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01/07/2022 | FRANCE | N°21/16973

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 01 juillet 2022, 21/16973


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 01 JUILLET 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/16973 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIPLQ







[V] [R]



C/



MDPH DU [Localité 2]





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Sally MERCIER



- MDPH DU [Localité 2]















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal

judiciaire de Toulon en date du 10 Novembre 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 20/422.





APPELANTE



Madame [V] [R], demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Sally MERCIER, avocat au barreau de TOULON





INTIMEE



MDPH DU [Localité 2], demeurant [Adresse...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 01 JUILLET 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/16973 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIPLQ

[V] [R]

C/

MDPH DU [Localité 2]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Sally MERCIER

- MDPH DU [Localité 2]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Toulon en date du 10 Novembre 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 20/422.

APPELANTE

Madame [V] [R], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sally MERCIER, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

MDPH DU [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

non comparant,

dispensée en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseillère

Madame Catherine BREUIL, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Juillet 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [R] présentait une pathologie de l'oreille interne dîte maladie de Ménière et le 16 décembre 2016, elle a été victime d'un accident du travail lui provoquant un choc émotionnel traumatique agravant son état de santé.

Le 28 avril 2016, le statut de travailleur handicapé lui avait été reconnu et elle bénéficiait de la carte priorité jusqu'au 31 juillet 2024.

Après l'accident du travail, elle a été placée en invalidité deuxième catégorie à compter du 1er juin 2017 et le 7 décembre 2017, la carte de priorité a été remplacée par la carte mobilité inclusion priorité et stationnement.

La Maison Départementale des Personnes Handicapées a en outre fait droit à sa demande d'allocation aux adultes handicapés à compter du 1er août 2017 jusqu'au 31 juillet 2024.

Le 22 juillet 2019, Mme [R] a saisi la Maison Départementale des Personnes Handicapées d'une demande de prestation de compensation du handicap (PCR) et a renouvelé ses demandes d'allocation aux adultes handicapés et de carte mobilité inclusion priorité et stationnement.

Le 31 octobre 2019, la Maison Départementale des Personnes Handicapées a notifié sa décision par laquelle elle a admis de renouveler l'AAH et la carte mobilité inclusion mais elle a rejeté la demande de prestation de compensation du handicap.

Le 23 janvier 2020, Mme [R] a présenté un recours amiable et la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) du [Localité 2] a rejeté son recours.

Par requête du 5 mars 2020, Mme [R] a saisi le tribunal judiciaire de Toulon aux fins de faire réévaluer son taux d'incapacité à 80% et d'obtenir le bénéfice de la prestation de compensation du handicap en demandant, subsidiairement, une mesure d'instruction médicale sur ces deux points.

Par jugement avant-dire droit du pôle social du tribunal judiciaire de Toulon en date du 8 avril 2021, il a été ordonné une consultation médicale confiée au docteur [U] [O] aux fins de fixer le taux d'incapacité de la requérante et de donner son avis sur les difficultés graves ou absolues rencontrées par elle du fait de son handicap dans les actes de la vie quotidienne telles que définies dans le référentiel figurant à l'annexe 2-5 du code de l'action sociale et des familles.

Le docteur [O] a rendu son rapport le 8 juin 2021.

Par jugement du 10 novembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon a :

- débouté Mme [R] de sa contestation du taux d'incapacité qui a été fixé par la MDPH comme étant compris entre 50 et 79% à la date de sa demande de prise en charge de son handicap du 22 juillet 2019,

- sursis à statuer sur la demande de bénéfice de la prestation de compensation du handicap, et ordonné avant dire droit une consultation médicale aux fins de recueillir un avis sur les difficultés graves ou absolues pouvant être rencontrées par la requérante après avoir invité la Maison Départementale des Personnes Handicapées à lui transmettre le GEVA et le plan personnalisé de compensation de handicap établis lors de la demande de prise en charge.

Par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 29 novembre 2021, Mme [R], a interjeté appel de cette décision notifiée le 12 novembre précédent.

