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23/06/2022 | FRANCE | N°19/07897

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 23 juin 2022, 19/07897


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 23 JUIN 2022

lv

N° 2022/ 304













N° RG 19/07897 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEIVV







Société LES HORTENSIAS





C/



[D] [W]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELAS CSF JURCO



Me Philippe LAVAUD



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de CAGNES-SUR-MER en date du 22 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18-000699.



APPELANT



Syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière [Adresse 5], représenté par son syndic en exercice la SAS SAFI MEDITERRANEE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 23 JUIN 2022

lv

N° 2022/ 304

N° RG 19/07897 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEIVV

Société LES HORTENSIAS

C/

[D] [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELAS CSF JURCO

Me Philippe LAVAUD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de CAGNES-SUR-MER en date du 22 Mars 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18-000699.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière [Adresse 5], représenté par son syndic en exercice la SAS SAFI MEDITERRANEE, dont le siège est [Adresse 1], représentée par son représentant légal en exercice, domicilié ès-qualités audit siège

représenté par Me Armand ANAVE de la SELAS CSF JURCO, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur [D] [W]

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Philippe LAVAUD, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2022

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

M. [D] [W] est propriétaire d'un studio et d'une cave constituant les lots n° [Cadastre 2] et [Cadastre 3] de l'ensemble immobilier [Adresse 5]. Se prévalant d'un arriéré de charges et provisions, le syndicat des copropriétaires l'a fait assigner le 26 juillet 2018 devant le tribunal d'instance de Cagnes-sur-Mer pour obtenir paiement d'une somme principale de 8894,14 € portée à 9125,29 € à l'audience du 29 janvier 2019 outre celle de 500 € à titre de dommages-intérêts et de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [D] [W] s'est opposé à la demande au motif que la créance correspondait à une consommation exorbitante d'eau sans rapport avec la superficie de son local.

Retenant pour partie cet argumentaire, le tribunal par jugement contradictoire du 22 mars 2019 a :

'condamné M. [D] [W] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] les sommes de :

*3224,91 € au titre de l'arriéré de charges, comptes arrêtés au 1er octobre 2018 incluant la facturation d'eau chaude et d'eau froide pour cette période et avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2018,

*500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'rejeté la demande du syndicat des copropriétaires relative aux frais de gestion du syndic ;

'condamné M. [D] [W] aux dépens ;

'ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Le syndicat des copropriétaires a régulièrement relevé appel de cette décision le 14 mai 2019 et demande à la cour selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 19 avril 2022 de:

vu l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965,

'réformer le jugement déféré quant au montant des condamnations prononcées ;

'condamner M. [D] [W] à payer la somme de 7007,98 € au titre de la consommation d'eau chaude et d'eau froide selon décompte arrêté au 1er juillet 2018 ;

'réformer le jugement en ce qu'il déduit du compte de M. [D] [W] les sommes de 25,20 € pour frais de relance et de 54 € pour frais de mise en demeure ;

'confirmer le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

'débouter M. [D] [W] de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

' le condamner au paiement d'une indemnité de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner M. [D] [W] aux dépens.

Au soutien de son appel, le syndicat des copropriétaires fait valoir principalement que nonobstant les multiples courriers et avis de passage du technicien de la société de distribution d'eau Ocea Smart Building celui-ci n'a pu accéder au compteur d'eau de l'intimé, qu'une régularisation lui a donc été notifiée en l'état, que M. [D] [W] est un débiteur récurrent pour avoir déjà était condamné à paiement par une décision précédente du 3 mai 2017, que le syndic a interrogé la société Ocea sur l'historique du compteur eau chaude et eau froide, que le local est actuellement loué à un couple avec deux enfants, que les factures du fournisseur attestent du coût du mètre cube d'eau livré, que M. [D] [W] ne règle plus aucune charge depuis février 2017, qu'un relevé contradictoire du compteur est intervenu le 6 avril 2018 en présence des locataires et que l'anormalité de la consommation d'eau n'est pas établie.

