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07/06/2022 | FRANCE | N°20/07847

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-3, 07 juin 2022, 20/07847


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-3



ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2022



N° 2022/254









Rôle N° RG 20/07847 -

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGFRE







[T] [H] épouse [O]





C/



[U] [O]

































Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE

Me Catarina CLEMENTE DE BARROS


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Décision déférée à la Cour :



Jugement du juge aux affaires familiales de Nice en date du 21 Juillet 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 15/05542.





APPELANTE



Madame [T] [H] épouse [O]

née le 27 Février 1978 à [Localité 1],

de nationalitéRroumaine,

demeurant [Adresse 6]



représentée par Me ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-3

ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2022

N° 2022/254

Rôle N° RG 20/07847 -

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGFRE

[T] [H] épouse [O]

C/

[U] [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE

Me Catarina CLEMENTE DE BARROS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du juge aux affaires familiales de Nice en date du 21 Juillet 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 15/05542.

APPELANTE

Madame [T] [H] épouse [O]

née le 27 Février 1978 à [Localité 1],

de nationalitéRroumaine,

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Bettina BOUSTANI, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur [U] [O]

né le 31 Octobre 1967 à [Localité 5]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Catarina CLEMENTE DE BARROS, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Mai 2022 en chambre du conseil. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme Aurélie LE FALC'HER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Catherine VINDREAU, Président

Monsieur Thierry SIDAINE, Conseiller

Mme Aurélie LE FALC'HER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Anaïs DOMINGUEZ.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2022.

Signé par Madame Catherine VINDREAU, Présidente et Madame Anaïs DOMINGUEZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [U] [O] et Madame [T] [H] se sont mariés le 16 février 2008 devant l'of'cier d'état civil de la commune de [Localité 4], sans contrat préalable.

Un enfant est issu de cette union :

- [Y] [O], née le 17 mai 2014 à [Localité 2].

Par ordonnance de référé en date du 29 décembre 2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NICE a :

- constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale,

- ordonné l'interdiction de sortie du territoire de l'enfant sans l'accord des deux parents.

Dans l'instance en divorce introduite par l'époux, le juge aux affaires familiales a, par ordonnance de non conciliation en date du 29 mars 2016, constaté par procès-verbal l'acceptation par les parties du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci et les a renvoyées à se pourvoir devant le juge du fond, la cause du divorce demeurant acquise. Statuant sur les mesures provisoires, il a :

- autorisé la résidence séparée des époux,

- attribué la jouissance du domicile conjugal à Madame [T] [H], bien en location, à charge pour cette dernière d'en assumer les charges,

- attribué à l'épouse la jouissance du véhicule RENAULT CLIO et à l'époux la jouissance des autres véhicules,

- condamné [U] [O] à verser à son épouse une pension alimentaire d'un montant mensuel de 150 euros au titre du devoir de secours,

- dit que l'autorité parentale s'exercerait en commun,

- fixé la résidence habituelle de l'enfant chez la mère,

- instauré un droit de visite et d'hébergement classique au profit du père,

- fixé la part contributive à l'entretien et l'éducation de l'enfant à la charge du père à la somme mensuelle de 300 euros.

Par jugement recti'catif en date du 31 janvier 2017, le juge aux affaires familiales de ce siège a recti'é ladite ordonnance de non conciliation et prévu au profit du père un droit de visite et d'hébergement les fins de semaines paires du calendrier annuel ainsi que la moitié des vacances scolaires.

Par acte d'huissier en date du 8 mars 2017, Monsieur [U] [O] a fait assigner son conjoint en divorce sur le fondement des dispositions des articles 233 et 234 du Code civil.

Par ordonnance d'incident en date du 21 février 2018, le juge de la mise en état, saisi par Monsieur [U] [O], a :

- débouté ce demier de sa demande d'enquête sociale,

- accordé à ce dernier un droit de visite et d'hébergement élargi,

- débouté la mère de sa demande tendant à ce que le père justi'e de sa disponibilité le mercredi.

