La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2022 | FRANCE | N°19/03285

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 30 juin 2022, 19/03285


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022



N° 2022/236













N° RG 19/03285 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD3HP







SAS SOGICOMM





C/



Société INDUSTRIAS PONSA





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Pierre-Yves IMPERATORE



Me Laurence BRANDEHO











<

br>
Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 07 Août 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017/02651.





APPELANTE



SAS SOGICOMM, dont le siège social est sis [Adresse 1]



représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022

N° 2022/236

N° RG 19/03285 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD3HP

SAS SOGICOMM

C/

Société INDUSTRIAS PONSA

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Pierre-Yves IMPERATORE

Me Laurence BRANDEHO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 07 Août 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017/02651.

APPELANTE

SAS SOGICOMM, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assisté de Me Amandine BIAGI, avocat au barreau de LYON, plaidant

INTIMEE

Société INDUSTRIAS PONSA, dont le siège social est sis [Adresse 2] (ESPAGNE)

représentée par Me Laurence BRANDEHO, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillèrer

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

La société Industrias Ponsa, société de droit espagnol spécialisée dans la vente de sangles d'arrimage, élingues et harnais de sécurité, a fait appel en 2005 à la société Sogicomm, agent commercial, afin de distribuer ses produits dans plusieurs départements français.

Aucun contrat n'a été signé.

En 2015, M. [J] [V], représentant la société Sogicomm, a indiqué à la société Industrias Ponsa que compte-tenu de problèmes de santé il envisageait de cesser son activité pour la société Industrias Ponsa et proposait de lui présenter un successeur.

Après plusieurs échanges entre les parties, la société Industrias Ponsa a mis fin au contrat d'agent commercial par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 mars 2016 et s'est opposée au versement d'une indemnité de rupture et au versement des commissions en cours.

En l'absence de solution amiable la société Sogicomm a saisi le tribunal de commerce de Draguignan le 5 mai 2017 afin d'obtenir le paiement de rappels de commissions et le paiement d'une indemnité de 51.440,06 euros.

Par jugement en date du 7 août 2018 le tribunal de commerce de Draguignan a condamné la société Industrias Ponsa à payer à la société Sogicomm les sommes suivantes, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

-17.949,68 euros HT à titre de rappel de commissions,

-7.951,10 euros à titre de rappel de commissions sur préavis,

-20.000 euros à titre d'indemnisation des conséquences préjudiciables de la rupture

avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil

-1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens

---------------

Par déclaration en date du 25 février 2019 la société Sogicomm a interjeté appel du jugement.

Par requête en date du 24 mars 2022 la société Industrias Ponsa a saisi le conseiller de la mise en état d'une requête en désignation d'un huissier de justice pour se rendre dans les locaux de la société Sogicomm et de sociétés tierces.

Par ordonnance en date du 7 avril 2022 le conseiller de la mise en état a rejeté la demande.

---------------

Par conclusions enregistrées le 23 octobre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Sogicomm (SAS) soulève l'irrecevabilité des demandes nouvelles présentées par la société Industrias Ponsa en appel et sollicite que cette dernière soit déboutée de l'ensemble de ses demandes.

L'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a limité sa demande indemnitaire à la somme de 20.000 euros, en ce qu'il a fait courir les intérêts légaux à compter de la signification et a réduit sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de le confirmer pour le surplus.

Ainsi, la société Sogicomm sollicite la condamnation de la société Industrias Ponsa au paiement de la somme de 51.440,16 euros au titre de la rupture du contrat d'agent commercial avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, et avec capitalisation, outre au paiement de la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société Sogicomm soulève en premier lieu l'irrecevabilité des demande de la société Industrias Ponsa au titre de l'indemnisation pour fautes graves commises par l'appelante en observant que ces demandes sont nouvelles en cause d'appel.

Sur le fond, elle conteste que la rupture du contrat d'agent commercial serait imputable à sa faute et conteste toute activité pour une société concurrente. Elle rappelle les dispositions des articles L.134-11 et suivants du code de commerce précisant les causes d'exclusion du bénéfice d'une indemnité de rupture pour l'agent commercial.

La société Sogicomm soutient qu'elle a proposé un successeur et n'a pas cessé son activité brutalement, indiquant même la poursuivre à défaut de repreneur. Elle fait valoir que seule la société Industrias Ponsa a pris l'initiative de la rupture.

Elle ajoute que le défaut de cession du mandat à un tiers ne procède que du choix de la société Industrias Ponsa et qu'aucune faute grave n'est démontrée, faute grave qui n'est soulevée que trois ans et demi après la rupture du contrat et n'a jamais été invoquée auparavant.

S'agissant des commissions, la société Sogicomm fait valoir qu'elles sont dues nonobstant l'absence de contrat écrit et qu'il appartient au mandant de fournir les pièces justificatives permettant le calcul de ces commissions.

S'agissant de l'indemnité de rupture la société Sogicomm demande à la cour de la fixer à deux années de commissions conformément aux règles usuelles applicables en la matière.

---------------

Par conclusions enregistrées le 16 août 2019, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Industrias Ponsa demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

-rejeter toutes les demandes de la société Sogicomm, et subsidiairement réduire les indemnités sollicitées à un euro symbolique,

-à titre reconventionnel, condamner la société Sogicomm au paiement de la somme de 70.000 euros à titre de dommages et intérêts,

-condamner la société Sogicomm à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens

La société Industrias Ponsa soutient que la rupture du contrat d'agent commercial émane de la société Sogicomm puisque M. [J] [V] l'avait informée de sa volonté de cesser ses activités et de partir à la retraite. Elle ajoute qu'en outre elle a découvert postérieurement que la société Sogicomm travaillait en parallèle pour une société concurrente, la société Industrias Murtra, et démarchait sa clientèle pour le compte de son concurrent, corroborant son désintérêt et son absence de disponibilité pour l'exercice de son mandat.

