant étaient de fait amenés à déjeuner eux-mêmes sur place.

Elle soutient avoir ainsi pris en charge des frais professionnels et ajoute que les repas ainsi fournis étaient enregistrés et comptabilisés comme des repas pris par les propres salariés de la société [6] qui les lui refacturait ensuite et que cette société a subi également un redressement au titre des repas fournis à ses salariés sur la même période de sorte que les mêmes sommes font l'objet de deux redressements.

L'URSSAF lui oppose que les frais de repas des salariés du siège social ont été pris en charge par la société en franchise de cotisations alors que la situation de déplacement professionnel n'est pas prouvée dans la mesure où le lieu de restauration des salariés du siège est situé à proximité de leur lieu de travail et que la cotisante ne rapporte pas la preuve qu'ils étaient en situation de déplacement et dans l'impossibilité de regagner leur domicile ou leur lieu de travail.

Les inspecteurs du recouvrement ont en l'espèce constaté que la comptabilité de l'entreprise fait apparaître que la société [6] facture à la société [2] le montant de frais de repas pris par les salariés de cette dernière alors que la preuve de la situation de déplacement professionnel de ces salariés n'est pas rapportée et que l'employeur n'a pas utilisé la possibilité de la formule du titre restaurant. Ils en ont déduit que la prise en charge des repas par l'employeur constitue une prise en charge de dépenses personnelles des salariés devant faire l'objet d'une réintégration dans l'assiette des cotisations.

En cause d'appel, la société ne justifie pas plus qu'en première instance, ou qu'au cours du contrôle, que les repas de ses salariés, pris en charge en franchise de cotisations, correspondaient à des dépenses exposées lors de déplacements professionnels, en particulier lors de contrôle portant sur les conditions d'accueil du public, et elle ne justifie pas davantage que les frais de repas de ses propres salariés auraient pu donner lieu à un redressement dans le cadre du contrôle par les inspecteurs du recouvrement de l'activité de cette autre société de son groupe.

Ce chef de redressement est justifié ainsi que retenu par les premiers juges.

* s'agissant du chef de redressement n°4: cotisations-rupture du contrat de travail avec limites d'exonération- transaction (année 2012, montant total 32 041 euros):

Il résulte de l'article L.242-1 alinéa 10 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l'espèce, qu'est exclue de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa, dans la limite d'un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L. 241-3, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités d'un montant supérieur à dix fois le plafond annuel défini par l'article L. 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l'application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail et de celles liées à la cessation forcée des fonctions.

Il s'ensuit que l'indemnité transactionnelle n'est pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts auxquelles renvoie l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale pour être exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, et qu'elle est soumise à cotisations dans les limites posées par cet article 80 duodecies.

Sont exclues des rémunérations imposables par l'article 80 duodecies dans sa rédaction applicable issue de la loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010, notamment, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail, mentionnées aux articles L.1235-2 (procédure de licenciement irrégulière), L.1235-3 (licenciement sans cause réelle et sérieuse) et L.1235-11 à L.1235-13 (procédure de licenciement nulle, violation des règles de consultation lors de licencient économique, non-respect de la priorité de réembauche) du code du travail et les indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Pour annuler ce chef de redressement et considérer que les montants des indemnités versées sont strictement indemnitaires, les premiers juges ont retenu que:

* le protocole transactionnel avec M. [Z] fait suite à un arrêt de la Cour de cassation avec renvoi devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée qui a considéré que le licenciement de ce salarié reposait bien définitivement sur une faute grave avant de le débouter de toutes ses autres demandes en rappel de salaires,

*les deux protocoles transactionnels avec messieurs [T] et [Z] relatent en phase de contestation de la rupture du contrat de travail des faits constitutifs d'un préjudice moral et financier dépassant la question des rémunérations du travail,

alors qu'il n'est pas contesté que le montant des indemnités en litige portant sur les conditions d'exécution du contrat de travail après transaction s'inscrit dans la limite du plafond de l'article 80 duodecies du code général des impôts,

* le protocole transactionnel avec M. [G] ayant exercé des fonctions de directeur juridique et financier de la société [2] expose des faits constitutifs d'un préjudice moral et financier s'étant traduits par la saisine de la justice prud'homale sur des questions indemnitaires.

