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17/06/2022 | FRANCE | N°21/02400

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 17 juin 2022, 21/02400


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 17 JUIN 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/02400 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG62M





S.A.R.L. [4]





C/



URSSAF PACA





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- Me Fabien GUERINI



- URSSAF PACA



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal

Judiciaire de Nice en date du 08 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/01353.





APPELANTE



S.A.R.L. [4], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Fabien GUERINI, avocat au barreau de TOULON





INTIMEE



URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]



représentée pa...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 17 JUIN 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/02400 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG62M

S.A.R.L. [4]

C/

URSSAF PACA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Fabien GUERINI

- URSSAF PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Nice en date du 08 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/01353.

APPELANTE

S.A.R.L. [4], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Fabien GUERINI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]

représentée par M. [Z] [K] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2022

Signé par Madame Audrey BOITAUD-DERIEUX, Conseiller pour Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre régulièrement empêchée et Madame Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits, procédures, prétentions et moyens des parties

La société à responsabilité limitée (SARL) [4], ayant une activité de transport routier de fret de proximité, a fait l'objet d'un contrôle par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence Alpes Côte d'Azur (ci-après URSSAF), sur l'application de la législation de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015.

Par lettre d'observations du 13 janvier 2017, l'URSSAF l'a informée des sept chefs de redressement suivants :

- 1/ forfait social ' assiette ' cas général : portant sur le montant des indemnités versées dans le cadre de ruptures conventionnelles intervenues sur la période de contrôle, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 1.118,00 euros

- 2/rémunérations non déclarées ' rémunérations non soumises à cotisations : portant sur des acomptes de salaires qui n'auraient pas été régularisés et n'auraient dès lors pas été soumis à cotisations, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 3.204,00 euros,

- 3/fixation forfaitaire de l'assiette ' factures non probantes : trois sous-traitants auxquels la société [4] a eu recours n'auraient pas fait figurer leur adresse et leur SIREN sur leurs factures, ne permettant pas de les identifier, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 8.124,00 euros,

- 4/ prise en charge par l'employeur de contraventions : portant sur des infractions au code de la route commises par des salariés, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 1.002,00 euros,

- 5/ avantages concédés ' bons d'achat : portant sur des bons d'achat servis par l'entreprise à ses salariés et leurs enfants à l'occasion d'événements déterminés (Noël, anniversaires et fêtes religieuses) qui n'auraient pas rempli les conditions d'exonération de cotisations et CSG/CRDS, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 7.917,00 euros,

- 6/ frais professionnels ' limites d'exonération ' chauffeurs ' petits déplacements, portant sur des paniers repas alloués aux salariés de l'entreprise qui n'auraient pas rempli les conditions pour être qualifiés de frais professionnels non soumis à cotisations, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 64.116,00 euros,

- 7/ réduction générale des cotisations ' régularisation suite à redressement (éléments de salaire) portant sur la réintégration à l'assiette de cotisations les bons d'achats et paniers repas, montant estimé du rappel de cotisations et contributions : 45.024,00 euros.

Par courrier du 10 février 2017, la société cotisante a fait part de ses remarques.

Par réponse du 21 février 2017, l'organisme de sécurité sociale a maintenu l'intégralité du redressement et par mise en demeure du 29 mars 2017, réceptionnée le 30 mars, il a enjoint à la société de régler la somme de 147.277,00 euros se décomposant en 130.504,00 euros au titre des cotisations, et 16.773,00 euros au titre des majorations de retard.

Par courrier du 12 avril 2017, la société a saisi la commission de recours amiable.

En l'absence de décision explicite, la société a alors porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes maritimes.

Par jugement du 8 janvier 2021, notifié le 20 janvier suivant, le tribunal judiciaire de Nice ayant repris l'instance, a déclaré le recours recevable, rejeté la contestation et débouté la société de ses demandes, l'a condamnée à payer à l'URSSAF la somme de 147.277,00 euros, représentant 130.504,00 euros en principal, et 16.773,00 euros au titre de majorations de retard, outre majorations de retard restant à courir jusqu'à parfait paiement sur les cotisations dues en principal, l'a condamnée à la somme de 800,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, a ordonné l'exécution provisoire de la décision et condamné la société [4] aux dépens.

