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22/07/2022 | FRANCE | N°20/11194

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 22 juillet 2022, 20/11194


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 20/11194 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGQ2V







[H] [N]



C/



MDPH DES BOUCHES DU RHONE



CONSEIL DEPARTEMENTAL 13



CAF DES BOUCHES DU RHONE









Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Anthony LUNARDI



- MDPH DES BOUCHES DU RHONE





- CONSEIL DEPARTEMENTAL r>




- CAF DES BOUCHES DU RHONE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 28 Octobre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11761.





APPELANTE



Madame [H] [N], demeurant [Adress...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUILLET 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 20/11194 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGQ2V

[H] [N]

C/

MDPH DES BOUCHES DU RHONE

CONSEIL DEPARTEMENTAL 13

CAF DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Anthony LUNARDI

- MDPH DES BOUCHES DU RHONE

- CONSEIL DEPARTEMENTAL

- CAF DES BOUCHES DU RHONE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 28 Octobre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11761.

APPELANTE

Madame [H] [N], demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/9050 du 24/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Anthony LUNARDI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

MDPH DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 3]

non comparant

CONSEIL DEPARTEMENTAL 13, demeurant [Adresse 3]

non comparant

CAF DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 2]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [H] [N], née le 20 juin 1993, a sollicité le 6 février 2018 le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés, de la carte mobilité inclusion- invalidité ainsi que la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) des Bouches-du-Rhône.

La Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) des Bouches-du-Rhône, dans sa séance du 17 mai 2018, a évalué son taux d'incapacité comme étant compris entre 50 et 79 %, sans restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi et a émis un avis favorable pour l'octroi des cartes mobilité inclusion priorité et stationnement, ainsi que pour la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé.

En conséquence, la Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône a notifié à Mme [N] le rejet de sa demande d'allocation aux adultes handicapés et lui a notifié un accord de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé jusqu'au 31 mars 2023.

Le conseil départemental des Bouches-du-Rhône, quant à lui, a adressé à la requérante deux notifications d'attribution des cartes mobilité inclusion priorité et stationnement jusqu'au 31 mars 2023 et une décision de rejet de sa demande de carte mobilité inclusion-invalidité au motif que son taux d'incapacité a été évalué comme étant inférieur à 80 %.

Le 4 juin 2018, la requérante a déposé un recours gracieux auprès de l'organisme décideur qui a donné lieu à un nouveau refus le 28 juin 2018.

Par lettre en date du 26 juillet 2018, Mme [N] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille, devenu aujourd'hui pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, d'un recours tendant à contester, d'une part, la décision de la Maison Départementale des Personnes Handicapées rejetant sa demande d'allocation aux adultes handicapés et, d'autre part, la décision émanant du conseil départemental lui opposant un rejet à sa demande de carte mobilité inclusion- invalidité .

Par jugement du 28 octobre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Nice a :

- reçu en la forme le recours de Mme [N],

- rejeté les demandes de Mme [N] et dit qu'elle présentait, à la date impartie du 6 février 2018, un taux d'incapacité compris entre 50 et 79% sans restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, et ne pouvait dès lors prétendre au bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés ni à l'attribution de la carte mobilité inclusion- invalidité,

- laissé la part des dépens exposés à compter du 1er janvier 2019, à l'exclusion des frais de la consultation médicale ordonnée à l'audience, à la charge de la Maison Départementale des Personnes Handicapées des Bouches-du-Rhône.

Par lettre recommandée expédiée le16 novembre 2020, Mme [N] a interjeté appel de cette décision.

A l'audience du 19 mai 2022, Mme [N] reprend oralement les conclusions déposées le jour de l'audience et visées par le greffe. Elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 28 octobre 2020 en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et jugé qu'elle présentait, à la date impartie du 6 février 2018, un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 % sans restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi,

- statuant à nouveau, annuler les décisions du 29 juin 2018 rendues par la Maison Départementale des Personnes Handicapées et le conseil départemental des Bouches-du-Rhône,

- dire qu'elle présentait un taux d'incapacité entre 50 et 79 % avec restriction substantielle et durable à l'accès à l'emploi, qu'elle peut prétendre au bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés à compter du 6 février 2018 et de la carte invalidité.

Son médecin généraliste, présent à l'audience, indique que l'état de santé de sa patiente ne lui permet pas de travailler compte tenu notamment de son syndrôme poly-malformatif et se dit surpris de l'évaluation de la situation faîte par l'expert consulté en première instance.

La Maison Départementale des Personnes Handicapées, le conseil départemental et la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône, bien que régulièrement convoqués par courriers recommandés avec accusés de réception tous retournés signés le 10 février 2022, n'ont pas comparu.

MOTIFS DE LA DECISION

 

Sur la demande d'allocation aux adultes handicapés

L'article L.821-1 du code de la sécurité sociale prévoit que toute personne dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé à 80 % par l'article D.821-1 perçoit, dans les conditions prévues au titre II du Livre VIII, une allocation aux adultes handicapés.

L'article L.821-2 poursuit ainsi : « L'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes :

1° Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L.821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ;

2° La commission mentionnée à l'article L.146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret.

Le versement de l'allocation aux adultes handicapés au titre du présent article prend fin à l'âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 821-1.»

Le taux visé au 1° ci-dessus est fixé à 50 % par l'article D.821-1.

En l'espèce, Mme [N] ne conteste pas présenter, au jour de sa demande le 6 février 2018, un taux d'incapacité permanente entre 50 et 79% comme l'ont retenu tant la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) des Bouches-du-Rhône, dans sa séance du 17 mai 2018, que le médecin consulté en première instance, le docteur [V], le 24 septembre 2020.