L'URSSAF soutient que les indemnités transactionnelles entrent par principe dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale à moins que l'employeur ne rapporte la preuve qu'elles concourent pour tout ou partie de leur montant à l'indemnisation d'un préjudice et que nonobstant la qualification retenue par les parties, il convient de rechercher si la somme globale d'une indemnité transactionnelle n'inclut pas des éléments de rémunération soumis à cotisations.

Concernant la transaction conclue avec:

* M. [T], l'organisme de recouvrement relève que ce salarié s'est désisté de sa demande devant le conseil de prud'hommes saisi d'une demande de requalification de sa démission en prise d'acte de rupture, alors que dans le cas d'une démission aucune indemnité n'est due par l'employeur,

* M. [Z], licencié pour faute grave, l'URSSAF souligne que sa contestation devant le conseil de prud'hommes, puis la cour d'appel et la Cour de cassation portait sur le paiement d'une prime exceptionnelle,

* M. [G], l'organisme de recouvrement relève que le contrat de travail a été rompu en période d'essai, alors que dans le cas d'une rupture d'essai aucune indemnité n'est due par l'employeur.

La société lui oppose que les sommes versées au salarié à l'occasion de la rupture du contrat de travail ne sont pas comprises dans l'assiette des cotisations si elles constituent l'indemnisation d'un préjudice et soutient que:

* M. [T] ayant exposé devant le conseil de prud'hommes avoir subi des faits de harcèlement, la transaction portant sur le versement d'une indemnité de 46 000 euros visait à la prémunir d'une condamnation plus lourde et à mettre un terme au litige,

* la transaction avec M. [Z] a été conclue alors qu'elle devait lui régler en exécution de l'arrêt de cassation la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et que, pour éviter les aléas liés à la cassation et à la cour de renvoi, elle a préféré verser une indemnité forfaitaire de 5 000 euros en contrepartie de la renonciation de son ancien salarié à ses demandes,

* l'indemnité transactionnelle de 32 200 euros avait pour objectif de réparer le préjudice subi par M. [G] qui contestait la rupture notifiée pendant la période d'essai, revendiquait la requalification du contrat de prestation de services régularisé en février 2008 en contrat de travail et soutenait avoir fait l'objet d'un licenciement abusif et avoir été victime de travail dissimulé et du non-respect de l'obligation de formation.

Les inspecteurs du recouvrement ont réintégré dans l'assiette des cotisations le montant total des indemnités transactionnelles versées à messieurs [T], [Z] et [G] en 2012 , après avoir:

* rappelé que l'indemnité transactionnelle ne peut être exonérée que pour sa fraction représentative d'une indemnité elle-même susceptible d'être exonérée,

* constaté que la transaction conclue avec M. [T] l'a été après une démission, que celle conclue avec M. [Z] est liée à un paiement de prime et celle conclue avec M. [G] à une rupture de période d'essai.

Lorsque après la rupture du contrat de travail, l'employeur s'engage dans le cadre d'une transaction à verser au salarié une indemnité forfaitaire, il appartient au juge, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de restituer à celle-ci sa véritable qualification et de rechercher si elle ne constitue pas un supplément de rémunération soumis à cotisations.

L'article 2044 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, dispose que la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. La transaction implique l'existence de concessions réciproques.

En l'espèce, la transaction conclue le 04 octobre 2012 entre la société [2] et M. [Y] [T]:

* fait mention de la démission du salarié par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 1er décembre 2010,

* liste les demandes dont il a saisi le 07 février 2011 le conseil de prud'hommes de Marseille au titre des indemnités de préavis (17 325 euros) et de congés payés y afférente (1 733 euros), de licenciement (17 513 euros), pour préjudice moral (138 603 euros) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (138 603 euros),

* fait état d'une alerte du salarié sur ses conditions de travail ayant des répercussions de son état de santé, de l'absence de confirmation par l'enquête diligentée par l'employeur d'agissements répétés ou d'une dégradation des conditions de travail, d'une atteinte aux droits à la dignité ou à la santé physique ou mentale du salarié,

* matérialise l'accord, sur le versement par l'employeur d'une indemnité transactionnelle brute globale de 50 000 euros soit 46 000 euros nette de CSG et de CRDS en contrepartie de la renonciation du salarié à poursuivre le litige.

