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30/06/2022 | FRANCE | N°22/00102

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 30 juin 2022, 22/00102


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 30 JUIN 2022



N° 2022/0102







Rôle N° RG 22/00102 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJUDE







[S] [N]





C/



LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER VALVERT

LA PROCUREURE GÉNÉRALE

[O] [R]

































Copie délivrée :

par courrie

l

le : 30 Juin 2022

- au Ministère Public

- jld-ho-Marseille

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le curateur/tuteur











Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 14 juin 2022 enregistrée au répertoire général s...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 30 JUIN 2022

N° 2022/0102

Rôle N° RG 22/00102 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJUDE

[S] [N]

C/

LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER VALVERT

LA PROCUREURE GÉNÉRALE

[O] [R]

Copie délivrée :

par courriel

le : 30 Juin 2022

- au Ministère Public

- jld-ho-Marseille

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le curateur/tuteur

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 14 juin 2022 enregistrée au répertoire général sous le n°22/05617.

APPELANTE

Madame [S] [N]

née le 30 Juin 1944, demeurant Residence du bourg rue du Molage 24A - CH 1860 AIGLE actuellement hospitalisée au centre hospitalier Valvert à Marseille

comparante en personne, assistée de Me Fiona VALENZA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office

INTIME

Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER VALVERT

78 Boulevard des Libérateurs - 13391 MARSEILLE CEDEX 11

non comparant et non représenté

PARTIE JOINTE

Madame LA PROCUREURE GÉNÉRALE

COUR D'APPEL - PALAIS MONCLAR - 13100 AIX- EN-PROVENCE

non comparante, ayant déposée des réquisitions écrites

CURATEUR

Madame [O] [R]

Quai Maria Belgia 18 - Case postale 52 CH -1800 VEVEY -

non comparante et non représentée

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 30 juin 2022, en audience publique, devant Madame Laurence DEPARIS, Conseillère, déléguée par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffière lors des débats : Mme Nezha BOURIABA,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 juin 2022.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 30 juin 2022.

Signée par Madame Laurence DEPARIS, Conseillère et Mme Nezha BOURIABA, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire,

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Mme [S] [N] a fait l'objet le 3 juin 2022 d'une admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier VALVERT à MARSEILLE en péril imminent en l'absence d'un tiers dans le cadre de l'article L.3212-1-II 2°du code de la santé publique.

Par ordonnance rendue le 14 juin 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de MARSEILLE, saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L. 3211-12-1 et suivants du même code, a dit que les soins devaient se poursuivre sous la forme de l'hospitalisation complète.

Par déclaration reçue le 23 juin 2022 au greffe de la chambre de l'urgence, Mme [S] [N] a interjeté appel de la décision précitée.

Par mail en date du 27 juin 2022, le service des curatelles et tutelles professionnelles de la région Est 2 du canton de Vaud en Suisse a fait connaître son inquiétude quant à la situation de Mme [N] qui a quitté l'EMS Tertianum Le Bourg le 23 mai 2022 et demande à ce qu'elle soit rapatriée. Est jointe une décision en date du 17 juin 2022 du juge de paix du canton de Vaud visant la mesure de curatelle de représentation et de gestion dont fait l'objet Mme [S] [N] et prononçant un placement provisoire de cette dernière à des fins d'assistance à l'EMS Tertianum Le Bourg.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 29 juin 2022 à la confirmation de la décision déférée.

A l'audience du 30 juin 2022, Mme [S] [N] comparaît et déclare : 'je viens presque chaque année à Marseille, je reste 10 jours, mais cette année, je me suis sentie mal, l'hôtel ma demandé ma carte verte, je l'ai trouvé et un médecin généraliste m'a ausculté et m'a dit d'aller là . Je prends le taxi pour y aller , mais on s'est trompé , on a eu du mal à trouver quand on est arrivé, il y avait du monde plus de 20 personnes. Un jeune médecin la trentaine m'a pris en charge, il ne m'a pas laissé parlé. Il m'a demandé ou je vivais je lui ai dit que je n'ai pas de logement actuellement et que j'étais de passage , que je vivais en suisse, il a appelé l'assistante sociale. Sur la mesure de protection , elle a été levée le 21 décembre 2021. Je devais chercher un 2 pièces a Genève, mais comme il m'avait fait une mauvaise blague , je suis partie fâchée. Il m'a demandé de montrer ma protection. Oui j'ai de la famille en France, mais je n'ai pas encore cherché. Je suis depuis avril 2021 à l'EMS. Eux ce qu'ils cherchaient c'était de voir si je me droguais, ils pensaient que j'étais démente. Ils cherchaient des stupéfiants. Moi ce que je veux c'est prendre le train et aller jusqu'a Genève. Mais personne là-bas ne m'a aidé, à Genève pour chercher le 2 pièces.

Ca se passe bien à l'ephad. Il me cherche à manger....A l'hôpital à Marseille, ils me disent qu'ils ne peuvent rien faire car je suis en Suisse, et qu'ils ne peuvent faire qu'en France les choses. Ils ont exagéré les choses, et ils veulent faire un placement provisoire. Je ne suis pas d'accord, oui je prends un cachet depuis 30 ans 8mg pour la tension, je veux qu'ils me laissent en paix, ils ont tout cassé, et maintenant je dois tout recommencer.'

