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22/07/2022 | FRANCE | N°21/08409

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 22 juillet 2022, 21/08409


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022



N°2022/.













Rôle N° RG 21/08409 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHSTB







Société [3]





C/



CPAM DU GARD















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Antony VANHAECKE





- CPAM DU GARD















Déc

ision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11890.





APPELANTE



Société [3], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Antony VANHAECKE de la SELARL CEOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Adrien ROUX DIT B...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/08409 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHSTB

Société [3]

C/

CPAM DU GARD

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Antony VANHAECKE

- CPAM DU GARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11890.

APPELANTE

Société [3], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Antony VANHAECKE de la SELARL CEOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Adrien ROUX DIT BUISSON, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

CPAM DU GARD, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [W] [S] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 9 septembre 2016, M. [H], employé en qualité d'agent de service par la société [3], a déclaré avoir été victime d'un accident en descendant au sous-sol pour ramasser des ordures, indiquant qu'il a glissé, que son bras a tapé l'escalier et qu'il a ressenti une douleur aigüe à la main et aux doigts gauches.

Cet accident a été pris en charge selon la législation sur les risques professionnels par la CPAM du Gard selon décision notifiée à la société employeur le 13 septembre 2016.

L'état de santé du salarié a été déclaré consolidé au 15 avril 2018 et par décision du 27 juin 2018, un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10% lui a été reconnu par la CPAM pour des ' séquelles d'une fracture du 3ème métacarpien auche traitée orthopédiquement, compliquée d'un syndrôme neuroalgodystrophique du membre supérieur gauche, survenant chez un droitier, et consistant en un oedème douloureux du 3ème rayon de la main gauche avec déficit de flexion de l'articulation métacarpo-phalangienne correspondante'.

Par courrier recommandé en date du 31 juillet 2018, la société [3] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille d'une contestation du taux d'incapacité permanente partielle opposable.

Par jugement du 3 mai 2021, après consultation confiée au docteur [P], le tribunal judiciaire de Marseille ayant repris l'instance, a :

- reçu le recours de la société,

- dit que le taux d'incapacité permanente partielle opposable à la société [3] et attribué à M. [H] suite à son accident du travail du 9 septembre 2016 est maintenu à 10%,

- confirmé la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard,

- condamné la société [3] aux dépens de l'instance comprenant les frais de consultation médicale.

Par courrier recommandé reçu le 3 juin 2021 au greffe de la cour, la société [3] a régulièrement interjeté appel.

A l'audience du 2 juin 2022,la société [3] reprend oralement les conclusions déposées le jour de l'audience et visées par le greffe. Elle demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a maintenu le taux d'incapacité opposable à 10% et statuant à nouveau, de réduire ce taux à 5% maximum.

Au soutien de sa prétention, elle se fonde sur l'avis du docteur [V] en date du 20 mars 2021 pour faire valoir que les pathologies interférentes et intercurrentes entraînant une légère limitation de l'épaule gauche n'a pas été prise en compte alors que l'opération de l'épaule le 23 août 2017 suppose qu'il n'existait plus, à ce moment là, d'algodystrophie, qui est une contre-indication à la chirurgie.

Elle fait valoir que l'examen du salarié a été incomplet et ne permet ainsi pas d'évaluer le taux d'incapacité, le médecin conseil de la caisse n'ayant pas précisé les mesures circonférentielles permettant d'authentifier l'oedème, n'ayant pas quantifier le déficit de flexion de la métacarpo-phalangienne des 3ème et 4ème rayons, et n'ayant pas non plus mesurer les amplitudes de flexion. Elle ajoute qu'aucune exploration des pinces, des prises ou de la force de préhension ou encore de la sensibilité n'a été effectuée.

Elle se fie à l'évaluation du docteur [V] indiquant que le barème préconise pour la limitation de la mobilité du 3ème doigt dominant un taux entre 4 et 6% mais aucun taux pour le médius non dominant, de sorte que le taux doit au maximum être fixé à 5%.

La caisse primaire d'assurance maladie du Gard reprend oralement les conclusions déposées à l'audience et visées par le greffe. Elle demande à la cour de confirmer le jugement et de débouter la société [3].

Au soutien de sa prétention, la caisse se fonde sur les conclusions de son médecin-conseil confirmée par le rapport de l'expert consulté en première instance pour faire valoir que le taux d'incapacité du salarié est justement évalué à 10%.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

L'article R.434-32 du même code prévoit qu'au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.

Les annexes I et II au code de la sécurité sociale prises en application de cet article définissent les barèmes indicatifs d'invalidité applicables en matière d'accidents du travail et de maladie professionnelle et rappellent que le barème n'a qu'un caractère indicatif. Les taux d'incapacité proposés sont des taux moyens, et le médecin chargé de l'évaluation garde, lorsqu'il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier, l'entière liberté de s'écarter des chiffres du barème ; il doit alors exposer clairement les raisons qui l'y ont conduit.

Ce barème indicatif a pour but de fournir les bases d'estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l'article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole. Il ne saurait se référer en aucune manière aux règles d'évaluation suivies par les tribunaux dans l'appréciation des dommages au titre du droit commun.

Le taux d'incapacité permanente partielle doit s'apprécier à la date de consolidation du 15 avril 2018 pour le cas d'espèce, et les situations postérieures ne peuvent être prises en considération.

