La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2022 | FRANCE | N°19/11749

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 30 juin 2022, 19/11749


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022

hg

N° 2022/ 334













Rôle N° RG 19/11749 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEUD6







[O] [N]

[L] [N]





C/



[F] [Z]

[C] [G] épouse [Z]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :





SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES



Me Sonia MORENO<

br>






Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix en provence en date du 24 Juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00980.





APPELANTS



Monsieur [O] [N]

demeurant [Adresse 4]



représenté par Me Mireille RODET de la SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES, a...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022

hg

N° 2022/ 334

Rôle N° RG 19/11749 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEUD6

[O] [N]

[L] [N]

C/

[F] [Z]

[C] [G] épouse [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES

Me Sonia MORENO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix en provence en date du 24 Juin 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00980.

APPELANTS

Monsieur [O] [N]

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Mireille RODET de la SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Sylvain MARCHI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [L] [N]

demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Mireille RODET de la SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Sylvain MARCHI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [F] [Z]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/013165 du 08/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

né le 13 Août 1969 à [Localité 7], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Sonia MORENO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [C] [G] épouse [Z]

née le 26 Septembre 1967 à [Localité 6], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Sonia MORENO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Hélène GIAMI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022,

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte du 3 mars 2006, [O] [N] et son épouse [L] (les époux [N]) ont acquis une maison à usage d'habitation, cadastrée [Adresse 4], section CW n°[Cadastre 1] pour 2a 25ca, correspondant au lot n°79 du lotissement

« Les Terrasses des Oliviers » 2ème tranche, régi par un cahier des charges du 22 janvier 1982.

Par acte du 27 mars 2013, [F] [Z] et son épouse [C] [G] ( les époux [Z] ) ont acquis la maison jouxtant à l'est, celle des époux [N], cadastrée [Adresse 5], section CW n°[Cadastre 2] pour 2a 69ca.

Suivant facture du 5 mai 2015, les époux [N] ont fait refaire les enduits des façades de leur maison, et notamment leur mur pignon ouest.

Les époux [Z] ont construit une piscine, un local technique et ont aménagé des plages, à proximité immédiate du mur précité de leurs voisins.

Se plaignant de ces travaux prenant appui sur leur mur et ayant détruit une partie de la semelle de leur maison, les époux [N] ont, par acte d'huissier du 13 novembre 2015, saisi le tribunal de grande instance d'Aix en Provence d'une demande d'expertise judiciaire, qui a donné lieu à la désignation de [S] [W], par ordonnance de référé du 3 février 2016, remplacé par [T] [H] par ordonnance du 12 octobre 2016.

Par assignation du 17 mai 2016, les époux [N] ont sollicité en référé une extension de mission de l'expert à propos de nouvelles constructions et travaux des époux [Z].

Par ordonnance de référé du 28 juin 2016, a été constatée la démolition des ouvrages litigieux, les époux [N] ont été déboutés de leur demande et il a été fait droit à la demande reconventionnelle d'extension de mission formulée par les époux [Z] qui se plaignaient de l'empiétement de la semelle de fondation de la maison des époux [N] sur leur propriété.

L'expert [T] [H] a déposé son rapport le 2 octobre 2017.

Avant et durant l'expertise, une partie des travaux réalisés par les époux [Z] ont été détruits et ils ont révisé leur projet initial, selon déclaration préalable du 17 juin 2016 ayant donné lieu à non opposition

Par acte d'huissier du 14 février 2018, les époux [N] ont fait assigner les époux [Z] devant le tribunal de grande instance d'Aix-en- Provence, afin de voir, suivant leurs dernières conclusions du 16 novembre 2018, au visa des articles 455 du code de procédure civile, 544 et suivants du Code civil, et avec exécution provisoire de la décision:

- Condamner les époux [Z] à détruire toutes les constructions adossées au mur privatif et/ou assise sur la semelle de leur villa ;

-ordonner la remise en état des lieux en recouvrant la semelle de construction de terre tel que c'était avant le décaissement (soit 20 centimètres de hauteur de terre) et en procédant à la réfection du mur pignon dégradé par l'inclusion des ouvrages réalisés par les époux [Z] ;

-le tout sous astreinte de 200 € par jour de retard, à compter de la date à laquelle la décision sera devenue définitive ;

- Condamner les époux [Z] à leur verser la somme de 10 000 € en réparation du préjudice subi du fait des nuisances sonores causées par les travaux de construction et de démolition des différences ouvrage, ainsi que par les vibrations du système de création de la piscine dans le mur pignon de leur maison ;

