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16/06/2022 | FRANCE | N°19/09613

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 16 juin 2022, 19/09613


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 16 JUIN 2022

sa

N° 2022/ 296













Rôle N° RG 19/09613 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BENZ6







[J], [Y], [W] [N]

[S], [L] [H] épouse [N]

SAS [N]

SCI SOCIETE 53





C/



Société LE HULLOT

Société LE MAIFFRET















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL STEMMER-B

RICE-FOUR



Me Sophie DEBETTE









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 15 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01118.





APPELANTS



Monsieur [J], [Y], [W] [N]

demeurant 120, Boulevard Gazagnaires - 06400...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 16 JUIN 2022

sa

N° 2022/ 296

Rôle N° RG 19/09613 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BENZ6

[J], [Y], [W] [N]

[S], [L] [H] épouse [N]

SAS [N]

SCI SOCIETE 53

C/

Société LE HULLOT

Société LE MAIFFRET

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL STEMMER-BRICE-FOUR

Me Sophie DEBETTE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 15 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01118.

APPELANTS

Monsieur [J], [Y], [W] [N]

demeurant 120, Boulevard Gazagnaires - 06400 CANNES

représenté par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN de la SELARL STEMMER-BRICE-FOUR, avocat au barreau de NICE, plaidant

Madame [S], [L] [H] épouse [N]

demeurant 120, Boulevard Gazagnaires - 06400 CANNES

représentée par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN de la SELARL STEMMER-BRICE-FOUR, avocat au barreau de NICE, plaidant

SAS [N] prise en la personne de son président Monsieur [J] [N] domicilié en cette qualité au siège, 120, Boulevard Gazagnaires - 06400 CANNES

représentée par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN de la SELARL STEMMER-BRICE-FOUR, avocat au barreau de NICE, plaidant

SCI SOCIETE 53, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, 120, Boulevard Eugène Gazagnaires - 06400 CANNES

représentée par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN de la SELARL STEMMER-BRICE-FOUR, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMES

Syndicat de copropriété LE HULLOT, sis 53 rue d'antibes - 06400 06400 CANNES, pris en la personne de son syndic en exercice le cabinet HAK, SARL, dont le siège social est sis Villa d'Artois 52 bd Sadi Carnot, pris en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège

représenté par Me Sophie DEBETTE, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

Syndicat de copropriété LE MAIFFRET, sis 53 rue d'antibes - 06400 06400 CANNES, représenté par son syndic en exercice la SARL cabinet HAK , dont le siège social est sis Villa d'Artois 52 Boulevard Sadi Carnot 06110 LE CANNET prise en la personne de son représentant légal domicilié de droit audit siège

représenté par Me Sophie DEBETTE, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Sylvaine ARFINENGO, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022,

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Les deux immeubles, Le Hullot et Le Maiffret, sont respectivement situés au 53 et 53 bis rue d'Antibes à Cannes et ils appartenaient à l'origine à une même famille.

Ces immeubles possèdent une entrée commune, une cour commune, une toiture commune, et ils ont toujours géré ensemble les parties communes, le syndic convoquant l'ensemble des copropriétaires des deux immeubles à chaque assemblée générale.

La SAS [N] est propriétaire des lots 10 et 11 dépendant de l'immeuble Le Maiffret

Monsieur et Madame [N] sont propriétaires des lots 3 et 12 au sein du même immeuble.

La SCI 53 est propriétaire des lots 3 et 4 constituant le premier étage de l'immeuble Le Hullot.

La SAS [N] exploite un laboratoire d'analyses médicales.

Elle expose qu'ayant obtenu un permis de construire pour la mise aux normes de ses locaux, elle déplore le refus des deux syndicats des copropriétaires de l'autoriser à effectuer les travaux.