Par ordonnance d'incident en date du 28 mai 2019, le juge de la mise en état, saisi par Madame [T] [H], a :

- ordonné la mainlevée de l'interdiction de sortie du territoire de l'enfant sans l'accord des deux parents.

Par jugement du 21 juillet 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de NICE a principalement :

- constaté la compétence internationale de la présente juridiction et l'application de la loi française au divorce, à l'autorité parentale et à l'obligation alimentaire ;

- prononcé en application des articles 233 et 234 du code civil le divorce des parties,

- débouté Monsieur [U] [O] et Madame [T] [H] de leurs demandes tendant à ce que soient ordonnés la liquidation du régime matrimonial et le partage des intérêt pécuniaires des époux,

- débouté Madame [T] [H] de sa demande de prestation compensatoire,

- constaté que l'autorité parentale à l'égard de l'enfant commun est exercée conjointement par les parents,

- fixé la résidence habituelle de l'enfant en altemance au domicile de chacun des parents selon les modalités suivantes : l'enfant sera une semaine sur deux au domicile de chacun de ses parents, du lundi sortie des classes en période scolaire, ou 10h en période de vacances scolaires, au lundi suivant selon les mêmes modalités, l'enfant étant au domicile de son père les semaines impaires du calendrier annuel et au domicile de sa mère les semaines paires, l'alternance étant maintenue pendant les petites vacances scolaires ; avec cette precision que les vacances scolaires d'été seront réparties en 4 périodes de 15 jours chacune et réparties entre les parents selon les mêmes modalités, le parent débutant sa période de vacances avec l'enfant étant celui qui ne l'a pas eue la semaine précédente,

- accordé à chacun des parents un droit de communication téléphonique avec l'enfant a raison de deux fois par semaine,

- fixé à la somme de 150 euros par mois le montant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant que Monsieur [U] [O] devra verser à Madame [T] [H],

- dit en outre que l'ensemble des frais scolaires, extra-scolaires et de santé restant à charge relatifs à l'enfant sera partagé par moitié, sous réserve qu'ils aient été approuvés par chacune des parties avant d'être engagés et sur présentation de justi'catifs,

- débouté Madame [T] [H] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procedure civile,

- dit que les dépens seront pris en charge à hauteur de 50% par Monsieur [O] et de 50% par Madame [H].

Le 18 août 2020, Madame [H] a fait appel de cette décision sur la prestation compensatoire, sur la résidence de l'enfant, la contribution à son entretien et son éducation ainsi que sur la condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

[Y] été entendue le 16 mars 2022.

Dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 11 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé exhaustif des moyens et prétentions, Madame [H] demande à la cour de :

- déclarer Madame [H] recevable et bien fondée en ses demandes,

- infirmer le jugement de divorce en ce qui concerne la prestation compensatoire, la résidence de l'enfant et la pension alimentaire au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,

- condamner Monsieur [O] à verser à Madame [H] la somme de 50.000 euros en capital au titre de la prestation compensatoire,

- fixer la résidence habituelle de l'enfant [Y] au domicile de la mère,

- accorder un droit de visite et d'hébergement à Monsieur [O], à défaut de meilleur accord des parties, selon les modalités suivantes :

- les fins de semaines paires du calendrier annuel, du vendredi sortie des classes au dimanche 19h, en ce cornpris le weekend de la fête des pères et à l'exclusion de celui de la fête des mères,

- la moitié des vacances scolaires, la première moitié revenant au père les années paires et la seconde moitié les années impaires,

à charge pour le père ou une personne honorable de prendre l'enfant ou de le faire prendre et de le ramener ou de le faire ramener au domicile de l'autre parent,

- fixer à la somme de 300 euros par mois, le montant de la contribution à l'entretien de l'enfant que Monsieur devra verser à Madame, en sus de la prise en charge par moitié des frais scolaires, extrascolaires et frais de santé restant à charge et l'y condamner,