-débouter les époux [Z] de l'intégralité de leurs demandes fins et conclusions ; - Condamner les époux [Z] au paiement de la somme de 5000 € au titre des frais irrépétibles, outre les dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Par jugement contradictoire du 24 juin 2019, le tribunal de grande instance d'Aix en Provence a statué en ces termes:

«Déboute Monsieur [O] [N] et Madame [L] [N] de l'intégralité de leurs demandes de démolition et de remise en état, fins et conclusions ;

Déboute Monsieur [O] [N] et Madame [L] [N] de l'intégralité de leurs demandes indemnitaires au titre du trouble anormal de voisinage ;

Déboute Madame [C] [G] épouse [Z] et Monsieur [F] [Z] de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles ;

Condamne solidairement Monsieur [O] [N] et Madame [L] [N] à verser à Madame [C] [G] épouse [Z] et Monsieur [F] [Z] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus de toutes les demandes des parties plus amples ou contraires ;

Condamne solidairement Monsieur [O] [N] et Madame [L] [N] aux entiers dépens de la procédure en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.»

Le premier juge a notamment considéré que:

-la limite entre les deux fonds n'était pas connue, faute de bornage, et donc que les empiétements n'étaient pas établis de part et d'autre ;

-le trouble anormal de voisinage n'était pas caractérisé.

Les époux [N] ont fait appel de ce jugement par déclarations des 17 et 18 juillet 2019.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 5 août 2019, la jonction des deux instances enrôlées sous les n°19 11749 et 19 11589 a été ordonnée.

Aux termes de leurs conclusions remises au greffe et notifiées le 21 décembre 2020 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les époux [N] entendent voir, au visa des articles 544 et suivants du code civil, du rapport d'expertise en date du 2 octobre 2017, de l'article 4 du cahier des charges régissant les ventes du lotissement:

-Recevoir les époux [N] en leur appel,

-Les déclarer recevables,

-Réformer le jugement dont appel,

- Condamner les époux [Z] à détruire toutes les constructions adossées au mur privatif et/ ou assise sur la semelle de la villa des époux ;

-Ordonner la remise en état des lieux en recouvrant la semelle de construction de terre tel que c'était avant le décaissement (soit 20 centimètres de hauteur de terre) et en procédant à la réfection du mur pignon dégradé par l'inclusion des ouvrages réalisés par les consorts [Z] ;

le tout sous astreinte de 200 € par jour de retard, à compter de la date à

laquelle la décision sera devenue définitive ;

- Condamner les époux [Z] à verser aux époux [N] la somme de 10 000 €, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des nuisances sonores causées par les travaux de construction et de démolition des différents ouvrages, ainsi que par les vibrations du système de filtration de la piscine dans le mur pignon de la maison des époux [N] ;

- Débouter les époux [Z] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

-Confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté les époux [Z] de leur demande de démolition et de leur demande de condamnation des époux [N] à leur verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- Condamner les consorts [Z] à leur verser une somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Il font notamment valoir que:

-certaines constructions restent adossées à leur mur privatif et/ou sont assises sur la semelle de leur villa, notamment deux maçonneries et une jardinière,

-la semelle de leur villa a été mise à nu et rognée au marteau piqueur sur environ 10 centimètres de large, du fait du décaissement opéré par les époux [Z],

-cela porte atteinte à leur droit de propriété et doit être réparé par la démolition,

-aux termes du cahier des charges, ils bénéficient d'une servitude de tour d'échelle qui est mise à néant par les ouvrages implantés empêchant son exercice,

-ils subissent un trouble anormal de voisinage à raison des nuisances sonores causées par les vibrations du système de filtration de la piscine,

-ils doivent être indemnisés des nuisances subies,

-la demande de démolition de la semelle de leur villa ne peut être accueillie dès lors que le coût des travaux pour y procéder est extravagant et qu'il s'agit d'un élément constituant les fondations de la maison, qui était enterré sous le sol de la propriété [Z],

-de plus, l'étendue de l'empiétement n'est pas précisée.

Aux termes de conclusions remises au greffe et notifiées le 14 mai 2020, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les époux [Z] demandent à la cour, au visa des articles 544 et suivants et 1361 du code civil, du rapport d'expertise en date du 2 octobre 2017, de:

-confirmer partiellement le jugement,

et,

-constater que les ouvrages réalisés par les époux [Z] n'empiètent pas sur la propriété des époux [N].

en conséquence,

-débouter les époux [N] de leur demande de destruction, de remise en état.

-constater que les époux [N] ne rapportent pas la preuve de nuisances sonores et vibratoires, qui en outre excéderaient les inconvénients normaux du voisinage,

en conséquence,

-débouter les époux [N] de leur demande de condamnation des époux [Z] à la somme de 10 000 €.