Seules les séquelles résultant des lésions consécutives à l'accident du travail pris en charge par la caisse primaire doivent être prises en compte pour l'évaluation du taux d'incapacité permanente attribué à la victime en application de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

Il résulte du barème indicatif d'invalidité en annexe 1 à l'article R.434-32 du code de la sécurité sociale, en son point 1.2.2, relatif aux atteintes des fonctions articulaires des doigts, notamment que la flexion des articulations métacarpo-phalangiennes est de 90°, sauf pour le pouce où elle n'atteint que 110° et que les séquelles seront appréciées selon le degré de limitation de l'enroulement du doigt (dont la pulpe normalement atteint la paume) ou de l'extension de celui-ci.

Il y est précisé que le taux d'incapacité est déterminé selon l'importance de la raideur et si sur le membre dominant la raideur de l'index entraîne un taux d'incapacité indicatif entre 7 et 14%, l'annulaire et le médius entre 4 et 6 % et l'auriculaire entre 4 et 6%, en revanche sur un membre non dominant seule la raideur de l'index entraîne un taux d'incapacité indicatif entre 6 et 12%.

En outre, en point 4.2.6 du barème, relatif aux syndrômes algodystrophiques, il est indiqué que 'les algodystrophies se manifestent :

1° Par des douleurs diffuses, plus ou moins prononcées, à prédominance distale;

2° Par des troubles trophiques : cyanose, hypersudation de la main ou du pied, peau fine avec sclérose du tissu cellulaire sous-cutané. Doigts ou orteils prennent un aspect effilé. Des rétractions tendineuses et aponévrotiques tendent à les fléchir ; on peut parfois percevoir des indurations de la paume ou de la plante. Les muscles de la main, du pied s'atrophient progressivement. Les radiographies montrent une transparence anormale des os, avec de multiples petites géodes. Il peut exister des oedèmes de la main, des indurations ou des ulcérations surtout au pied ;

3° Par des troubles articulaires, avec blocage plus ou moins prononcé des articulations, principalement de l'épaule au membre supérieur et de la cheville au membre inférieur.

En outre, il y est prévu qu'une forme mineure d'algodystrophie du membre supérieur sans troubles trophiques importants et sans troubles neurologiques, entraîne un taux d'incapacité indicatif entre 10 et 20%.

En l'espèce, il résulte de l'avis de l'expert médical consulté en première instance le 31 mars 2021, le docteur [P], qu'elle s'est fondée sur la constatation :

- d'un oedème de la main gauche (R2 R3 R4), d'un déficit de la flexion MCP (métacarpo-phalangienne) de R3 et R4 et un enroulement incomplet du doigt en précisant la distance de la pulpe à 2 cm,

- et d'une limitation de la mobilité de l'épaule gauche en précisant la mesure de cette mobilité pour chaque épaule en antepulsion, abduction, rétropulsion, adduction, rotation interne et rotation externe,

pour conclure à la fracture du 3ème métacarpien de la main gauche traitée orthopédiquement, compliquée d'un syndrome neuroalgodystrophique du membre supérieur gauche survenant chez un droitier, à la persistance d'un oedème de la main et une limitation de la flexion de l'articulation métacarpo-phalangienne du majeur gauche, constituant des séquelles mineures d'une algodystrophie justifiant un taux d'incapacité permanente partielle de 10%.

Il s'en suit que si l'examen du médecin conseil était incomplet aux dires du médecin conseil de la société dans son avis médico-légal du 31 mars 2021, en revanche, l'examen du médecin consulté en première instance, confirmant les conclusions du médecin conseil de la caisse, est à la fois complet et précis.

En outre, c'est en vain que la société se prévaut de la disparition du phénomène algodystrophique avant l'intervention chirurgicale sur l'épaule gauche du salarié le 23 août 2017, dans la mesure où le taux d'incapacité permanente est évalué au jour de la consolidation le 15 avril 2018, soit huit mois plus tard. De surcroît, si selon l'avis médico-légal du docteur [V] produit par la société elle-même, l'algodystrophie du membre supérieur gauche qualifiée de 'modérée' objectivée par la scintigraphie osseuse du 2 février 2017 avait marqué une amélioration soulignée par le chirurgien dans un courrier du 15 juin 2017, il n'est cependant pas démontré que le phénomène avait complètement disparu au jour de la consolidation, de sorte que la constatation des signes de l'algodystrophie décrits tant par le médecin de la caisse en juin 2018 que par le médecin consulté en première instance en 2020, ne serait pas cohérente.

Enfin, il importe peu que le barème indicatif ne prévoit pas de taux d'incapacité pour un blocage du 3ème métacarpien du membre non dominant, dès lors qu'il prévoit qu'une forme mineure d'algodystrophie, médicalement constatée dans le cas d'espèce, entraîne un taux compris entre 10 et 20%.

L'évaluation du médecin consulté n'est pas sérieusement contestée et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

La société [3], succombant à l'instance, sera condamnée au paiement des éventuels dépens de l'appel conformément à l'article 696 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 3 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille en toutes ses dispositions,

Condamne la société [3] au paiement des éventuels dépens de l'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT +


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/08409
Date de la décision : 22/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-22;21.08409 ?
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