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24/06/2022 | FRANCE | N°21/05770

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 24 juin 2022, 21/05770


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 24 JUIN 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/05770 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHJO7







S.A.R.L. [4]





C/



URSSAF PACA







Copie exécutoire délivrée

le :

à :







- Me Carole LAGARDERE



- URSSAF PACA













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribuna

l judiciaire de Toulon en date du 22 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02048.





APPELANTE



S.A.R.L. [4], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON





INTIMEE



URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]



représentée ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 24 JUIN 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/05770 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHJO7

S.A.R.L. [4]

C/

URSSAF PACA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Carole LAGARDERE

- URSSAF PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Toulon en date du 22 Mars 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02048.

APPELANTE

S.A.R.L. [4], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Carole LAGARDERE, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]

représentée par Mme [O] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits - Procédure - Moyens et Prétentions des parties :

La SARL [4], immatriculée auprès de l'union de recouvrement de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence Alpes Côte d'Azur (ci-après désignée URSSAF) en tant qu'employeur de personnel salarié à compter du 1er septembre 2013, a fait l'objet d'un contrôle au titre de l'application de la législation de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires AGS pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

Une lettre d'observation relative à la législation sociale comportant sept chefs de redressement lui a été adressée le 15 avril 2016.

Par courrier du 13 mai 2016, la société a entendu contester quatre chefs de redressement :

* 2 - frais professionnels non justifiés- allocations forfaitaire dirigeants de société et mandataires : 669,00 euros,

* 4 - frais professionnels- limite d'exonération : utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques) : 260,00 euros,

* 6 - rémunérations non déclarées : rémunérations non soumises à cotisations : 3.118,00 euros,

* 7 - non fourniture de documents : fixation forfaitaire de l'assiette : 13.665,00 euros.

Le 7 octobre 2016, l'URSSAF a adressé une mise en demeure à la société d'un montant total de 20.925,00 euros, comprenant 18.136,00 euros de cotisations sociales, et 2.789,00 euros de majorations de retard.

La société a également fait l'objet d'un contrôle au titre de la recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015.

Une lettre d'observation relative au travail dissimulé lui a été adressée le 15 avril 2016 comportant un chef de redressement pour dissimulation d'emploi salarié au titre d'une période d'essai d'un montant de 1.763,00 euros.

La société a également formulé des observations par courrier du 13 mai 2016.

Le 17 octobre 2016, l'URSSAF PACA a adressé une mise en demeure à la société d'un montant de 1.996,00 euros comprenant 1.762,00 euros de cotisations et 234,00 euros de majorations de retard au titre des années 2013, 2014 et 2015.

La société a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF aux fins de contester les deux mises en demeure. La commission, dans sa séance du 31 mai 2017, a rejeté les contestations de la société.

Par requête envoyée le 2 août 2019, la société a porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale du Var.

Par jugement du 22 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon ayant repris l'instance, a:

- débouté la société de sa contestation de la décision de la commission de recours amiable du 31 mai 2017,

- condamné la société à payer à l'URSSAF la somme de 19.514,00 euros au titre de la mise en demeure du 7 octobre 2016, ainsi qu'aux dépens.

Par lettre recommandé avec accusé de réception du 16 avril 2021, la société a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 29 mars 2021.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

- juger que la réintégration dans l'assiette des cotisations des indemnités kilométriques versées à M. [U] est injustifiée,

- juger qu'il n'y a pas eu de retraits d'espèces injustifiés,

- juger que la fixation forfaitaire est injustifiée,

- juger qu'il n'y a pas de travail dissimulé,

- ramener la mise en demeure n° 62354306 à la somme de 1.093,00 euros de cotisations,

- annuler la mise en demeure n° 62364879.

