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17/06/2022 | FRANCE | N°17/13717

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 17 juin 2022, 17/13717


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT AU FOND

DU 17 JUIN 2022



N° 2022/ 207













Rôle N° RG 17/13717 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA5GM







[L] [H]





C/



Association ASSOCIATION POUR ADULTES ET JEUNES HANDICAPES DU V AR (APAJH 83)





















Copie exécutoire délivrée

le : 17/06/2022

à :



Me François TOUCAS, avocat au bar

reau de TOULON



Me Agnès BALLEREAU-BOYER, avocat au barreau de GRASSE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 23 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F16/00173.





APPELANTE


...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 17 JUIN 2022

N° 2022/ 207

Rôle N° RG 17/13717 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA5GM

[L] [H]

C/

Association ASSOCIATION POUR ADULTES ET JEUNES HANDICAPES DU V AR (APAJH 83)

Copie exécutoire délivrée

le : 17/06/2022

à :

Me François TOUCAS, avocat au barreau de TOULON

Me Agnès BALLEREAU-BOYER, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 23 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F16/00173.

APPELANTE

Madame [L] [H]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2017/13098 du 30/11/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me François TOUCAS, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Association ASSOCIATION POUR ADULTES ET JEUNES HANDICAPES DU V AR (APAJH 83), [Adresse 2]

représentée par Me Agnès BALLEREAU-BOYER, avocat au barreau de GRASSE substitué pour plaidoirie par Me Coralie GARCIA, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 26 Avril 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Philippe SILVAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

M. Ange FIORITO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2022,

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon cinq contrats à durée déterminée, l'Association pour adultes et jeunes handicapés du Var (l'Apajh 83) a recruté Mme [H] en qualité de secrétaire/agent administratif selon le détail suivant :

- du 6 février 2007 au 5 février 2009 à raison de 26 heures hebdomadaires dans le cadre d'un contrat d'avenir,

- du 6 février 2009 au 5 février 2010 à raison de 24 heures hebdomadaires dans le cadre d'un contrat d'avenir,

- du 8 février 2010 au 26 février 2010 à raison de 27 heures hebdomadaires, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de droit commun motivé par un surcroît d'activité,

- du 15 mars 2010 au 14 mars 2012 à raison de 26 heures hebdomadaires dans le cadre d'un contrat unique d'insertion/accompagnement dans l'emploi.

La relation de travail s'est poursuivie à l'échéance de ce dernier contrat sous la forme d'un contrat à durée indéterminée sans signature d'un contrat de travail écrit entre les parties.

Le 4 avril 2012, l'Apajh 83 a procédé à la mise à pied conservatoire de Mme [H].

Le 25 avril 2012, Mme [H] a été licenciée pour faute grave.

Le 24 février 2016, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon d'une demande portant principalement sur la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet et en rappel de salaire afférent et en contestation de son licenciement.

Par jugement du 23 juin 2017, le conseil de prud'hommes de Toulon a déclaré celle-ci irrecevable en ses demandes à raison de la prescription de son action et a réservé les dépens.

Mme [H] a fait appel de ce jugement le 17 juillet 2017.

A l'issue de ses conclusions du 15 décembre 2017 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, l'Apajh 83 demande :

- déclarer Mme [H] irrecevable à agir au motif que son action est prescrite tant pour ses demandes découlant de la rupture du contrat de travail que pour celles relatives à la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

- déclarer Mme [H] irrecevable à agir au motif que son action est prescrite pour ses demandes de rappels de salaire ,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le recours au contrat de travail à durée déterminée (contrat unique d'insertion - contrat d'accompagnement dans l'emploi CUI-CAE) est régulier et légitime,

- dire et juger que la rupture du contrat de travail pour licenciement pour faute grave est parfaitement fondée, régulière et justifiée,

- dire et juger que les demandes de rappels de salaire formées par Mme [H] tirées de la durée du travail et de la classification de l'emploi sont infondées

- dire et juger que harcèlement morat n'est pas établi par Mme [H],

- dire et juger que les demandes formulées par Mme [H] sont non fondées dans leur principe et injustifiées dans leur montant ;

En conséquence';

débouter Mme [H] de IJensemble de ses demandes, fins et conclusions';

condamner Mme [H] au paiement de la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 29 juin 2021. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.