La société [N] a, suivant exploit introductif d'instance en date du 17 février 2015, assigné le syndicat des copropriétaires Le Hullot et le Syndicat des Copropriétaires Le Maiffret aux fins de se voir autoriser à effectuer, sur le fondement des dispositions de l'article 30 alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965, les travaux prévus par le permis de construire n° 006029130128 et aux fins de voir condamner solidairement les deux syndicats des copropriétaires au paiement d'une somme de 336.000 € à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'à une indemnité de procédure.

Selon exploit d'huissier délivré le 13 avril 2017 à la requête de la SAS [N], de Monsieur [J] [N], de Madame [S] [H] épouse [N] et de la SCI 53 à l'encontre du cabinet Hak, syndic des deux copropriétés Le Maiffret et Le Hullot et de sa compagnie d'assurance, la société Axa.

Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement du 15 mai 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a débouté l'ensemble des parties de leurs demandes et a condamné les demandeurs aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que seuls les travaux relevant de l'article 25 de la loi pouvaient faire l'objet d'une autorisation judiciaire, et non ceux relevant de l'article 26; que les travaux en cause induisant une appropriation des parties communes ou une modification du règlement de copropriété ne pouvaient pas être autorisés par le tribunal....

Le 17 juin 2019, la SAS [N], Monsieur [J] [N], Madame [S] [H] épouse [N] et la SCI 53 ont relevé appel de cette décision, intimant devant la cour les deux syndicats des copropriétaires.

Ils ont saisi le conseiller de la mise en état d'un incident aux fins d'expertise.

Ils en ont été déboutés selon ordonnance du 22 septembre 2020.

Selon leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 15 avril 2022, Monsieur [J] [N], Madame [S] [H] épouse [N] et la SCI 53 demandent à la cour, sur le fondement de l'article 30 de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 1240 du code civil, de :

-réformer le jugement du 15 mai 2019 en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes,

-les autoriser à effectuer les travaux prévus par le permis de construire n°006 029 13 0128 tel que modifié et soumis aux assemblées de 2015 et 2016,

-condamner solidairement les syndicats des copropriétaires intimés à leur verser la somme de 1.435.000€ de dommages-intérêts pour perte de jouissance outre 142.306,58 euros au titre du préjudice matériel,

-condamner les mêmes chacun au paiement de la somme de 20.000 euros pour préjudice moral,

A titre subsidiaire, avant-dire droit,

-désigner tel expert qu'il plaira à la cour et lui confier la mission de :

'se rendre à l'ensemble immobilier situé 53, rue d'Antibes à Cannes,

'se faire communiquer tous documents et pièces utiles à sa mission,

'analyser les règlements de copropriété des deux immeubles et déterminer les parties privatives et communes desdites copropriété,

'constater la non-conformité des locaux appartenant aux demandeurs aux normes requises pour l'exploitation professionnelle,

'analyser le permis de construire déposer ainsi que ses modificatifs afin de déterminer si les travaux entrepris sont de travaux principalement de mise aux normes requis pour l'exploitation professionnelle des locaux et de déterminer s'ils emportent annexion des parties communes de l'une des copropriétés susvisés,

'condamner les syndicats intimés au paiement, chacun, de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

Les appelants soutiennent, en substance, que :

'les syndicats des copropriétaires invoquent vainement la péremption du permis de construire

'les travaux consistent tout d'abord en la création d'un couloir respectant les normes d'accessibilité et de sécurité incendie : ces travaux ne concernent pas les parties communes de l'immeuble ; en outre, les travaux sont destinés à une mise aux normes. Ce sont des travaux d'amélioration au sens de l'article 30 de la loi;

- les travaux consistent ensuite dans le remplacement de l'escalier actuel par une passerelle située au premier étage: la création de cette passerelle a déjà été autorisée par une assemblée générale en 1983. La création de cette passerelle couverte n'entraîne aucune appropriation des parties communes puisqu'elle est située au premier étage de l'immeuble. Sans doute affecterait-t-elle l'aspect extérieur de l'immeuble, auquel cas elle nécessiterait une autorisation sur le fondement de l'article 25 b mais non de l'article 26,