Elle fait valoir essentiellement que :

- elle a versé des indemnités kilométriques à un salarié, M. [U], qui utilisait un véhicule Clio dont il était propriétaire mais dont il n'avait pas régularisé le certificat d'immatriculation, il a cependant attesté en ce sens de sorte que le redressement à ce titre doit être annulé,

- les retraits d'espèces ont été compensés par des virements, par ailleurs la réintégration de la somme de 2.854,23 euros n'est que comptable et non réelle, de sorte que cette somme ne constitue pas un revenu distribué à l'associé de la société,

- sur le point n° 4 : elle explicite en détail des écritures comptables correspondant à des remboursements de prêts ou à des avances faites à la société,

- sur le travail dissimulé : en aucun cas elle n'a souhaité se soustraire à ses obligations de déclaration, puisqu'il peut se produire un décalage de quelques jours entre le début du chantier et la prise effective de poste, qui n'induit nullement que puisse être supposée l'existence d'une période d'essai non déclarée.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de confirmer le jugement en validant le redressement sur les points 4, 6 et 7 ainsi que celui relatif au travail dissimulé, en condamnant la société à lui payer la somme de 19.003,00 euros restant dû au titre de la mise en demeure n° 62354306 du 7 octobre 2016, portant sur16.229,00 euros de cotisations et 2.774,00 euros de majorations de retard, ainsi que la somme de 1.996,00 euros au titre de la mise en demeure n°62364878 portant sur1.762,00 euros de cotisations et 234,00 euros de majorations de retard, outre la somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

L'organisme de sécurité sociale soutient en substance que :

- s'agissant du point 4 ( frais professionnels non justifiés ) : l'attestation établie par M. [U] est insuffisante, comme émanant d'un salarié placé sous subordination et non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile,

- s'agissant du point 6 ( rémunérations non déclarées ) : la commission de recours amiable a pris en compte le jeu d'écritures passées entre différents comptes bancaires et le compte-courant d'associé pour annuler une partie du redressement, cependant les autres mouvements ne sont pas justifiés de sorte que le dirigeant de la société a eu la disposition des sommes concernées qui doivent dès lors être soumises à cotisations,

- s'agissant du point 7 ( non fourniture de documents : fixation forfaitaire de l'assiette des cotisations): au visa des dispositions des articles L.242-1 et R.242-5 du code de la sécurité sociale, les débits qualifiés de prêts constituent des mises à disposition de sommes non justifiées par leur origine au crédit du compte courant du dirigeant, qui doivent donc être considérées comme des rémunérations nettes soumises à cotisations,

- s'agissant des faits de travail dissimulé : il a été constaté que l'employeur avait éludé entre 10 et 13 jours de travail en ne déclarant pas les périodes d'essai de cinq de ses salariés et notamment pour tous ceux en contrat à durée déterminée.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige. L'affaire a été mise au délibéré par mise à disposition au greffe, la date fixée ayant été communiquée aux parties présentes.

 

MOTIFS DE L'ARRÊT

Au constat de ce que le premier juge n'a statué en définitive que sur les points 4, 6, 7 de la lettre d'observations du 15 avril 2016 faisant suite à la vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance-chômage et de garantie des salaires, ainsi que sur le redressement opéré par lettre d'observation du 15 avril 2016 suite au contrôle portant sur la recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé, la cour n'est saisie par la voie de l'appel que du litige ainsi circonscrit.

* 4 - frais professionnels- limite d'exonération : utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques)

En application de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

Ainsi, l'article 4 de l'arrêté du 20 décembre 2002 prévoit que lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint d'utiliser son véhicule personnel à des fins professionnelles, l'indemnité forfaitaire kilométrique est réputée utilisée conformément à son objet dans les limites fixées par les barèmes kilométriques annuellement publiés par l'administration fiscale.

L'exonération est admise sous réserve qu'il soit justifié du moyen de transport utilisé par le salarié, du nombre de kilomètres effectués à titre professionnel, et de la puissance du véhicule par le biais de la carte grise. Ainsi, la carte grise du bénéficiaire doit être conservée en copie aux fins de justification de la cylindrée fiscale, cette carte grise doit être établie au nom du bénéficiaire ou de son conjoint.

Aux termes de la lettre d'observation du 15 avril 2016, l'inspecteur du recouvrement a constaté sur décembre 2015 le versement d'indemnités kilométriques à M. [U] sans que ce dernier ne soit en mesure de prouver avec certitude la nature et la cylindrée du véhicule qu'il a habituellement utilisé. En conséquence l'inspecteur du recouvrement a réintégré dans l'assiette de cotisations les sommes qui lui ont été versées au titre des indemnités kilométriques pour un total de régularisation de 260,00 euros.