Au terme de ses conclusions du 15 avril 2022 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, Mme [H] demande de :

Prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture ayant fixée celle-ci au 29 juin 2021';

Débouter l'apajh 83 de sa demande visant à voir prononcer la péremption de l'instance';

la recevoir dans son appel et le dire fondé';

Infirmer le jugement du 23 juin 2016 en toutes ses dispositions';

Dire non prescrites ses demandes;

Requalifier son emploi en contrat de travail à temps complet et à durée indéterminée';

Condamner l'association apajh à lui verser les sommes suivantes :

Au principal : (pour un emploi a plein temps):

- au titre des rappels de salaires de base dus': 19.891,29 € bruts';

- au titre des heures supplémentaires dues': 1.220,89 € bruts';

- au titre des heures travaillées le dimanche et les jours fériés': 128,70 € bruts';

- au titre de l'indemnité compensatrice de congés payes due': 2.124,09 € bruts';

- au titre de l'indemnité compensatrice de préavis due': 3.621,94 € bruts';

- au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement': 4.225,07 €';

au titre de l'indemnité pour travail dissimule :11.216,58 €';

Subsidiairement : (pour un emploi a temps partiel)';

- au titre des rappels de salaires de base dus': 7.343,42 € bruts';

- au titre des heures complémentaires dues': 2.413,04 € bruts';

- au titre des heures travaillées le dimanche et les jours fériés': 128,70 € brut';

- au titre de l'indemnité compensatrice de congés payes due': 998,51 € bruts';

- au titre de l'indemnité compensatrice de préavis due': 3.621,94 € bruts';

- dommages et intérêts pour dépassement prolongé des heures complémentaires': 3.'000'€';

- au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement': 3.497,25 €';

- au titre de l'indemnité pour travail dissimulé': 10.583,64 €';

Dans tous les cas :

- indemnité prévue par l'article l.1245-2 du code du travail': 1.618,11 €';

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse': 12.000 €';

- dommages et intérêts pour harcèlement moral': 10.000 €';

- dommages et intérêts pour non-paiement des salaires dus a leur échéance mensuelle': 1.500,00€ + mémoire';

- dommages et intérêts pour non remise des documents sociaux (bulletins de paye, certificat de travail et attestation, destinée à pôle emploi) conformes 1.500 €';

- condamner l'apajh 83 à verser a l'urssaf les cotisations correspondant aux rémunérations des heures non déclarées par l'employeur sur les bulletins de paye pour le quantum et la rémunération de celles-ci que retiendra la cour d'appel';

- ordonner la remise par l'association apajh des documents sociaux rectifies en original pour mentionner les rémunérations dues a celle-ci retenues par la cour d'appel, a savoir :

- son certificat de travail mentionnant son emploi et les dates de début et de fin de son emploi en precisant s'il s'agit d'un temps complet';

- son attestation destinée à pôle emploi mentionnant la nature de son contrat de travail, son temps de travail et les rémunérations et accessoires dus qu'aura retenu la cour d'appel';

- ses bulletins de paye comprenant l'horaire de travail realise effectivement, la nature du contrat de travail et les rémunérations et accessoires dus depuis le 1er septembre 2011';

- assortir la remise de ces documents par l'employeur d'une astreinte de 50 € par jour de retard a compter de la notification qui lui sera faite du jugement a intervenir';

- condamner l'association apajh, outre aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, à lui verser la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile';

- debouter l'apajh 83 de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions comme infondées.

SUR CE :

Sur le rabat de l'ordonnance de clôture et la péremption d'instance.

Moyens des parties':

Mme [H] affirme que, compte tenu de l'avis rendu le 14 avril 2021 par la Cour de cassation quant à l'application du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, il est de bonne administration de la justice de prendre en considération cet avis au regard des conclusions adverses invoquant une péremption d'instance de la présente procédure, et qu'il convient donc de prononcer le rabat de l'ordonnance de clôture à cet effet.