- condamner Monsieur [O] au paiement de la somrne de 3.000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [O] au paiement des entiers dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle rappelle la compétence des juridictions françaises et l'application de la loi française. S'agissant de la prestation compensatoire, elle explique avoir arrêté ses études à la demande de Monsieur [O] et avoir arrêté de travailler lorsqu'elle est tombée enceinte jusqu'en avril 2015. Elle précise qu'elle est sans emploi depuis mai 2019, qu'elle est aidée financièrement par sa famille et qu'elle justifie de l'ensemble de ses ressources et de ses charges. Elle précise que la situation financière de Monsieur [O] est bien plus confortable puisqu'il a un emploi en CDI et qu'il vit en couple. Elle ajoute que l'aide familiale du côté de Monsieur [O] a été remboursée mais qu'il ne s'agissait pas d'un prêt. Elle indique qu'elle a transmis sa société en ROUMANIE à sa mère et que Monsieur [O] ne démontre pas le contraire.

Elle fait valoir que la résidence alternée mise en place n'est pas conforme à l'intérêt de l'enfant qui a vécu ses premières années auprès de sa mère. Elle nie toute atteinte à l'exercice conjoint de l'autorité parentale mais souligne que Monsieur [O] ne respecte pas toujours les règles qui en découlent. Elle déclare qu'aucune entente n'est possible entre elle et Monsieur [O] ce qui nuit à la prise en charge de [Y] et rend la résidence alternée très difficile pour l'enfant. Elle fait remarquer que [Y] ne s'entend pas très bien avec la compagne de son père et le fils de cette dernière, ce qu'elle a expliqué lors de son audition. Elle reprend la description faite de la situation financière de chacun pour justifier sa demande de contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant à hauteur de 300 euros.

Dans ses dernières écritures d'intimé notifiées par RPVA le 14 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé exhaustif des moyens et prétentions, Monsieur [O] sollicite :

- la confirmation en tout point des dispositions du jugement pris par le juge aux affaires familiales de NICE le 21 juillet 2020,

- le rejet de l'intégralité des demandes de Madame [H],

- la condamnation de Madame [H] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il indique que les juridictions françaises sont compétentes et la loi française applicable.

Il fait valoir que Madame [H] ne justifie pas de sa situation actuelle et des raisons pour lesquelles elle est toujours sans emploi malgré ses compétences. Il ajoute qu'elle ne donne aucune preuve de ses recherches d'emploi alors même qu'elle apparaît avoir démissioné en 2019. Il évoque l'existence d'une société en ROUMANIE créée en 2010 par l'appelante qui permet d'expliquer les raisons pour lesquelles Madame [H] n'a pas de revenus en FRANCE.

Il indique être en capacité de s'occuper de sa fille dans de bonnes conditions malgré le dénigrement qu'il subit de la part de Madame [H]. Il ajoute qu'il y a un conflit important entre eux attisé par l'appelante. Il nie toute difficulté rencontrée par [Y] du fait de la résidence alternée ce qui est confirmé par ses résultats scolaires. Il déclare que l'audition de [Y] démontre qu'elle se trouve dans le conflit entre les parents et que si les relations décrites avec le fils de son compagne ne sont pas bonnes cela est commun à tous les enfants qui vivent ensemble et peuvent parfois se montrer jaloux. Il souligne que du fait de la résidence alternée, la contribution fixée pour l'entretien et l'éducation de [Y] est tout à fait justifiée.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 avril 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence des juridictions françaises et la loi applicable

Il existe des éléments d'extranéité en l'espèce puisque Madame [H] est de nationalité roumaine.

La décision déférée n'a pas été contestée initialement en ce que le juge aux affaires familiales pouvait retenir sa compétence et appliquer la loi française. Elle n'est pas davantage contestée en cause d'appel et doit être confirmée de ce chef.