A l'audience du 12 mai 2022, Mme [R] reprend oralement les conclusions notifiées par RPVA le 22 avril 2022, déposées le jour de l'audience et visées par le greffe . Elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa contestation du taux d'incapacité qui a été fixé par la MDPH comme étant compris entre 50 et 79 % à la date de sa demande de prise en charge de son handicap du 22 juillet 2019,

- statuant à nouveau, annuler le rapport de consultation médicale du docteur [U] [O] en date du 8 juin 2021et fixer le taux d'incapacité à 80 %,

- subsidiairement, ordonner une nouvelle mesure d'instruction aux fins de déterminer le taux d'incapacité.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que le rapport de consultation du docteur [O] est nul compte tenu du fait que le médecin n'a examiné la patiente qu'une seule minute et n'a pas écouté ses doléances conformément à sa mission. Elle ajoute que l'expert n'a pas pris en compte le fait que son état de santé rend nécessaire l'utilisation d'un fauteuil inclinable et d'un appareillage de surdité.

Elle considère que son taux d'incapacité est sous-évalué. Elle s'appuie sur plusieurs certificats médicaux pour démontrer qu'elle souffre d'un asthme sévère nécessitant un traitement lourd, d'une surdité mixte bilatérale sévère justifiant un appareillage, des vertiges et pertes d'équilibre nécessitant un fauteuil inclinable et l'utilisation d'une canne, la maladie de Ménière bilatérale aggravée avec traitement au long cours outre des soins à domicile en cas de forte crise, une photophobie rendant nécessaire le port de verres teintés et des troubles psychiatriques rendant nécessaires un suivi psychothérapeutique et un traitement par psychotropes. Elle s'y appuie également pour faire valoir qu'elle est dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle et que son état n'est pas susceptible d'amélioration. Selon elle, le caractère particulièrement invalidant de ses pathologies lui permet de conclure à la fixation d'un taux d'incapacité à 80%.

La Maison Départementale des Personnes Handicapées du [Localité 2], dispensée de comparaître à l'audience, se réfère au mémoire transmis au greffe de la cour le 7 avril 2022. L'organisme demande à la cour de confirmer la décision déférée.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

 

Le guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant en annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version inchangée depuis 2007, définit trois classes de taux d'incapacité :

- taux inférieur à 50 p. 100 : incapacité modérée n'entraînant pas d'entrave notable dans la vie quotidienne de l'enfant ou de celle de sa famille ;

- taux compris entre 50 p. 100 et 80 p. 100 : incapacité importante entraînant une entrave notable dans la vie quotidienne de l'enfant et de sa famille ;

- taux égal ou supérieur à 80 p. 100 : incapacité majeure, entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de l'enfant et de celle de sa famille.

En introduction du guide, il est précisé qu'il vise à permettre aux utilisateurs de fixer le taux d'incapacité d'une personne quel que soit son âge à partir de l'analyse de ses déficiences et de leurs conséquences dans sa vie quotidienne et non sur la seule nature médicale de l'affection qui en est l'origine.

De même, il y est indiqué que :

'Un taux de 50 % correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.

Un taux d'au moins 80 % correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l'ensemble des actions que doit mettre en oeuvre une personne, vis-à-vis d'elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu'elle doit être aidée totalement ou partiellement, ou surveillée dans leur accomplissement, ou ne les assure qu'avec les plus grandes difficultés, le taux de 80 % est atteint. C'est également le cas lorsqu'il y a déficience sévère avec abolition d'une fonction.

Les actes de la vie quotidienne, parfois qualifiés d'élémentaires ou d'essentiels, sont mentionnés dans les différents chapitres et portent notamment sur les activités suivantes :

- se comporter de façon logique et sensée ;

- se repérer dans le temps et les lieux ;

- assurer son hygiène corporelle ;

- s'habiller et se déshabiller de façon adaptée ;

- manger des aliments préparés ;

- assumer l'hygiène de l'élimination urinaire et fécale ;

- effectuer les mouvements (se lever, s'asseoir, se coucher) et les déplacements (au moins à l'intérieur d'un logement).'

Il est également indiqué que l'approche évaluative en vue de la détermination du taux d'incapacité doit être individualisée et globale, c'est-à-dire que même si le repérage des différentes déficiences est nécessaire, en revanche pour la détermination du taux d'incapacité, les taux mentionnés dans les différents chapitre ne s'ajoutent pas de façon arithmétique sauf précision contraire indiquée dans le chapitre correspondant.