Par déclaration au greffe de la cour du 16 février 2021, la société a régulièrement interjeté appel à l'encontre de cette décision en toutes ses dispositions.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, l'appelante demande à la cour de réformer partiellement le jugement entrepris, et de :

- annuler au moins partiellement la décision de rejet implicite rendue par la commission de recours amiable et le redressement opéré,

- ordonner à l'URSSAF de lever sa réserve quant à la portée du contrôle réalisé, au regard des justifications apportées sur la situation de la SARL [3],

- lui donner acte qu'elle a régularisé le rappel de cotisations et contributions (1.118,00 euros) relatif à l'assujettissement des indemnités versées dans le cadre de ruptures conventionnelles, depuis la date du contrôle ( chef n°1),

- lui donner acte qu'elle reconnaît avoir commis une erreur de bonne foi et qu'elle s'engage à régulariser le rappel de cotisations et contributions opéré par l'URSSAF du chef des acomptes et avances sur salaires pour un montant de 3.204,00 euros ( chef n°2),

- annuler les 5 autres chefs de redressement,

- condamner l'URSSAF PACA à lui verser la somme de 5.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir en substance que :

- la réserve émise par l'URSSAF quant à la portée du contrôle dans l'attente de la vérification de la situation de la société [3] doit être levée, ce sous-traitant ayant été placé en liquidation judiciaire suivant jugement du 5 octobre 2015 arrêtant la cessation des paiements au 31 juillet 2015, de sorte que l'URSSAF ne pouvait pas retenir qu'au mois de juin 2015 elle faisait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire,

- sur le troisième chef de redressement contesté : il était possible de vérifier l'authenticité et la réalité des entreprises sous-traitantes malgré l'absence d'adresse et de numéro SIREN sur les factures transmises par les trois sociétés concernées,

- sur le quatrième chef : en prenant en charge le paiement de contraventions infligées pour des excès de vitesse et usage du téléphone tenu en main par le conducteur, la société n'a fait qu'appliquer des dispositions de l'article R.121-6 du code de la route, d'autant que le roulement des véhicules et des salariés la place dans l'impossibilité d'identifier les conducteurs lors de la commission des infractions,

- sur le cinquième chef de redressement : l'URSSAF ne démontre pas que le montant des bons d'achat servis aux salariés excède 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, elle établit elle-même avoir respecté les conditions posées par la circulaire ACOSS n°2011-5024 du 21 mars 2011,

- sur le sixième chef : au visa des articles 1 à 3 de l'arrêté du 20 décembre 2002, en l'absence de toute pause déjeuner, incompatible avec la nature de l'activité et les tâches exercées, les indemnités repas, d'un montant journalier de 13,06 euros qu'elle verse aux chauffeurs livreurs doivent être qualifiées de remboursements de frais professionnels,

- sur le septième chef : par voie de conséquence, la réintégration des bons d'achat et indemnités de repas ne se justifiant pas, la réduction de cotisations sociales applicables doit être recalculée et ce chef annulé.

Par conclusions visées et développées oralement à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et de condamner l'appelante à lui régler une somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle soutient en substance que :

- les chefs de redressement 1 et 2 n'ayant pas été soumis à la commission de recours amiable, la cour doit rejeter toute contestation à cet égard,

- s'agissant de la réserve de la portée du contrôle, il est reproché à la cotisante de ne pas avoir respecté son obligation de vigilance, peu important la date de mise en liquidation judiciaire du sous-traitant, de sorte que la réserve doit être maintenue,

- sur le chef n°3: l'impossibilité d'identifier les sous-traitants en l'absence de toute adresse et de tout n° SIREN justifie le redressement opéré,

- sur le chef n°4 : l'avantage en nature est constitué par l'économie réalisée par le contrevenant, soumis à cotisations sociales, l'article R.126-3 du code de la route invoquée ayant été introduit dans la loi par décret du 26 décembre 2016,

- sur le chef n°5 : la société n'établit pas avoir respecté les conditions d'attribution des bons cadeaux,

- sur le chef n°6 : aucun justificatif n'est produit permettant de justifier le versement systématique d'indemnité de repas pour l'ensemble des salariés, le contrôle n'ayant pas permis de vérifier si les salariés pouvaient regagner leur domicile ou leur lieu de travail,

- sur le chef n°7 : les redressements précédents ont eu pour conséquence de modifier l'assiette des cotisations et donc celui de la réduction générale de ces dernières.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige. L'affaire a été mise au délibéré par mise à disposition au greffe, la date fixée ayant été communiquée aux parties présentes.