-recevoir les époux [Z] en leur appel incident,

et,

-dire et juger que la semelle de fondation de la maison des époux [N] empiète sur la propriété des époux [Z] de 25 à 30 centimètres.

en conséquence,

-ordonner la démolition de la semelle de fondation de la maison des époux [N] qui empiète de 25 à 30 centimètres sur leur propriété et les empêche de construire en limite de propriété.

-condamner les époux [N] à leur régler la somme de 30 000 € au titre du préjudice

subi du fait de l'empiétement,

-condamner les époux [N] à leur régler la somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens y compris le coût de l'expertise.

Pour eux :

-leurs travaux n'empiètent pas sur le fonds voisin,

-toutes leurs premières installations et travaux initiaux ont été déposés,

-la demande de démolition ne peut être accueillie,

-la preuve de l'existence d'une servitude de tour d'échelle n'est pas rapportée, et les travaux réalisés n'empêcheraient aucunement les époux [N] d'en bénéficier en cas de besoin,

-la preuve de nuisances sonores ou vibratoires n'est pas rapportée et ne peut permettre l'indemnisation sollicitée,

-l'empiétement de la semelle de la villa est caractérisé, et la démolition doit être ordonnée, les époux [N] n'ayant pas répondu à leur proposition offrant une alternative,

-cet empiétement leur cause un préjudice dont ils doivent être indemnisés.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la configuration des lieux, la limite entre les fonds et les empiétements :

En l'espèce, il n'est pas discuté que le mur pignon ouest de la maison [N] leur appartient.

S'il n'est pas non plus contesté que la semelle de leur villa leur appartient, en revanche, il est soutenu qu'elle empiète sur le fonds [Z].

Cet empiétement serait caractérisé dans l'hypothèse où la face externe du mur pignon ouest de la maison [N] constituerait la limite des deux fonds.

Or, l'expert et le premier juge ont relevé à juste titre qu'il n'était pas justifié d'un bornage, et aucune des parties n'a souhaité donner suite aux suggestions de l'expert d'en réaliser un, en missionnant un géomètre expert.

Il n'est pas non plus produit de plan de division du lotissement qui permettrait de déterminer la limite entre les deux parcelles.

Dans ces conditions, il a été considéré à juste titre que la preuve d'un empiétement de la semelle de la villa [N] sur le fonds [Z] n'était pas rapportée, et que la demande de démolition de cette construction devait être rejetée.

De même la demande de dommages et intérêts fondée sur cet empiétement sera rejetée.

Sur la demande de condamnation des époux [Z] à détruire toutes les constructions adossées au mur privatif et/ou assise sur la semelle de la villa des époux [N] :

Le mur pignon ouest de la maison [N] leur appartient.

De ce fait, aucun élément ne peut y être ancré sans porter atteinte à leur droit de propriété, en infraction avec les dispositions de l'article 544 du code civil.

Les époux [N] se plaignent de deux maçonneries adossées à leur mur privatif et d'une jardinière, assise sur la semelle de leur villa.

Le rapport d'expertise mentionne :

en page 17 :

« Monsieur [N] attire notre attention sur les dommages matériels persistants :

-dommages aux enduits sur le mur pignon,

-démolition partielle de la semelle de fondation, »

en page 23 :

si la face externe du mur pignon ouest constitue la limite de propriété, les travaux réalisés par les époux [Z] n'empiètent pas sur la villa...

les installations litigieuses ont été déposées avant notre visite,

en page 26 deux murs semblent être au contact du pignon de la villa [N] au niveau de leur assise...

Aucun autre élément n'est produit ou précision donnée qui permettrait de définir quelles seraient les constructions à démolir.

A défaut par les époux [N] d'apporter ces éléments et de préciser quelles constructions devraient être détruites, comme étant ancrées dans le mur pignon, ou assises sur la semelle de leur villa, il ne peut être fait droit à la demande de démolition « de toutes constructions » formée par les époux [N].

Les époux [N] entendent également voir condamner les époux [Z] à procéder à la réfection du mur pignon dégradé par l'inclusion des ouvrages réalisés.

Or, sur ce point, il n'est pas justifié des dégradations du mur, ni le rapport d'expertise, ni les photographies produites ne permettant de les mettre en évidence.

Les travaux réalisés par les époux [Z] ont porté atteinte à la semelle de la villa [N] qui a été, selon les observations de l'expert, « rognée au marteau piqueur » (p23 du rapport d'expertise) « partiellement grignotée » (p24).

Les époux [N] demandent que soit ordonnée « la remise en état des lieux en recouvrant la semelle de construction de terre tel que c'était avant le décaissement (soit 20 centimètres de hauteur de terre) ».