'les travaux concernent ensuite la création d'un ascenseur à l'intérieur des locaux de la société [N], donc à l'intérieur de locaux entièrement privés. Il s'agit en outre de travaux d'amélioration,

'les travaux concernent également la création d'un nouvel accès au bâtiment B avec un escalier à l'arrière du bâtiment appartenant à la société [N];

'les travaux concernent enfin la création d'une extension qui sera faite sur la terrasse Nord appartenant en toute propriété aux époux [N];

-le tribunal s'est fondé sur le rapport d'un expert qui a été requis par les syndicats de copropriétaires et qui n'est pas contradictoire, et dont la rédaction imprécise ne permet pas de déterminer si la consultation de l'expert a été sollicitée sur la base du permis modifié tel que soumis à l'assemblée générale du 11 décembre 2015,

-les travaux envisagés n'affectent ni les droits des autres copropriétaires ni les parties communes des deux immeubles: l'extension reprochée est envisagée sur une terrasse privative, tandis que les autres travaux sont des travaux d'amélioration bénéficiant à tous;

-la société [N] subit un préjudice car en refusant sans raison l'exécution de ces travaux, les deux copropriétés ont empêché la jouissance normale de ses locaux destinés à l'usage professionnel et empêché la mise en conformité des accès au laboratoire. Ils ont également contraint la société [N] a prononcé aux travaux commandés à des entreprises aujourd'hui en liquidation judiciaire et contraint les appelants à de multiples démarches.

Selon leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 20 avril 2022, le syndicat des copropriétaires Le Hullot et le syndicat des copropriétaires Le Maiffret demandent à la cour de :

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse,

-débouter la société [N], Monsieur et Madame [N] ainsi que la SCI 53 de l'ensemble de leurs demandes,

-les débouter de leur demande subsidiaire avant dire droit de désignation d'un expert,

Y ajoutant,

-condamner solidairement la société [N], Monsieur et Madame [N] ainsi que la SCI 53 à payer au syndicat des copropriétaires Le Maiffret la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

-les condamner solidairement à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Hullot la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

-les condamner solidairement au paiement d'une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les syndicats des copropriétaires font valoir, en substance, que :

-le permis de construire sur lequel ils fondent leur demande d'autorisation de travaux est caduc depuis de nombreuses années, puisqu'il a été accordé le 27 juin 2014 et qu'il était valable à cette époque pour une durée de 2 ans.

-les travaux, pour lesquels les consorts [N] ont sollicité un permis de construire, touchent aux parties communes et doivent préalablement être autorisés par une décision d'assemblée générale,

-les assemblées générales ont toujours refusé cette autorisation de travaux,

-à l'examen du permis déposé, il apparaît que les travaux projetés ne sont pas de simples travaux de mise en conformité aux règles d'accessibilité, mais sont surtout des travaux d'extension, de réhabilitation, et d'aménagement, augmentant la surface de plancher de 243 à 275 m².

-sont également envisagés la création d'un ascenseur dans la cour commune aux lieu et place de l'escalier en fer existant, et l'agrandissement du 1er étage et des ouvertures en façade par une construction à édifier sur la terrasse, partie commune de l'immeuble.

-seule une autorisation judiciaire peut être sollicitée lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b.

-en l'espèce, les travaux envisagés devaient être autorisés à la double majorité de l'article 26, de sorte que l'article 30 n'est pas applicable.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 avril 2022.

Motifs de la décision :

1-L'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au litige, énonce que l'assemblée générale des copropriétaires, statuant à la majorité prévue à l'article 25, peut, à condition qu'elle soit conforme à la destination de l'immeuble, décider toute amélioration, telle que la transformation d'un ou de plusieurs éléments d'équipement existants, l'adjonction d'éléments nouveaux, l'aménagement de locaux affectés à l'usage commun ou la création de tels locaux.