MOTIFS DE L'ARRÊT

À titre liminaire, le recours amiable préalable, tout comme la saisine de la juridiction de première instance n'ont porté que sur la réserve sur la portée du contrôle, et sur les chefs de redressement portant les numéros dans l'ordre 3 à 7 de la lettre d'observation. La saisine de la cour se trouve donc limitée à ces points de contestation, de sorte que ne seront pas examinés les chefs de redressement 1 et 2.

Sur la réserve de la portée du contrôle

Il a été constaté lors de la vérification de la comptabilité que la société avait fait appel dans le cadre de la sous-traitance à la société [3], laquelle a facturé en novembre 2014, en décembre 2014, et en juin 2015. L'inspectrice du recouvrement a noté que cette société était en liquidation judiciaire depuis le 2 juillet 2014 mettant fin son activité. Elle a relevé que la cotisante ne s'était pas assurée de la régularité de la situation de son co-contractant en se faisant remettre les documents mentionnés aux articles D.8222-5 et D.8222-7 du code du travail.

Il importe peu que la SARL [4] produise en cours de procédure les mentions publiées au Bodacc relatives à ce sous-traitant, dès lors qu'il est constant qu'elle n'établit pas s'être faite remettre les attestations de vigilance prévue par les articles L.8222-1, R.8222-1 et D.8222-5 du code du travail.

C'est donc à juste titre que l'inspecteur du recouvrement a précisé que la lettre d'observations excluait expressément toute décision implicite de régularité de l'entreprise sous-traitante dispensant la cotisante de tout risque de mise en 'uvre de la solidarité financière.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le chef de redressement n°3 : fixation forfaitaire de l'assiette : factures non probantes

Aux termes de la lettre d'observations, l'inspecteur du recouvrement a constaté que la société avait fait appel à des sous-traitants, enregistrés dans les comptes 60400000 ' achats études et prestations de services', et que parmi les factures vérifiées trois sociétés ne faisaient apparaître ni leur adresse ni leur n° SIREN, de sorte que l'identification de ces sous-traitants s'avérait impossible.

En considération de ce que l'absence de certaines mentions légales sur ces factures ne permettait pas d'exploiter les documents fournis et d'identifier le bénéficiaire des sommes versées, il a été procédé à la taxation forfaitaire en application de l'article R. 243- 59- 4 1°) du code de la sécurité sociale.

Quoiqu'affirmant dans ses écritures que l'absence de ces mentions, dont elle reconnaît pourtant le caractère obligatoire, n'empêchait pas de vérifier l'authenticité et la réalité des entreprises sous-traitantes, et qu'elle fournira les pièces et informations nécessaires à leur parfaite identification, la cotisante ne justifie en rien ses assertions et ne produit aucune pièce.

Il en résulte qu'ainsi que l'a retenu l'inspecteur du recouvrement, les factures ainsi contrôlées ne constituent pas des justificatifs comptables probants, justifiant la mise en 'uvre de la réintégration de leurs montants dans l'assiette de cotisations par application du texte précité.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur le chef de redressement n°4 : prise en charge par l'employeur de contraventions

L'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose :

Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

Aux termes de la lettre d'observations, l'inspecteur du recouvrement a relevé, à la vérification des grands livres à des exercices 2014 et 2015 et plus particulièrement le compte 671200 'amendes et pénalités' que l'employeur prenait en charge des contraventions suite à des infractions au code de la route commises par les salariés (principalement excès de vitesse et usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur).

