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22/07/2022 | FRANCE | N°20/11329

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 22 juillet 2022, 20/11329


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 20/11329 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGRE5





[T] [K]



C/



URSSAF PACA





Copie exécutoire délivrée

le :

à :







- Monsieur [T] [K]



- Me Jean-Marc SOCRATE







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Nice en date du 09 Octobre 2

020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/583.





APPELANT



Monsieur [T] [K], demeurant [Adresse 2]



comparant en personne





INTIMEE





URSSAF PACA [Adresse 1]



représentée par Me Jean-Marc SOCRATE, avocat au barreau de MARSEILLE ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 20/11329 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGRE5

[T] [K]

C/

URSSAF PACA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Monsieur [T] [K]

- Me Jean-Marc SOCRATE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Nice en date du 09 Octobre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/583.

APPELANT

Monsieur [T] [K], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne

INTIMEE

URSSAF PACA [Adresse 1]

représentée par Me Jean-Marc SOCRATE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Christian MULLER, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Mai 2022 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Après rejet le 28 novembre 2018 par la commission de recours amiable de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur de sa contestation de la mise en demeure en date du 28 avril 2018, lui faisant obligation de payer la somme totale de 2 781 euros au titre des cotisations et majorations de retard afférentes au 1er trimestre 2018, M. [T] [K] a saisi le 23 mars 2019 le tribunal de grande instance des Alpes-Maritimes, pôle social, en contestant son affiliation au régime social des travailleurs indépendants.

Par jugement qualifié en dernier ressort en date du 09 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Nice, pôle social, a:

* déclaré la contestation de la commission de recours amiable recevable,

* rejeté celle-ci,

* condamné M. [T] [K] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 2 656 euros (soit 2 519 euros au titre des cotisations et 137 euros au titre des majorations de retard),

* condamné M. [T] [K] au paiement d'une amende civile de 1 000 euros au profit du Trésor public,

* condamné M. [T] [K] aux dépens.

M. [K] a relevé appel.

Par conclusions visées par le greffier le 11 mai 2022, reprises et complétées oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, M. [K] demande à la cour de:

* déclarer son appel recevable,

* infirmer le jugement entrepris,

* déclarer la mise en demeure nulle et de nul effet,

* débouter l'URSSAF de sa demande de validation de la mise en demeure,

* débouter l'URSSAF de toute demande éventuelle de dommages et intérêts,

* condamner l'URSSAF à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

* condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 18 mai 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur soulève à titre principal l'irrecevabilité de l'appel.

A titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris tout en sollicitant la condamnation de M. [T] [K] à lui payer la somme de 2 656 euros, représentant 2 519 euros en principal et 137 euros en majorations de retard.

Elle lui demande en outre de condamner M. [T] [K] au paiement:

- de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- d'une amende civile de 2 000 euros,

- de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS

* sur la recevabilité appel:

Par applications combinées des articles L.142-1, R.142-10 du code de la sécurité sociale et L.211-16 et R.211-3-25 du code de l'organisation judiciaire, les décisions rendues par les pôles sociaux des tribunaux judiciaires spécialement désignés statuent en dernier ressort lorsque le montant de la demande est inférieur ou égal à la somme de 5 000 euros.

L'article L.137-4 du code de la sécurité sociale apporte cependant une dérogation à cette règle pour les différends nés de l'assujettissement aux contributions sociales généralisées, les décisions rendues par les tribunaux judiciaires spécialement désignés en application de l'article L.211-16 du code de l'organisation judiciaire jugeant de ces différends étant susceptibles d'appel quel que soit le montant du litige.

Enfin l'article 536 du code de procédure civile dispose que la qualification inexacte d'un jugement par les juges qui l'ont rendue est sans effet sur le droit d'exercer un recours.

L'URSSAF soulève l'irrecevabilité de l'appel portant sur un jugement rendu en dernier ressort, le litige portant sur la somme de 2 781 euros, l'intérêt du litige ne dépassant pas le taux du dernier ressort.

M. [K] réplique que son appel est recevable, le jugement étant improprement qualifié en dernier ressort, puisque le litige opposant les parties porte sur la contestation d'une mise en demeure afférente à des contributions de CSG et CRDS.

En l'espèce, le litige est consécutif à la notification de la mise en demeure en date du 28 avril 2018 portant sur un montant total de cotisations et majorations de retard de 2 781 euros, dont 628 euros au titre des contributions de CSG-CRDS provisionnelles afférentes à la période du 1er trimestre 2018.

Le jugement entrepris est donc improprement qualifié en dernier ressort, l'appel est donc recevable.

* Sur l'annulation de la mise en demeure:

Par applications combinées des articles L.244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale la mise en demeure doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elle se rapporte.

La motivation de la mise en demeure est exigée à peine de nullité.

L'appelant soutient que la mise en demeure n'est pas motivée, faute d'en énoncer la cause et ou son motif, et ne lui permettait pas de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation. Il relève qu'elle ne précise pas son motif (tel que: absence de versement, insuffisance de versement, majoration de retard complémentaire) et que cette irrégularité entraîne la nullité de plein droit de la mise en demeure sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. Il souligne que par application de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure doit être motivée et constitue un avertissement invitant le travailleur indépendant à régulariser sa situation.

L'organisme de recouvrement ne répond pas au moyen de nullité soulevé.