Elle expose en outre qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes avant le 1er août 2016, qu'il y a lieu de faire application des règles de péremption applicables en matière prud'homale à cette date, que la cour d'appel n'a mis aucune diligence à sa charge et, en tout état de cause, que son conseil a régulièrement relancé le greffe par voie téléphonique pour connaître la date de l'audiencement de l'affaire et que son dernier appel remonte à moins d'un an.

Elle estime enfin que le prononcé d'une caducité serait contraire aux dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme puisqu'elle serait sanctionnée à raison du non respect par l'Autorité judiciaire du droit au procès dans un délai raisonnable.

L'Apajh 83 n'a pas conclu sur ce point.

Réponse de la cour':

A l'audience de plaidoiries, l'Apajh 83 ne s'est pas opposée à la révocation de l'ordonnance de clôture. Il sera donc fait droit à la demande de Mme [H] de ce chef. Il ne ressort pas des conclusions adressées à la cour par l'Apajh 83 que celle-ci a soulevé la péremption de l'instance. Il n'y a donc pas lieu à répondre à l'argumentation développée de ce chef par Mme [H].

Sur la prescription':

moyens des parties':

Mme [H] soutient que l'Apajh 83 ne peut lui opposer la prescription de son action aux motifs qu'elle ne peut prétendre qu'elles auraient conventionnellement prévu une prescription abrégée à une année à l'exception des demandes relatives aux salaires puisqu'il ressort de l'article 2254 code civil que les parties ne peuvent de manière conventionnelle abréger le délai de prescription aux actions relatives aux rappels de salaires, mais aussi, à tous les accessoires de salaires (congés payés, primes, heures supplémentaires, indemnité de préavis,') ainsi qu'à toutes les sommes nées de l'exécution successive du contrat de travail comme étant « payables par année ou à des termes périodiques plus courts » comme les indemnités de licenciement et que l'Apajh 83 ne rapporte pas la preuve de son accord pour renoncer aux délais de prescription prévus par code du travail, que la prescription des demandes au titre des salaires et accessoires est prévue par l'article L.'3245-1 du code du travail dans sa version issue de la loi du 14 juin 2013 et que, compte-tenu des dispositions transitoires de cette loi, le délai qui lui incombait pour saisir le conseil de prud'hommes expirait le 17 Juin 2016, que ce délai concernait ses demandes au titre des salaires de base, des heures supplémentaires qui lui restaient dues des demandes d'indemnisation au titre de repos hebdomadaires non pris ainsi que de repos compensateur de remplacement, des congés payés qui lui restaient dus pour 2010 sur la période du 1er Juin 2009 au 31 mai 2010, 2011, sur la période du 1er Juin 2010 au 31 Mai 2011 et 2012 sur la période du 1er Juin 2011 au 27 Avril 2012, de l'indemnité compensatrice de congés payés qui lui était due au terme de son emploi, de l'indemnité compensatrice de préavis comprenant les Congés payés dus sur le préavis de toute prime pouvant être due entre le 1er Avril 2009 et le terme du préavis, dont celle d'ancienneté, de la part salariale ou la part patronale des cotisations sociales et des indemnités de licenciement, qu'il est nécessaire, pour déterminer le montant des salaires restant dus, de déterminer l'emploi conventionnel sur lequel elle était affectée réellement, que l'action en requalification de l'emploi occupé au sein de l'Apajh 83, qui constitue l'accessoire nécessaire du rappel de rémunération, est donc soumise à ce délai de prescription de trois ans, que la reconnaissance par la cour d'appel du harcèlement moral dont elle a été la victime constitue le point de départ à compter elle sera en mesure de soulever la nullité de son licenciement pour harcèlement moral en application de l'article L.1152-3 précité et que le délai de prescription de son action en nullité de son licenciement n'a pas encore couru.