La société produit un écrit dénué de toute forme telle qu'exigée par les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, sans aucune pièce d'identité, sur lequel il est mentionné manuscritement : «Je soussigné C. [U] atteste être l'utilisateur du véhicule Renault Clio 273 B CJ 31. Je n'ai pas la carte grise à mon nom. » Ce document est daté du 14 janvier 2016. Il est joint la photocopie d'une carte grise établie le 18 septembre 2003 correspondant à un véhicule Renault, immatriculé 217 B CJ 31, établi au nom d'une société [5].

Ce document est insuffisant à établir que M. [U] ait été l'utilisateur de ce véhicule, durant l'année sur laquelle le contrôle a porté, à savoir l'année 2015. C'est par conséquent de manière justifiée que l'URSSAF a procédé à la réintégration dans l'assiette de cotisations des indemnités kilométriques versées à ce salarié, en l'absence de tout autre justificatif.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

* 6 - rémunérations non déclarées : rémunérations non soumises à cotisations

Aux termes de la lettre d'observation du 15 avril 2016, il a été constaté de nombreux retraits d'espèces dans le compte 512 « banque ».

Ainsi pour l'année 2013, ces retraits d'espèces ont fait l'objet d'une contrepartie dans le compte 580 (virement interne) qui lui-même a été soldé le 28 septembre 2013 par un débit de 1.863,00 euros porté au crédit du compte courant du dirigeant. Aucune justification de ces sommes n'a été apportée dans le journal des opérations diverses. Cette somme non justifiée au regard d'une quelconque exonération et créditée au compte courant du dirigeant a été considérée par l'inspecteur du recouvrement comme devant être assujettie aux cotisations et contributions du régime général et réintégrée dans l'assiette des cotisations pour son montant brut.

Pour ce qui concerne l'année 2014, dans le compte 512 « banque » le 2 décembre 2014, lors de la clôture du compte de la BCPA, le montant de 2.854,23 euros a été affecté au crédit du compte courant du dirigeant. Néanmoins, la commission de recours amiable, concernant ce redressement au titre de l'année 2014, a constaté l'existence d'un jeu d'écriture entre les comptes banque BCPA et SMC et le compte courant d'associé, ayant entraîné une neutralisation des écritures, le compte-courant n'ayant servi que de compte pivot entre la fermeture du compte BCPA et l'ouverture du compte SMC. La commission de recours amiable a donc estimé qu'il n'y avait pas d'incidence sur le compte courant d'associé car les sommes s'annulaient, de sorte que le chef global de redressement à ce titre a été ramené à la somme de 1.210,00 euros au seul titre de l'année 2013.

Concernant la somme de 1.863,89 euros réintégrés au compte du dirigeant, la société indique dans ses écritures qu'elle correspond à des sommes avancées par celui-ci. Elle se prévaut à ce titre des pièces numéro 11 et 12, à savoir les extraits du compte 580 (virement interne), et 455 (associés comptes-courants). Néanmoins, ces documents n'établissent nullement l'avance de somme par le dirigeant qui a bénéficié du virement à son compte de la somme précitée.

Le redressement est par conséquent pleinement justifié, et le jugement doit être confirmé de ce chef.

* 7 - non fourniture de documents : fixation forfaitaire de l'assiette

En application de l'alinéa premier de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.

Aux termes de l'article R.242-5 du même code, lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle engagé en application de l'article L.243-7 ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l'organisme chargé du recouvrement dans les conditions prévues par cet article.

Le forfait est établi compte tenu des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l'emploi est déterminée d'après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve.

Aux termes de la lettre d'observation du 15 avril 2016, l'inspecteur du recouvrement a constaté dans le compte-courant du dirigeant deux écritures au débit, à savoir les 12 et 13 juin 2013 : deux débits de1.500,00 euros chacun. L'inspecteur du recouvrement a mentionné que malgré de nombreuses demandes, il n'avait pas été possible d'identifier la nature et la destination de ces sommes.