Il a considéré que cette prise en charge par la société du paiement des amendes infligées constituait pour les salariés ayant commis l'infraction un avantage en espèce devant être soumis à cotisations et à contributions sociales.

Les parties ne discutent pas que la commission de ces infractions procède d'un comportement personnel de celui qui les a commises, sans aucun lien avec la responsabilité de la société. Il en résulte qu'il appartient à chaque chauffeur contrevenant de régler les amendes en découlant.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, les dispositions de l'article R.121-6 du code de la route ne sont pas applicables au contrôle litigieux.

Par ailleurs, ainsi que l'a relevé opportunément le premier juge, ce texte n'instaure qu'une responsabilité pécuniaire à l'égard de certaines infractions, qui n'est retenu qu'en cas d'impossibilité d'identifier le conducteur du véhicule, il n'instaure aucune responsabilité pénale du titulaire de la carte grise de ce dernier.

La société soutient ne pas être en mesure d'identifier les conducteurs, en raison du nombre de véhicules et du fait que les salariés n'ont pas toujours le même véhicule du fait des tournées qu'ils accomplissent par roulement. Cependant elle n'établit en rien cette affirmation.

Le redressement doit donc être maintenu et le jugement confirmé de ce chef.

Sur le chef de redressement n°5 : bons d'achat

En application de l'alinéa 1er de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérés comme rémunérations toutes les sommes allouées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.

Il en est ainsi des bons d'achat et cadeaux en nature attribués par l'employeur. Par dérogation à ce principe, les bons d'achat et cadeaux en nature alloués dans les conditions précisées par l'instruction ministérielle du 17 avril 1985, la lettre ministérielle du 12 décembre 1988, et les lettres circulaires ACOSS des trois décembres 1996 et 9 janvier 2002, peuvent être exonérés de cotisations et de CSG CRDS.

Ne sont pas soumis à cotisations, ni à CSG ou à CRDS les bons d'achat ou cadeaux en nature servie au cours d'une année lorsque leur montant global n'excède pas 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale.

Sur ce point, il résulte de la lettre d'observations qu'il a été relevé en comptabilité, plus précisément le compte 64800000 « diverses charges sociale » l'achat de bons cadeaux pour un montant de 8.000,00 euros en 2014 et de 9.000,00 euros en 2015. Pour justificatifs, un tableau a été établi par année mentionnant l'attribution de bons d'achat aux salariés par événement. Il est précisé que chaque salarié perçoit 70 euros de bons d'achat par événement.

C'est en vain que la société soutient que l'URSSAF n'a pas démontré que le montant des bons d'achat servi au salarié excédait 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, alors que les montants comptabilisés ci-dessus précisés excèdent manifestement ce montant, rappel fait de ce que ce plafond a été fixé pour l'année 2014 à 3.129,00 euros de sorte que il est aisé de vérifier que le montant global des bons d'achat servi par l'employeur au cours de cette même année a largement excédé 5 % de ce montant. Il en est de même pour l'année 2015.

Aux termes de la lettre d'observations, l'inspecteur du recouvrement a constaté que certains bénéficiaires des bons de Noël n'étaient plus présents dans l'effectif de l'entreprise au moment de l'événement. Par ailleurs, s'agissant des bons cadeaux pour les enfants, l'entreprise a été dans l'incapacité de fournir aucun document permettant de vérifier leur existence. Il a enfin été distribué des bons « anniversaires » et « fêtes religieuses » alors que ces événements ne font pas parties des dérogations permettant d'exonérer les bons distribués de charges sociales.

Au rappel de ce que les dispositions relatives aux conditions d'exonération, dont l'interprétation ne fait pas discussion entre les parties, ne permettent ni de distribuer des bons cadeaux à des salariés non présents dans l'entreprise, ni de distribuer des bons cadeaux aux enfants de salariés dont l'existence et l'âge ne peut être vérifié, ni encore la distribution de bons au titre de l'anniversaire ou de fêtes religieuses, c'est à juste titre que l'inspecteur du recouvrement a réintégré dans l'assiette de cotisations le montant des bons dont la distribution est ainsi non conforme.