Elle fixe alors, à la même majorité, la répartition du coût des travaux et de la charge des indemnités prévues à l'article 36 ci-après, en proportion des avantages qui résulteront des travaux envisagés pour chacun des copropriétaires, sauf à tenir compte de l'accord de certains d'entre eux pour supporter une part de dépenses plus élevée.

Elle fixe, à la même majorité, la répartition des dépenses de fonctionnement, d'entretien et de remplacement des parties communes ou des éléments transformés ou créés.

Lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d'amélioration visés à l'alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu'il est possible d'en réserver l'usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu'en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée.

L'article 25 b de cette loi dispose que ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci.

Il ressort de ces textes que les travaux pour l'exécution desquels l'autorisation du tribunal peut être demandée doivent être des travaux d'amélioration au sens de l'article 30 alinéa 1er, ce dont le demandeur à l'autorisation doit rapporter la preuve.

Une telle autorisation suppose, outre un refus définitif de l'assemblée générale, le caractère améliorant des travaux, le respect de la destination de l'immeuble, l'absence d'atteinte aux droits des autres copropriétaires, ainsi que l'absence d'emprise sur les parties communes, dont il résulterait une aliénation de celles-ci.

Enfin, il n'est pas nécessaire que cette amélioration bénéficie aux autres copropriétaires.

En l'espèce, il est constant que par une assemblée générale des copropriétaires des immeubles Le Maiffret et Le Hullot, réunie le 26 avril 2016, les demandes d'autorisation de travaux soumises à cette assemblée par la SAS [N] d'une part, par Monsieur et Madame [N] d'autre part, ont été rejetées aux termes des deux résolutions suivantes :

-la résolution n°14, inscrite à l'ordre du jour, à la demande de la SAS [N], libellée en ces termes:

« Demande de la SAS [N] : autorisation à donner à la SAS [N] de réaliser son projet sur l'immeuble Le Maiffret tel que décrit dans le PC n°0602913128 (suivant plan et lettre du 25/09/2015 en annexe); Article 25 »

Cette résolution a été rejetée à la majorité des voix de tous les copropriétaires.

-la résolution n°15, inscrite à l'ordre du jour à la demande de Monsieur et Madame [N], en ces termes : « Autorisation à leur donner pour agrandir l'ouverture (fenêtre du bureau) sur la façade nord et couvrir par un projet esthétique toute la passerelle depuis le labo jusqu'à l'immeuble B Le Maiffret (article 25) ».

Cette résolution a été rejetée à la majorité des voix de tous les copropriétaires.

Il sera observé, à titre liminaire, que la SCI 53, qui n'a sollicité aucune autorisation de travaux de la part de l'assemblée générale, est mal fondée à invoquer l'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, et ne peut être que déboutée de ses demandes.

Il sera aussi observé que les travaux dont la réalisation a été sollicitée ne sont pas détaillés dans la demande d'autorisation soumise à l'assemblée générale selon la résolution n°14, pas plus qu'ils ne le sont dans les prétentions soumises à la cour selon le dispositif des conclusions précité, qui fait référence au projet tel que décrit dans le permis de construire n°006 029 13 0128.

Dans leurs conclusions, ainsi qu'ils l'avaient fait en première instance, les appelants détaillent ainsi les travaux envisagés :

-la création d'un couloir respectant les normes accessibilité et de sécurité incendie par un passage dans les parties privées de Monsieur et Madame [N] situées au premier étage du Maiffret A,

-le remplacement de l'escalier actuel par une passerelle située au seul premier étage,

-la création d'un ascenseur à l'intérieur des locaux de la SAS [N],

-la création de nouveaux accès au bâtiment B, avec un escalier à l'arrière du bâtiment appartenant à la SAS [N],

-la création d'une extension sur une partie privée au nord, hors copropriété.

Cependant, tenue par le dispositif des conclusions des appelants, la cour ne peut examiner les travaux projetés que tels qu'ils résultent du permis de construire et des résolutions de l'assemblée générale.