Sur la recevabilité de l'appel

Rien dans les éléments soumis à l'appréciation de la cour ne permet de critiquer la régularité de l'appel par ailleurs non contestée. Il sera donc déclaré recevable.

Sur la prestation compensatoire

L'article 270 du code civil énonce que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives.

Ce n'est que si l'analyse du patrimoine des parties tant en capital qu'en revenus disponibles fait apparaître, au détriment de l'un des époux, une inégalité, présente ou se réalisant dans un avenir prévisible, du fait de la rupture du lien conjugal qu'il y a lieu à compensation.

L'époux qui demande une prestation compensatoire, supporte la charge de la preuve de la disparité résultant de la rupture du mariage créée dans les conditions de vie respectives des époux, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l'évolution dans un avenir prévisible.

En application de l'article 1075-2 code de procédure civile, les époux doivent, à la demande du juge, justifier de leurs charges et ressources, notamment par la production de déclarations de revenus, d'avis d'imposition et de bordereaux de situation fiscale. Ils doivent également, à sa demande, produire les pièces justificatives relatives à leur patrimoine et leurs conditions de vie, en complément de la déclaration sur l'honneur permettant la fixation de la prestation compensatoire.

En application de l'article 259-3 du code civil, les époux doivent se communiquer et communiquer au juge tous renseignements et documents utiles pour fixer les prestations et pensions et liquider le régime matrimonial.

L'article 272 du code civil dispose que dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire, par le juge ou par les parties, ou à l'occasion d'une demande de révision, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie.

Pour rejeter la demande de prestation compensatoire de Madame [H], le juge aux affaires familiales a noté que :

Madame [H] « est particulièrement peu claire sur sa situation financière actuelle. Elle ne produit en outre aucun relevé de carrière susceptible de permettre d' apprécier les périodes au cours du mariage pendant lesquelles elle n'aurait pas travaillé. Par conséquent, cette dernière ne rapportant pas la preuve d'une disparité au sens de l'article 270 du code civil, il convient de la débouter de sa demande ».

Il décrivait la situation financière des parties de la manière suivante :

« - [U] [O] exerce toujours la profession de comptable ce qui lui procure un revenu mensuel moyen de 3.176 euros (cumul imposable décembre 2019/12). Il a bénéficié en 2018 d'un revenu mensuel déclaré de 3.122 euros.

En dehors des charges de la vie courante, il assume un loyer mensuel de 956 euros (bail) et une taxe d'habitation mensuelle de 86 euros.

- [T] [H] indique être sans emploi depuis le mois de mai 2019, alors qu'elle venait de signer un contrat à durée indéterminée en février 2019. Elle ne produit aucun élément justifiant des causes de la rupture de ce contrat de travail, ni des somrnes perçues à ce jour par POLE EMPLOI, puisqu'elle ne produit que le justi'catif adressé par POLE EMPLOI en vue de la déclaration fiscale pour l'année 2019. Elle percevait auparavant une somme mensuelle de 1.609 euros auprès de la SAM SOMECO (cumul imposable mai 2019/ 5). Elle a béné'cié en 2018 d'un revenu mensuel déclaré de 824 euros. Elle indique ne plus disposer de prestations CAF mais ne fournit pas de justi'catif plus actualisé que son relevé CAF pour le mois d'avril 2017, sa situation financière actuelle étant des lors particulierement obscure.

L'époux indique qu'elle serait en outre présidente d'une société de droit roumain nommée ATINIMUL SRL, créée en 2010 ; il ne fournit toutefois à ce titre que des documents établis en langue étrangère non traduits, dès lors inexploitables par la présente juridiction.

En dehors des charges de la vie courante, elle assume un loyer mensuel de 854 euros (réévaluation de loyer de mars 2020) ».