En l'espèce, la mise en demeure en date du 20 février 2017, porte sur un montant total de 2 781 euros, dont 2 644 euros de cotisations et 137 euros de majorations.

La cause de l'obligation est mentionnée dès lors qu'elle résulte de l'affiliation du cotisant au régime social des travailleurs indépendants, en raison de son activité d'artisan, gérant associé de la Sarl [3] pour les régimes légaux obligatoires couverts (maladie-maternité, indemnités journalière, invalidité-décès, retraite de base, retraite complémentaire, allocations familiales, CSG-CRDS, formation professionnelle) en application des dispositions alors applicables de l'article L.611-1 du code de la sécurité sociale, dont il ne conteste plus l'application.

La cause de son obligation, est en conséquence énoncée par la mention de son numéro d'affiliation mentionné sur la mise en demeure.

La mise en demeure mentionne également par nature de cotisations (maladie maternité, indemnités journalières, invalidité-décès, retraite de base, retraite complémentaire tranche 1, allocations familiales, CSG-CRDS) les montants des cotisations et contributions demandées, en précisant qu'elles sont toutes de nature provisionnelle, et précise la période en indiquant qu'il s'agit du premier trimestre 2018.

Contrairement à ce qu'allègue l'appelant, le motif de la mise en demeure n'est pas exigé pour sa validité.

La mise en demeure est donc régulière en elle-même.

* sur les cotisations, contributions et majorations de retard dont le paiement est sollicité:

En vertu des dispositions de l'article L.131-6 du code de la sécurité sociale, M. [K] est redevable, en raison de son affiliation au régime social des travailleurs indépendants depuis le 02 janvier 2008, des cotisations obligatoires prévues et définies par l'article L.131-6-2 du code de la sécurité sociale, lesquelles sont assises à titre provisionnel sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année, puis lorsque le revenu professionnel est définitivement connu, font l'objet d'une régularisation.

L'organisme de recouvrement détaille les modalités de calcul des cotisations et contributions visées par la mise en demeure en précisant qu'elles ont été calculées sur les bases de revenus pour 2017 de 26 000 euros et 9 179 euros de charges sociales et pour 2018 de 28 050 euros de revenus et 8 843 euros de charges sociales, précise les taux appliqués par cotisations et contributions.

Il indique que pour la période objet du litige, le 1er trimestre 2018, le cotisant n'a effectué aucun versement et que par suite de la déclaration de ses revenus pour l'année 2017, a été annulée une mise en recouvrement de la somme de 125 euros le 23 mai 2018 concernant le 1er trimestre 2018, ramenant le montant des cotisations et contributions dues pour ce trimestre à la somme de 2 519 euros outre 137 euros au titre des majorations de retard, soit au total à 2 656 euros.

La cour n'est pas saisie par l'appelant d'une contestation des sommes ainsi sollicitées.

Par infirmation du jugement entrepris, la cour condamne M. [T] [K] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 2 519 euros au titre des cotisations et contributions afférentes au 1er trimestre 2018 outre la somme de 137 euros au titre des majorations de retard.

* Sur les autres demandes de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur:

Se fondant sur les dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile l'URSSAF sollicite des dommages et intérêts au motif que M. [K] multiplie les procédures sans pour autant contester le calcul ou le montant des cotisations et que la présente procédure est abusive et dilatoire. Elle demande en outre à la cour de prononcer à son encontre une amende civile sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile au motif que la présente procédure s'inscrit dans le cadre d'un mouvement de contestation systématique de l'affiliation de professionnels, caractérisant un abus de procédure.

Les premiers juges ont prononcé à l'encontre de l'appelant une amende civile, au visa de l'article 32-1 du code de procédure civile en retenant qu'il exerce de manière répétitive des recours dans les mêmes termes, ne conteste nullement en réalité les sommes réclamées et que son recours procède d'une attitude dilatoire et d'une contestation systématique du principe de la sécurité sociale qui apparaît abusive et porte atteinte au bon fonctionnement de l'institution judiciaire à l'engorgement de laquelle il participe.

L'exercice d'une action en justice, comme sa défense, ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lequel ne peut être caractérisé par la seule référence à d'autres procédures, auquel l'intéressé aurait été partie, ni par une position de principe qui aurait déjà été jugée juridiquement erronée par la juridiction.

L'amende civile prononcée n'est donc pas plus justifiée sur le fondement des dispositions de l'article 559 du code de procédure civile.

Le jugement entrepris doit en conséquence être réformé sur l'amende civile qui n'a pas lieu d'être prononcée et l'URSSAF qui ne justifie pas de l'existence d'un préjudice doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Il serait par contre inéquitable de laisser à la charge de l'URSSAF les frais qu'elle a été contrainte d'exposer pour sa défense en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

- Dit M. [T] [K] recevable en son appel,

- Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

- Déboute M. [T] [K] de sa demande d'annulation de la mise en demeure,

- Condamne M. [T] [K] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 2 519 euros au titre des cotisations et contributions afférentes au 1er trimestre 2018 outre la somme de 137 euros au titre des majorations de retard,

- Déboute l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur de sa demande de dommages et intérêts,

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une amende civile,

- Condamne M. [T] [K] à payer à l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. [T] [K] aux dépens.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 20/11329
Date de la décision : 22/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-22;20.11329 ?
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