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30/06/2022 | FRANCE | N°19/01051

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 30 juin 2022, 19/01051


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022



N° 2022/232













N° RG 19/01051 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUV7







[C] [M]

SARL ARTMEDI





C/



[D] [X]

Fondation CRISTOBAL GABARRON





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Françoise BOULAN



Me Magali BOURDAROT




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 13/06126.





APPELANTES



Madame [C] [M], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS I...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 30 JUIN 2022

N° 2022/232

N° RG 19/01051 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUV7

[C] [M]

SARL ARTMEDI

C/

[D] [X]

Fondation CRISTOBAL GABARRON

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Françoise BOULAN

Me Magali BOURDAROT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 13/06126.

APPELANTES

Madame [C] [M], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me François ILLOUZ, avocat au barreau de PARIS

SARL ARTMEDI, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me François ILLOUZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [D] [X], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Magali BOURDAROT, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Cindy FRIGERIO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Fondation CRISTOBAL GABARRON, dont le siège social est sis [Adresse 4] (Espagne)

représentée par Me Magali BOURDAROT, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Cindy FRIGERIO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Pierre CALLOCH, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Courant 2012, monsieur [X], galeriste, a mis en relation madame [M], artiste sculpteur dont les oeuvres sont éditées par la société ARTMEDI, avec la FONDATION CRISTOBAL GABARRON, personne morale de droit espagnol, en vue de l'organisation d'une exposition.

21 sculptures ont été exposées dans ce cadre à [Localité 6] (ESPAGNE) du 25 mai 2012 puis à [Localité 5] (ESPAGNE) du 16 octobre au 31 novembre 2012.

Constatant que 20 oeuvres sur 21 avaient été endommagées lors de leur retour le 20 décembre 2012, et que la dernière avait disparu, madame [M] a entrepris des travaux de restauration et a été indemnisée à hauteur de 15 000 par la compagnie d'assurance ALLIANZ pour une oeuvre ne pouvant être remise en état.

Madame [M] et la société ARTMEDI ont fait assigner monsieur [X] et la FONDATION GABARRON devant le tribunal de grande instance de GRASSE pour obtenir leur condamnation au paiement de la somme de 188 130 € 30 en réparation du préjudice matériel subi, outre 210 000 € en réparation du préjudice moral de l'auteur.

Suivant jugement en date du 4 décembre 2018, le tribunal a jugé irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la FONDATION GABARRON et au fond a débouté les demandeurs de l'intégralité de leurs demandes, les condamnant à verser à chacun des défendeurs la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [M] et la société ARTMEDI ont interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 15 janvier 2019.

L'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 25 avril 2022 et renvoyée à l'audience du 19 mai 2022.

A l'appui de leur appel, par conclusions déposées par voie électronique le 11 octobre 2019, la société ARTMEDI et madame [M] soutiennent qu'un contrat s'est formé avec monsieur [X], ce dernier s'engageant à assurer le transport des oeuvres et à prendre en charge les frais d'assurance. A ce titre, il serait tout comme la FONDATION GABARON tenu à faire supporter le coût des dégradations, coût établi selon devis à la somme de 188 130 € 81. Ils précisent que monsieur [X] est intervenu non à titre amical et gracieux, mais dans le cadre de son activité professionnelle lui permettant de percevoir des commissions en cas de vente des oeuvres exposées. Ils soutiennent que le contrat ainsi conclu entre les parties doit être qualifié de contrat de dépôt et excipent en conséquence des dispositions de l'article 1927 du Code civil et invoquent l'existence d'une obligation de moyen renforcée en matière de garde des oeuvres déposées, observation étant faite que l'exposition des oeuvres en plein

air est sans incidence sur les obligations des dépositaires. Ils indiquent que les origines des dégradations ne sont pas établies, pouvant notamment être occasionnés lors du transport dont les intimés avaient la charge et font observer que l'existence de mouvements de manifestation ne peut être considérée comme un cas de force majeure.

Sur le préjudice, ils estiment le coût des réparations fondé, notamment eu égard à la valeur des oeuvres détériorées et rappellent que toute modification d'une oeuvre porte atteinte au droit de son auteur et doit en conséquence être réparée.

Subsidiairement, à l'encontre de monsieur [X], ils soutiennent que celui ci a consenti une promesse de porte fort et à ce titre doit être condamné à réparer les préjudices constatés.