Il s'agit, en particulier, des travaux suivants :

-agrandissement de l'ouverture (fenêtre du bureau) sur la façade nord et couverture par un projet esthétique toute la passerelle depuis le laboratoire jusqu'à l'immeuble B Le Maiffret : il n'est pas établi que ces travaux, à vocation esthétique, constituent une amélioration au sens des textes précités;

-extension de la terrasse dépendant du lot n° 10 : selon les plans du permis de construire, il s'agit d'un projet d'agrandissement de cette terrasse dont les appelants indiquent qu'elle est privative. Les syndicats des copropriétaires, contestent cette qualification. Ils affirment, sans être contredits, que la création de cette extension permettrait d'obtenir une surface de 76 m² et qu'une telle construction impliquerait la démolition d'une partie du mur de la façade, et la modification de celle-ci. Par ailleurs, les plans du permis de construire ne permettent pas à la cour de s'assurer que l'extension projetée ne s'accompagne d'aucune annexion de parties communes.

-création d'un ascenseur: les parties sont contraires sur ce point, les appelants affirmant que l'ascenseur sera entièrement situé dans les locaux de la SAS [N], donc dans ses parties privatives, tandis que le syndicat des copropriétaires le conteste. En toute hypothèse, les plans du permis de construire ne permettent pas à la cour de déterminer que l'ascenseur serait entièrement situé dans les parties privatives, sans induire une appropriation des parties communes.

- la création de nouveaux accès, le remplacement de l'escalier.

D'une manière générale, il sera relevé que selon le permis de construire, tous les travaux envisagés sont des travaux d'extension, de réhabilitation, d'aménagement, augmentant la surface plancher de 243 m² à 275 m², mais également de travaux de mise en conformité totale aux règles d'accessibilité, ce dont le tribunal, comme la cour aujourd'hui, avait relevé qu'il n'en était pas justifié.

Le tribunal a justement relevé, pour l'ensemble des travaux projetés, que la seule consultation des plans du permis de construire ne permettait pas de s'assurer que ceux-ci ne s'accompagnaient pas d'une aliénation des parties communes.

Par ailleurs, aucune information -étude par un architecte ou un ingénieur sur la faisabilité technique du projet, les contraintes possibles ou les risques pour la copropriété- n'est fournie par les appelants sur les conditions de réalisation des différents travaux projetés, de sorte que la cour n'est pas en mesure de mesurer l'incidence qu'ils pourraient avoir sur la vie de la copropriété, en particulier quant à leur la durée possible et aux différentes nuisances pouvant être subies par les copropriétaires.

Du reste, à l'occasion des assemblées générales, seul le permis de construire a été produit, avec un courrier écrit par la SAS [N] le 28 septembre 2015, demandant l'inscription à l'ordre du jour des résolutions en cause.

Les demandeurs à l'autorisation de travaux auraient pu, là aussi, produire une étude d'architecte, décrivant les aspects techniques des travaux, leurs avantages, leurs inconvénients possibles, les changements pour la copropriété, ce qui aurait permis de délivrer à l'ensemble des copropriétaires une information claire et complète, ce dont ils se sont abstenus.

Ainsi, l'avis de l'architecte de la copropriété aurait pu être préalablement recueilli sur l'ensemble de ces travaux alors même qu'un tel avis est exigé par les règlements de copropriété des deux immeubles avant toute exécution de travaux affectant le gros oeuvre, partie commune .

Il s'en déduit que les conditions de réalisation de ces travaux restent indéterminées.

Au surplus, le tribunal a justement considéré :

-que les demandeurs à l'instance, aujourd'hui appelants, ne rapportaient pas la preuve de la nécessité d'exécuter des travaux pour des raisons de mise aux normes d'une quelconque réglementation. Nonobstant la carence probatoire relevée par le premier juge, il sera observé que cette preuve n'est pas davantage établie en cause d'appel,

-que les plans composant le dossier de permis de construire ne permettaient de déterminer si les travaux annoncés comme devant avoir lieu dans les parties privatives se limitaient exactement à ces parties.

