La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/06/2022 | FRANCE | N°20/12706

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 10 juin 2022, 20/12706


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 10 JUIN 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 20/12706 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGVH4







[G] [N]



C/



URSSAF PACA







Copie exécutoire délivrée

le :

à :







- Me Christine BALENCI



- URSSAF PACA













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal judiciaire

de Toulon en date du 30 Novembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/00311.





APPELANT



Monsieur [G] [N], demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Christine BALENCI, avocat au barreau de TOULON





INTIMEE



URSSAF PACA, demeurant [Adresse 2]



représentée...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 10 JUIN 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 20/12706 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGVH4

[G] [N]

C/

URSSAF PACA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Christine BALENCI

- URSSAF PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Toulon en date du 30 Novembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/00311.

APPELANT

Monsieur [G] [N], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Christine BALENCI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 2]

représentée par M. [V] [C] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Juin 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par courrier recommandé envoyé le 16 juin 2018, M. [G] [N] a formé opposition à une contrainte en date du 28 mai 2018 délivrée par l'URSSAF PACA pour un montant de 10.758,87 euros, et signifiée par acte d'huissier de justice le 12 juin 2018.

Cette contrainte est afférente au solde des mises en demeure suivantes du :

- 18 avril 2018 pour la période de cotisations de janvier 2017 à janvier 2018 pour un solde de 9.307 euros,

- 15 février 2018 pour la période de cotisations de mars, avril, août, septembre, octobre et novembre 2017 pour un solde de 3.500 euros,

- 20 mars 2018 pour la période de cotisations d'avril, octobre et novembre 2017 pour un solde de 1.821,04 euros.

Par jugement du 30 novembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon a :

- débouté M. [N] de son opposition à la contrainte émise par l'URSSAF PACA le 28 mai 2018 et signifiée le 12 juin 2018,

- condamné M. [N] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 9.210,98 euros au titre du solde de la contrainte du 28 mai 2018 pour la période de janvier 2017 à janvier 2018, outre la somme de 73,18 euros au titre des frais de signification de la contrainte;

- condamné M. [N] aux dépens.

Par déclaration d'appel formée sur RPVA le 17 décembre 2020, M.[N] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 3 décembre 2020.

Par arrêt avant-dire-droit en date du 4 février 2022, la présente cour a rejeté la demande de radiation de l'affaire présentée sur le fondement de l'article 524 du Code de procédure civile par l'URSSAF, renvoyé les parties pour plaider à l'audience du 7 avril 2022, et enjoint l'URSSAF de communiquer ses pièces et conclusions à la partie adverse avant le jeudi 3 mars 2022.

A l'audience du 7 avril 2022, M. [N] reprend oralement les conclusions déposées et visées par le greffe le 6 janvier 2021 et signifiées par RPVA le 4 janvier 2022. Il demande à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement et, statuant à nouveau de :

- déclarer nuls l'appel de cotisations dirigé à son encontre, la mise en demeure du 16 octobre 2017 (sic) et la contrainte signifiée le 12 juin 2018,

- débouter l'URSSAF PACA de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner l'URSSAF PACA à verser à M. [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et au paiement des dépens.

Au soutien de ses prétentions, l'appelant se prévaut d'un cloisonnement entre son patrimoine personnel et professionnel, et considère que les cotisations découlant de son activité professionnelle doivent être appelées auprès de l'EIRL de même que le recouvrement doit être exécuté sur le patrimoine affecté à l'exploitation professionnelle.

Il soutient que seule l'EIRL, entité distincte de la sienne, est redevable des cotisations sociales relatives à la part patronale des cotisations salariales et estime que s'agissant d'une dette ayant pour origine l'activité professionnelle, il ne peut pas être redevable ni poursuivi à titre personnel, étant précisé qu'aucune manoeuvre frauduleuse ne lui est reprochée conformément à l'hypothèse envisagée par les dispositions de l'article L.133-4-7 du code de la sécurité sociale.

Se prévalant de son inscription au registre du commerce et de sa déclaration d'affectation de patrimoine du 1er octobre 2016, il soutient qu'il s'agit de dettes inhérentes à son activité professionnelle obligatoire rentrant dans la nécessité d'exploitation puisqu'il s'agit des cotisations salariales, de sorte qu'elles doivent rentrer dans le passif de son entreprise commerciale individuelle et considère que la poursuite de leur recouvrement en son nom personnel est mal dirigée.

L'URSSAF PACA reprend oralement les conclusions déposées à l'audience et visées par le greffe. Elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon du 30 novembre 2020,

- en conséquence, valider la contrainte et condamner M. [N] à lui payer la somme totale de 10 758,87 euros dont 9.782,96 euros de cotisations et de 975,91 euros de majorations de retard dues au titre de la contrainte décernée le 20 février 2018 signifiée le 23 février 2018 (sic) en deniers ou quittances,

- condamner M. [N] à lui régler la somme de 73,18 euros au titre des frais de signification,

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de frais irrépétibles.

Sur l'obligation de M. [N], l'organisme se fonde sur les articles L.133-5-7, D.133-6 et D.133-7 du code de la sécurité sociale, L.1273-3 du code du travail relatif au titre emploi service entreprise (TESE) pour soutenir que les dettes de cotisations et contributions réclamées sont des dettes professionnelles car nées au titre de l'activité professionnelle indépendante, mais qu'elles sont dues par le dirigeant de l'entreprise, lequel doit être obligatoirement affilié à titre personnel, l'entreprise n'ayant pas de personnalité juridique.