Il a par ailleurs constaté au crédit du même compte courant du dirigeant les écritures suivantes : le 17 novembre 2014 un crédit de 6.500,00 euros portant la mention versement Kadiri, le 8 octobre 2013, un crédit de 1.000,00 euros , le 30 octobre 2013 un autre crédit de 5.000,00 euros, enfin le 6 novembre 2013 un quatrième crédit de 5.000,00 euros , ces trois dernières écritures portant la mention de « prêt perso [T] ».

L'inspecteur du recouvrement a noté que les montants versés au crédit correspondaient selon l'employeur à des sommes que ce dernier qualifiait de prêts. Ainsi, la somme de 6.500,00 euros représenterait un versement en espèces correspondant à de prêts faits par des amis. Concernant les sommes identifiées sous le libellé « prêt perso [T], l'employeur a également précisé qu'il s'agissait d'un prêt fait par [T].

Néanmoins, l'inspecteur du recouvrement a constaté que malgré de nombreuses demandes lors du contrôle, l'employeur n'avait pas été en mesure d'apporter la preuve de l'origine et de la nature des espèces pour le montant de 6.500,00 euros, que par ailleurs aucun contrat de prêt enregistré à l'administration fiscale n'avait été produit, que les sommes, afin d'être comptablement qualifiées de prêts n'avaient pas fait l'objet d'une inscription dans un compte de la classe 2, qu'aucun début de remboursement n'avait enfin été constaté malgré l'antériorité de l'écriture.

L'inspecteur du recouvrement a dès lors considéré que ces sommes ne pouvaient être qualifiées de prêts et, compte tenu de leur mise à disposition non justifiée par leur origine au crédit du compte courant du dirigeant, il en a déduit qu'il s'agissait de rémunérations nettes soumises à cotisations.

Concernant en premier lieu les sommes débitées les 12 et 13 juin 2016, la société produit deux attestations distinctes établies toutes deux le 11 avril 2016, soit antérieurement à la fin du contrôle, par lesquels la gérante de la SARL [3] ( société radiée du registre du commerce le 15 octobre 2015) atteste avoir encaissé de la société contrôlée deux chèques de 1500 euros chacun, établis tous deux le 11 juin 2013, qu'elle aurait libellés elle-même à l'ordre de deux salariés de sa propre société, remboursant en espèces la société [4] le 30 juillet 2014 pour l'un des prêts, et le 1er septembre 2014 pour l'autre.

Toutefois, ces prêts ne figurent dans aucun compte pas plus que dans le bilan. Aucun contrat de prêt n'a été enregistré auprès de l'administration fiscale. Aucun enregistrement de ces prêts n'est visible dans le grand livre dans un compte d'immobilisation. Les versements en espèces figurant sur les relevés bancaires sont non identifiables par leur provenance. Il est donc strictement impossible de prouver que la somme de 3.000,00 euros aurait servi à rémunérer deux salariés d'une autre société et aurait été remboursée. Par conséquent c'est de manière justifiée que la taxation forfaitaire est intervenue en application de l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale.

Concernant en second lieu les sommes figurants au crédit du compte courant, l'employeur indique qu'il s'agirait de prêts consentis par des amis.

Néanmoins les mêmes observations sur l'absence de toute comptabilisation qualifiée de prêt dans les comptes de la société s'imposent. Par ailleurs, l'inspecteur du recouvrement a mentionné que l'employeur avait précisé qu'il s'agissait de prêts consentis par des amis. Or, aucun document n'a été établi, l'attestation rédigée par M. [C] fait état de relations personnelles étrangères au fonctionnement de la société. Les remboursements en espèces évoqués ne sont pas suffisamment justifiés. A cet égard, le créancier invoque un premier remboursement de 700,00 euros effectué le 26 février 2015 , il est seulement produit un relevé bancaire faisant état d'un retrait d'espèces le 28 février 2015. Il est évoqué un second remboursement le 13 février 2015 de 800,00 euros, or il est produit un relevé bancaire faisant état d'un retrait d'espèces le 13 mars 2015. Il est fait état d'un troisième remboursement de 2.000,00 euros le 26 mai 2015, et d'un quatrième remboursement le 27 mai 2015 de 3000,00 euros, or ces remboursements sont contraires à l'obligation légale faite aux professionnels agissants pour les besoins de leur activité professionnelle de payer par chèque ou espèce lorsque la transaction est d'un montant supérieur à 1.500,00 euros.