Toutefois, dès lors qu'ils agissent sur le fondement du droit de propriété, à défaut de rapporter la preuve que ladite semelle est située sur leur terrain et qu'ils peuvent prétendre à un droit sur la terre la recouvrant, cette demande ne peut qu'être rejetée.

Sur la demande de condamnation des époux [Z] au paiement de 10 000 €:

Les époux [N] forment une demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des nuisances sonores causées par les travaux de construction et de démolition des différents ouvrages, ainsi que par les vibrations du système de filtration de la piscine dans le mur pignon de leur maison.

Ils fondent cette prétention sur le trouble anormal de voisinage.

Aux termes des articles 544 et 651 du code civil, «la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.» et «la loi assujettit les propriétaires à différentes obligations l'un à l'égard de l'autre, indépendamment de toute convention.»

La limite au droit de propriété est que nul ne doit causer à autrui de trouble anormal de voisinage, et qu'à défaut, il en devra réparation, même en l'absence de faute.

L'anormalité du trouble s'apprécie au regard des circonstances locales, et doit présenter un caractère grave et répété, dépassant les inconvénients normaux de voisinage, sans qu'il soit nécessaire de caractériser une faute de son auteur.

Il appartient à celui qui invoque le trouble anormal de voisinage d'en rapporter le preuve.

A cet égard, les époux [N] se fondent sur le rapport d'expertise et sur leurs photographies, ces dernières étant censées démontrer l'importance des travaux réalisés chez leurs voisins, et nécessairement à l'origine de nuisances sonores.

Le premier juge a parfaitement écarté le trouble anormal de voisinage résultant des travaux de construction et de démolition des différents ouvrages, en relevant qu'il était loisible aux propriétaires d'aménager leurs parcelles dans les conditions réglementées et prévisibles pour chacun, sans qu'en soi, de tels travaux constituent un trouble qui excéderait les inconvénients normaux de voisinage.

Il sera ajouté que des photographies de travaux ne sauraient caractériser les nuisances sonores alléguées, qui pour être constitutives d'un trouble anormal de voisinage devraient être subies sur des durées importantes ou à des heures de tranquillité normales.

Concernant les vibrations du système de filtration de la piscine [Z] dans le mur pignon de la maison [N], l'expert a relevé :

« Les travaux réalisés par les époux [Z] sont à l'origine de dommages matériels en bordure de semelle - rognée au marteau piqueur - et de phénomènes acoustiques liés au fonctionnement de la pompe du système de filtration dans un local reposant partiellement sur la semelle du mur pignon de la villa des époux [N].

Ces nuisances acoustiques sont générées par des phénomènes vibratoires à l'origine de la transmission de bruit dit solidien.

Toutefois les installations litigieuses ont été déposées avant notre première visite. »

« Le système de filtration était en fonctionnement : la pompe de filtration de la piscine est posée au sol dans un local implanté en angle nord est de la parcelle [Z], adossé au mur fermant l'auvent nord de la villa [N].

Nous avons relevé à l'oreille que le système était relativement peu bruyant ».

En se fondant uniquement sur ces extraits du rapport d'expertise, les époux [N] prétendent à l'existence d'un trouble anormal de voisinage alors que l'expert relève que les installations de nature à provoquer des phénomènes acoustiques avaient été supprimées dès avant sa première visite et qu'il n'avait pas relevé de bruit important à l'occasion du fonctionnement du système de filtration.

En l'absence de tout autre élément qui permettrait d'établir la mesure et la durée de nuisances acoustiques subies avant la dépose des installations litigieuses, et après celle-ci, il convient de confirmer le jugement ayant écarté la demande de dommages et intérêts des époux [N], ceux-ci étant défaillants à caractériser l'anormalité des nuisances sonores subies dans un environnement de maisons rapprochées, édifiées sur des terrains de faible superficie, dans un lotissement comportant 95 maisons où des constructions peuvent être édifiées contre les limites séparatives.

Sur les dépens et indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Chacune des parties succombe en ses prétentions, et les époux [N] étaient à l'initiative de l'instance.

Pour autant, un certain nombre de constructions réalisées par les époux [Z] ont été démolies avant et pendant l'expertise, (page 22 du rapport) de même que les installations à l'origine de vibrations du système de filtration de la piscine.

Les doléances initiales des époux [N] étaient donc en partie fondées lorsqu'ils ont engagé l'instance, ce qui justifie de faire masse des dépens qui seront supportés par moitié par chacune des parties, y compris les frais d'expertise, et de leur laisser supporter leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il rejette les prétentions de chacune des parties

Infirme le jugement uniquement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau de ce chef,

Vu les articles 696 à 700 du code de procédure civile,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront supportés par moitié par chacune des parties, y compris les frais d'expertise,

Rejette les demandes de chacune des parties en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/11749
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.11749 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award