Il convient donc de vérifier si, compte tenu de son handicap, Mme [N] présente une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi qui lui permettrait d'ouvrir droit à l'allocation aux adultes handicapés.

L'article D.821-1-2 du code de l'action sociale et des familles précise que 'la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est appréciée ainsi qu'il suit :

1° La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération:

a) Les déficiences à l'origine du handicap ;

b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;

c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;

d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.

Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.

2° La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :

a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L.144-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;

b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;

c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.

3° La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.

4° Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.

5° Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :

a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L.243-4 code de l'action sociale et des familles ;

b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;

c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L.241-5 du code de l'action sociale et des familles.'

La restriction substantielle et durable de l'accès à l'emploi, suppose notamment une limitation des activités ou des contraintes pour travailler auxquelles il est impossible de répondre par un aménagement du poste de travail ou par la mise en valeur de potentialités d'adaptation.

En l'espèce, il ressort du rapport de consultation du docteur [V] en cours de première instance, le 24 septembre 2020, que Mme [N] présente une scoliose thoracique, un ptosis, des douleurs rotuliennes, une tubérosité tibiale droite et gauche et un rein unique, qui entraînent des troubles locomoteurs et une insuffisance respiratoire restrictive, avec une capacité vitale déterminée à 53%. Il est noté une dyspnée d'effort importante, un rachis cervical enraidi et le reste du rachis signalé douloureux. Il est également indiqué que la patiente suit des séances de kinésithérapie. L'expert retient que l'autonomie de Mme [N] est totalement préservée, et conclut à un taux d'incapacité permanente entre 50 et 79% sans restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisant qu'un emploi adapté à son handicap est possible.

Dans ses conclusions, Mme [N] admet que l'expert consulté a pris en compte toutes les déficiences dont elle souffre.

Les documents médicaux qu'elle produit ne permettent pas de retenir d'autres troubles que ceux déjà pris en compte par l'expert consulté, à savoir des dyspnées d'effort et un périmètre de marche réduit et à plat lié à ses douleurs articulaires.

De même, les documents médicaux ne permettent pas de retenir d'autres contraintes qui soient liées au traitement suivi et à la prise en charge thérapeutique du handicap, que celles de suivre des séances de kinésithérapie. Le 17 mai 2018, il lui était prescrit 30 séances, à raison de trois fois par semaine.

Il en ressort également qu'elle a subi des interventions chirurgicales au niveau du genou en 2011, et pour la mise en place d'une ventilation non invasive en février 2014, qui ne sont pas contemporaines de sa demande d'allocation du 6 février 2018.

Enfin, il résulte des documents médicaux produits que Mme [N] est soumise à des examens cliniques et biologiques réguliers dans le cadre du suivi de sa scoliose évolutive mais qui sont espacés dans le temps : 2014, avril et juillet 2016, puis juillet 2018.

Il s'en suit que les traitements et la prise en charge de son handicap ne constituent pas un obstacle à l'accès à l'emploi.

Mme [N] produit des contrats de travail à durée déterminée, permettant de vérifier qu'elle a travaillé à temps partiel, en qualité d'animatrice d'activités périscolaires en novembre 2017, puis en janvier et février 2018.

Si Mme [N] prétend qu'elle a dû cesser son travail du fait de son handicap, puisqu'elle a souffert d'une subluxation du genou sans phénomène de pivot ou rotation, il n'en demeure pas moins que la restriction de l'accès à l'emploi du fait des déficiences articulaires subies et de la kinésithérapie prescrite en suivant n'a pas duré au moins une année.

En outre, il n'est pas démontrer en quoi le handicap de la requérante l'empêche de rechercher un emploi dépourvu d'effort physique et de déplacement.

Il s'en suit que s'il est incontestable que le handicap de Mme [N] constitue une difficulté importante pour accéder à l'emploi, il n'est pas pour autant démontré que la restriction substantielle d'accès à l'emploi ne peut être surmontée par un aménagement de son poste de travail en qualité d'animatrice d'activités périscolaire ou bien grâce à ses potentialités d'adaptation dans le cadre de ce travail ou dans un autre secteur, ni même que la restriction substantielle subi du fait de la sub-luxation de son genou ait duré plus d'un an.

La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi au sens de la réglementation précitée n'étant donc pas établie, l'allocation aux adultes handicapés ne peut être attribuée sur le fondement de l'article L.821-2 du Code de la sécurité sociale.

Sur la demande de carte mobilité invalidité

Aux termes de l'article L.241-3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2017 :

'I.-La carte " mobilité inclusion " destinée aux personnes physiques est délivrée par le président du conseil départemental au vu de l'appréciation, sur le fondement du 3° du I de l'article L. 241-6, de la commission mentionnée à l'article L. 146-9. Elle peut porter une ou plusieurs des mentions prévues aux 1° à 3° du présent I, à titre définitif ou pour une durée déterminée.

1° La mention " invalidité " est attribuée à toute personne dont le taux d'incapacité permanente est au moins de 80 % ou qui a été classée dans la catégorie mentionnée au 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale. (...)'

En l'espèce, il n'est pas discuté que Mme [N] présente un taux d'incapacité permanente entre 50 et 79%, de sorte qu'elle ne remplit pas les conditions pour ouvrir droit à la carte invalidité.

Le jugement ayant débouté Mme [N] de l'ensemble de ses prétentions sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS,

  

La cour statuant publiquement par décision réputée contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 28 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Marseille, en toutes ses dispositions,

Condamne Mme [N] aux éventuels dépens de l'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 20/11194
Date de la décision : 22/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-22;20.11194 ?
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