La société Industrias Ponsa fait ainsi valoir que la rupture du contrat ne lui est pas imputable, que la société Sogicomm a commis des fautes graves justifiant une résiliation à ses torts et qu'elle était en droit de refuser la cession du mandat à un tiers.

Elle conteste par ailleurs être débitrice de commissions.

A titre reconventionnel, la société Industrias Ponsa dénonce les actes de concurrence déloyale et de parasitisme de la part de la société Sogicomm, répréhensibles même en l'absence de clause de non-concurrence et sollicite l'indemnisation de son préjudice au regard de la perte de clientèle générée.

----------------

Par conclusions postérieures intitulées « avant-dire-droit » enregistrées le 17 mai 2022, la société Industrias Ponsa a conclu au sursis à statuer sur ses demandes jusqu'à la communication des pièces et documents séquestrés chez l'huissier instrumentaire et a sollicité la condamnation de la société Sogicomm au paiement de la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions en réplique enregistrées le 18 mai 2022 la société Sogicomm soulève in limine litis l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer formulée par la société Industrias Ponsa au visa de l'article 74 du code de procédure civile et réitère l'ensemble de ses demandes telles qu'exposées par conclusions du 23 octobre 2020.

----------------

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 25 avril 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 19 mai 2022. La clôture a été reportée au 19 mai 2022.

A cette date, l'affaire a été retenue et mise en délibéré au 30 juin 2022.

MOTIFS

Sur la demande de sursis à statuer :

En application des articles 73, 74 et 108 du code de procédure civile la demande tendant à faire suspendre le cours de l'instance est une exception de procédure qui doit être présentée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir de son auteur.

En conséquence, est irrecevable la demande de sursis à statuer formée par la société Industrias Ponsa dès lors que cette exception est soulevée pour la première fois après que ladite société ait conclu au fond.

Au surplus, les pièces dont se prévaut la société pour solliciter le sursis à statuer résultent d'une requête en désignation d'un huissier de justice dans le cadre de demandes reconventionnelles formées par la société Industias Ponsa au titre d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme dont la recevabilité est contestée.

Sur la recevabilité des demandes nouvelles :

En application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En outre les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.

En l'espèce, il convient d'observer que la société Industias Ponsa ayant formulé par dernières conclusions une demande limitée au sursis à statuer est réputée avoir abandonné les autres chefs de demandes contenus dans ses conclusions antérieures conformément à l'article 954 du code de procédure civile de sorte que la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

A titre surabondant et en tout état de cause, sont irrecevables les demandes indemnitaires formulées pour la première fois en cause d'appel par la société Industrias Ponsa à hauteur de 70.000 euros au titre d'actes de concurrence déloyale ou de parasitisme, étant relevé en outre, que l'intimée n'a pas répliqué au moyen d'irrecevabilité de ses demandes nouvelles soulevé par l'appelante.

Sur l'indemnité compensatrice :

Aux termes des articles L134-12 et L134-13 du code de commerce en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

Par exception, cette indemnité n'est pas due lorsque la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ou fait suite à la cession à un tiers du contrat d'agent commercial, en accord avec le mandant.

Par ailleurs, elle n'est pas due si la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, à l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée.

En l'espèce, l'effet dévolutif de l'appel n'étant limité qu'au quantum de l'indemnité de rupture au regard des dernières conclusions de la société Industrias Ponsa, il n'y a lieu de statuer que sur ce chef de jugement critiqué par la société Sogicomm, appelante.

Il est d'usage que le montant de l'indemnité de rupture soit évalué à deux ans de commissions brutes calculées sur la base des commissions perçues soit au cours des deux dernières années d'exécution du contrat, soit sur la moyenne des commissions des trois dernières années.

La société Sogicomm justifie des commissions versées par le mandant entre les années 2011 et 2015 pour une moyenne annuelle de 25.720,08 euros de sorte qu'elle est bien-fondée à solliciter une indemnité de rupture égale à la somme de 51.440,16 euros, notamment en l'état de l'ancienneté des relations existant entre les parties.

En application de l'article 1231-7 du code civil (1153-1 ancien) les sommes allouées à titre indemnitaire portent intérêts à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En l'espèce, il y a lieu de fixer le point de départ des intérêts à la date de la demande en justice, à savoir au 5 mai 2017.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les frais et dépens :

La société Industrias Ponsa conservera la charge des entiers dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et sera tenue de payer à la société Sogicomm la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit irrecevable la demande de sursis à statuer formée par la société Industrias Ponsa,

Constate que la société Industrias Ponsa n'a pas formulé d'autres demandes aux termes de ses dernières conclusions de sorte qu'elle est réputée avoir abandonné les autres chefs de demandes contenus dans ses conclusions antérieures,

Confirme le jugement rendu le 7 août 2018 par le tribunal de commerce de Draguignan sauf en ce qu'il a condamné la société Industrias Ponsa à payer à la société Sogicomm la somme de 20.000 euros à titre d'indemnisation des conséquences préjudiciables de la rupture, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

Condamne la société Industrias Ponsa à payer à la société Sogicomm la somme de 51.440,16 euros avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice datée du 5 mai 2017 à titre d'indemnisation des conséquences préjudiciables de la rupture du contrat d'agent commercial,

Condamne la société Industrias Ponsa aux entiers dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ,

Condamne la société Industrias Ponsa à payer à la société Sogicomm la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/03285
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.03285 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award