L'Apajh 83 soutient que l'action de Mme [H] au titre de la rupture de son contrat de travail et au titre de la requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est prescrite aux motif que celle-ci a engagé son action plus d'un an après la fin de la relation de travail alors que le contrat de travail prévoyait de réduire à un an le délai de prescription de toutes les actions résultant de la conclusion, de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, que la loi du 17 juin 2013 a instauré une prescription salariale de deux ans et que, compte tenu des dispositions transitoires de cette loi, Mme [H] avait jusqu'au 17 juin 2015 pour agir.

Réponse de la cour':

L'article 2254 code civil prévoit que la durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des parties, qu'elle ne peut toutefois être réduite à moins d'un an ni étendue à plus de dix ans mais que ces dispositions ne sont pas applicables aux actions en paiement ou en répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyers, fermages, charges

locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou à des termes périodiques plus courts.

En l'espèce, le contrat de travail invoqué par l'Apajh 83, prévoyant de réduire à la durée d'une année le délai de prescription de toutes actions résultant de la conclusion, de l'exécution et de la rupture du contrat de travail n'a pas été signé par Mme [H]. Il n'est donc pas justifié par l'ex-employeur de l'accord de sa salariée sur la réduction des délais de prescription. Il ne peut en conséquence s'en prévaloir pour conclure à la prescription de l'action de son ex-salariée.

Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail':

L'article L.'1471-1 du code du travail, créé par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, dispose que toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. Ce délai était antérieurement de cinq ans.

L'article 21.V de la loi du 14 juin 2013 précise que cette modification des délais de prescription s'applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, que lorsqu'une instance a été introduite avant la promulgation de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne et que cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Il en résulte en conséquence que les demandes en dommages et intérêts formées par l'Apajh 83 à l'encontre de Mme [H] au titre de l'exécution du contrat de travail et portant sur la non-remise des documents sociaux à l'issue de la rupture du contrat de travail, le non-paiement des salaires à leur échéance mensuelle et la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée sont régies par le délai de deux ans précités.

La demande en dommages et intérêts formée par Mme [H] au titre de la non-conformité des documents de fin de rupture de son contrat de travail, du retard de l'Apajh 83 dans la délivrance de ces documents et du non-paiement du salaire à bonne date, formée plus de deux ans après la cessation de la relation de travail, s'avère en conséquence irrecevable.

Il est de jurisprudence constante que le délai de prescription de l'action en requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat, a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat.

Par ailleurs, la demande en requalification par Mme [H] de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, fondée sur le non-respect par l'employeur du délai de carence entre les contrats de travail ou la violation de l'obligation de professionnalisation lui incombant au titre du contrat de professionnalisation, se fonde non pas sur la violation du formalisme afférent au contrat à durée déterminée mais sur l'exécution de la relation de travail. Dès lors, le délai de prescription devra courir, concernant la demande formée au titre de la violation du délai de carence, à compter du terme du dernier contrat et, concernant la demande formée sur l'absence de formation dans le cadre du contrat de professionnalisation, à l'issue de ce denier contrat.

Mme [H] a formé sa demande en requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée plus de deux ans après le terme du dernier contrat de travail. Elle sera par conséquent déclarée irrecevable en sa demande de ce chef.

sur les demandes de nature salariale':

L'article L.'3245-1 du code du travail, dans sa version initiale, prévoyait que l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2277 du code civil (devenu l'article 2224 du même code).

L'article L.'3245-1 du code du travail, dans sa version issue de la loi du 14 juin 2013 dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer et que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

L'article 21.V de la loi du 14 juin 2013 précise que cette modification des délais de prescription s'applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, que lorsqu'une instance a été introduite avant la promulgation de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne et que cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Il est de principe que l'action en requalification du contrat de travail en contrat à temps complet est une action en paiement du salaire soumise au délai de prescription prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail.

En l'espèce, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes plus de trois ans après son licenciement. Elle s'avère en conséquence irrecevable en ses demandes au titre d'un rappel de salaire sur classification, en paiement de l'indemnité de sujétion spéciale, en paiement de la majoration pour travail le dimanche, en paiement de l'indemnité compensatrice sur congés payés, en rappel sur heures supplémentaires ou heures complémentaires et en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail':

L'article L.'1471-1 du code du travail, créé par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, dans sa version en vigueur lors de la saisine du conseil de prud'hommes de Toulon par Mme [H], prévoyait que toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. Ce délai était antérieurement de cinq ans.