Son avocat, entendu, conclut et demande la nullité de la procédure et mainlevée de la mesure en raison de l'absence de notification des mesures d'admission, de maintien et des droits à la patiente qui lui a fait grief. Sur le fond, le dernier certificat du 29 juin 2022 ne dit rien sur le maintien de l'hospitalisation à temps complet et elle n'a aucun traitement sauf ce qu'elle a déclaré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article L. 3211-12-1 I du code de la santé publique prévoit que l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l'Etat dans le département lorsqu'elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l'article L. 3214-3 du présent code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

1° Avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l'article L. 3214-3 du même code. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission ;

En application de l'article L3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Lorsque l'admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

Sur le moyen tiré de l'absence de notification de la décision d'admission et de maintien des soins psychiatriques et des droits

L'article L. 3216-1 du code de la santé publique prévoit que la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire. Le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1. Dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

Par ailleurs, l'article L. 3211-3 du code de la santé publique prévoit qu'avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.

En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.

L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.

En l'espèce, il résulte de la procédure que la décision d'admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent en date du 3 juin 2022 a été notifiée à Mme [N] même si la date de cette notification n'est pas lisible. Par ailleurs la décision de maintien des soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en date du 6 juin 2022 a été notifiée à Mme [N] le 7 juin 2022. S'agissant de ses droits tels qu'ils sont prévus par l'article L. 3211-3 alinéa 5 du code de la santé publique, ils figurent dans les articles 3 à 5 de la décision d'admission et 4 et 5 de la décision de maintien des soins et lui ont par conséquent été notifiés selon les mêmes modalités que les décisions et tel que précisé ci-dessus.

Il convient par conséquent, au vu de ces éléments et du moyen tiré de l'absence de notification des décisions administratives et des droits de la personne hospitalisée sans consentement, de rejeter le moyen soulevé.

Sur la mesure d'hospitalisation complète

Par certificat médical en date du 3 juin 2022, le Dr [J] a relevé que Mme [S] [N] s'est présentée à l'hôpital après dix jours passés à l'hôtel à Marseille en présentant un délire de persécution interprétative et indiquant être partie de Suisse où elle résidait dans une unité de géronto-psychiatrie et évoque un placement sous tutelle en Suisse. Il est noté qu'elle aurait déjà été hospitalisée sous contrainte en Suisse pour un syndrome de Diogène semble-t-il.

Par certificat médical avant 24 heures en date du 4 juin 2022, le Dr [H] mentionne l'existence d'éléments de persécution peu systématisés, une humeur neutre, un déni des troubles, une opposition aux soins sans agitation et la nécessité de poursuivre les soins dans leur forme actuelle.

Par certificat médical de 72 heures en date du 6 juin 2022, le Dr [V] relève un contact et une présentation correct, un comportement calme, un discours organisé même si les raisons de sa venue à Marseille s'apparentent à un voyage pathologique puisqu'elle indique ne pas vouloir rester dans un EPHAD où elle se trouvait. Il est ajouté qu'elle ne semble pas reconnaître le caractère inadapté de son départ soudain de Suisse et sa situation de vulnérabilité.

Par avis en date du 8 juin 2022, le Dr [Z] a confirmé l'existence d'idées délirantes de persécution autour de la mesure de protection et de spoliation. La patiente est décrite comme étant dans le déni des troubles avec une anosognosie totale des difficultés sociales et des troubles psychiatriques.

Enfin, le Dr [Z] a fait parvenirà la juridiction un certificat médical de situation daté du 29 juin 2022 indiquant que Mme [S] [N] présente toujours des troubles persécutés associés aux troubles du jugement mais que le contact est correct.

Il résulte des documents médicaux susvisés et notamment du certificat médical du 29 juin 2022 que Mme [S] [N] présente toujours des troubles persécutés associés à des troubles du jugement, troubles déjà décrits dans l'avis en date du 8 juin 2022 sous la forme d'idées délirantes de persécution autour de la mesure de protection et de spoliation avec déni des troubles, sans qu'une amélioration ne soit notée dans le certificat en date du 29 juin 2022. Ces troubles nécessitent des soins auxquels la patiente ne peut adhérer au vu de ses propos tenus à l'audience et du fait de l'absence de conscience complète de ses troubles.

Les certificats médicaux sus-visés permettent de constater que les conditions fixées par l'article L . 3212-1 du code de la santé publique sont toujours réunies, la décision du premier juge qui a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète doit être confirmée, la demande de sortie de l'intéressé étant prématurée au regard de la gravité de la pathologie et de la fragilité de son état de santé décrites par les médecins.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R. 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire.

Déclarons recevable mais non fondé l'appel formé par [S] [N].

Confirmons la décision déférée rendue le 14 Juin 2022 par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE.

Laissons les dépens à la charge du trésor public.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 22/00102
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;22.00102 ?
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