Devant la cour, pour déterminer l'existence du droit et apprécier le montant de la prestation compensatoire, les juges doivent se placer à la date où le divorce a pris force de chose jugée et non à la date où ils statuent ni au moment où les effets du divorce ont été reportés entre les parties. Lorsque ni l'appel principal limité, ni les conclusions d'appel incident limité n'ont remis en cause le prononcé du divorce, le jugement de divorce est passé en force de chose jugée à la date de l'appel incident limité.

En l'occurrence, le prononcé du divorce n'est pas contesté par les parties. Il convient donc de se placer à la date des premières conclusions de l'intimée soit le 1er février 2021 pour apprécier la situation des parties.

Il sera rappelé que les allocations familiales ne sont pas prises en compte dans ce cadre.

Monsieur [O] justifie avoir perçu pour l'année 2021, un salaire mensuel moyen de 3.283 euros (cumul net imposable annuel 39.396,44 euros).

Il vit avec une compagne qui travaille et a un enfant à charge.

Il règle une taxe d'habitation annuelle de 720 euros et la redevance à l'audiovisuel public ainsi qu'un loyer de 990 euros.

Il déclare rembourser plusieurs crédits mais ne produit pas les justificatif pour l'année 2021. Pour l'année 2022, il est justifié d'un prélèvement de 287,94 euros qu'il indique partager avec sa compagne et d'un remboursement de 65 euros.

Madame [H] n'a déclaré aucune ressource pour l'année 2020. Au 10 avril 2020, Pôle Emploi atteste qu'elle ne peut prétendre au versement d'allocation chômage car elle a démissionné de son précédent emploi en 2019.

Elle ne perçoit aucune prestation sociale et indique que sa famille lui verse mensuellement 1.200 euros par mois.

Elle produit un document traduit du roumain qui explique que, depuis 2012, elle ne participe plus à la société roumaine dont Monsieur [O] fait état.

Elle ne produit que des annonces d'emploi mais ne justifie pas de sa candidature alors qu'elle a travaillé assez régulièrement jusqu'en 2019.

Elle règle un loyer de 854 euros.

Comme en première instance, la situation de Madame [H] n'est pas claire. Elle indique n'avoir pas fait de demande d'allocation logement ou de RSA. Elle a fait le choix d'arrêter de travailler puisqu'elle a démissionné. Le budget qu'elle présente ne paraît pas réaliste au regard des dépenses courantes et de l'ensemble des activités estrascolaires pratiquées par sa fille. Par conséquent, comme en première instance, elle ne démontre pas l'existence d'une disparité au sens de l'article 270 du code civil. Il n'est donc pas nécessaire de se pencher sur les critères de l'article 271 du code civil.

Sa demande de prestation compensatoire sera donc rejetée et le jugement de première instance confirmé.

Sur la résidence de l'enfant

Aux termes de l'article 373-2-9 du code civil, la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux.

En application de l'article 373-2-6 du code civil, le juge aux affaires familiales statue en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs.

Aux termes de l'article 373-2-11 du code civil, lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :

1° La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure ;

2° Les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1;

3° L'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre ;

4° Le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant ;

5° Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12 ;

6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre.

La résidence alternée est une modalité pouvant être retenue lorsqu'elle correspond au système le plus propice au bon développement de l'enfant ce qui est fonction des besoins liés à son âge, de la proximité géographique des domiciles des parents, de l'état de leurs relations et de la compatibilité de leurs rythme de vie et leurs conceptions éducatives.

Pour retenir une résidence alternée, le premier juge a indiqué que :

« Les parents sont tous deux domiciliés à [Localité 4], les domiciles étant distants de moins de 2 kms selon le père, et de plus de 3 kms selon la mère ; aucun élément probant n'est versé aux débats à ce titre.

Le père dispose manifestement d'un logement au sein duquel l'enfant a sa propre chambre, des photographies de cette chambre étant produites.