Madame [M] et la société ARTMEDI concluent en conséquence à l'infirmation de la décision les ayant déboutés et demandent à la cour de condamner les défendeurs in solidum au paiement de la somme de 188 130 € 80, déduction faite de la somme de 15 000 € déjà versée par l'assureur, et à madame [M] la somme de 63 000 € en réparation de son préjudice moral, outre 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La FONDATION CRISTOBAL GABARRON et monsieur [X], par conclusions déposées par voie électronique le 19 avril 2022, affirment en premier lieu que les demandes dirigées contre monsieur [X] sont dépourvues de tout fondement juridique ou factuel, l'intéressé n'ayant jamais conclu de contrat avec madame [M] et s'étant contenté de mettre en relation les parties dans un but amical. Ils contestent en particuliers l'existence d'une promesse de porte fort, qu'aucun document n'étayerait. Ils font observer qu'aucune pièce ne permet de quantifier le préjudice allégué, rappellent que l'exposition avait lieu sur la voie publique et invoquent le caractère de cas de force majeure de la manifestation éventuellement à l'origine des dégradations. Ils reprennent l'argumentation des premiers juges, tout particulièrement sur l'étendue des obligations de la fondation. Ils contestent enfin l'existence d'une atteinte au droit moral de l'auteur, que ce soit dans son principe que dans son montant. Ils concluent en conséquence à la confirmation de la décision ayant débouté les demandeurs de l'intégralité de leurs prétentions, mais demandent à la cour de les condamner à verser à monsieur [X] une somme de 10 000 € de dommages intérêts pour procédure abusive, outre pour chacun des intimés la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les échanges de courriels versés aux débats permettent de conclure, comme l'ont fait les premiers juges, qu'un contrat de dépôt a été conclu entre madame [M] et la FONDATION CRISTOBAL GABARRON concernant 21 sculptures créées par l'artiste, et ce dans le cadre de deux manifestations artistiques organisées à [Localité 6] puis [Localité 5] (ESPAGNE).

En application de l'article 1927 du Code civil, le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses lui appartenant ; en l'espèce, il n'est pas contesté que les sculptures étaient destinées à être

exposées sur la voie publique, ce qui était connu tant du déposant que du dépositaire ; il ne peut dès lors être reproché à la FONDATION CRISTOBAL GABARRON un manque dans ses obligations de surveillance des oeuvres au motif que d'éventuelles dégradations auraient été commises lors de manifestations de rue, ce risque étant inhérent au choix même des lieux d'exposition ; il ne peut en outre être invoqué l'existence d'une obligation en ce domaine particulière dès lors qu'aucune des conditions posées pour ce faire par l'article 1928 n'est réalisée ; le fait enfin que la FONDATION CRISTOBAL GABARRON ait accepté de prendre à sa charge l'assurance des oeuvres exposées ne peut être interprétée comme valant reconnaissance a priori de responsabilité en cas dégradation ; enfin, de manière surabondante, il convient de constater d'une part que le bon de livraison établi par la société EXPOMED et le constat d'huissier dressé dans l'atelier sont insuffisant pour démontrer l'imputabilité des détériorations aux expositions elles-mêmes et d'autre part et surtout que le montant même de ces détériorations n'est établi que par des devis émanant de la société ARTMEDI ; c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont refusé de faire droit à la demande en réparation, la responsabilité du dépositaire n'étant pas établie, et subsidiairement le montant des dommages n'étant pas documenté de manière objective.

La demande principale à l'encontre de l'association FONDATION CRISTOBAL GABARRON étant rejetée, celle dirigée contre monsieur [X] le sera aussi.

La demande formée par madame [M] et la société ARTMEDI à l'encontre de monsieur [X] n'apparaissant pas motivée par une intention de nuire, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande en dommages intérêts présentée pour procédure abusive.

Les appelants succombant en leur recours, ils verseront ensemble la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile à chacun des intimés.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

- CONFIRME dans l'intégralité de ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 4 décembre 2018,

Y ajoutant,

- DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

- CONDAMNE la société ARTMEDI et madame [M] pris ensemble à verser à monsieur [X] et à la FONDATION CRISTOBAL GABARRON chacun la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- MET l'intégralité des dépens in solidum à la charge de la société ARTMEDI et madame [M].

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 19/01051
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.01051 ?
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