Enfin, il sera observé que le permis de construire sur le fondement duquel les appelants poursuivent l'autorisation de travaux est, à ce jour, caduc.

Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande d'autorisation de travaux.

2-L'article 1240 du code civil énonce que tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il incombe donc aux appelants, qui sollicitent, sur le fondement du texte précité, la condamnation des syndicats des copropriétaires intimés à leur payer la somme de 1.435.000 euros de dommages-intérêts, dont 142306,58 euros au titre du préjudice matériel, de rapporter la triple démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité direct entre eux.

Or, les travaux projetés ont été rejetés par l'assemblée générale des copropriétaires, dont il n'est pas établi que sa décision serait constitutive d'une faute.

Du reste, si les appelants insistent sur leur préjudice, ils sont défaillants à démontrer quelle aurait été la faute commise par les syndicats des copropriétaires, tenus de respecter les décisions prises par l'assemblée générale.

Est évoqué le fait que la réalisation de ces travaux aurait été refusée « sans raison ».

Cependant, les assemblées générales ne sont pas tenues de motiver leurs décisions. Il n'est ni allégué, ni, a fortiori démontré, que les résolutions critiquées seraient constitutives d'un abus de majorité, et n'auraient été prises que dans le dessein de faire échec aux projets des appelants.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de dommages-intérêts, ces derniers étant, pour les mêmes motifs, déboutés du surplus de leur demande en cause d'appel.

3-Subsidiairement, les appelants sollicitent une mesure d'expertise avec la mission suivante « analyser le permis de construire déposer ainsi que ses modificatifs afin de déterminer si les travaux entrepris sont de travaux principalement de mise aux normes requis pour l'exploitation professionnelle des locaux et de déterminer s'ils emportent annexion des parties communes de l'une des copropriétés susvisés ».

Or, la cour a déjà débouté les appelants des demandes qu'ils ont formées à titre principal, la demande d'expertise étant formulée à titre subsidiaire.

Par ailleurs, une mesure d'expertise n'est pas destinée à pallier les carences d'une partie dans l'administration de la preuve.

Il appartenait aux appelants, alors même que l'un des motifs retenus par le tribunal pour les débouter de leur demande était, précisément, que la preuve n'était pas rapportée que les travaux projetés n'emportaient pas annexion des parties communes, de tirer les enseignements de la motivation retenue et de se ménager, en cause d'appel, des preuves suffisantes.

Ils seront, dès lors, déboutés de leur demande subsidiaire.

4-Pour débouter le syndicat des copropriétaires Le Hullot et le syndicat des copropriétaires Le Maiffret de leur demande respective de dommages-intérêts pour procédure abusive, le tribunal a justement retenu que l'action en justice représentait l'exercice d'un droit et qu'il n'était pas démontré que les demandeurs, actuels appelants, avaient introduit la procédure dans l'intention de nuire, ni que leur action avait dégénéré en abus.

En conséquence, le jugement dont appel sera également confirmé de ce chef.

Vu les articles 696 à 700 du code de procédure civile,

Par ces motifs,

la cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, publiquement,

Confirme le jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Grasse en toutes ses dispositions appelées.

Ajoutant au jugement,

Déboute la SAS [N], Monsieur [J] [N], Madame [S] [H] épouse [N] et la SCI 53 du surplus de leur demande de dommages-intérêts devant la cour.

Déboute la SAS [N], Monsieur [J] [N], Madame [S] [H] épouse [N] et la SCI 53 de leur demande d'expertise formée à titre subsidiaire.

Condamne la SAS [N], Monsieur [J] [N], Madame [S] [H] épouse [N] et la SCI 53 aux entiers dépens d'appel.

Article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/09613
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;19.09613 ?
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