Le syndicat ajoute avoir fait installer des compteurs neufs dans tout l'immeuble le 8 mars 2019 pour mettre un terme à la suspicion d'un dysfonctionnement des anciens compteurs, que leur historique a toutefois été conservée par le fournisseur, qu'un jugement postérieur du 10 mars 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Grasse a écarté l'argumentaire repris par M. [D] [W] sur les consommations d'eau postérieures et que le préjudice moral qu'il allègue n'est pas établi.

Selon dernières conclusions en réplique signifiées par voie électronique le 29 avril 2022, M. [D] [W] demande à la cour de :

vu « les contestations sérieuses établies »,

'débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes ;

'le condamner au paiement des sommes de 6000 € en application de l'article 32-1 du code de procédure civile et de 12'000 € pour préjudice moral ;

'condamner le syndicat à payer la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner le même aux dépens.

M. [D] [W] soutient principalement que sur un arriéré réclamé de 8894,14 €au 1er juillet 2018, 7007,98 € concernent une régularisation de consommation d'eau chaude et d'eau froide portant sur cinq ans, que la consommation moyenne d'un couple est de 40 m³ par an alors qu'en l'espèce 108 m3 sont imputés à un studio de 36 m², que le syndic ne justifie d'aucune vérification pertinente, que les charges appelées à ce titre correspondent à une consommation estimée et non vérifiée, que l'entreprise Cb'Eau qu'il a fait intervenir dans les lieux atteste de l'absence de fuite et d'un remplacement des compteurs et que finalement la surconsommation n'a pu être expliquée.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 3 mai 2022.

MOTIFS de la DECISION

Sur le paiement des charges de copropriété :

L'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 énonce que « les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement communs en fonction de l'utilité que ces services et équipements présentent à l'égard de chaque lot et qu'ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5 » ; l'article 14 -1 de la même loi dispose en outre que « pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel, que les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté, sauf à ce que l'assemblée générale fixe des modalités différentes et que la provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour fixé par l'assemblée générale».

L'approbation des comptes du syndic par l'assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges. Cependant, chaque propriétaire est recevable à contester son décompte individuel s'il s'avère que les sommes qui y sont portées en débit ou en crédit ne sont pas en corrélation avec les résolutions de l'assemblée générale ; enfin il appartient à tout créancier réclamant paiement d'établir la preuve de l'obligation à la dette conformément à l'article 1315 ancien du Code civil et 1353 nouveau du même code.

Au soutien de sa demande en paiement de la somme de 9125,29 € actualisée au 1er octobre 2018, le syndicat produit à nouveau en appel les pièces déjà soumises à l'appréciation du premier juge et listées au jugement déféré ci-après expressément reprises ; il ajoute :

-un décompte individuel actualisé au 30 janvier 2019,

-le jugement du 10 mars 2022 et son rectificatif du 24 mars 2022,

-des relevés de consommation d'eau émanant de la société Océa,

-plusieurs courriers du syndic adressés à M. [D] [W] concernant la consommation d'eau,

-un tableau comparatif de la consommation d'eau des studios de la résidence,

-les attestations de [Y] [N] et [B] [G].

Les sommes imputées au compte individuel ne sont pas critiquées dans leur montant ; la contestation de leur principe fondée sur une prétendue surconsommation d'eau et/ou un défaut de diligences du syndic n'est pas pertinente. En effet, il est constant en lecture des lettres de relance figurant en pièces n°9, 11 à 15 et 18 que : 1/le syndic n'a eu de cesse d'interpeller M. [D] [W] sur la consommation élevée d'eau de son local, 2/ce dernier n'ayant donné aucune suite aux avis de passage de la société Océa en charge des relevés, le fournisseur n'a pas eu accès aux compteurs privatifs, 3/qu'un relevé réel enfin effectué le 6 avril 2018 en présence des locataires corrobore les estimations des années précédentes ; autrement dit si carence il y a, elle incombe en totalité à l'intimé qui est malvenu de se prévaloir d'une absence de relevés réels de 2014 à 2018 et de la régularisation consécutive pluriannuelle résultant de son seul fait ou de celui de ses locataires.