En l'absence de tout document probant permettant de vérifier la réalité des prêts invoqués tout comme celle de leur remboursement, c'est à juste titre que l'inspecteur du recouvrement a fait application de la taxation forfaitaire. Le redressement est pleinement justifié et doit être maintenu, et le jugement confirmé.

* dissimulation d'emploi salarié au titre d'une période d'essai

Aux termes de la lettre d'observation adressée le 15 avril 2016 au titre du contrôle relatif à la recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé mentionnées à l'article L.8221-2 du code du travail, l'inspecteur du recouvrement a constaté que pour cinq salariés l'employeur n'avait pas déclaré leur période d'essai. Il existait en effet une différence entre la déclaration de l'embauche sur le serveur DUE et les dates constatées sur la DAS mensuelle, qui démontrait que l'employeur avait éludé entre 10 et 13 jours de travail. L'inspecteur du recouvrement a par conséquent réintégré dans l'assiette des cotisations les sommes calculées sur le SMIC horaire augmenté des congés payés.

Il a été rappelé la règle non contestée selon laquelle la déclaration doit être adressée à l'URSSAF avant la prise de fonction ou le début de la période d'essai, au plus tôt dans les huit jours précédant la date prévisible de l'embauche.

Il n'est pas davantage contesté que s'agissant des cinq salariés énumérés dans la lettre d'observation, la déclaration unique d'embauche est intervenue antérieurement à ce délai.

Néanmoins aucun texte ne sanctionne le caractère anticipé d'une déclaration effectuée antérieurement à ce délai.

La société fait valoir pour expliciter ce décalage qu'il peut exister un retard dans le début réel du chantier de sorte que la prise de poste du salarié s'effectue en décalage de quelques jours. Elle conteste la supposition selon laquelle le décalage constaté en l'espèce puisse constituer une période d'essai. Elle produit l'attestation en ce sens de sa secrétaire qui indique procéder généralement à l'enregistrement de la déclaration préalable à l'embauche en ligne la veille de l'embauche réelle, mais que cependant il peut arriver que le début effectif du chantier soit soumis à des aléas météorologiques ou à un différé imposé par le client ou encore à la maladie d'un salarié.

Toutefois, l'analyse du registre du personnel comme la lecture des DADS produites par l'URSSAF montre que les périodes d'emploi des salariés concernés ont été brèves et parfois très brèves : ainsi M. [X] [E] est entré le 18 novembre et a quitté l'entreprise le 22 novembre de la même année, M. [H] [I] est entré le 3 mars 2014 et a quitté l'entreprise le 31 mai 2014, M. [F] [P] a commencé et fini le 4 novembre 2013, M. [U] a commencé le 1er décembre 2015 et fini le 23 décembre de la même année.

Il n'a pas été procédé à la vérification du type de contrat de travail conclu avec ces salariés, alors que pour certains contrats, il ne peut y avoir de période d'essai, et que la durée de la période d'essai varie selon le type de contrat de travail.

En conséquence, la cour estime que les constatations opérées sont insuffisantes à démontrer que la société a commis des faits de travail dissimulé en éludant des périodes d'essai. Le redressement sera annulé de ce chef et le jugement infirmé sur ce point.

L'équité commande d'allouer à l'URSSAF la somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande à ce titre présentée par la société sera rejetée, et cette dernière supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire :

- Confirme le jugement du 22 mars 2021 sauf en ce qui concerne le chef de redressement pour dissimulation d'emploi salarié au titre d'une période d'essai notifié par lettre d'observation du 15 avril 2016 portant sur un montant de 1.762,00 euros.

Statuant de nouveau de ce seul chef :

- Annule le chef de redressement pour dissimulation d'emploi salarié au titre d'une période d'essai, ainsi que la mise en demeure subséquente adressée à la société le 17 octobre 2016 portant sur un montant de 1.762,00 euros de cotisations et 234,00 euros de majorations de retard, soit sur un total de 1.996,00 euros.

- Y ajoutant,

- Condamne la société SARL [4] à payer à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence Alpes Côte d'Azur une somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Déboute la société SARL [4] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

- Condamne la société SARL [4] aux dépens.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/05770
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;21.05770 ?
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