Il convient de préciser en l'espèce que la demande de prise en charge de son handicap, présentée par Mme [R] date du 22 juillet 2019, de sorte qu'il doit être statué sur son état de santé à cette date.

Il ressort du rapport de consultation du docteur [U] [O] en date du 8 juin 2021 qu'il a pris en compte l'âge de la patiente, sa polypathologie, son asthme avec syndrome obstructif, des plaintes psychologiques, un tableau ORL invalidant avec syndrôme de Ménière en notant une dernière hospitalisation en 2018, les doléances de la requérante (polyalgies, instabilité, douleurs du rachis et plaintes psychiques), ses traitements antalgiques et symptomatiques, son examen en mentionnant la tension, la morphologie mince, une marche autonome, et en indiquant que la patiente bien que gênée dans les actes de la vie quotidienne par son handicap, conserve son autonomie, pour conclure au maintien d'un taux d'incapacité entre 50 et 79%.

La mesure s'étant déroulée en présence du médecin conseil de la requérante, répondant à la question médicale du taux d'incapacité posée par le tribunal, après examen sur pièces et clinique de la personne, conformément à l'article R.142-16 du Code de la sécurité sociale, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande tendant à l'annulation de la mesure.

En outre, l'expertise du docteur [T], psychiatre, en date du 21 décembre 2018, ainsi que les certificats médicaux du docteur [N], oto-rhino-laringologiste, en date des 21 juin 2019 et 22 décembre 2020, du docteur [I], pneumologue, en date des 5 juillet 2019, 7 février 2019 et 21 décembre 2020, du docteur [K], psychiatre, en date des 15 juillet 2019 et 23 décembre 2020, du docteur [G], médecin généraliste, homéopathe et allopathe, en date des 26 novembre 2019 et 31 décembre 2020, du docteur [M], pneumologue, en date du 6 juillet 2019, ne font état d'aucun trouble dont Mme [R] aurait pu souffrir au moment de la demande le 22 juillet 2019, et qui n'aurait pas déjà été pris en compte par l'expert consulté en première instance.

Seul le docteur [Y], ohptalmologiste, dans son certificat médical du 12 décembre 2017 fait état d'une photophobie nécessitant le port de verres teintés, sans que cela ait été précisémet repris par le médecin consulté. Mais il n'est aucunement démontré que cette contrainte entrave l'autonomie de la requérante dans la réalisation des actes de la vie quotidienne.

De même, il ressort des deux certificats médicaux du docteur [N], médecin généraliste, en date des 22 décembre 2020, que la pathologie chronique de la patiente rend nécessaire l'utilisation d'un fauteuil à poussée inclinable et un oreiller de maintien partiel de la tête et qu'elle bénéficie d'un appareillage pour surdité de perception bilatérale sévère. Mais il n'est pas non plus démontré que ces appareillages sont indispensables à la requérante pour accomplir les actes de la vie quotidienne tels qu'ils sont répertoriés en annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles.

Enfin, les troubles cognitifs explorés par le docteur [Z], neurologue, faisant suite au tableau ORL au regard du certificat médical du docteur [N] en date du 22 décembre 2019, produit par l'appelante, ils ont été pris en compte dans l'analyse du médecin consulté.

En conséquence, les conclusions du docteur [O] dans son rapport de consultation du 8 juin 2021, complètes et claires, selon lesquelles l'autonomie de la requérante est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne, malgré un tableau clinique marqué par un degré important de gènes, au 22 juillet 2019, ne sont pas sérieusement contestées.

Le taux d'incapacité déterminé par le docteur [O] entre 50 et 79% doit être entériné et l'appelante doit être déboutée de sa demande en fixation de son taux d'incapacité à 80%.

Sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle mesure d'instruction, le jugement sera donc confirmé.

 

PAR CES MOTIFS,

  

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 10 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Toulon en toutes ses dispositions,

Déboute Mme [R] de l'ensemble de ses prétentions,

Condamne Mme [R] aux éventuels dépens de l'appel.

 

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/16973
Date de la décision : 01/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-01;21.16973 ?
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