Les considérations hautement théoriques sur la consommation moyenne et annuelle d'eau par personne en France relèvent de l'artifice puisque le studio a été occupé par un couple et deux enfants et non pas par un couple seul, que les relevés issus des nouveaux compteurs montrent une consommation supérieure à celle de locaux de même surface et qu'aucune fuite n'a été décelée sur le réseau privatif ou commun. S'agissant encore du prix du mètre cube d'eau, il est audacieux de contester le coût facturé à la copropriété par une comparaison tout autant artificielle avec le prix moyen du mètre cube d'eau en France . Il faut encore ajouter que M. [D] [W] n'a réglé aucune charge depuis 2017 et a fait l'objet d'une nouvelle condamnation à paiement par jugement précité du tribunal judiciaire de Grasse du 24 mars 2022 qui d'ailleurs a écarté l'argumentaire de la surconsommation anormale d'eau à nouveau soutenu par l'intimé devant cette juridiction.

Les charges proprement dites dues au 1er octobre 2018 s'élèvent ainsi à la somme de 8830,09€ au paiement de laquelle M. [D] [W] est condamné avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 juillet 2018.

Le décompte inclut également diverses sommes au titre de frais de relance, de mise en demeure par avocat et d'honoraires de suivi de procédure. L'article 10 -1 de la loi du 10 juillet 1965 énonce que « par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 10, sont imputables au seul copropriétaire concerné a) les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur » ; ce texte ne vise que les frais nécessaires exposés par le syndicat à compter d'une mise en demeure et non les frais qui relèvent des dépens ou ceux entrant dans les prévisions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat ne peut donc faire figurer au débit du compte individuel de l'intimé les frais taxables et les honoraires de son conseil. Il ne peut pas plus se prévaloir de frais forfaitaires prévus au contrat conclu avec le syndic auquel M. [D] [W] est étranger , étant observé de surcroît que des dispositions conventionnelles ou encore une résolution de l'assemblée générale, ne sauraient remettre en cause les dispositions d'ordre public de la loi du 10 juillet 1965. Il faut aussi ajouter, à l'instar du premier juge, que le recouvrement des charges de copropriété constitue un acte élémentaire de l'administration de la copropriété confiée au syndic pour lequel il est rémunéré ; enfin, le syndicat n'établit pas en quoi il aurait été contraint d'exposer des sommes excédant ces frais pour recouvrer la créance de charges.

C'est donc à bon droit que le tribunal a écarté le montant de 295,25 €.

Sur les demandes annexes :

L'admission du recours du syndicat des copropriétaires rend sans objet les demandes reconventionnelles de M. [D] [W] en application de l'article 32-1 du code de procédure civile ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Le syndicat ayant été contraint d'exposer en appel de nouveaux frais de conseil et de représentation, sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile est accueillie dans les termes figurant ci-après.

M. [D] [W] qui succombe est enfin condamné aux dépens en application de l'article 696 du même code.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement déféré en ce qu'il :

-déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Hortensias de ses demande en paiement de frais de recouvrement et de dommages-intérêts,

-condamne M. [D] [W] à lui payer la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ,

-condamne le même aux dépens ;

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

Condamne M. [D] [W] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] la somme de 8830,09 € au titre des charges et provisions dues au 1er octobre 2018 avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2018 ;

Ajoutant au jugement :

Déboute M. [D] [W] de ses demandes en application de l'article 32-1 du code de procédure civile et en paiement de dommages-intérêts ;

Le condamne à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Le condamne aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/07897
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;19.07897 ?
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