Le montant de cette indemnité globale au regard de la nature des demandes du salarié soumise à la juridiction prud'homale implique nécessairement qu'elle correspond essentiellement à des indemnités ayant un caractère salarial, devant comme telles être assujetties à cotisations.

La cotisante ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la part, dans l'indemnité versée, correspondant à l'indemnisation alléguée d'un préjudice.

Il s'ensuit que cette indemnité doit être réintégrée dans l'assiette des cotisations.

La transaction conclue le 20 juin 2012 entre la société [2] et M. [Z]:

* fait état du licenciement pour faute grave le 22 décembre 2006 et d'une demande de paiement d'une prime de complément de bilan d'un montant de 7 595 euros,

* fait mention des décisions du conseil de prud'hommes de Marseille du 19 novembre 2008, de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 25 mars 2010, et de la Cour de cassation du 31 janvier 2012, dont l'arrêt a cassé celui de la cour d'appel uniquement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de paiement du solde d'une prime exceptionnelle de 5 595 euros,

* matérialise l'accord, sur le versement par l'employeur d'une indemnité transactionnelle de 5 000 euros (soit 4 600 euros net de CSG et CRDS) 'tous chefs de créances confondus et comprenant également l'offre de paiement de la somme de 2 000 euros mise à la charge de la société au titre de l'article 700 du code de procédure civile', en contrepartie de la renonciation du salarié à poursuivre le litige.

Le montant de cette indemnité globale au regard de la portée de la cassation implique nécessairement qu'elle correspond essentiellement à des indemnités ayant un caractère salarial devant comme telles être assujetties à cotisations.

La société ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la part, dans l'indemnité versée, correspondant à l'indemnisation alléguée d'un préjudice.

Il s'ensuit que cette indemnité doit être réintégrée dans l'assiette des cotisations.

La transaction non datée conclue courant 2012 entre la société [2] et M. [G]:

* fait mention d'un contrat de travail en date du 10 avril 2007, portant sur une embauche en qualité de contrôleur de gestion, puis de la nomination du salarié comme directeur juridique et financier de la société et de la rupture 'en période d'essai contractuelle', le 18 janvier 2008, avec effet au 31 janvier 2008, terme de la période d'essai, et enfin de la saisine du conseil de prud'hommes,

* matérialise l'accord, sur le versement par l'employeur d'une indemnité transactionnelle forfaitaire de 35 000 euros bruts de CSG et CRDS en contrepartie de la renonciation du salarié à poursuivre le litige.

En l'absence de toute précision de la nature des demandes du salarié dont la juridiction prud'homale avait été saisie, la société ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que l'indemnité ainsi versée ne constitue pas un supplément de rémunération soumis à cotisations.

La réintégration de l'intégralité de l'indemnité transactionnelle versée à M. [G] dans l'assiette des cotisations est donc justifiée.

Il s'ensuit que ce chef de redressement est intégralement justifié et que le jugement entrepris qui l'a annulé doit être infirmé de ce chef.

* s'agissant du chef de redressement n°5: primes diverses: adhésions clubs (années 2010 et 2011, montant total 1 870 euros):

Constituent des frais d'entreprise au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, les sommes versées au salarié en remboursement des dépenses, ne découlant pas de son activité, qu'il a exposées à titre exceptionnel et dans l'intérêt de son employeur, alors qu'il résulte de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité, que les frais professionnels, déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Pour annuler ce chef de redressement, les premiers juges ont retenu que les primes diverses d'adhésion à des clubs privés professionnels en 2010 et 2011du directeur salarié de la société présentent un caractère exceptionnel pour ne pas avoir été renouvelées en 2012 et pour être des frais exposés en dehors de l'exercice normal de l'activité du travailleur salarié ou assimilé mais dans l'intérêt de l'entreprise.

L'URSSAF soutient que pour constituer des frais d'entreprise les dépenses engagées par le salarié doivent être justifiées par:

- l'accomplissement des obligations légales ou conventionnelles de l'entreprise,

- la mise en oeuvre des techniques de direction, d'organisation ou de gestion de l'entreprise,

- le développement de la politique commerciale de l'entreprise,

et que pour prétendre à une exonération, la dépense doit être justifiée par la production de pièces comptables attestant de la réalité de la nature et du montant de la dépense ainsi que de la qualité des personnes y ayant participé.