Sur le bien-fondé de la créance, l'URSSAF rappelle que les cotisations sont appelées sur une période en fonction de la date à laquelle le salaire a été versé au salarié et détaille les calculs auxquels elle a procédé. Elle explique que c'est à défaut de règlement des cotisations réclamées à M. [N] dans la mise en demeure du 18 avril 2018, qu'elle a décerné la contrainte litigieuse du 28 mai 2018 et qu'à ce jour il reste dû sur cette contrainte la somme de 8.235,07 euros de cotisations et 975,91 euros de majorations de retard, outre les frais de signification à hauteur de 73,18 euros.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article D.611-1 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable du 1er janvier 2018 au 25 mai 2020, applicable à la contrainte litigieuse du 28 mai 2018, les dispositions du livre sixième concernant les travailleurs indépendants 's'appliquent aux personnes physiques suivantes : (...) 2° les gérants de sociétés à responsabilité limitée qui ne sont pas assimilés aux salariés pour l'application de la législation sur la sécurité sociale.'

Il s'en suit que M. [N], entrepreneur individuel à responsabilité limité, inscrit au registre du commerce et des sociétés pour une activité de restauration traditionnelle sous le numéro 523 665 925, relève du régime social des travailleurs non salariés et est bien personnellement tenu au paiement des cotisations pour les indépendants.

Le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée créé par la loi n° 2010-658 du 15 juin 2010, et repris aux articles L.526- 6 et suivants du Code de commerce, ne contrevient pas à cette obligation personnelle de cotiser.

En effet, il autorise l'entrepreneur à affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel, sans création d'une personne morale. La constitution du patrimoine affecté résulte du dépôt d'une déclaration effectué, dans le cas de M. [N], au greffe du tribunal de commerce de Toulon le 19 janvier 2017. Une fois la déclaration effectuée, il s'opère un cloisonnement, actif et passif, des deux patrimoines, chacun d'eux répondant des seules dettes qui lui sont rattachées. Les créanciers auxquels la déclaration d'affectation est opposable et dont les droits sont nés à l'occasion de l'exercice de l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté ont pour seul gage général le patrimoine affecté.

Ainsi, les cotisations sociales réclamées en l'espèce, découlant de l'activité professionnelle de M. [N], leur recouvrement sera exécuté sur le patrimoine affecté, mais l'obligation personnelle de cotisation demeure à la charge de M. [N], et non à celle de l'EIRL, qui n'a pas de personnalité juridique indépendamment de la personne même de M. [N].

De même, l'article L.133-4-7 du Code de la sécurité sociale ne contredit pas l'obligation de payer les cotisations pour les indépendants à laquelle est tenu M. [N]. En effet, il dispose que : 'lorsque dans l'exercice de son activité professionnelle l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée dont le statut est défini aux articles L.526-6 à L.526-21 du code de commerce a, par des man'uvres frauduleuses ou à la suite de l'inobservation grave et répétée des prescriptions de la législation de la sécurité sociale, rendu impossible le recouvrement des cotisations et contributions sociales et des pénalités et majorations afférentes dont il est redevable au titre de cette activité, le recouvrement de ces sommes peut être recherché sur la totalité de ses biens et droits dès lors que le tribunal compétent a constaté la réalité de ces agissements.' Ainsi, l'article ne fait que prévoir que l'exécution de l'obligation de payer les cotisations découlant de l'activité professionnelle de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée, incombant, à titre personnel, à l'entrepreneur, pourra être, par exception, poursuivie sur la totalité des biens et droits de l'entrepreneur sans limitation de patrimoine, en cas de manoeuvres frauduleuses ou inobservations graves et répétées des prescriptions de la législation de sécurité sociale de sa part.

Ainsi, la séparation des patrimoines de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée et de l'entrepreneur ne remet pas en cause l'obligation d'affiliation de l'entrepreneur à la sécurité sociale des indépendants et l'obligation personnelle de payer les cotisations sociales. Seul le recouvrement des créances sur un des deux patrimoines est en jeu.

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que M. [N] était personnellement tenu au paiement des cotisations sociales pour les indépendants réclamées par contrainte du 28 mai 2018.

Celui-ci ne remettant pas en cause ni les montants, ni les modalités de calcul des cotisations réclamées, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné M. [N] à payer le reliquat des sommes dues au titre de la contrainte en deniers ou quittances à hauteur de 9.210,98 euros dont 8.235,07 euros de cotisations et 975,91 euros de majorations de retard, outre les frais de signification à hauteur de 73,18 euros.

M. [N], succombant à l'instance, sera condamné au paiement des dépens en vertu de l'article 696 du Code de procédure civile.

En application de l'article 700 du Code de procédure civile, il sera débouté de sa demande en frais irrépétibles et condamné à payer à l'URSSAF PACA la somme de 2.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 30 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Toulon en toutes ses dispositions,

Condamne M. [N] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 2.000 euros à titre de frais irrépétibles,

Déboute M. [N] de l'ensemble de ses prétentions,

Condamne M. [N] aux éventuels dépens de l'appel.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 20/12706
Date de la décision : 10/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-10;20.12706 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award