L'article 21.V de la loi du 14 juin 2013 précise que cette modification des délais de prescription s'applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, que lorsqu'une instance a été introduite avant la promulgation de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne et que cette loi s'applique également en appel et en cassation.

Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon d'une demande en contestation de son licenciement plus de deux ans après la rupture du contrat de travail. Elle s'avère en conséquence irrecevable en sa demande de de ce chef.

sur les autres demandes':

Les demandes formées par Mme [H] à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et en paiement au titre de l'indemnité pour travail dissimulé étaient soumises lors de l'introduction de l'instance au délai de prescription de cinq ans prévu par l'article 2224 code civil.

Il ressort de l'argumentation développée par Mme [H] que les faits de harcèlement moral aurait entraîné chez elle, à compter de janvier 2012, un état dépressif réactionnel à des conflits professionnels, soit moins de cinq ans avant la saisine du conseil de prud'hommes. Par ailleurs, Mme [H] saisi la juridiction prud'homale moins de cinq ans après son licenciement.

Dès lors, ses demandes en dommages et intérêts pour harcèlement moral et en paiement de l'indemnité pour travail dissimulé, s'avèrent recevables.

Sur le harcèlement moral':

moyens des parties':

Mme [H] expose qu'elle travaillait plus que l'horaire mentionné sur son contrat de travail s'achevant le 14 Mars 2012, qu'elle s'est investie dans ses missions, celles-ci allant au-delà de celles relevant de sa qualification d'Agent Administratif, que l'arrivée d'un nouveau président l'a amené à s'investir encore plus, qu'elle a fait l'objet de l'acharnement du nouveau président lequel visait à la présenter comme une menteuse, à lui imposer des conditions de travail dégradées de force, à lui reprocher de venir travailler à ne pas entendre ses propositions de rupture conventionnelle, à lui opposer des fautes qu'elle n'a jamais commises pour la licencier, à lui demander des tâches visant à refaire le travail déjà effectué s'agissant des états des courriers et courriels et à l'empêcher de disposer du temps nécessaire pour réaliser ses missions tout en lui reprochant injustement de ne pas les avoir réalisées.

Elle indique que ces faits ont dégradé son état de santé puisqu'elle a présenté, de janvier 2012 à janvier 2013, une dépression réactionnelle à des conflits professionnels et qu'elle est donc fondée à solliciter l'indemnisation du préjudice ainsi subi.

L'Apajh 83 conteste tout fait de harcèlement moral. Elle fait valoir que Mme [H] met en avant son investissement puis tente d'imputer des agissements au Président de l'Apajh lui-même sans verser un seul élément de preuve, que le certificat médical versé aux débats, établi par son médecin traitant, ne fait que relater ses dires et s'avère dépourvu de toute force probante quant à l'imputation de l'état de santé de Mme [H] avec sa situation professionnelle, que la période concernée porte du mois de janvier 2012 au mois de janvier 2013 et que, pourtant, Mme [H] a décidé de s'engager avec l'association dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

réponse de la cour':

L'article L.'1152-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Il résulte des dispositions précitées et de l'article L.'1154-1 du code du travail, dans sa version en vigueur lors de l'introduction de l'instance, qu'il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail et que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, Mme [H] verse aux débats les courriels échangés avec son employeur courant mars 2012 portant sur le projet de contrat à durée indéterminée qui lui avait été adressé par son employeur et dans le cadre desquels elle marque son étonnement sur la régression de la rémunération proposée, un courrier de l'Apajh 83 du 29 mars 2012 dans lequel cette dernière s'étonne du refus de Mme [H] de signer ce projet de contrat et l'invite à respecter ses horaires de travail, sa lettre de licenciement pour faute grave du 25 avril 2012, un tableau présenté comme faisant le résumé des heures de travail réalisées entre septembre 2011 et avril 2012, le témoignage de Mme [U] qui indique qu'elle se rendait une fois par semaine au sein de l'association et que Mme [H], qui devait pallier au manque de personnel, ne disposait pas du temps nécessaire pour accomplir ses missions et, enfin, un certificat médical d'un médecin attestant l'avoir suivie entre janvier 2012 et janvier 2013 à raison d'une dépression réactionnelle à des conflits professionnels';