Afin de s'opposer à cette demande de résidence altemée, la mère indique qu'une séparation trop longue avec l'enfant perturberait cette dernière, que le père n'est pas en capacité de s'occuper quotidiennement de l'enfant et qu'il ne respecte pas l'exercice conjoint de l'autorité parentale.

En réplique, le père reproche également à la mère de ne pas respecter l'exercice conjoint de l'autorité parentale.

Toutefois, aucun élément probant n'est produit par la mère susceptible de démontrer une inaptitude du père à s'occuper de l'enfant. Aucun élément ne démontre davantage que l'enfant, désormais âgée de 6 ans, ne pourrait s'épanouir dans le cadre d'une résidence alternée. Enfin, s'agissant de l'exercice conjoint de l'autorité parentale, il ressort des pièces versées aux débats que la mère elle-même a pu adopter une attitude faisant obstacle aux droits du père (refus de communiquer les éléments d'immatriculation à la sécurité sociale de l'enfant, refus de laisser le père intervenir au sein de la classe de l'enfant sans en avoir été avisée ...).

Aucun élément ne justifie par conséquent de s'opposer à la mesure de résidence alternée sollicitée par le père, la communication entre les parents, si elle est émaillée de reproches réciproques, apparaissant toutefois de qualité suffisante afin de faire droit à cette demande. La résidence alternée apparaît au surplus justifiée au vu de l'intérêt de l'enfant qui est de pouvoir passer le plus de temps possible aux côtés de chacun de ses parents ».

[Y] a été entendue le 16 mars 2022. Il ressort de ses déclarations que la relation avec le fils de la compagne de son père est difficile. De plus, elle fait une différence entre sa maman qui vit seule et son papa qui a refait sa vie.

Cela fait désormais plus d'une année que [Y] vit en alternance chez sa mère et son père. Si Madame [H] produit deux attestations d'une psychologue de novembre 2020 et février 2021 qui indique que [Y] a des difficultés à prendre ses repères, aucune autre consultation a ce sujet n'est justifiée par la suite.

Si les rapports entre Madame [H] et Monsieur [O] ne sont pas toujours sereins, il n'est pas démontré que cela a un effet négatif sur la prise en charge de [Y]. Son bulletin scolaire du premier trimestre de l'année 2021/2022 est très bon. En outre, comme le notait le juge aux affaires familiales, chaque partie a pu à un moment donné empêcher l'autre dans son rôle de parent. De plus, les échanges produits par Madame [H] sont essentiellement datés de 2020. Les derniers échanges produits de 2021 sont au sujet des cours de piscine et du fait que Monsieur [O] préfère que Madame [H] rencontre seule le maître de [Y] plutôt que de lui faire un compte rendu. Il ne s'agit donc pas de sujets graves.

La résidence alternée n'est, à ce stade, pas contraire à l'intérêt de l'enfant.

Il est certain que [Y] est tristre de laisser sa maman seule mais cela ne justifie pas de remettre en question la résidence alternée qui lui permet de vivre avec ses parents.

La plus grande difficulté réside donc dans la relation entre [Y] et le fils de la compagne de Monsieur [O]. Il convient de noter à ce propose qu'il s'agit de deux enfants uniques qui doivent apprendre à vivre ensemble. [Y] n'a pas à partager lorsqu'elle se trouve chez sa maman. Vivre à plusieurs n'est, dans ce sens, pas négatif.

Toutefois, compte tenu de la différence d'âge, du fait qu'il s'agit d'une fille et d'un garçon qui ne sont pas frère et soeur, il est important que chacun puisse avoir sa propre chambre. Monsieur [O] indique rechercher un appartement plus grand depuis septembre 2021 mais ne démontre pas de recherches actives. Le coût d'un tel appartement peut être assumé par le couple au regard de leur salaire respectif ou alors le couple peut décider de laisser les deux chambres de leur lieu de vie actuel à chaque enfant.