Le redressement doit être maintenu et le jugement confirmé.

Sur le chef de redressement n°6 : frais professionnels- limite d'exonération : chauffeurs- petits déplacements

Aux termes de la lettre d'observations, l'inspecteur du recouvrement a constaté que la société allouait systématiquement des indemnités de repas pour l'ensemble des salariés, moyennant un montant global des indemnités versées en 2014 de 53.880,00 euros et de 58.067,00 euros en 2015.

Il a donc été sollicité auprès de l'employeur les plannings des salariés pour les mois de mars 2014 et de mai 2015 afin de vérifier les heures et les lieux de livraison pouvant justifier le versement des indemnités. Cette demande est demeurée sans suite, aucun document n'a été produit prouvant que les salariés se trouvaient en situation de déplacement aux heures de repas.

En application de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature allouée en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels dans les conditions et limites fixées par arrêté ministériel.

Ces conditions d'exonération sont fixées par l'arrêté interministériel du 20 décembre 2002 selon les dispositions suivantes:

Article 1er :Les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Les sommes à déduire de l'assiette des cotisations de sécurité sociale au titre des frais professionnels, tels que prévus à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, sont celles qui sont versées aux travailleurs salariés ou assimilés, à l'exception des allocations forfaitaires prévues au 2° de l'article 2 ci-dessous perçues par les personnes visées aux 11°, 12° et 23° de l'article L. 311-3 dudit code pour l'exercice de leur fonction de dirigeant.

Article 2 : L'indemnisation des frais professionnels s'effectue :

1° Soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé ; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents. Ces remboursements peuvent notamment porter sur les frais prévus aux articles 6, 7 et 8 (3°, 4° et 5)°;

2° Soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9.

Article 3 :

Les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas les montants suivants :

1° Indemnité de repas :

Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 15 Euros par repas;

(...)

En l'espèce, la société verse à ses salariés des allocations forfaitaires. Ainsi, par application du texte précité, le salarié doit être en déplacement hors des locaux de l'entreprise, et les conditions de travail doivent l'empêcher de regagner sa résidence ou son lieu de travail pour le repas, de sorte qu'il se trouve exposé à des dépenses supplémentaires.

L'inspecteur du recouvrement a constaté l'impossibilité de vérifier si cette dernière condition était remplie. La société décrit dans ses conclusions la journée type de travail de chaque chauffeur livreur mais ne produit aucun justificatif démontrant l'impossibilité résultant des conditions de travail du salarié de regagner son domicile pour y prendre son repas de midi.

La référence à l'article 3 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux ouvriers frais de déplacement, attaché à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, ne démontre pas davantage que les chauffeurs de la société soient réputés obligés de prendre leur repas hors du lieu de travail car effectuant un service dont l'amplitude couvre entièrement les périodes comprises soit entre 11h45 et 14h15, soit entre 18h45 et 21h15.

Par ailleurs des bulletins de salaire produit ne permettent pas davantage d'établir les conditions de travail réel des chauffeurs livreur les empêchant de prendre leur repas de midi à leur domicile.

Dès lors, le redressement doit être maintenu et le jugement confirmé.

Sur le chef de redressement n°7 : réduction générale des cotisations : régularisation suite à redressement (éléments de salaire)

Eu égard au maintien des redressements relatifs aux bons d'achat et aux frais professionnels non justifiés, le calcul de la réduction générale des cotisations s'est trouvé modifié, selon des modalités qui ne sont pas discutées par l'appelante.

Il s'ensuit suffisamment que le redressement est justifié et doit être maintenu.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande d'allouer à l'URSSAF une somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'appelante, qui succombe à son appel, verra sa demande présentée à ce même titre rejetée, et supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

- Confirme le jugement du 8 janvier 2021 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- Condamne la SARL [4] à payer à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Provence Alpes Côte d'Azur la somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Déboute la SARL [4] de sa demande présentée à ce dernier titre.

- Condamne la SARL [4] aux dépens.

Le GreffierLe Conseiller pour la Présidente empêchée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/02400
Date de la décision : 17/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-17;21.02400 ?
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