Ces éléments, pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence de faits de harcèlement moral à l'égard de l'Apajh 83. En effet, les documents précités n'établissent pas que Mme [H] a été présentée comme une menteuse, que des conditions de travail dégradé lui ont été imposées, que ses demandes de rupture conventionnelle de son contrat de travail n'ont pas été entendues par l'employeur, qu'il lui a été demandé de refaire un travail déjà effectué.

Par ailleurs, la décision de licenciement pour faute grave de Mme [H], dont il a été retenu que cette dernière a été prescrite pour en contester le bien-fondé, emporte rupture de la relation de travail et ne peut en conséquence porter sur son exécution. En outre, le témoignage de Mme [U], par sa généralité, n'apparaît pas suffisamment pertinent pour apporter la preuve que Mme [H] ne disposait pas du temps suffisant pour réaliser ses missions et qu'elle s'est vue reprocher injustement de ne pas les avoir réalisées. De surcroît, le certificat médical précité ne fait que reprendre les déclarations de Mme [H] sans relater aucun fait auquel son rédacteur aurait personnellement assisté. Enfin, s'il est exact que le 29 mars 2012, l'Apajh 83 a émis envers Mme [H] divers griefs portant sur ses horaires de travail, il est de jurisprudence constante qu'un seul fait isolé ne peut caractériser un harcèlement moral. Mme [H] sera par conséquent débouté de sa demande en dommages-intérêts de ce chef.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé':

moyens des parties':

Mme [H] expose que, de manière intentionnelle, l'Apajh 83 n'a pas fait figurer sur ses bulletins de paie les heures supplémentaires ou complémentaires qu'elle a réalisée et qu'elle est donc fondée à réclamer sa condamnation au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.

L'Apajh 83 n'a pas conclu sur cette demande.

Réponse de la cour':

L'article L'8221-5 du code du travail énonce qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur ':

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L'8223-1 du même code prévoit qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l'article L'8223-1, de la volonté chez l'employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.

Il a été retenu que Mme [H] était prescrite en sa demande en paiement en rappel de salaire sur heures supplémentaires ou complémentaires. Dès lors, la présente cour n'est pas en mesure de statuer sur l'existence d'heures supplémentaires ou complémentaires réalisées par Mme [H] et ne figurant pas sur son bulletin de paie. L'élément matériel du délit de travail dissimulé ne peut donc être établi. Mme [H] sera par conséquent déboutée de sa demande de ce chef.

sur le surplus des demandes':

Enfin, Mme [H] partie perdante, sera déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles. Il n'apparaît pas inéquitable de débouter l'Apajh 83 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement,

REVOQUE l'ordonnance de clôture';

FIXE la clôture de l'instruction au 26 avril 2022, 14 heures';

DECLARE Mme [H] recevable en son appel';

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Toulon du 23 juin 2017 en ce qu'il a déclaré Mme [H] irrecevable en ses demandes en dommages et intérêts pour harcèlement moral et en paiement de l'indemnité pour travail dissimulé';

LE CONFIRME pour le surplus';

STATUANT à nouveau et y ajoutant';

DECLARE Mme [H] recevable en sa demande en dommages et intérêts pour harcèlement moral';

DECLARE Mme [H] recevable en sa demande en indemnité pour travail dissimulé';

DEBOUTE Mme [H] de ses demandes en dommages et intérêts pour harcèlement moral et en indemnité pour travail dissimulé';

DEBOUTE Mme [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

DEBOUTE l'Apajh 83 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE Mme [H] aux dépens qui seront recouvrés comme il est prescrit en matière d'aide juridictionnelle.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 17/13717
Date de la décision : 17/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-17;17.13717 ?
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