Elle ajoute que la notion de frais d'entreprise qui n'est définie par aucun texte, résulte de leur admission par la circulaire de 2003 et de la jurisprudence de la Cour de cassation, conduisant à la distinguer des frais professionnels, qui sont des dépenses habituelles liées à l'exercice normal de la profession du salarié.

Elle souligne que les inspecteurs du recouvrement ont constaté que la société prend en charge des frais d'adhésion à divers clubs (Navi league, Wine and business...) alors que ces frais d'adhésion à des clubs privés ne présentent pas par ailleurs le caractère de frais professionnels au sens de l'arrêté du 20 décembre 2002. Elle en tire la conséquence qu'ils ne pouvaient être exonérés de charges sociales, puisque ces frais ne concourent pas à l'accomplissement d'obligations légales ou conventionnelles de l'entreprise qui est une holding, ne relèvent pas de la mise en oeuvre des techniques de direction, d'organisation ou de gestion de l'entreprise et n'entrent pas dans sa politique de développement commerciale.

La société lui oppose que la réintégration dans l'assiette des cotisations des frais d'adhésion à certains clubs n'est pas conforme à celle adoptée par le Ministère des affaires sociales du travail et de la solidarité dans la circulaire du 7 janvier 2003 relative à la mise en oeuvre de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, et que pour la jurisprudence l'entreprise doit uniquement rapporter la preuve que les dépenses ont été effectuées dans l'intérêt de la société et en dehors de l'exercice normal de l'activité du salarié.

Elle soutient que jusqu'en 2015, elle a été un des principaux acteurs de la restauration rapide de la région et que dans ce contexte, elle a pris en charge les frais d'adhésion de son directeur (cadre salarié) à plusieurs clubs privés professionnels en 2010 et 2011 pour lui permettre de développer l'image et le réseau de l'entreprise.

Les inspecteurs du recouvrement ont constaté que la société prend en charge dans sa comptabilité des frais d'adhésion à divers clubs privés, pour un montant de 2 885 euros en 2010 et de 3 000 euros en 2011.

La société ne justifie ni du salarié bénéficiaire des adhésions ainsi prises en charge, ni des montants des adhésions, ni enfin des clubs concernés. Ce faisant, elle ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'elle a remboursé à son directeur des dépenses, ne découlant pas de son activité, qu'il a exposées à titre exceptionnel et dans l'intérêt de la société.

Ce chef de redressement dont les montants ne sont pas discutés est justifié ce qui justifie l'infirmation de ce chef du jugement entrepris.

* s'agissant du chef de redressement n°9: assurance chômage et AGS: erreur de totalisation (années 2010, 2011 et 2012, montant total 9 073 euros).

L'article L.5422-13 du code du travail fait obligation à l'employeur d'assurer contre le risque de privation d'emploi tout salarié, y compris les travailleurs salariés détachés à l'étranger ainsi que les travailleurs salariés français expatriés, et l'assiette des contributions versées à l'assurance chômage est définie par l'article 43 du règlement Unedic.

Pour annuler ce chef de redressement, les premiers juges ont retenu, après avoir relevé que la société ne conteste pas l'erreur de totalisation de l'assurance chômage et des AGS, que l'extrait du grand livre de sa comptabilité analytique sur l'année 2010 permet de vérifier que l'écart de rémunérations de M. [D] [N], à la fois mandataire social et salarié, devant servir de base aux cotisations d'assurance chômage ressort de la différence entre les rémunérations globales (125 628 euros) et les montants comptabilisés (93 316.96 euros) et que la réintégration dans la base de calcul de 2010 doit porter sur le différentiel justifié de 33 311 euros et non sur 59 867 euros retenu par les inspecteurs du recouvrement.

L'URSSAF soutient que la vérification des assiettes déclarées auprès de Pôle emploi fait apparaître une divergence avec les montants qui auraient dû être soumis aux cotisations d'assurance chômage, des écarts constatés en 2010 de 59 867 euros, en 2011 de 45 672 euros et en 2012 de 28 999 euros, et que les pièces fournies par la société, pour ne concerner que l'année 2010, ne permettent pas de justifier et de vérifier les déclarations faites.

La société réplique justifier du bulletin de salaire de M. [D] [N] portant récapitulatif de l'ensemble des rémunérations qui lui ont été versées en 2010, dont il résulte que la base utilisée est de 92 316.96 euros de sorte que l'écart sujet à réintégration doit être ramené à 33 311 euros et le rappel de cotisations à 2 885 euros.