Au regard de ces éléments, il convient de prononcer une résidence alternée et donc de confirmer le jugement du 21 juillet 2020. Il y a également lieu d'ajouter que si [Y] n'a pas sa propre chambre au 1er janvier 2023, sa résidence sera fixée au domicile de sa mère avec un droit de visite et d'hébergement élargi au père comme dans la décision du 21 février 2018.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de [Y]

La résidence alternée étant maintenu, le montant de la contribution sera également confirmé à 150 euros par mois.

Le partage des frais scolaires, extra scolaires, de santé non remboursés étant justifiés et déjà prévu dans le jugement dont appel, ce point sera confirmé.

En cas de changement en janvier 2023, si [Y] n'a pas sa propre chambre, la contribution sera de nouveau fixée à 300 euros par mois au regard de la situation financière de Monsieur [O] telle que décrite dans le cadre des développements sur la prestation compensatoire.

Sur les autres demandes

Madame [H], principale partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens d'appel.

L'équité commande qu'elle soit condamnée à verser à Monsieur [O] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après débats en chambre du conseil,

En la forme,

Reçoit l'appel,

Au fond,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 juillet 2020 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de NICE,

Y ajoutant,

Dit que si au 1er janvier 2023, [Y] ne dispose de sa propre chambre, sa résidence sera fixée chez sa mère,

Dit qu'en cas de changement de résidence, à défaut de meilleur accord des parties, Monsieur [U] [O] accueillera [Y] selon les modalités suivantes :

- en période scolaire : les fins de semaines paires du vendredi sortie des classes au dimanche 18h00,

- pendant la moitié de toutes les vacances scolaires à l'exception des vacances d'été : la 1ère moitié des vacances scolaires les années paires, du samedi 9h00 au vendredi 19h00 et la 2nde moitié des vacances scolaires les années impaires, du samedi 9h00 au vendredi 19h00,

- pendant les vacances d'été : la 1ère quinzaine des mois de juillet et août les années paires, du samedi 9h00 au vendredi 19h00 et la 2nde quinzaine des mois de juillet et août les années impaires, du samedi 9h00 au vendredi 19h00,

à charge pour le père d'aller chercher ou faire chercher les enfants au domicile de Madame Madame [T] [H] et de les y ramener ou faire ramener par une personne de confiance,

Dit que le jour férié qui suit ou précède une période de droit de visite et d'hébergement (fins de semaine, vacances) sera automatiquement intégré dans cette période,

Dit que faute pour le parent d'être venu chercher les enfants dans la première heure pour les fins de semaine, dans la première demi-journée pour les vacances, il est réputé avoir renoncé à son droit d'accueil,

Dit que les dates de vacances scolaires à prendre en considération sont celles de 1'académie où demeure l'enfant,

Dit que par dérogation à la réglementation prévue ci-dessus le père recevra les enfants le dimanche de la Fête des pères et la mère les recevra le dimanche de la Fête des mères,

Rappelle que chacun des parents doit respecter les liens de l'enfant avec l'autre parent, que tout changement de résidence de l'un des parents, des lors qu'il modifie les modalités de l'exercice de l'autorité parentale doit faire 1'objet d'une information préalable et en temps utile de l'autre parent, et qu'en cas de désaccord, le parent le plus diligent pourra saisir le juge aux affaires familiales,

Rappelle, en outre, que l'absence de signalement d'un changement de résidence dans le délai d'un mois de sa survenance, peut être sanctionné pénalement en application des articles 227-4 et 227-6 du Code Pénal,

Dit qu'en cas de changement de résidence de [Y] le 1er janvier 2023, Monsieur [U] [O] sera condamné à verser à Madame [T] [H] une contribution à l'entretien et l'éducation de [Y] de TROIS CENTS EUROS (300 euros) par mois,

Condamne Madame [T] [H] à verser à Monsieur [U] [O] 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Madame [T] [H] au paiement des dépens d'appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-3
Numéro d'arrêt : 20/07847
Date de la décision : 07/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-07;20.07847 ?
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