Il est exact que les inspecteurs du recouvrement ont procédé au redressement par réintégration dans l'assiette des cotisations, après vérifications auprès de Pôle emploi, de l'écart constaté dans la rémunération, la société ayant en réalité considéré que la rémunération liée au mandat social de son directeur comme celle reposant sur son contrat de travail étaient exonérées de cotisations, alors que seule la rémunération au titre du mandat social devait l'être et ont procédé à la réintégration du différentiel dans l'assiette des cotisations non seulement pour l'année 2010 mais aussi pour les années 2011 et 2012.

La cour n'est pas saisie d'une contestation des réintégrations ainsi opérées au titre des années 2011 et 2012, ni des calculs des régularisations retenues par les inspecteurs du recouvrement soit 3 060 euros (pour 2011) et 1 943 euros (pour 2012).

Il s'ensuit que les montants des redressements ainsi retenus pour les années 2011 et 2012 ne sont pas contestés et que le redressement opéré à leur égard est justifié.

S'agissant de l'année 2010, les inspecteurs du recouvrement ont chiffré à 59 867 euros l'écart entre le montant de la rémunération annuelle versée au titre du contrat de travail et la base déclarée à Pôle emploi de 65 761 euros.

L'extrait de la comptabilité analytique de la société pour la période de janvier à décembre 2010 concernant M. [D] [N] met en évidence au titre de 'Assedic':

* en tranche A un montant cumulé de 23 079.96 euros,

* en tranche B un montant cumulé de 69 240 euros,

ce qui représente sur cette année un total de 92 316.96 euros.

Il s'ensuit que l'écart pour 2010 étant égal à la différence entre:

* la rémunération du contrat de travail : 125 628 euros (retenu par les inspecteurs du recouvrement)

* le montant des rémunérations justifié par les données annuelles du bulletin de paye: 92 316 euros,

est, comme soutenu par la société, de 33 311 euros (et non point 59 867 euros comme retenu par les inspecteurs du recouvrement), ce qui justifie un rappel de cotisations 2010 que la société chiffre à 2 885 euros, montant non contesté par l'URSSAF.

Par conséquent le chef de redressement n°9 est justifié pour un montant total de 7 888 euros (2 885 pour 2010 + 3 060 pour 2011+ 1943 euros pour 2012).

La cour valide ce chef de redressement n°9 pour un montant ramené à 7 888 euros.

Il résulte donc de ce qui précède, que les chefs de redressements non contestés:

* n°2 montant de 663 euros (années 2010, 2011, et 2012),

* n°3 montant de 190 euros (année 2012),

* n°7: montant de 18 369 euros (années 2010, 2011 et 2012),

* n°8: montant de 941 euros (années 2010, 2011 et 2012),

* n°10: montant de 2 010 euros (années 2010, 2011, 2012).

totalisent la somme de 22 173 euros.

La cour vient de valider les chefs de redressements suivants:

* n°1: montant de 1 460 euros (années 2010, 2011 et 2012),

* n°4: montant de 1 32 041 euros (année 2012),

* n°5: montant de 1 870 euros (années 2010 et 2011),

* n°9: montant ramené à 7 888 euros (2010, 2011 et 2012)

qui totalisent la somme de 43 259 euros.

Par infirmation du jugement entrepris, la cour condamne la société [2] au paiement de la somme de 65 432 euros au titre des cotisations et contributions, outre les majorations de retard y afférentes dont l'URSSAF devra recalculer les montants.

Succombant en ses prétentions la société [2] doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter l'application à son bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait par contre inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur les frais exposés pour sa défense ce qui conduit la cour à lui allouer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

- Infirme le jugement entrepris hormis en ce qu'il a débouté la société [2] de sa demande d'annulation du chef de redressement n°1,

- Le confirme de ce chef,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

- Valide les chefs de redressement n° 4 et 5 pour leurs montants,

- Valide le chef de redressement n°9 pour un montant ramené à 7 888 euros,

- Condamne la société [2] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 65 432 euros au titre des cotisations et contributions, outre les majorations de retard y afférentes dont l'URSSAF devra recalculer les montants,

- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

- Condamne la société [2] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Déboute la société [2] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société [2] aux dépens.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/09066
Date de la décision : 22/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-22;21.09066 ?
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